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Nicaragua : le recul du pouvoir après le massacre

Nicaragua

Lien publiée le 23 avril 2018

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://www.liberation.fr/planete/2018/04/23/nicaragua-le-recul-du-pouvoir-apres-le-massacre_1645347

Le bilan d'une trentaine de morts lors de manifestations contraint le président Daniel Ortega à renoncer à sa réforme de la Sécurité sociale.

Après une vague de mécontentement qui a provoqué en cinq jours la mort d’au moins trente personnes, le président du Nicaragua, Daniel Ortega, a renoncé dimanche à sa réforme des retraites. Les manifestants protestaient contre un plan d’augmentation de contributions sociales. Les troubles, accompagnés de pillages, ont touché tout le pays et sont les plus graves depuis l’arrivée au pouvoir du président sandiniste (socialiste) il y a onze ans.

«Nous devons rétablir l’ordre, nous ne pouvons pas permettre que s’imposent le chaos, le crime, les pillages», a déclaré le Président devant une délégation du patronat, comparant les manifestants aux gangs criminels et sans faire mention du nombre de morts. La réforme des retraites visait, sur recommandation du Fonds monétaire international, à réduire le déficit de la sécurité sociale. Elle imposait une baisse de 5% du montant des retraites, ainsi qu’une hausse des cotisations des salariés et des employeurs. Le plan était censé rapporter au moins 200 millions d’euros par an aux caisses de l’Etat.

Balle dans la tête d'un journaliste

Les manifestations ont été durement réprimées par la police antiémeutes et par des turbas, groupes de militants du Front sandiniste au pouvoir, organisés en milices. Parmi les morts figure le journaliste Angel Eduardo Gahona, atteint d’une balle dans la tête alors qu’il transmettait sur Facebook Live un défilé à Bluefields, sur la côte atlantique du pays. La presse a décrit lundi une descente de police dans l’université polytechnique de Managua, sans pouvoir confirmer la mort d’un jeune homme annoncée par les étudiants. La veille, selon un communiqué officiel, un policier de 33 ans avait été tué par un coup de feu dans le même secteur.

L’ampleur du mouvement de protestation dépasse largement la réforme des retraites. «Nous nous battons non seulement pour l’INSS [Institut national de la sécurité sociale], mais pour toutes les années de pillage de la population par le régime sandiniste», a confié un étudiant d’ingénierie de Managua à l’AFP. En novembre 2016, les conditions de la réélection de Daniel Ortega avaient été contestées dans le pays comme à l’étranger. Pour briguer un nouveau mandat, l’ancien guérillero (déjà président entre 1985 et 1990) avait modifié la Constitution et invalidé sous divers prétextes les candidatures des principaux opposants.

Grand bazar ésotérique

Mais c’est la vice-présidente et première dame qui avait polarisé la colère de nombreux Nicaraguayens. Rosario Murillo a toujours exercé une influence importante sur son époux Daniel Ortega. Avec ses chemisiers bariolés et ses colifichets hippies, elle abreuve chaque semaine ses compatriotes de discours fumeux, grand bazar ésotérique qui brasse «harmonie cosmique» et philosophies pseudo-orientales. La population l’a surnommé «la chamuca» : la sorcière, ou la diablesse.

Le monde intellectuel, longtemps soutien du sandinisme, lui a progressivement tourné le dos. La romancière Gioconda Belli a exprimé vendredi sur Twitter : «Je suis nicaraguayenne, sandiniste, et je soutiens ce combat. […] Le Nicaragua ce n’est pas un couple, c’est nous tous.» Quant à Sergio Ramirez, compagnon de lutte d’Ortega et ancien ministre sandiniste devenu écrivain, il recevait lundi en Espagne le prix Cervantes, considéré comme le Nobel des lettres hispaniques. L’auteur d’Il pleut sur Managua a dédié sa récompense aux «Nicaraguayens assassinés alors qu’ils demandent justice».

Lundi, les rues de Managua étaient jonchées de débris. Les habitants se pressaient vers les magasins et supermarchés pour constituer des stocks de provisions, et les files d’attente s’allongeaient devant les stations d’essence.

