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En Italie, l’aile gauche du Parti démocrate sur le départ
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
(Mediapart) Après la victoire du « non » au référendum et sa démission de la présidence du conseil début décembre, Matteo Renzi a quitté la direction du Parti démocrate (PD) dimanche 19 février. Objectif : le reprendre en mains au congrès prochain, une fois le divorce avec son aile gauche consommé.
La séparation couvait depuis un bon moment. Depuis dimanche, les départs se succèdent dans les rangs du Parti démocrate (PD) italien. Si la plupart des « frondeurs » faisaient profil bas depuis l’arrivée de Matteo Renzi à la direction du parti puis à la tête de l’exécutif italien début 2014, la divergence prend cette fois-ci une forme concrète : les transfuges du PD sont en train de former un nouveau groupe parlementaire et Matteo Renzi, qui a accepté de démissionner du poste de secrétaire général dimanche 19 février pour convoquer un congrès en juin, ambitionne de reprendre la main du parti une fois cette clarification politique achevée.
« Il y a depuis longtemps une bataille larvée au sein du PD entre la majorité autour de Renzi et une minorité qui comprend essentiellement des anciens dirigeants de l’aile gauche du PD, comme l’ancien secrétaire général Pier Luigi Bersani et l’ancien premier ministre Massimo d’Alema, explique Paolo Chiocchetti, chercheur en sciences politiques associé à l'université de Luxembourg. Au référendum de décembre [il s’agissait de voter sur une réforme constitutionnelle conduisant entre autres à la suppression du Sénat dans sa forme actuelle – ndlr] cette minorité a voté “non”, contre l’avis de la majorité. Ces dernières semaines, le désaccord s’était aggravé. » La scission n'est donc pas en soi une surprise, mais elle est pleine d'inconnues. « On ne sait pas pour l’heure combien de députés vont partir, et quelle nouvelle structure ils formeront. Nous n’en sommes qu’au stade de l’annonce. »
Matteo Renzi lors de la réunion du Parti démocrate, dimanche 19 février © Reuters
D’après les journaux italiens, ils seraient une trentaine de députés et une quinzaine de sénateurs à quitter les rangs du PD. Peu d’étonnement dans les colonnes. Ainsi La Repubblica écrivait mercredi : « La scission au sein du Parti démocratique n’a pas le caractère soudain du traumatisme, mais plutôt, comme cela arrive souvent dans les séparations de la vie individuelle et collective, celui d’une lente érosion qui n’a pas été traitée au bon moment (…). Elle résulte d’un processus qui a des origines lointaines, et est même liée, pour certains, à l’acte de fondation du parti divisé en deux âmes culturellement irréconciliables : la sociale-catholique et la socialiste-communiste. » Le PD est en effet né en 2007 de la réunion entre l’ancienne démocratie chrétienne (famille politique de Matteo Renzi) et les héritiers du Parti communiste italien.
« On ne peut pas ne pas voir que le prolongement d’une cohabitation forcée risque d’alimenter une pulsion de mort tout aussi dévastatrice, poursuit l’éditorialiste. L’horizon du monde se réduit alors aux vicissitudes internes de la relation. Au lieu de transformer le monde, le parti reste paralysé dans la rumination continue sur lui-même. Voilà ce qui a éloigné la politique du pays réel. N’est-ce pas l’un des principaux maux qui affligent le Parti démocrate depuis un certain temps ? » Ilvo Diamanti, l’une des grandes figures de la sociologie politique italienne qui était de passage à Paris ces jours-ci pour une conférence à Sciences-Po, analysait de la même manière la dérive du PD : « Le principal obstacle du PD, c’est le PD lui-même : son adversaire est plus à l’intérieur qu’à l’extérieur ! », glisse-t-il.
