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Ne croyez pas au bobard que la CFDT est passée devant la CGT
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Le mode de scrutin servant à la représentativité des organisations syndicales mis en place par la loi Bertrand du 20 août 2008, qui vient pour la deuxième fois de donner des résultats, (2009-2012 puis 2013-2016), ne peut pas être considéré comme satisfaisant aux yeux d’un démocrate attentif.
C’est un système étrange qui agrège les résultats des élections des institutions représentatives du personnel, dans des conditions variables sur une période étalée sur quatre ans. C’est le contraire d’un scrutin direct et sincère. Ce n’est pas une photo, ni un constat, c’est un cliché bougé-brouillé, indirect qui perd tout sens.
Il est aléatoire : car les élections de CE sont théoriquement prévues tous les 4 ans, dans une partie seulement de 3 % des entreprises (qui regroupent 50 % des salariés). Les élections de DP sont prévues à partir de 11 salariés dans une mince partie des 200 000 entreprises. Dans le million de TPE existantes, il y a des élections « spéciales » à très faible participation par correspondance (10% puis 8 %). En réalité, trop peu d’entreprises ont des IRP, CE, des DP : seulement 4,923 millions de salariés ont eu l’occasion de se prononcer au moins une fois sur une ou plusieurs listes présentées par un ou des syndicats selon la CGT et 5,243 128 selon le ministère (+3,30 % de votants). 68 043 procès-verbaux envoyés par les DRH, seulement, ont été compilés selon le ministère qui affirme que c’est une hausse de 18,4 % par rapport à 2012.
Ce résultat est estimé à 60 % des 9 millions de salariés inscrits dans ces entreprises où le patron a organisé un vote pour les IRP. C’est donc peu sur un total de 23 millions de salariés qui sont dans toutes les entreprises incluses celles sans IRP, ou sans syndicat.
Le recollement national de ces élections organisées par les patrons se transmet par les « DRH » au Ministère : le favoritisme patronal a tout loisir de s’exercer à tous les stades de ces opérations.
Le vote pour les CE s’effectue souvent sur les critères de gestion (oeuvres sociales) et non pas pour l’action syndicale en général, laquelle est heureusement plus vaste : comment voulez vous, par exemple, mesurer avec un cycle de 4 ans, étalé entre janvier 2013 et décembre 2016, la représentativité des syndicats et l’opinion des salariés après l’immense bataille pour ou contre la loi El Khomri qui coure de mars à septembre 2016 ?
Lors des dernières élections nationales directes démocratiquement contrôlables, celle des prud’hommes, en décembre 2009, donnait 38 % des voix exprimées à la CFDT, la CFTC, la CGC, et 62 % à la CGT et FO.
Coup de théâtre, la première application de la loi Bertrand le 31 mars 2013 abaisse le score de la CGT et FO à 48,5 % tandis que la CFDT, CGC, CFTC, obtiennent 51,5 % des voix. En dépit de ce système antidémocratique, lors des élections recensées en 2013, la CGT restait encore devant avec une très courte majorité à 26,77 % et 26 % pour la CFDT. Qui croit que la CGC est à hauteur de 10% et la CFDT à 9,5 % ? Par contre Solidaires et UNSA sont éliminés parce que le seuil de représentativité est à 8 %.
Deuxième compilation de vote 31 mars 2017 : la CFDT arrache 26,37 % des voix dans le seul privé, juste devant la CGT avec 24,86 %. Cela suffit à une campagne de faussaire dans les médias : »tournant historique » »tremblement de terre » , etc. FO est à 15,59 % , la CGC à 10,67 % et la CFTC à 9,49 %.
Alors qu’il y avait 35 % de taux de participation aux prud’hommes 2009, on est autour de 25 % de participation dans ce « scrutin étalé » de 2017.
Contrairement à ce qui est dit, la CGT toutes catégories confondues, privé, public, TPE reste quoiqu’il arrive à 24, 27 % devant la CFDT.
Mais cela ne colle pas du tout avec les élections directes dans les TPE de décembre 2012 car elles donnent nettement en 2013, (10 % de participation) 10 points d’avance dans le privé à la CGT sur la CFDT, et c’est encore significativement confirmé entre le 30 décembre 2016 et le 13 janvier 2017, en dépit du « bug » qui a eu lieu (8 % de participation). Comment expliquer que dans les petites TPE, endroit sensible, deux scrutins directs donnent un maintien du scrutin des prud’hommes de 2009, en contradiction avec les scrutins « étalés » de 2013 et 2017 ?
La mesure 2017 marque la fin de la période transitoire prévue par la loi du 20 août 2008 selon laquelle toute organisation syndicale affiliée à l’une des organisations syndicales de salariés reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel était présumée représentative au niveau de la branche. Désormais, pour être représentative dans une branche professionnelle, les organisations syndicales devront dans tous les cas satisfaire au critère de l’audience de 8 % dans cette branche et plus largement respecter l’ensemble des critères de la représentativité (respect des valeurs républicaines, indépendance, transparence financière, ancienneté de deux ans, influence, effectifs d’adhérents et cotisations) pour être en capacité de signer des accords collectifs. Solidaires et Unsa sont éliminés définitivement.
La loi du 18 décembre 2014 a modifié les modalités de désignation des conseillers prud’hommes : la désignation (cooptation) des membres des conseils de prud’hommes se fonde désormais sur cette incertaine mesure d’audience.