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http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2018/04/23/nicaragua-le-president-annule-la-reforme-des-retraites-a-l-origine-de-manifestations-meurtrieres_5289108_3222.html

Cette réforme, dénoncée par une vague de manifestations, prévoyait de diminuer de 5 % le montant des retraites afin de réduire le déficit de la sécurité sociale.

Le Nicaragua s’enfonce dans le chaos, au cinquième jour d’une vague de protestations sans précédent contre le gouvernement. Dimanche 22 avril, le président Daniel Ortega a annulé une réforme contestée des retraites, qui a provoqué des affrontements violents entre manifestants et forces de l’ordre, faisant au moins 28 morts. Mais la répression policière a transformé la contestation en rébellion inédite contre le régime de l’ancien guérillero sandiniste.

Imposée par un décret présidentiel, la réforme visait à augmenter les contributions des employeurs et des salariés pour réduire le déficit de la Sécurité sociale (76 millions de dollars). La baisse de 5 % du montant des retraites a déclenché, depuis mercredi 18 avril, une série de manifestations, durement réprimées par la police et les groupes de choc du Front sandiniste de libération nationale (FSLN, au pouvoir). Dimanche, M. Ortega a reconnu que ces mesures, prises sans concertation, n’étaient pas « viables » et avaient créé une « situation dramatique ».

Depuis cinq jours, les rues de la capitale, Managua, sont jonchées de débris et bloquées par des barricades alors que des bâtiments publics ont été mis à sac et des magasins pillés. Les manifestations se sont poursuivies, dimanche, dans plusieurs villes, dont Managua et Granada (ouest), où l’armée a été déployée par le gouvernement, qui accuse les manifestants d’être responsables des saccages.

« Usage excessif de la force »

« L’annulation de la réforme n’arrêtera pas le mouvement car Ortega est allé trop loin dans la répression », assure un étudiant de l’Université polytechnique du Nicaragua (Upoli) qui veut garder l’anonymat par peur des représailles. Dimanche soir, une nouvelle agression armée de la police devant l’Upoli, un des foyers de la contestation à Managua, aurait fait quatre morts, selon les manifestants. Parmi les 24 décès, comptabilisés samedi par le Centre nicaraguayen des droits de l’homme, figurent des étudiants mais aussi un policier et des sympathisants du FSLN, accusés d’attaquer les manifestants.

« Le gouvernement tente de censurer la presse par la force », fustige un journaliste indépendant qui se sent menacé depuis qu’un caméraman nicaraguayen a été tué par balles, samedi, dans la ville de Bluefields (est) alors qu’il couvrait une manifestation. Une douzaine de journalistes auraient été agressés par les forces de l’ordre. Trois jours plus tôt, l’Etat bloquait la diffusion des deux uniques chaînes de télévision indépendantes.

« Nous exigeons la destitution de ce président autoritaire et corrompu », clame une productrice de programmes télévisés, engagée dans la contestation. Un des piliers du régime de M. Ortega, qui compte quatre mandats présidentiels (1985-1990 et 2007-2022), reposait sur son alliance avec le Conseil supérieur du secteur privé (Cosep), au nom de la stabilité économique. Mais la levée de boucliers des patrons, qui conditionnent le dialogue proposé par le président à la fin des violences policières, a déstabilisé le gouvernement. Ce dernier a aussi été surpris par la mobilisation des étudiants d’universités publiques, autrefois acquises au FSLN.

La répression a généré l’indignation d’autres secteurs, dont l’Eglise catholique, qui soutiennent les manifestants en organisant des collectes de vivres dans plusieurs villes. Dimanche, les Etats-Unis ont aussi condamné « l’usage excessif de la force » par les autorités.

Acculé, M. Ortega fait face à des Nicaraguayens déjà excédés par la hausse des tarifs des carburants et la baisse des aides sociales, liées à la réduction des subsides du Venezuela. Dimanche soir, le Nicaragua était plongé dans l’incertitude alors qu’une nouvelle manifestation pacifique est prévue, lundi à Managua, à l’appel du Cosep, après les troubles les plus violents depuis le retour au pouvoir de M. Ortega onze ans plus tôt. Jusqu’où ira la mobilisation contre la dérive répressive de l’ancien guérillero, accusé par ses opposants d’être tombé dans les travers autoritaires du dictateur, Anastasio Somoza (1967-1972 et 1974-1979), que M. Ortega avait combattu dans sa jeunesse ?