Le mouvement de recomposition ne se fait pas sans quelques faux départs. L’ancien procureur Michele Emiliano, une des grandes voix critiques de Renzi au sein du PD, se disait prêt à quitter le navire. Lundi 20 février, il a finalement confirmé qu’il resterait, et se porterait candidat face à Renzi au prochain congrès. Dans un entretien au Corriera della Serra mercredi, il explique : « Je reste parce que je voyais Renzi heureux de me voir partir. Et puis je me suis dit que je faisais fausse route. Le champ de bataille, c’est le Parti démocrate. Laisser le parti en cadeau à Renzi serait une erreur historique ; si nous voulons changer le pays, nous devons disposer d’un parti d’une certaine taille, capable de masse critique. »
Changer le parti de l’intérieur ou participer à la reconstruction d’un espace à gauche du PD : telle est l’alternative qui se présente aujourd’hui pour les députés déçus par la politique sociale-libérale et la personnalisation à outrance de Matteo Renzi. Dans le contexte d’un pays où la gauche radicale est aujourd’hui quasiment effacée du paysage politique, cette clarification est peut-être même une opportunité alors que la constellation à la gauche du PD est précisément en cours de recomposition. La semaine dernière, le SEL (« Écologie et Liberté ») tenait son congrès. Il s’est rebaptisé « Sinistra italiana » (« Gauche italienne ») : « C’est la fin d’un processus d’unification avec différents groupuscules de gauche, explique Paolo Chiocchetti. Mais en l’état actuel des intentions de vote, il n’est pas certain que la nouvelle formation franchisse la barre des 3 % pour entrer au parlement. » C’est avec cette « Gauche italienne » que les députés frondeurs discutent actuellement, ainsi que des personnalités indépendantes de poids comme le maire de Milan, Giuliano Pisapia, ou celui de Naples, Luigi De Magistris.
Giuseppe Civati fait partie de ces frondeurs du PD qui travaillent à ce rassemblement à gauche. Lui a déjà quitté les rangs du parti depuis 2015. Les raisons du départ de cet élu de Milan sont nombreuses : « Le “Job act” – cette loi qui fait passer la loi El Khomri pour progressiste –, la façon d’exercer le pouvoir de Matteo Renzi, la loi électorale, l’absence d’écologie dans sa politique… »
Avertissement de la Commission européenne
Avec neuf autres députés, Giuseppe Civati a formé le groupe « Possibile » au parlement. Ces jours-ci, il discute intensément avec « Gauche italienne ». « Nous sommes un peu dans la même démarche que Mélenchon il y a quelques années. » Mais combien sont-ils ? Lui-même n’en a aucune idée, la situation étant très mouvante. « Hier, une trentaine de députés et une quinzaine de sénateurs semblaient quitter le PD », dit ce député qui reconnaît que différentes stratégies sont à l’œuvre dans la recomposition en cours. « Bersani et d’Alema sont dans des positionnements tactiques, ilsvisent les prochaines élections. Pour moi, il y a un problème culturel et politique avec ce qu’est devenu le PD. Ce n’est plus du tout un parti de gauche. » Plus tendance Hamon que Macron ou Valls, ce parlementaire n’en revient pas que Renzi se soit déclaré en faveur du fondateur d’« En Marche », il y a une dizaine de jours. Il appelle au rassemblement. « Pour créer ce nouvel espace à gauche du PD dont nous avons besoin, il nous faut être unitaires, créatifs et intelligents. Or pour l’heure, nous sommes surtout divisés en plusieurs mouvements. Il y a un éparpillement des personnalités. Il faut trouver la définition de ce parti, le projet commun, pour unifier le puzzle. C’est d’une seule gauche que nous avons besoin. »
Cette recomposition au centre-gauche et à gauche de l’échiquier politique italien reste toutefois chargée d’inconnues. « On ne sait pas avec quelle loi électorale nous allons voter aux prochaines élections, ni avec quel seuil électoral, rappelle le chercheur Paolo Chiocchetti. Le PD est affaibli avec la perte de son aile gauche, mais en réalité, cela ne change rien pour l’instant au cadre général : aucun parti n’est actuellement en mesure de gagner la majorité. Même une coalition élargie entre la droite berlusconienne de Forza Italia, les centristes et le nouveau PD n’obtiendrait pas la majorité à la chambre des députés si des élections étaient organisées aujourd’hui. On risque de revenir à la période des années 1980 en Italie, où chaque élection était suivie de longues tractations pour bâtir les coalitions à l’assemblée. »
