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STX, Alstom et le déclin de l’industrie française
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Fin septembre, on apprenait que deux « fleurons » de l’industrie française, dont l’Etat restait un actionnaire minoritaire, passaient sous le contrôle de deux multinationales italienne et allemande. Fincantieri et Siemens vont en effet devenir les principaux actionnaires respectifs des chantiers navals de Saint-Nazaire (devenus STX) et du constructeur de trains Alstom.
Déclin
Le gouvernement présente la « fusion » Siemens-Alstom comme visant à constituer un « Airbus du ferroviaire », avec deux partenaires « équivalents ». En réalité, Siemens sera l’actionnaire largement majoritaire. Il pourra même, après quatre ans, monter au-delà de 50 % d’actions et absorber Alstom.
La prise de contrôle de Siemens sur son concurrent français n’a pas surpris les politiciens et médias bourgeois. Les mêmes ont l’habitude de s’alarmer du « déclin français », depuis des années, en le comparant inlassablement au « modèle allemand » et à son industrie performante sur le marché mondial (sans jamais évoquer le prix social de cette compétitivité). De fait, la France affiche depuis 2003 un déficit commercial chronique (48 milliards d’euros en 2016), alors que l’Allemagne accumule d’importants excédents commerciaux (260 milliards en 2016).
Dans le cas de STX, le gouvernement français s’est opposé à l’Italie. Suite au départ de l’ancien propriétaire sud-coréen de STX, le gouvernement français avait annoncé sa nationalisation « temporaire ». Mais il s’agissait d’un coup de bluff dans le cadre des négociations avec l’Italie. L’idée était d’empêcher l’Etat italien, via Fincantieri, de contrôler ce « secteur stratégique ». En effet, le dernier chantier naval français construit des navires civils et militaires.
Cependant, la manœuvre a fait long feu. Avec une dette publique proche de 100 % du PIB, l’Etat français ne veut plus systématiquement intervenir pour soutenir les profits de « ses » capitalistes nationaux. Aucun capitaliste français ne voulant reprendre STX, Macron a dû capituler et céder l’entreprise aux Italiens. C’est une nouvelle preuve du déclin de l’impérialisme français.
Plans sociaux
Le gouvernement a beau se démener pour rassurer les salariés inquiets, ces derniers ont de bonnes raisons de l’être. Rien n’empêchera les patrons allemands et italiens de privilégier les sites de leurs pays respectifs – ou même ailleurs, si la main d’œuvre y est moins chère.
Les travailleurs apprennent par l’expérience ; le passé récent est riche en leçons. L’exemple de l’indien Mittal est saisissant. En 2006, il reprend Arcelor, géant français de l’acier. Il ne s’est pas gêné pour mettre au chômage les salariés des sites lorrains de Gandrange (sous Sarkozy), puis Florange (sous Hollande), sans que nos deux présidents lèvent le petit doigt.
La branche énergie d’Alstom avait été cédée en 2014 à l’américain General Electrics. Le PDG du nouveau consortium, Jérôme Pécresse, annonçait dès janvier 2016 la suppression de 6500 emplois en Europe, dont 800 dans la région Ile-de-France, laquelle est désormais présidée par sa femme, Valérie Pécresse (LR). Celle-ci prétendant « lutter contre le chômage », elle avait à portée de main une occasion de joindre la parole aux actes !
Protectionnisme ou nationalisations ?
Le mouvement ouvrier ne doit pas croire aux promesses des politiciens bourgeois. Mais nous devons aussi rejeter les fausses alternatives, comme le protectionnisme. Mélenchon, par exemple, a bien raison de dénoncer les risques de plans sociaux liés aux cessions de STX et Alstom. Mais il a tort de le faire au nom de « l’indépendance française », ce qui revient à lier le sort des salariés français au succès de « leurs » capitalistes nationaux.
L’intransigeance du gouvernement italien s’appuyait sur les nombreuses prises de contrôle de capitalistes français, tels Arnault ou Bolloré, sur des « fleurons » italiens du luxe ou des communications. On retrouve ici le véritable rôle de l’Etat capitaliste, ce « comité qui gère les affaires communes de la bourgeoisie » (Marx). Affaiblis par la crise mondiale, les Etats français et italien se mettent d’accord pour sauver certains secteurs plutôt que d’autres. En l’occurrence, Macron a permis à son ami et soutien financier Bolloré d’avoir désormais les mains libres pour prendre la direction de Telecom Italia et Mediaset, l’empire médiatique de Berlusconi (lui-même lâché par le gouvernement italien). Face à deux milliardaires, se demander lequel serait le « moins pire », pour les travailleurs, ne mène nulle part.
La crise mondiale du capitalisme entraîne un ralentissement du commerce mondial, et réduit partout les investissements productifs, notamment dans les transports ferroviaire et naval. Les syndicats et la gauche doivent dénoncer les conséquences sociales de ces restructurations dans tous les pays, sans exception.
Il faut aller plus loin : pour s’opposer sérieusement à la casse de l’industrie, il faut défendre partout l’expropriation des grands capitalistes, qui sont les premiers responsables du saccage. Par exemple, STX et Alstom devraient être définitivement nationalisés. Mais il faut aussi avancer une alternative générale : la planification rationnelle de l’économie à l’échelle nationale, puis internationale, en plaçant les entreprises nationalisées sous le contrôle démocratique des travailleurs eux-mêmes.