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L’histoire du 1er mai en Turquie
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
http://www.kedistan.net/2016/04/24/26508/
La Place Taksim à Istanbul est profondément liée avec l’histoire du 1er mai en Turquie. Qui connait de près ou de loin Istanbul, sait que Taksim est le centre névralgique d’Istanbul. Ce n’est pas seulement parce que tous les rendez-vous se donnent à Taksim, qu’ils soient culturels, touristiques, loisirs ou amoureux, mais parce que cette place est le lieu des grands rassemblements politiques, le point de départ des manifestations. Et celles des 1er mai lui sont amèrement liées et fidèles malgré les interdictions.
Sous l’Empire Ottoman
En Anatolie, le 1er mai a été célébré pour la première fois en 1905 sous l’Empire Ottoman. Ensuite suivront la ville de Scopie (Skopje, Macédoine) en 1909 et Istanbul en 1910.
1906 Izmir
Le 1er mai du 1920 est célébré malgré l’oppression de l’administration de l’occupation et le gouvernement ottoman. Les ouvriers manifestent de Haliç jusqu’à Beyoğlu, passant par Karaköy, avec leur banderole « Turquie indépendante ».
En 1921, pratiquement tous les travailleurs d’Istanbul y compris les employés de transports de mer et tramway, participent aux célébrations.
1912 Istanbul, une première…
Le 1er mai du 1923 est marqué par les grèves de nombreux ouvriers d’entreprises turques et étrangères. La nationalisation des entreprises étrangères, 8 heures de travail journalières, congé hebdomadaire, droits aux syndicats et grèves et la reconnaissance du 1er mai comme la fête des travailleurs faisaient partie des revendications.
Sous la République
En 1924, les initiatives des ouvriers qui veulent célébrer le 1er mai comme « fête des travailleurs » sont empêchées. De nombreux ouvriers distribuant des tracts pour les 8 heures de travail journalières se font arrêter.
Ensuite les célébrations sont interdites selon une nouvelle loi de « sérénité » (Takrir-i Sükun Kanunu). Jusqu’en 1935, le 1er mai les travailleurs célébreront la journée en cachette. C’est à partir de cette date, que l’Histoire du 1er mai s’écrira avec des interdictions. Par ailleurs, en 1935, une nouvelle loi sur les fêtes nationales et les vacances et fériés, intègre le 1er mai dans les jours fériés en tant que « Fête du printemps et des fleurs ».
Après le 27 Mai 1960, le premier coup d’Etat militaire dans l’histoire de la République de Turquie, les interdictions continuent. La date du 24 juillet où la loi de « Conventions collectives, grèves » est imposée à la classe ouvrière comme « fête » à la place du 1er mai. Mais grâce à de nombreuses luttes déterminées, toutes ces initiatives et efforts n’aboutiront pas.
Le 1er mai, le plus massif s’est déroulé en 1976. Un grand rassemblement organisé par le syndicat DISK, réunit 400 mille travailleurs sur la place de Taksim.
Le 1er mai du 1977 entrera dans l’Histoire comme « 1er mai sanglant ». Depuis la réussite de l’année précédente, le 1er mai inquiétaient certains milieux. Malgré tout, plus de 500 mille manifestants arrivent dès le matin sur la place de Taksim, pour les célébrations su 14h30. Ouvriers, travailleurs, étudiants, femmes, enfants composaient cette foule joyeuse. Après la prise de parole de Kemal Türkler, alors President du DISK, le feu est ouvert sur la place intensément remplie, faisant 37 morts et plus de 200 blessés.
1977 avant l’attaque
Pendant….
L’année suivante, en 1978 de centaines de milliers de manifestants sont de nouveau présents sur la place de Taksim avec douleur au coeur…
En 1979 la Direction du couvre-feu n’autorise pas le rassemblement à Istanbul. Une manifestation se déroule à Izmir, sur la place Konak.
Après le coup d’Etat militaire du 12 septembre 1980, les célébrations du 1er mai, font partie des interdictions. Une nouvelle période d’interdiction débute. Le sens du 1er mai est gardé dans les mémoires par des actions telle que des grèves de courte durée, petites cérémonies de célébration, distributions de tracts.
En 1987 après une période de 7 ans d’interdictions, un groupe de 1000 personnes composé de syndicalistes, députés, intellectuels, artistes et scientifiques tente de poser une gerbe au mémorial de Taksim, afin de commémorer les martyrs du 1er mai. La police n’autorise que les députés à accéder au mémorial.
Toujours à Taksim, en 1989, les manifestants sont attaqués. Mehmet Akif Dalcı, un jeune ouvrier y perd la vie.
Pour l’année 1990, pas d’autorisation aux manifestants qui veulent marcher vers Taksim. Des affrontements s’en suivent. Gülay Beceren, étudiante à l’Université Technique d’Istanbul, est bléssée. Elle restera paralysée.
La police se fait battre – 1996
En 1996, c’est le 1er mai le plus nombreux de la période d’après 1980. 150 mille personnes se réunissent à Kadiköy. Mais encore une fois, le feu est ouvert sur la foule faisant 3 morts : Dursun Adabaș, Hasan Albayrak ve Levent Yalçın. Un vague de protestation s’est déroulée à Kadiköy. A partir de cette date, Kadiköy restera interdit aux célébrations du 1er mai jusqu’en 2005.