Opportunité pour la reconstruction de la gauche ou ouverture d’une nouvelle période d’instabilité politique dont l’Italie est familière ? Les conséquences de l’éclatement du PD sont très incertaines, d’autant que les frondeurs restent pour l’heure dans un entre-deux ambigu. Le nouveau groupe parlementaire maintiendra en effet son soutien au gouvernement jusqu’aux prochaines élections, afin de ne pas provoquer de crise politique majeure. Un double discours qui risque de manquer de clarté pour les électeurs… « Cette scission est un mouvement à la fois profond et superficiel, nuance Paolo Chiocchetti. Car les partis italiens sont en réalité très affaiblis et n’ont plus beaucoup de soutien du côté des militants et du noyau dur de leur électorat. Tout ce qui se passe actuellement se passe dans les appareils : cela se fait sans enthousiasme ni participation de l’électorat – qui est par ailleurs très volatil. La bataille ne porte pas sur des fondamentaux politiques, les scissionnistes ne savent pas quel rôle ils veulent exercer dans l’opposition. »
L’autre inconnue provoquée par ce mouvement est à droite. Est-ce que le recentrage du PD peut lui permettre de se rapprocher de la droite berlusconienne – option totalement exclue par l’aile gauche jusqu’à présent ? Tout dépend de la façon dont le Cavaliere va se positionner face à l’extrême droite de la Ligue du Nord qui cherche à bâtir une coalition anti-euro et anti-UE. Entre la formation d’une coalition de droite radicale ou la constitution d’un centre élargi, Berlusconi n'a pas tranché. Celui qui pourrait bien tirer son épingle du jeu dans cet éclatement du PD, c’est le Mouvement Cinq Étoiles qui, depuis les élections législatives de 2013, profite du délitement politique et économique du pays. Face au recentrage du PD et à l’éventualité d’une grande coalition centriste, le discours anti-système du mouvement fondé par Beppe Grillo ne peut que prospérer.
Quant à Renzi, une fois de plus, il feint de partir pour mieux revenir. Sandro Gozi, l’un de ses proches et ancien secrétaire d’État aux affaires européennes, nous l’avait confié en décembre : « Il veut revenir, et il reviendra le moment venu. » C’est d’ailleurs l’analyse que fait également le chercheur Paolo Chiocchetti : « Renzi va rester au centre du jeu politique, c’est pourquoi il a accepté l’organisation d’un nouveau congrès. Il a une capacité d’agréger un espace de centre gauche important alors qu’Emiliano n’a pas grand chance de l’emporter à la tête du parti. Renzi reste en effet très populaire : s’il a perdu le référendum en décembre, c’est essentiellement parce que les autres partis se sont unis contre lui. Mais dans le parti lui-même et au centre gauche, le “oui” l’a emporté très largement. Il continue à bénéficier de ce soutien. »
En attendant, l’Italie ne peut guère se permettre un scénario d’instabilité politique. Dans son examen mensuel des économies de la zone euro, la commission européenne a retoqué le budget italien cette semaine : Rome doit opérer une correction de 3,5 milliards d’euros dans ses comptes publics d’ici le mois prochain… Et les signaux sont à nouveau dans le rouge, la péninsule présentant, après la Grèce, la plus grosse dette publique du continent rapportée au PIB. « Il y a un pays qui a besoin d’être gouverné, quelle que soit la date des prochaines élections, prévenait jeudi La Repubblica. Il y a un pays qui ne peut se permettre une escalade comme celle de novembre 2011 qui nous a amenés au bord de la faillite. L’inflation est à la hausse. Dans quelques mois, la BCE devra tourner la page de la phase des intérêts à taux zéro et du “Quantitative easing” [rachat massif des titres de dettes par la banque centrale – ndlr] qui nous ont jusqu’à présent mis à l’abri des catastrophes. Lorsque le parapluie de Mario Draghi sera fermé, il va pleuvoir des pierres sur l’Italie. Le temps est écoulé. Mais la politique est-elle encore là ? »