L’utilisation médiatique de la prétendue avance de la CFDT sur la CGT en ce 31 mars 2017, deuxième « scrutin Bertrand » est donc fortement soumise à caution.
La presentation de deux blocs « réformiste » et « contestataire » dans Le Monde (c’est jour de gloire pour Michel Noblecourt et sa présentation manipulatrice) ne repose sur rien. Tous les syndicats sont à la fois réformistes et contestataires, et souvent à tour de rôle, (FO et CFDT) rien n’oppose ces deux prétendues démarches. Noblecourt donne un bloc « dit réformiste » de 41,21 % CFDT CFTC rajoutant.. l’ Unsa. Et un bloc FO et CGT « dit contestataire » à 40,44 % en omettant… Solidaires et la FSU ! La CGC qui a basculé contre la loi El Khomri refuse avec ses 10,67 % d’être classée dans l’un des ces prétendus « blocs » qui font abusivement les « une » de France inter et de France 2.
L’UNSA qui, finalement, au niveau de son CN a été opposée à la loi El Khomri, alors que son BN était pour, la CFDT qui a vu ses fédérations métallurgie et culture opposée à la loi El Khomri, rien de tout cela ne correspond aux bobards idéologiques des médias, diffusés de façon abusive autour de ces audiences tellement incertaines.
Ne faut-il pas reposer la question ? Revenir à un scrutin de représentativité globale clair, direct, national, contrôlable, démocratique, un jour férie tous les 4 ou 5 ans comme les prud’hommes ? (On pourrait aussi refaire des élections à la sécurité sociale le même jour)
Gérard Filoche
REPRESENTATIVITE SYNDICALE DANS LE PRIVE
Premières réflexions (René Defroment)
La mesure de la représentativité des organisations syndicales et l’agrégation du résultat de différentes élections du privé entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2016 :
- § des élections professionnelles (comité d’entreprise, délégation unique du personnel, à défaut délégués du personnel) organisées dans les entreprises d’au moins 11 salariés;
- § du scrutin organisé auprès des salariés des très petites entreprises et des employés à domicile du 30 décembre 2016 au 13 janvier ;
- § et des élections aux chambres départementales d’agriculture, pour les salariés de la production agricole, qui se sont déroulées en janvier 2013.
Avec un total de 5 243 128 suffrages valablement exprimés (+ 3,30% par rapport à 2013) sur 17,8 millions d’électeurs potentiels), le résultat est le suivant:
- CFDT : 26,37% (+0,37 %)
- CGT : 24,85% (-1,92 %)
- CGT-FO : 15,59% (- 0,35 %)
- CFE-CGC : 10,67% (+ 1,24%)
- CFTC : 9,49% (+ 0,19 %)
Cette façon de mesurer la représentativité syndicale n’est pas la plus indépendante des pressions patronales. En effet ce scrutin favorise l’organisation syndicale qui a le plus de candidats dans les entreprises. Le traitement des organisations syndicales et de leurs militants n’étant pas le même, il faut plus de courage pour se présenter sur une liste CGT que CFDT. C’est cette particularité qui explique la différence des résultats qu’il y avait lors des élections prud’homales. Aux dernières élections la CGT avait progressé alors que la CFDT régressait. Ce gouvernement avec l’appui de la CFDT s’est d’ailleurs dépêché de les supprimer. De même les élections dans les très petites entreprises mettent nettement en tête la CGT avec 25,10 %, CFDT 15,5 %, FO 13%, UNSA 12,5%, CGC 3,4 %).
Ce résultat n’a rien à voir avec l’appréciation de la loi El Khomri par les salariés puisqu’il cumule des résultats d’élections qui ont eu lieu pour la plupart avant mars 2016.
Par contre il est paradoxal que la confédération qui a été le soutien le plus fidèle d’un gouvernement honni par les salariés arrive en tête.
Le favoritisme du patronat pour certaines confédérations n’est pas la seule explication.
La CFDT ne se porte pas si bien que ça avec 15 % aux élections TPE et les défections de base syndicales se poursuivent. La CFDT ne publie plus son nombre d’adhérents depuis plusieurs années et gonflait ces chiffres en comptant un adhérent pour 7 cotisations au lieu de 12 alors que tous ses adhérents sont au prélèvement automatiques.
Les causes de ce mauvais résultat sont à chercher dans les raisons de l’affaiblissement de la CGT dans des secteurs importants : Sncf -1,72%, Edf – 2,74% ; postes et télécom -2,79 %.
Le salariat a changé : il y a plus de cadres et de techniciens, beaucoup plus de précaires, une majorité de salariés dans les entreprises de moins de 50 salariés. La CGT doit le prendre en compte
L’échec des mouvements successifs sur les retraites a certainement pesé.
Le patronat a aussi institutionnalisé le syndicalisme et les délégués sont probablement moins sur le terrain. Nous avons tout à gagner à sortir de notre microcosme et à être au plus près des salariés pour gagner leur conviction et les écouter pour mieux apprécier leurs attentes.
NE PAS GEMIR, AGIR
Les militants de la CGT ne doivent pas gémir et chercher des causes ailleurs mais réfléchir à ce que nous devons changer dans nos pratiques pour augmenter le rapport de force en faveur du salariat, s’implanter là où nous sommes absents, prendre en compte l’évolution et les attentes du salariat et ainsi redevenir la première organisation.