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Quand Trotsky écrivait à Nin en défense de l’indépendance de la Catalogn

Catalogne

Lien publiée le 4 janvier 2018

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://socialisme-2010.fr/blog2016/octobre2017.php#octobre33

La Catalogne au cœur

Par Robert Duguet

Léon Trotsky écrivait à Andreu Nin, dirigeant du Parti Ouvrier d’Unification Marxiste (POUM) en 1931, les phrases suivantes.

« Le mot d’ordre du droit des nationalités à disposer d’elles-mêmes est devenu en Espagne d’une importance exceptionnelle. Ce mot d’ordre est du domaine de la pensée démocratique. Il ne s’agit pas pour nous d’engager les catalans et les basques à se séparer de l’Espagne, mais notre devoir est de militer pour que le droit à la séparation leur soit reconnu s’ils désirent en faire usage.

Les tendances séparatistes posent devant la révolution le problème démocratique du droit des nationalités à disposer d’elles-mêmes. Ces tendances, considérées superficiellement, se sont aggravées pendant la dictature de Miguel Primo de Rivera. Mais tandis que le séparatisme de la bourgeoisie catalane n’est qu’un moyen pour elle de jouer avec le gouvernement madrilène contre le peuple catalan et espagnol, le séparatisme des ouvriers et paysans n’est que l’enveloppe d’une révolte intime d’ordre social. Il faut établir une rigoureuse distinction entre ces deux genres de séparatisme. Cependant, et précisément pour disjoindre de leur bourgeoisie les ouvriers et les paysans opprimés dans leur sentiment national, le prolétariat doit prendre, sur cette question du droit des nationalités à disposer d’elles-mêmes, la position la plus hardie et la plus sincère. Les ouvriers défendront intégralement et sans réserve le droit des catalans et des basques à vivre dans des états indépendants, dans le cas où la majorité des nationaux se prononcerait pour une complète séparation. Ce qui ne veut nullement dire que l’élite ouvrière doive pousser les catalans et les basques dans la voie du séparatisme.

Bien au contraire, l’unité économique du pays, comportant une large autonomie des nationalités, offrirait aux ouvriers et aux paysans de grands avantages du point de vue de l’économie et de la culture générale ».

Et Léon Trotsky ajoutait, « comment savoir s’ils ont ce désir ? C’est très simple, il faut organiser un plébiscite des provinces intéressées sur la base du suffrage universel égalitaire, direct et secret, il n’y a pas d’autre procédé ».

Cette lettre est écrite avant naturellement que la dictature franquiste n’écrase la révolution espagnole, avec l’aide active de Joseph Staline et de la non-intervention de Léon Blum. La défaite de la république espagnole ouvrait les écluses de la seconde guerre mondiale. Joseph Staline détroussera l’or de la république espagnole en livrant des armes, la plupart de la première guerre mondiale, qui n’étaient pas en état de fonctionner. Dans la même intention, il décapite l’avant-garde du mouvement ouvrier espagnol. La répression de sa police infiltrant les brigades internationale et les jeunesses socialistes tue et réprime des dirigeants du POUM, de la Confédération Nationale du Travail (CNT), de la Fédération Anarchiste Ibérique (FAI) et de la gauche du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol (PSOE) de Francisco Largo Caballero partisane d’un gouvernement de l’Alliance Ouvrière. Andreu Nin, interlocuteur de Léon Trotsky en 1931, meurt assassiné le 20 juin 1937 à Alcalá de Henares, sur ordre d’Alexandre Orlov, responsable du commissariat du peuple pour les affaires intérieures (NKVD) en Espagne. Il n’est pas question pour le dictateur sanglant du Kremlin de toucher à l’appropriation privée des moyens de production et d’appliquer une réforme agraire contre les latifundia.

