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Madrid a besoin maintenant de l’Unité populaire
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https://alencontre.org/europe/etat-espagnol-madrid-a-besoin-maintenant-de-lunite-populaire.html
Par Lorena Cabrerizo et Manuel Garí
L’actuelle situation politique madrilène ne soulève pas l’enthousiasme de la majorité sociale et des forces du changement. Le 2 mai 2018, divers sondages portant sur les intentions de vote pour le législatif de la Communauté de Madrid ont été publiés. Ils sont franchement préoccupants. Les chefs de la «démoscopie» [terme désignant le milieu des «sondeurs» d’opinion] situent Podemos en quatrième position, en queue, Ciudadanos en hausse, un PSOE qui stagne mais qui maintient son hégémonie électorale sur la gauche et un PP qui, malgré son déclin [1], fait montre d’une grande capacité de résilience. La formation violette [Podemos] apparaît sans relief ni projet, vivant un état d’urgence.
Il faut toutefois souligner, comme contrepoint à l’impasse institutionnelle, de l’apparition de résistances, certes moléculaire mais persistantes, au sein d’importantes entreprises, parmi les étudiant·e·s qui se sont mobilisés face au master du mensonge [allusion au master douteux obtenu par C. Cifuentes, députée à l’Assemblée de Madrid] ou encore les retraité·e·s qui manifestent une fermeté exemplaire [contre des diminutions drastiques des pensions]. Un élément central du moment reste les mobilisations de femmes, le mouvement féministe, qui a émergé avec force, marquant l’agenda politique sur des thèmes importants.
Podemos enfermé sur lui-même
En pleine crise Cifuentes et dans un contexte de mobilisations populaires croissantes, la direction de Podemos n’a pas centré toutes ses forces dans la bataille contre la corruption, le machisme institutionnel, les politiques néolibérales du gouvernement régional – menées en syntonie avec l’Etat – et l’attitude de Ciudadanos, parti-béquille du PP et candidat à en siphonner les suffrages. Au lieu de cela, elle a lancé l’organisation dans un processus interne de primaires visant à revalider dans les urnes le candidat désigné par le secrétaire général [Pablo Iglesias] pour une échéance électorale qui aura lieu dans plusieurs mois [sur ce sujet, voir cet article].
Loin de parler des questions qui intéressent la population, le coup de maître des politologues de salon [allusion ironique aux cercles dirigeants de Podemos] a consisté à ouvrir une compétition interne pour les postes sur une future liste électorale; compétition bien éloignée des préoccupations et intérêts actuels de la majorité sociale.
Les derniers mouvements qui ont traversé Podemos dans la Communauté de Madrid sont déjà connus. Suite à une semaine de crise exposée aux yeux du public, au cœur de l’épisode Bescansa, Iñigo Errejón et Ramón Espinar, avec l’aval de Pablo Iglesias, mettent en scène un accord de liste commune visant à court-circuiter la lutte ouverte entre les deux fractions [2]. Un accord précipité et par en haut, sans programme politique, avec un discours visant à séduire les électeurs de centre-gauche et une perspective stratégique limitée à co-gouverner avec le PSOE [à l’instar de la participation à l’exécutif de la Communauté de Castille-La Manche] ainsi qu’à n’offrir pas même le retour à un ordre qui n’a jamais été tel pour les classes populaires.
La liste présentée par l’appareil aux primaires, dont Errejón est la tête de liste, est à la fois un symptôme de la crise d’un modèle et une déclaration d’intention: c’est une candidature d’appareil pure. La majorité des candidats de la liste sont des professionnels de la politique et nombre d’entre eux n’ont pas exercé une profession auparavant. Presque tous travaillent pour Podemos, qu’ils soient conseillers municipaux, députés ou autres. Ils présentent en outre une forte homogénéité en termes de génération et de couche sociale. Face à cela, il convient de s’interroger: combien proviennent ou sont-ils liés à des mouvements sociaux? Combien représentent la fameuse société civile? Quelle a été leur participation aux luttes?
La liste met en évidence l’établissement d’une délimitation définitive envers ce qui se passe en dehors du monde de Podemos. Ce qui est d’ailleurs perçu comme quelque chose d’extérieur par d’amples secteurs d’activistes sociaux. Lors d’une discussion récente avec des syndicalistes sur cette question, on faisait souvent référence à Podemos comme ce qui se passe en son sein.
Il est possible qu’un grand nombre de personnes votent encore Podemos, la formation est en effet l’option électorale de larges couches des classes laborieuses, mais ils estiment que ce qui se passe à l’intérieur ne leur appartient plus. L’enchantement a été rompu, c’est la fin de la période d’amour.
