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Puigdemont renonce "provisoirement" à la présidence de la Catalogne
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Réfugié à Bruxelles, l’ancien dirigeant de la région autonome semble bien décidé à demeurer le trublion de la politique espagnole et le héraut de l’indépendance.
Est-ce une preuve de réalisme politique ou une nouvelle stratégie de confrontation avec le gouvernement espagnol ? L’ancien président de la Catalogne, Carles Puigdemont, destitué par Madrid le 26 octobre 2017 après la mise sous tutelle de la région rebelle, a annoncé, jeudi 1er mars, dans un discours filmé et diffusé sur les réseaux sociaux, qu’il renonce « provisoirement » à briguer la présidence de la Généralité (l’exécutif catalan).
Mais, dans le même temps, il a précisé que sa formation, Junts per Catalunya (Ensemble pour la Catalogne), présentera à sa place la candidature de Jordi Sanchez, président de l’association indépendantiste ANC et numéro deux sur sa liste, actuellement… en prison préventive. Incarcéré depuis le 16 octobre 2017, il est accusé de « sédition » par la justice espagnole.
Installé en Belgique depuis le 30 octobre 2017, afin d’éviter les poursuites judiciaires pour « rébellion, sédition et malversation de fonds publics » engagées en Espagne à son encontre pour sa tentative de sécession avortée, M. Puigdemont semble pourtant bien décidé à demeurer le trublion de la politique espagnole et le héraut de l’indépendance catalane.
Parlement catalan paralysé
Jusque-là, il avait maintenu son intention de reprendre la tête de la Généralité. Quitte à gouverner la région à distance, de Bruxelles. Mais ce souhait a été contrecarré par le Tribunal constitutionnel espagnol, saisi par Madrid, qui a obligé le président du Parlement catalan, l’indépendantiste de la Gauche républicaine (ERC) Roger Torrent, à suspendre sine die la session d’investiture du 30 janvier, afin d’éviter de possibles poursuites. Depuis cette date, le Parlement de Catalogne était paralysé.
Un mois plus tard, sous la pression d’ERC et de membres de son parti, M. Puigdemont a donc finalement accepté de faire un pas en arrière. Mais sous conditions. En échange, quelques heures plus tôt, il a obtenu la reconnaissance symbolique de sa légitimité. Jeudi, les indépendantistes ont en effet voté au Parlement catalan une résolution rejetant « la destitution illégale et illégitime » de M. Puigdemont et réaffirmant le soutien majoritaire de la Chambre régionale à son égard. Enfin et surtout, il entend maintenir un certain contrôle sur la politique de la région autonome.
Bien que M. Puigdemont ait assuré que, grâce à son retrait, « Madrid n’aura aucune excuse pour maintenir l’occupation de nos institutions » le choix de Jordi Sanchez pour le remplacer semble au contraire destiné à maintenir le blocage.
Autorisation de sortie
Afin de participer au débat et vote d’investiture, M. Sanchez devra en effet demander une autorisation de sortie au juge du Tribunal suprême, Pablo Llarena, afin de se rendre au Parlement. Or le magistrat la lui a déjà refusée ces derniers mois, lorsqu’il a voulu assister à la session de constitution de la Chambre régionale, puis au débat d’investiture de M. Puidgdemont, finalement suspendu du fait de possibles risques de récidive.
Malgré les critiques d’avocats, d’intellectuels et d’organisations – dont Amnesty International Espagne –, sur la durée de la détention provisoire, les possibilités d’une remise en liberté semblent donc limitées.
Dans ces conditions, le gouvernement espagnol lèvera-t-il la mise sous tutelle de la Catalogne ? Rien n’est moins sûr. Le porte-parole du gouvernement, Iñigo Mendez de Vigo, a en effet rappelé, le 28 février, que celle-ci est prévue jusqu’à ce qu’il y ait dans la région autonome « un gouvernement constitué légalement » et « avec pleine capacité d’exercice. » Ce qui serait « difficile » si les indépendantistes choisissent « un monsieur qui est à disposition judiciaire et en prison », a-t-il précisé en référence à M. Sanchez, dont la possible candidature avait déjà fuité dans la presse.
Plainte contre l’Etat
De plus, la candidature de l’ancien président de l’ANC fait grincer d’autres dents. « Les indépendantistes ne cherchent pas un président de la Généralité, mais une manière de prolonger les embrouilles et le processus indépendantiste, pour ne pas faire face à la réalité, qui est qu’ils n’ont pas le soutien international, ni la majorité sociale ni la couverture légale, ni la raison avec eux… », a réagi la porte-parole du parti libéral Ciudadanos, Inès Arrimadas, arrivée en tête des élections du 21 décembre 2017.
« L’investiture de Jordi Sanchez (…) n’est pas la façon la plus rapide de récupérer l’autonomie du gouvernement catalan. Vous croyez qu’ainsi vous boycottez l’Etat, mais vous boycottez les citoyens de Catalogne, a de son côté lancé aux indépendantistes le chef de file de la formation de la gauche alternative En Comu-Podem, Xavier Domenech. Vous avez la majorité pour gouverner, pas pour proclamer l’indépendance. »
M. Puigdemont se dit quant à lui bien décidé à faire vivre la flamme de la « République catalane » proclamée le 26 octobre 2017 au Parlement régional. Pour cela, « dans les prochains jours », il convoquera « les [députés] à une réunion solennelle pour impulser une nouvelle étape, et former le Conseil de la République, pour qu’il conduise au chemin de l’indépendance effective. » Son objectif est que ce « Conseil », qu’il entend présider, constitue « l’Etat libre » de Catalogne « en exil » et travaille « en étroite collaboration avec le gouvernement de l’intérieur », celui de Barcelone, pour mener un « processus constituant. » Une idée qualifiée de « démente » par le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy.
M. Puigdemont a enfin annoncé qu’une « équipe d’avocats internationaux » a présenté en son nom une plainte contre l’Etat espagnol devant le comité des droits de l’Homme des Nations Unies pour violation du droit à l’autodétermination des peuples, des droits d’opinion et de participation politique. Avant de conclure, le regard décidé, sur un ton de défi : « Que ce soit clair pour tout le monde. Je ne capitulerai pas, je ne renoncerai pas, je ne me retirerai pas… »