Quatre vingt ans après, soit le 3 octobre 2017, devant l’assemblée nationale française, Jean Luc Mélenchon regrette que « la monarchie semble incapable d’assumer la fonction fédératrice que le franquisme lui avait confiée ». Vous avez bien lu. Le leader maximo reconnait au franquisme la fonction progressiste d’avoir fédéré les peuples d’Espagne, au cri de « viva la muerte » sans doute et après avoir fait un million de morts dans une guerre civile, dont les blessures chez les survivants de la Retirada ne se sont jamais refermées. Des milliers de militants ouvriers espagnols rejoindront la résistance française au nazisme ainsi que les colonnes de la Nueve de la deuxième division blindée de Philippe Leclerc. Ils avaient bien l’intention, après avoir nettoyé le sol français et après avoir poussé jusqu’au nid d’aigle du führer pour tuer le cœur du nazisme, de poursuivre et de liquider la dictature franquiste. La raison d’état incarnée par Charles de Gaulle et la raison des états, la division du monde à Yalta en 1945, en décida autrement. On ne toucherait ni à Francisco Franco, ni à Antonio de Oliveira Salazar.

Le 10 octobre 2017, toujours devant l’assemblée nationale française, Jean Luc Mélenchon récidive et regrette que « les nations deviennent des coquilles vides où ceux qui sont les plus avantagés ne veulent plus prendre en charge ceux qui le sont moins et cela vous donne un indépendantisme généralisé et régional des plus favorisés face à ceux qui le sont moins. Nous avons la Catalogne sous nos yeux ». Bref, les catalans, j’entends les masses, seraient des nantis qui veulent quitter l’Espagne pour ne pas payer pour les autres régions plus pauvres. Il est bien connu que la jeunesse précarisée et que les ouvriers en Catalogne qui interviennent en tant que classe sociale sur la scène de l’histoire, y compris contre les hésitations de la bourgeoisie catalaniste, seraient des réactionnaires, puisqu’ils voudraient un meilleur salaire.

La phrase de Léon Trotsky de 1931 n’a pas pris une ride, parce que les rapports sociaux imposés depuis le début de la dictature franquiste sont globalement restés les mêmes, « mais tandis que le séparatisme de la bourgeoisie catalane n’est qu’un moyen pour elle de jouer avec le gouvernement madrilène contre le peuple catalan et espagnol, le séparatisme des ouvriers et paysans n’est que l’enveloppe d’une révolte intime d’ordre social. Il faut  établir une rigoureuse distinction  entre ces deux genres de séparatisme ».

Si la bourgeoisie et la petite bourgeoisie catalane louvoient et hésitent, assises qu’elles sont sur un tonneau de poudre, d’emblée la question de la république, sur fond de crise économique du capitalisme mondialisé depuis 2008, pose la question sociale. Nous avons vu les masses s’engager dans un premier processus d’auto-organisation de défense du référendum. Une formidable Sainte Alliance se déchaine contre ce mouvement, de l’Union Européenne à Emmanuel Macron, d’Angela Merkel jusqu’au pape, sans oublier Jean Luc Mélenchon en queue de comète.

Solidarité avec la Catalogne ouvrière et républicaine !

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https://blogs.mediapart.fr/jean-marc-b/blog/030118/catalunya-la-question-nationale-et-lemancipation-sociale

Le marxisme et les mouvements nationalistes
(Andrés Nin, septembre 1934)

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 Avertissement

Andrés Nin occupa des fonctions politiques dans le cours de la révolution russe, fut membre de la CNT anarchiste et l'un des dirigeants du POUM (Parti Ouvrier d'Unification Marxiste) dans l'Etat espagnol, une organisation révolutionnaire, située à la gauche du PCE, qui joua un rôle important pendant la guerre civile dans la lutte contre Franco. Il mourut assassiné par des agents du NKVD stalinien avec le soutien du PCE, son parti fut dissous au nom de la nécessité d'arrêter le processus révolutionnaire en cours, activateur d'une guerre populaire, au profit d'une militarisation de la lutte antifranquiste,  s'appuyant sur la bourgeoisie républicaine qu'il fallait, selon le PCE, ménager. 

