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La première biographie de P. Mattick
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https://bataillesocialiste.wordpress.com/2016/03/18/la-premiere-biographie-de-paul-mattick/
Paru dans Critique sociale N°38 (février 2016)
La première biographie du militant marxiste Paul Mattick (1904–1981) est parue l’an dernier en anglais : Gary Roth, Marxism in a Lost Century, A Biography of Paul Mattick, Brill, 2015 (réédition en poche – « paperback » – par Haymarket Books, décembre 20151). Nous en traduisons ici quelques bref passages, avec l’accord de l’auteur, en espérant qu’une éventuelle publication intégrale en français puisse voir le jour. Nous n’avons pas choisi d’extraits concernant son militantisme en Allemagne, ni au début des années 1930 aux Etats-Unis, puisqu’il les a lui-même largement évoqué dans La Révolution fut une belle aventure, livre dont nous avons déjà rendu compte2. D’abord militant en Allemagne, jeune ouvrier, Mattick prit part à la Révolution allemande, fut membre d’un conseil ouvrier, et milita au KAPD (Parti communiste ouvrier d’Allemagne). Il vécut à partir de 1926 aux Etats-Unis, y prit part aux luttes sociales et devint un théoricien du communisme des conseils.
Le premier extrait concerne la parution de la revue New Essays, que Mattick animait avec Karl Korsch et qui prenait la suite de la revueLiving Marxism (« marxisme vivant », 13 numéros parus de 1938 à 1941). Il est d’abord question de la recherche de nouveaux collaborateurs à la revue, qui parut en 1942–1943 (extrait du chapitre 12, pp. 212–213) :
« Korsch demanda à Herbert Marcuse, membre de l’école de Francfort, d’envoyer son récent ouvrage sur Hegel, bien que Mattick l’ait déjà utilisé pour un essai publié dans la Partisan Review3. Boris Souvarine était aussi une possibilité, mais on sut qu’il était « vraiment mélancolique voire morbide » du fait qu’il avait été obligé de laisser derrière lui tous ses travaux en fuyant l’Europe4. L’historien Arthur Rosenberg promit d’écrire une recension de livre, mais mourut avant de l’achever5. La revue ne publia pas de contributions littéraires, bien que Korsch pensait que chaque numéro devrait en comporter6. Bertolt Brecht fut envisagé, de même que James Farrell. Un beau texte de Victor Serge dut être écarté car il aurait exigé un difficile travail de traduction7. Un essai de critique littéraire par Rosa Luxemburg fut par contre publié, grâce à la traduction de Frieda Mattick8. Seuls trois numéros de New Essays purent paraître, mais ils comportaient un large éventail d’auteurs. Outre Mattick et Korsch, des articles et des recensions étaient signés de Dwight Macdonald, Victor Serge, Julien Coffinet, George Kimmelman, Leo Friedman, Sebastian Frank, C.P. West, Walter Boelke, Anton Pannekoek et Heinz Langerhans. »
Extrait du chapitre 13, pp. 234–235 : « Un projet de voyage de trois mois à Berlin, Paris, Amsterdam et Londres dut être revu à la baisse pour des raisons financières. […] Début avril 1948, Mattick embarqua à bord d’un bateau de transport de troupes reconverti, où les voyageurs dormaient à cinquante par chambre, ce qui était le moyen le moins cher de faire la traversée. Cela faisait trois ans qu’il préparait ce voyage : « Je suis très enthousiasmé par tout ça, tout en ayant un peu peur bien que je ne sache pas pourquoi »9. Il n’avait plus été en Europe depuis 22 ans.
Mattick passa trente jours rapides à Berlin, ce qui était le maximum autorisé pour une visite10. Près de 50 personnes vinrent écouter une conférence organisée par Reinhold Klingenberg et Alfred Weiland, au cours de laquelle Mattick parla du mouvement ouvrier aux Etats-Unis et de la situation internationale. Beaucoup de ses anciens camarades étaient dans le public, de même que des agents de la sécurité municipale. Même Klingenberg sous-estimait le degré de surveillance : sur les huit participants à un cours d’économie qu’il donnait avec Weiland, quatre étaient des espions de la police11. […] De Berlin, Mattick se rendit aux Pays-Bas pour y voir Henk Canne Meijer et Pannekoek, ce qui fut leur première rencontre après vingt ans de correspondance. Pendant ses sept semaines loin de chez lui, Mattick ne mangea que ce que les autres mangeaient et dans les mêmes quantités : il revint chez lui nettement amaigri. Son récit de voyage, « Obsessions de Berlin », parut dans la Partisan Review quelques mois plus tard12. »
Dans ce dernier extrait, sont évoqués les rapports de Mattick avec le marxologue Maximilien Rubel (chapitre 15, pp. 267–268) :
« Le fait que Rubel fut professeur invité à l’université Harvard en 1961 consolida leur amitié. Pour Mattick, Rubel était quelqu’un qui avait « un bon état d’esprit tant sur le plan humain que politique, et très érudit. Nous passons de très bons moments ensemble ». Pendant que Mattick aidait Rubel à améliorer son anglais, il l’entendit beaucoup parler de « manuscrits [de Marx] cachés dans des archives, que je ne verrai jamais »13. Mattick reconnaissait que « la recherche n’est pas ce que j’aime (aller dans des bibliothèques et chercher à y dénicher des textes intéressants) », mais sur ces sujets c’était une autre affaire14. Leur correspondance durera deux décennies et couvre un champ très large de sujets : la théorie de la monnaie de Marx, les volumes 1 et 2 du Capital, la nature capitaliste de l’URSS, l’aliénation et l’orthodoxie dans le marxisme, le travail productif ou improductif, la production de déchets, les motivations subjectives de la classe ouvrière, et l’éthique socialiste.
