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    La succession qui paralyse la CGT

    CGT

    Lien publiée le 23 mai 2012

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    (Le Monde, Michel Noblecourt) A l'Elysée, mardi 15 mai, Bernard Thibault brillait par son absence. Comme les autres dirigeants syndicaux et la présidente du Medef, le secrétaire général de la CGT avait pourtant été invité - une première - à la cérémonie d'investiture du nouveau président de la République, François Hollande. Mais il s'est fait représenter. Lundi 21 mai, lorsque Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, et Michel Sapin, ministre du travail et du dialogue social, ont entamé leurs entretiens avec François Chérèque, Jean-Claude Mailly ou encore Laurence Parisot, les numéros un de la CFDT, de FO et du Medef, M. Thibault manquait de nouveau à l'appel.

    Depuis l'élection de M. Hollande, la CGT est aux abonnés absents. Elle a attendu le 9 mai pour se réjouir de la victoire du candidat socialiste, pour lequel elle avait pourtant explicitement appelé à voter. La raison ? Depuis que, le 24 janvier, M. Thibault a lancé officiellement le processus de sa succession - qui interviendra, en mars 2013, à l'issue du 50e congrès de Toulouse -, la centrale est paralysée par ce qui prend la tournure d'une crise interne.

    La bataille fait rage au sein de la CGT. En fonctions depuis février 1999, M. Thibault, 53 ans, affiche sa volonté de voir une femme, issue de préférence du secteur privé, où il veut renforcer l'implantation de sa centrale, lui succéder. Son prédécesseur, Louis Viannet, avait eu la même idée en inclinant d'abord pour Maryse Dumas, avant de choisir le leader des cheminots. M. Thibault a hésité entre deux femmes, membres du bureau confédéral : Nadine Prigent, 54 ans, ancienne infirmière, secrétaire générale de la fédération de la santé ; Agnès Naton, 53 ans, retraitée de La Poste, directrice de La Nouvelle Vie ouvrière, l'hebdomadaire confédéral. Il a finalement opté pour Mme Prigent, même si elle ne vient pas du privé.

    Le choix de M. Thibault se heurte à celui de son appareil. La majorité des fédérations et une partie des unions départementales, plus dociles - ces structures qui composent le comité confédéral national (CCN), le "parlement" de la CGT, qui doit se prononcer, le 31 mai, sur la succession - soutiennent Eric Aubin. Agé de 50 ans, secrétaire général de la fédération de la construction, membre de la commission exécutive, M. Aubin a travaillé chez Bouygues. Il est aujourd'hui le "M. Retraites" de la CGT et c'est à ce titre qu'il a réagi, lundi 21 mai, au projet de décret préparé par Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, permettant un départ à 60 ans pour 41 annuités. "C'est un pas positif, mais qui en appelle d'autres, a-t-il déclaré. Notre revendication reste le retour à l'âge légal à 60 ans, pour tous."

    Alors qu'en treize ans M. Thibault a mené, avec des hauts et des bas, une mutation "réformiste" de la CGT, les deux principaux prétendants à sa succession sont sur la même ligne. Ils sont tous les deux membres du Parti communiste, lequel a été prié de ne pas s'en mêler... Ils s'opposent plutôt sur leur style et leur tempérament. Mme Prigent est jugée en interne "plus raide" et elle a des relations difficiles avec les autres centrales. Plus pragmatique et ouvert au compromis, M. Aubin apparaît plus consensuel, mais M. Thibault lui reproche de s'être trop mis en avant et d'avoir mené campagne.

    M. Thibault avait prévu de révéler son choix devant les cinquante-quatre membres de la commission exécutive (CE) le 17 avril. Au dernier moment, il y a renoncé, annonçant la poursuite de ses consultations à travers neuf rencontres interrégionales. Vendredi 25 mai, lors d'une CE extraordinaire, M. Thibault devrait demander un vote - purement consultatif - sur sa proposition. Mais, selon de bonnes sources, cette instance est divisée en trois tiers : un pour Mme Prigent, un pour Mme Naton et un pour M. Aubin. Le patron de la CGT pourrait confirmer son choix pour Mme Prigent ou faire acter le principe que son successeur devra être une femme...

    Mais les partisans de M. Aubin n'ont pas dit leur dernier mot. Ils n'excluent pas de mettre M. Thibault en minorité au CCN du 31 mai. L'article 28 des statuts de la CGT permet, "à la demande du quart des organisations ayant voix délibérative", d'accorder à chaque structure (disposant d'une voix) "une voix supplémentaire par tranche de 2 000 adhérents " à jour de cotisations. Une telle procédure jouerait en faveur de M. Aubin. Du coup, trois scénarios sont envisageables : M. Thibault, fort de sa légitimité, impose Mme Prigent (ou Mme Naton), mais le malaise persiste ; M. Aubin réussit à l'emporter, mais M. Thibault est affaibli ; le "parlement" cégétiste se trouve dans l'incapacité de trancher.

    La crise interne risque de durer jusqu'en mars 2013, avec un match revanche au congrès de Toulouse si Mme Prigent est mise sur orbite. C'est le CCN de la Ville rose qui élira formellement le successeur de M. Thibault. Or celui-ci, ou celle-ci, doit figurer parmi les membres de la commission exécutive qui seront élus par les délégués du congrès de Toulouse. La CGT se trouve donc paralysée au pire moment, en pleine alternance politique et alors que se prépare, pour la mi-juillet, une conférence sociale que le gouvernement envisage d'installer dans la durée. Compte tenu de la place centrale de la CGT dans le dialogue social, on n'ose imaginer que cette mise hors jeu, qui inquiète autant les autres syndicats que le gouvernement et le patronat, se prolonge encore dix mois...