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En Picardie, Ruffin part à la reconquête de l’électorat populaire
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Le réalisateur de “Merci Patron!”, candidat unique de la gauche hors-PS aux législatives dans la 1ère circonscription de la Somme, a lancé sa campagne ce 17 février, avec pour objectif de reconquérir le vote populaire, tombé soit dans l’abstention, soit dans le vote FN.
Quelque chose a changé chez François Ruffin. Ce n’est pas son verbe, toujours à mi-chemin entre la citation érudite et l’argot picard – un mélange qui fait le charme de son journal satirique, Fakir. Ni sa dégaine de militant décroissant, une paire de baskets invariablement aux pieds, en cas de match de foot à disputer. C’est son t-shirt. On ne le connaissait plus qu’avec une déclaration d’amour à Bernard Arnault inscrite au milieu d’un t-shirt blanc, depuis la sortie de Merci Patron!, son film-documentaire qui prenait pour cible le patron de LVMH.
Désormais, il l’a remisé pour un t-shirt à l’effigie de Lafleur, devenu le symbole de sa campagne pour les élections législatives de 2017, dans la 1ère circonscription de la Somme. “Quelle fleur ?”, s’enquerront les profanes de la culture picarde. Lafleur : la marionnette populaire tirée d’un personnage de la révolution, “dont la spécialité est de botter le cul aux notables!”, explique François Ruffin devant la salle comble du Chiffon rouge, à Flixecourt (Somme), à une vingtaine de kilomètres d’Amiens, ce 17 février. “Et si je suis élu, je botterai le cul aux notables de l’Assemblée nationale!”, ajoute-t-il face aux quelques 600 personnes venues le soutenir. Le lieu est symbolique : c’est le “point de départ de la fortune de Bernard Arnault”, explique Ruffin. Il sera opposé dans cette circonscription à la candidate du PS Pascale Boistard, secrétaire d’État chargée des personnes âgées.
L’union est un combat
C’est sous le label “Picardie Debout” (ce qui n’est pas un hasard pour l’un des protagonistes de Nuit Debout), que toutes les étiquettes de la gauche hors-PS se sont réunies pour soutenir François Ruffin, et sa suppléante Zoé Desbureaux (PCF). Un exploit.
Cette convergence est le fruit d’un long processus. Peu avant le meeting, quand François Ruffin aperçoit le porte-parole d’Europe Ecologie-Les Verts (EE-LV), Julien Bayou, venu le soutenir, il le salue d’une franche accolade. L’intéressé fait partie des personnes qui, dans chaque parti, ont intercédé en faveur de l’union de la gauche derrière le militant picard.
A l’été 2016, alors que “le bal des égo battait son plein pour la présidentielle”, le trentenaire écolo lui laisse un message pour l’encourager à se présenter. Il n’est pas le seul. Le message est resté sans réponse jusqu’à la mi-août :
“Il m’a dit, très cash : ‘No way si tout le monde n’est pas derrière nous'”, raconte Julien Bayou.
Dans le numéro de Fakir paru en décembre, François Ruffin réitère cette condition d’union de la gauche. Il a fallu tordre virtuellement quelques bras, mais c’est chose faite : “L’avantage, c’est que je pouvais passer au niveau national quand ça coinçait au niveau local”, explique François Ruffin, citant par exemple Pierre Laurent (PCF), Eric Coquerel et Manuel Bompard (France Insoumise) parmi ceux qui ont pesé en sa faveur.
“Même les chips ont quitté la Picardie ! Pourquoi on laisse faire ?”
Désormais, fort de cette union, François Ruffin s’est présenté en verve devant ses soutiens. Après une intervention des salariés de Whirlpool dont l’usine va être délocalisée en Pologne, le journaliste s’est fait le chantre du protectionnisme, et s’est engagé à porter la voix des oubliés.
Énumérant toutes les fermetures d’usines et les délocalisations qui ont miné la région (Goodyear, Magneti-Marelli, Sièges de France…), il déclare ainsi :
“La même histoire se répète depuis trente ans. Même les chips ont quitté la Picardie ! Pourquoi on laisse faire ? Parce que ce sont des ouvriers, et qu’ils ne sont pas représentés à l’Assemblée nationale!”
Aussi François Ruffin s’est-il engagé, s’il est élu, à être payé au Smic, à mettre sa réserve parlementaire sous le contrôle d’un jury populaire, et à ce que son mandat soit révocable.
Faire de la Picardie un exemple de reconquête du vote populaire
Le contexte local dans l’Amiénois est favorable depuis des années au vote FN. Aux dernières élections régionales, en 2015, il atteignait ainsi 42%. Mais François Ruffin ne se résigne pas à cette situation et espère renverser la balance dans cette terre historiquement rouge, pour en faire un exemple de reconquête de l’électorat populaire par la gauche. “Lutter contre le fatalisme, la résignation et le marinisme” est un de ses mots d’ordre.
“Aux régionales, les gens de gauche ne sont pas allés voter. Mon objectif, c’est d’abord de les refaire voter, et de reconquérir les électeurs qui sont tombés dans l’escarcelle du FN”, nous confie-t-il après son discours.
Pour ce faire, François Ruffin et son équipe vont mouiller le t-shirt. Littéralement. Dans son entourage, on a évalué à 20 000 heures le temps nécessaire pour couvrir toute la circonscription en faisant du porte-à-porte. Mais ce n’est pas tout : Picardie Debout a une équipe de foot, qui organise des rencontres dans les villages, pour ensuite discuter politique. “On a 113 jours pour se battre. C’est de Picardie qu’est partie la Grande Jacquerie de 1358 [une révolte paysanne contre les nobles, ndlr]. L’objectif aujourd’hui c’est de faire partir de Picardie une grande jacquerie électorale”, sourit François Ruffin. La campagne va être sportive