Les priorités de Rubel n’étaient pas toujours celles de Mattick, et Mattick dévalorisait souvent des choses qui étaient chères à Rubel. Mattick, par exemple, pensait que la théorie monétaire n’était pas quelque chose qui intéressait Marx, bien que Rubel passa beaucoup de temps à déchiffrer les idées de Marx sur le sujet. Le grand projet de Rubel impliquait une réédition des volumes 2 et 3 du Capital afin de corriger les erreurs éditoriales qui entachaient la publication originale. Ce projet ne rencontrait pas la pleine compréhension de Mattick : « il y a assez dans Le Capital, tel qu’il est, pour savoir ce que Marx voulait vraiment dire, même s’il n’était pas toujours très clair ». Bien plus, disait-il à Rubel, « toutes les théories ne restent que des fragments et de simples approximations de la vérité ». Même si Marx avait achevé tous les tomes du Capital, il était de toute façon « hors de la capacité d’un seul individu de comprendre toutes les ramifications d’un système dynamique tel que le capitalisme ». Pour Mattick, « Marx a fait plus que n’importe qui d’autre », mais cela ne voulait pas dire autre chose que « l’important est de poursuivre les travaux de Marx »15. »
Notes:
1. Gary Roth est aussi le coauteur avec Anne Lopes de Men’s Feminism, August Bebel and the German Socialist Movement, Humanity Books, New York, 2000.
2. « “La Révolution fut une belle aventure”, de Paul Mattick », Critique Sociale n° 29, janvier 2014 ; Paul Mattick, La Révolution fut une belle aventure. Des rues de Berlin en révolte aux mouvements radicaux américains (1918–1934), L’échappée, 2013, préface de Gary Roth, postface de Laure Batier et Charles Reeve.
3. Lettre de Karl Korsch à Paul Mattick, 20 août 1941 (publiée dans Karl Korsch Gesamtausgabe, Offizin Verlag, 2001).
4. Lettres de Dinsmore Wheeler à Mattick, 5 janvier 1943, de Karl Korsch à Boris Souvarine, 6 octobre 1942 (conservée à Harvard), de Korsch à Mattick, 24 octobre 1942 (Gesamtausgabe).
5. Lettres d’Arthur Rosenberg à Mattick, 16 janvier 1943, et de Mattick à Claudio Pozzoli, 5 mai 1970.
6. Korsch à Mattick, 21 octobre 1942 (Gesamtausgabe).
7. James Farrell à Mattick, 16 juillet 1943, Mattick à Dwight Macdonald, 24 août 1943.
8. Il s’agit de la préface écrite en prison par Luxemburg à sa traduction en allemand d’un texte de l’écrivain russe Vladimir Korolenko [nde].
9. Lettre de Mattick à Dinsmore Wheeler, 13 mars 1948.
10. Reinhold Klingenberg à Mattick, 16 mai 1946, Mattick à Anton Pannekoek, 8 mars 1948.
11. Reinhold Klingenberg à Mattick, 1er septembre 1946, Michael Kubina, Von Utopie, Widerstand und Kaltem Krieg: Das Unzeitgemässe Leben des Berliner Rätekommunisten Alfred Weiland (1906–1978), Lit Verlag, 2001, p. 199 et 244–245.
12. Mattick, « Obsessions of Berlin », Partisan Review, octobre 1948.
13. Mattick à Dinsmore Wheeler, 2 mars 1961, Maximilien Rubel à Mattick, 5 janvier 1961, etc.
14. Mattick à Maximilien Rubel, 6 octobre 1961 (BDIC, Nanterre).
15. Correspondance Mattick-Rubel, 1961–1963.
Voir aussi:
- Mattick: une vie communiste (F. Baum)