Nous recommandons la lecture de l'ensemble du texte, qui accorde une grande place à la Catalogne et qu'il ne s'agit pas de fétichiser comme un texte sacré mais dont il convient de considérer comment, dans sa démarche générale, il est en contrepoint radical avec ce que certain-es prétendent qu'est "la" position marxiste sur les questions nationales. Il reste ensuite à évaluer où réside toujours son actualité malgré une situation politique et sociale, en Catalogne et dans l'Etat espagnol qui, aujourd'hui, a peuà voir avec ce qui prévalait alors.

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 […] Les mouvements nationaux jouent un rôle de premier plan dans le développement de la révolution démocratico-bourgeoise, ils entraînent dans la lutte des masses immenses et constituent un facteur révolutionnaire très puissant que le prolétariat ne peut pas ne pas prendre en compte, surtout dans des pays comme le nôtre, où cette révolution n'a pas encore eu lieu. Tourner le dos à ces mouvements, adopter une attitude d'indifférence envers eux, c'est faire le jeu du nationalisme oppresseur et réactionnaire, malgré les tentatives pour occulter une telle attitude derrière la façade de l'internationalisme. La position du prolétariat doit être, à ce propos, claire et concrète et s'articuler à l'objectif de resserrer les liens entre les ouvriers des différentes nations qui forment l'Etat et d'impulser la révolution pour qu'elle aille de l'avant. […]

Le prolétariat, par sa nature et par la mission que l'histoire lui assigne, est appelé à réaliser ce que ni la grande bourgeoisie ni la petite ne sont capables de faire : la révolution démocratico-bourgeoise. Il est le seul, par conséquent, à pouvoir résoudre radicalement le problème national. Mais, pour cela, il importe qu'il adopte une attitude claire et définie face à lui. La tradition du marxisme lui propose, en ce sens, une orientation précise.

Marx et Engels ont souligné maintes fois le rôle progressiste des mouvements d'émancipation nationale et, plus particulièrement,  l'immense importance de la lutte de la Pologne et de l'Irlande. L'indifférence envers ces mouvements représentait, à leur yeux, un appui direct au chauvinisme oppresseur qui est à la source du pouvoir de classe de la bourgeoisie de la nation dominante. (...) Marx affirmait que "la victoire du prolétariat sur la bourgeoisie est en même temps le signal de l'émancipation de toutes les nations opprimées". […]

Le mouvement national catalan, par son contenu et par la participation des masses populaires, est, à l'heure actuelle, un facteur révolutionnaire de premier ordre, qui contribue puissamment, avec le mouvement ouvrier, à contenir l'avancée victorieuse de la réaction. D'où l'on déduit clairement quelle est l'attitude que doit adopter à son endroit le prolétariat révolutionnaire :

1/ un soutien actif au mouvement d'émancipation nationale de la Catalogne, en opposition énergique à toute tentative de la réaction pour l'attaquer.

2/ Une défense du droit indiscutable de la Catalogne à disposer librement de son destin, sans que l'on exclue son droit à se séparer de l'Etat espagnol, si telle est sa volonté.

3/ La prise en considération que la proclamation de la République catalane est un acte d'une énorme importance révolutionnaire.

4/ Se saisir du drapeau de la République catalane pour déplacer de la direction du mouvement la petite bourgeoisie indécise et portée à capituler, qui prépare le terrain de la victoire de la contre-révolution; pour faire aussi avec la Catalogne émancipée du joug espagnol le premier pas vers l'Union des Républiques Socialistes Ibériques.


Traduction de l'espagnol par NPA 34.

Le texte intégral en espagnol

Pour en savoir plus sur l'assassinat d'Andrés Nin, le documentaire (en espagnol) qui a fait définitivement le point Operación Nikolai. El secuestro y asesinato de Nin (1992) M. D. Genovès