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Guillaume Meurice, d’extrême gausse

Lien publiée le 29 décembre 2016

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

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L’humoriste, qui renouvelle le genre du micro-trottoir, s’amuse à propager les valeurs de la gauche écolo-radicale sur France Inter.

Récemment, Guillaume Meurice a été interviewé par une revue de gauche radicale, Ballast, qui se définit comme un «collectif de création politique» et dont le slogan est «tenir tête, fédérer, amorcer». Du genre sérieux, donc. Elle l’a interrogé sur sa «dénonciation de la violence sociale des institutions dominantes» et lui a demandé si «saisir les armes du capitalisme et les retourner contre lui», comme l’humoriste le fait dans ses micros-trottoirs en traquant les failles logiques dans les discours des communicants, des politiques et des entreprises, est «une stratégie révolutionnaire efficace». Bref, Ballast ne s’était pas déplacé pour déconner, mais pour réfléchir avec ce compagnon de lutte à la puissance subversive du rire. Lui a surtout répondu en faisant des blagues. «Je ne suis pas militant, je n’ai jamais été encarté», assure le jeune homme sympa et taquin que l’on rencontre un soir dans un café proche de la Maison de la radio.

Ecolo revendiqué, tendance végétarienne, le Bourguignon de 35 ans n’en a pas tout à fait conscience, mais il est porté aux nues par la gauche de la gauche. Celle-ci, d’habitude plus agacée par France Inter, en a presque fait son comique officiel. Sur les réseaux sociaux, elle partage à tout-va ses vidéos, qui raillent chaque jour les riches, le CAC 40, l’argent-roi, les droites et le PS. Souvent, elles dépassent le demi-million de vues sur Facebook. Le propos de Meurice est tellement marqué politiquement que ses comparses de l’émission Si tu écoutes, j’annule tout, les pourtant pas très droitiers Charline Vanhoenacker et Alex Vizorek, le font passer à l’antenne pour le gaucho de service.

Son humour est parfois facile : il va dans un salon de l’industrie militaire, demande aux gens s’ils sont fiers de vendre des engins qui tuent des enfants et recueille des justifications à ce point embarrassées qu’elles sont hilarantes. Si l’on fait partie du même camp progressiste, favorable à l’égalité universelle et à la redistribution des richesses, on se marre. Un peu moins, sans doute, si l’on est un patron de PME catholique et conservateur. Quoique… Etre drôle permet de brasser large. On trouve des fillonistes qui l’apprécient : cf. sa poilante chronique du 28 novembre, visible sur Youtube«Il ne se moque pas des gens mais grossit leurs défauts. C’est un caricaturiste vocal. Il a toujours eu cette gentillesse, ce sourire en coin», dit Julien Héteau, directeur du théâtre parisien Le Funambule Montmartre, qui le pratique depuis longtemps. Le talent évident de Meurice tient à sa repartie, sa capacité à rebondir sur les mots de ses interlocuteurs. On peut le mesurer dans son spectacleQue demande le peuple ? où il joue le spin doctor de Manuel Valls : c’est quand il interagit avec le public qu’il est le meilleur. «Rarement on se demande pourquoi on pense ceci ou cela, observe cet adepte de la théorie du cerveau reptilien, lecteur du généticien Albert Jacquard. On a tendance à répéter les choses qu’on a entendues et quand on essaie de les justifier, on arrive à des trucs marrants. Ce que je fais est une sorte d’aïkido sémantique : j’accepte la proposition de l’autre et je la pousse au plus loin. Quand quelqu’un te dit que tous les Arabes sont des voleurs, c’est beaucoup plus rigolo de lui demander pourquoi que de lui répondre : vous avez tort.» Patrick Cohen, matinalier de France Inter :«Ce qu’il fait est extraordinaire. Il a renouvelé le genre du micro-trottoir. Je suis très client. Il a le culot, les idées, la capacité de travail.»Laurence Bloch, directrice de la station : « Je n’étais pas convaincue quand il a commencé avec des chroniques sans son, mais là, c’est irrésistible.»

L’humoriste double cette qualité oratoire d’une solide connaissance de l’actualité et du monde qui l’entoure. Il lit peu de romans, préférant les essais, les biographies et les documentaires (il adore regarder Un jour, un destin sur France 2). «Un pote m’appelle l’obsédé du réel. J’ai du mal à m’intéresser à ce qui n’est pas vrai. Je suis plus ému par un paysage que par un tableau.» Il ne faut pas fouiller longtemps pour trouver où il a façonné son art de la joute verbale. En 1987, son père, cheminot, et sa mère, au foyer, s’installent avec sa sœur et lui à Jussey (Haute-Saône) et ouvrent une maison de la presse. «C’était l’endroit du village où l’on venait pour discuter de politique, dans une ambiance de rigolade. Mon père était vachement dans le débat. Et moi, je traînais là… Mon enfance a été scandaleusement heureuse.» Les parents, de gauche évidemment, n’ont jamais essayé de le détourner du théâtre lorsque l’envie lui a pris, à la vingtaine. «Beaucoup de gens m’en parlaient. J’ai toujours été un peu fouteur de merde, un peu grande gueule, un peu espiègle.» A l’époque, il languit à l’IEP d’Aix-en-Provence. Il a échoué là parce que, fan de foot (la passion l’a quitté depuis), il voulait se rapprocher de l’Olympique de Marseille. «Mon rêve de gosse était d’être abonné au Stade-Vélodrome.»Auparavant, il a décroché un DUT de «gestion des entreprises et des administrations» à Besançon, en trichant : il photocopie ses cours en format réduit et les planque sous la table lors des examens. En licence, il recommence, se fait griller, est éliminé. «Je m’en foutais, j’allais pas en cours, je glandais. Je savais dès l’arrivée à Aix que j’allais me barrer à Paris l’année suivante.» Dans la capitale, il apprend la comédie au cours Florent et finance son début de carrière poussif par des petits boulots, à l’ex-Relais H de la gare Saint-Lazare ou comme agent-courrier à la Sogecap, la filiale d’assurance de la Société générale. «Je n’ai jamais eu l’impression que je galérais, raconte-t-il. C’est un chemin à parcourir, avec des étapes. J’aime bien l’idée d’avoir à faire ce chemin.»

Aujourd’hui, Guillaume Meurice gagne environ 6 000 euros brut par mois, à raison de 240 euros par chronique et 250 à 500 euros par cachet. Le type qui se présente devant nous n’a pas l’air de flamber : il porte des chemises fatiguées et loue un 35 mètres carrés dans le 12e arrondissement de Paris avec sa copine ébéniste. Il continue à jouer son spectacle deux à trois fois par semaine, pour «avoir un pied en dehors des médias». Il semble convaincu que sa hype audiovisuelle s’arrêtera bientôt. Plusieurs fois dans la conversation, il répète : «Le jour où je me ferai virer de France Inter.» Il s’étonne de la «liberté totale»que lui laisse la radio, lui qui a mis fin à sa collaboration avec Canal + après une seule chronique en janvier 2015, lorsque la chaîne lui a interdit de passer un dessin de Charb à l’antenne. «A France Inter, je ne peux rien faire de plus ressemblant à ce que je suis, parce que je suis à ma place de petit emmerdeur, qui fait chier sans avoir l’air d’y toucher. Je ne fais aucun compromis avec moi-même.» Heureux homme.

14 juin 1981 Naissance à Chenôve (Côte-d’Or).

2007 Premier one man show.

Septembre 2012 Devient chroniqueur sur France Inter.

2014 Spectacle Que demande le peuple ? 

Septembre 2014 Rejoint l’émission Si tu écoutes, j’annule tout.