> Vous pouvez aussi lire l’article d’Etienne Copeaux sur Susam Sokak :
Esquisses(13) « Premier mai » sanglants, 1977 et 1996
En 2006, c’est encore Kadiköy où se réuniront de centaines de milliers de manifestants.
2007 : 30ème anniversaire du « 1er mai sanglant ». La police charge violemment les manifestants qui veulent retourner sur la place Taksim et commémorer les martyrs du 1977. Bilan : Ibrahim Sevindik est tué et 100 personnes sont blessées. La Préfecture annonce 580 garde à vue, selon les organisateurs le nombre des personnes arrêtées est plus de 700.
En 2008, au mois d’avril, le fait que le 1er mai soit célébré comme « journée de solidarité et de travail » est décidé. Mais, les syndicats n’ayant pas pu se mettre d’accord avec le gouvernement sur le lieu, décident de marcher sur la place Taksim. Des partis de gauche déclarent leur participation à cette marche. Les forces de sécurité commencent à se déployer dès la veille. Le 1er mai, à partir des heures matinales, des affrontements déclarent dans les quartiers Şişli, Osmanbey, Pangaltı, Nişantaşı, Okmeydanı, Dolapdere et Kurtuluş. La violence des intervention policières, notamment des grenades lacrymogènes lancés à l’entrée des urgences d’un hôpital, ont fait couler beaucoup d’encre. Mehmet Ali Özpolat, un député CHP a au un spasme cardiaque du aux gaz, un jeune de 19 ans Burhan Gül, est blessé à la tête par une balle en caoutchouc.
Changement de loi en avril 2009. L’Assemblée Nationale accepte la célébration du 1er mai comme fête nationale (de nouveau, depuis 1981). Mais le mois de mai arrivé, la place de Taksim ne sera pas autorisé aux manifestants.
En 2010 Taksim est de nouveau autorisé. Ils sont 200 mille…
Et en 2011 1 million de personnes se sont réunis sur la Place historique. Pas de violence policière, tout se déroule normalement. Mais le nombre de participants qui augmente inquièterait-il quelques uns ?
2011
En 2012, de démocrates à la gauche radicale sur l’échiquier politique à gauche, toutes communautés confondues sont à Taksim et dans les villes de Turquie. Symboliquement à 14h tapante, dans toutes les villes du pays, ils scandent d’une seule voix, un seul et unique slogan : « Coude à coude contre le fascisme ! »
C’est encore plus inquiétant…
Donc en 2013 en prétextant le projet d’urbanisation comprenant Taksim, la manifestation est de nouveau interdite. Les manifestants essayent d’y accéder malgré tout, la police intervient violemment. Rappelons que, le 31 mai commencera la lutte du parc Gezi, qui se transformera rapidement une vague de protestations et de résistance qui s’étendra dans d’autres villes du pays.
2013
En 2014, l’année des grands moyens : 40 milles policiers sont en place à Taksim. A la fin de la journée on compte 266 gardes à vue à Istanbul, et 300 dans tout le pays, centaines de blessés, et pas des petits bobos : 90 personnes ont été hospitalisées, dont 4 traumatismes crânien, une oreille arrachée, une fracture au bras, une vingtaine de blessure par grenade lacrymo, une blessure à l’oeil avec le risque de perte de vue. 12 journalistes avaient été blessés par la police et un journaliste était mis en garde à vue.
2014
L’année dernière 2015, malgré l’interdiction, diverses organisations appellent à se rassembler à Taksim. Les manifestants réunis à Beşiktaş essayent de remonter mais la place de Taksim leur reste inaccessible. La police ne manque pas l’occasion… A la fin de l’après-midi, la Préfecture déclare 203 gardes à vue et 18 blessés.
> Notre ami Pierre présent sur place, avait partagé ses impressions et images avec Kedistan. Voilà quelques unes.
Pour lire son article cliquez : « 1er mai, j’ étais à Istanbul »
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La marche du 1er mai
« 1 Mayıs Marşı », la Marche du 1er Mai date du 1974. Son histoire est assez originale…
En effet, cette marché avait été écrite et composée par Sarper Özsan en 1974. L’AST (Ankara Sanat Tiyatrosu, Théâtre d’Art d’Ankara) mettait en scène alors, « La Mère » de Maxime Gorki, adaptée au théâtre par Bertolt Brecht. Sarper Özsan explique dans un reportage donné au magazine Aydınlık du 4 mai 2008 :
C’était la scène du 1er mai 1905, nommé « dimanche sanglant ». Il n’y a pas de répliques dans cette scène. Brecht notifie « Les ouvriers entrent en scène en chantant une marche », mais ne donne aucune précision sur la marche. J’ai donc pensé à écrire et composer cette marche, en tant que musique de théâtre.
Tous les mouvements politiques de gauche se sont appropriés cette marche. Et en 1976, quand il a été question de célébrer le 1er mai à Taksim, elle a naturellement pris sa place.
Cette chanson a été interprétée par plusieurs artistes et groupes engagés. Kedistan vous offre en bonus, la vidéo sous titrée en français de la version du Grup Yorum, dont le concert a été interdit le 17 avril dernier. Mais vous pouvez aussi écouter en cliquant sur leur noms, les versions de Cem Karaca, Edip Akbayram, Timur Selçuk, Selda… Certains d’entre eux ont été jugés pour l’avoir chantée…
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