On trouve des personnes de valeur sur cette liste, mais plutôt que de critiquer des volontés individuelles, il est temps d’engager une réflexion de fond pour ne pas en rester aux symptômes. Car c’est un modèle politico-organisationnel qui est à l’origine d’une liste de ce type, éloignée du mouvement réel. Au début, les primaires de Podemos avaient pour objectif de rassembler et d’agréger des secteurs sociaux au champ politique; actuellement, elles ont pour seules fonctions de ratifier plébiscitairement les propositions de l’appareil et d’engendrer la désaffection.
Déficit démocratique
Le système des primaires qui s’est imposé n’est pas démocratique du fait qu’il ne respecte pas le pluralisme. Il ne permet pas la représentation réelle au sein des organes de direction de la volonté de l’organisation. Progressivement, les primaires se sont transformées en un rituel sans débat politique dont l’objet consiste à discipliner les secteurs critiques de Podemos.
Le système Desborda [qui détermine les règles électorales au sein de l’organisation] qui sera appliqué à Madrid surreprésente l’option qui a reçu le plus grand nombre de suffrages et pénalise celle qui ne l’emporte pas. Le principe de proportionnalité n’est pas respecté. Les règles sont conçues de façon à contraindre les secteurs critiques à négocier, les forçant à s’intégrer [à d’autres listes] s’ils souhaitent rester en lice en échange de la renonciation à leurs propositions ou à concourir dans un système qui, après une semaine d’affrontements factice [fin avril 2018], aboutit à leur liquidation politique une année avant les élections. Si les secteurs critiques avaient accepté le système proposé, ils auraient alors accepté un cadre qui, même en obtenant environ 30% des suffrages, les aurait transformés en acteur marginal de la politique madrilène.
Des propositions ont été formulées par la candidature Errejón-Espinar afin de permettre l’intégration (subalterne) de certaines personnes (dans une proportion moindre que la réalité de ce courant requière au sein de l’organisation) du secteur Podemos en Movimiento. Accepter ces postes sans avoir même débattu du programme ni même soumettre à la discussion un projet politique étant absolument inacceptable pour un secteur […].
Une expérience de longue haleine face à des accords de bureau
Anticapitalistas et d’autres secteurs ont tenté une série de formules visant à démocratiser Podemos ainsi qu’à éviter des affrontements dignes de Caïn et Abel, cherchant à ouvrir l’organisation à d’autres secteurs avec générosité et flexibilité. Ils ont participé aux divers processus internes autant en présentant des listes propres qu’en établissant des accords; en plaçant dans les deux cas au premier plan l’orientation politique, la clarté, la publicité [le caractère public des discussions] et la transparence. Cela en étant fidèles à l’esprit qui inspira le 15-M et la création même de Podemos. Malheureusement, la vie interne de Podemos n’a pas suivi cette voie.
Pablo Iglesias et Inigo Errejon
Il suffit de mentionner deux exemples. Il y a peu, les partisans d’Errejón à Madrid – qui avaient perdu l’assemblée citoyenne régionale [l’un des organes décisionnels, de 62 membres] – ont conclu un accord avec Ramón Espinar afin d’imprimer un virage à droite au Podemos de la Communauté de Madrid. Cet accord, conclu en opposition avec ce qu’avaient adopté par les adhérent·e·s, a culminé par la liquidation du secteur anticapitaliste des organes internes puisque ce dernier représentait un «obstacle». Souvenons-nous également de l’expérience du deuxième congrès de Vista Alegre [qui s’est tenu à Madrid en février 2017], au cours duquel le secteur représenté par Errejón s’était fait le champion de la démocratie interne alors que le secteur regroupé autour de la figure de Pablo Iglesias défendait la création de contre-pouvoirs, c’est-à-dire, dans les deux cas, une politique de congrès qui reprenait à son compte formellement les propositions formulées par le courant anticapitaliste. Ceux qui défendaient la démocratie interne au sein de l’Assemblée citoyenne au niveau de l’Etat ont abandonné leurs propositions de démocratisation dans le processus madrilène, en échange de quoi Iglesias soutient Iñigo Errejón comme tête d’affiche [y compris au sens strict, son visage figurant sur les logos]. De son côté, une fois soldées les démarches du congrès, le «pablisme» est retourné à une logique politique ne rompant pas avec le système. Donde dije digo, digo Diego [impossible de reproduire cette formule sous forme d’allitération en français; des traducteurs proposent: là où j’ai dit «je dis» (jeudi), je dis dimanche ou Si je l’ai dit, je m’en dédis].
La décision adoptée par Podemos en Movimiento à Madrid, courant auquel appartient Anticapitalistas, ne peut être isolée d’une trajectoire et d’une conjoncture. L’appréciation au sein de la majorité de ces secteurs repose sur l’idée que la régénération, l’ouverture et le changement de cap d’organisations politiques telles que Podemos ne se produiront pas à la suite d’une évolution strictement interne, ni même depuis l’intérieur. Il est indispensable que le contexte [social, politique, les luttes, etc.] exerce une pression et motive un tel changement.
Cette appréciation n’est pas fondée sur des questions morales (elles sont ici politiques), ni sur une volonté d’être (la lutte des postes étant pour d’autres). De fait, au sein de la majorité de ces secteurs de base et parmi ses activistes, existe une évaluation négative des résultats obtenus au sein de la politique institutionnelle ainsi que du rôle joué par les partis et les candidatures du changement [dans certaines communautés autonomes ou à la tête de villes comme Barcelone ou Madrid].
Une camarade expérimentée exprimait cela avec sincérité lors d’une assemblée, lorsqu’elle affirmait qu’il n’était agréable pour personne d’être, au sein des mouvements sociaux, organiquement lié à Podemos. Cette affirmation ne peut être généralisée et ses manifestations ne sont pas identiques selon les mouvements et les organisations. Podemos a perdu le contact avec les secteurs qui défendent des positions plus combatives au sein du mouvement, mais il a renforcé ses rapports avec la gauche traditionnelle, notamment avec les grands syndicats.
Ce n’est qu’en tenant compte de ces expériences, sans en citer d’autres, que l’on peut comprendre la décision des secteurs critiques de ne pas participer au vote ni de conclure des accords pour les primaires convoquées – en hâte et à contretemps – à Madrid. Il semble que les courants majoritaires au sein de la direction de Podemos ne savent pas faire les choses autrement.
Quo vadis, Podemos?
La question est, aspect ancien en politique, que pour engager certains changements dans l’orientation politique visant à la conformation d’un parti pour le rendre acceptable par le régime, il est nécessaire d’exercer un contrôle intérieur condamnant au silence les voix dissidentes. Il s’agit là d’un changement structurel au sein de Podemos: une organisation qui dispose d’un soutien électoral, d’une structuration limitée (remplacée par le pouvoir omniprésent de la direction et le règne des règlements), l’éviscération interne [de tout débat], des liens sociaux faibles ainsi que d’un modèle toujours moins démocratique.
A cela s’ajoute une fermeture envers les secteurs les plus dynamiques et radicaux, la social-démocratisationde ses propositions politiques, l’abandon d’axes programmatiques aussi fondamentaux que les nationalisations des secteurs stratégiques de l’économie, la désobéissance face à l’austérité (à l’instar de ce qui s’est passé à la municipalité de Madrid, suite à l’acceptation du Plan économico-financier et la destitution de Carlos Sánchez Mato [économiste, responsable des finances de la ville jusqu’en décembre 2017]) ou encore ce qui a été sa marque identitaire la plus importante lors de sa fondation: la rupture avec le régime de 1978 et la mise en avant d’une perspective constituante.
Avec une politique dirigée vers les classes moyennes, l’actuel bloc du changement n’établit pas de rapports avec les secteurs précarisés de la société. Manquent alors [dans le projet de Podemos] ceux qui sont «restés en arrière», soit un pourcentage énorme de la population pour lequel le début de la sortie de crise n’a absolument pas signifié une amélioration de ses conditions d’existence.
Alors que Ciudadanos peut faire appel à la démagogie raciste et national-libérale pour établir des liens avec des fractions de ce secteur, une force qui se situe à gauche ne peut le faire qu’en investissant dans l’organisation, encourageant l’auto-organisation, en engageant un travail concret de longue à haleine. Que l’on trouve des tables de propagande de Ciudadanos dans le quartier populaire madrilène de Vallecas sans qu’il ne se passe rien n’est que le prélude d’une défaite assurée sur le plan électoral. Aucun discours, aucune minute de présence à la télévision ni les articles dans la presse progressiste ne nous sauvera du monstre orange [couleur de Ciudadanos].
Les prémisses de l’unité populaire
La décision d’Anticapitalistas et de Podemos en Movimiento de ne pas se présenter aux primaires peut se comprendre exclusivement comme une manœuvre offensive. Il s’agit de changer de cadre, d’en proposer un autre, fondé sur l’expérience réelle du mouvement. La proposition est très simple, elle n’a d’autre passé que d’autres de ce type qui ont fonctionné.
Il s’agit d’encourager à la création et de proposer un cadre unitaire et démocratique englobant tous les acteurs. Des primaires plurielles doivent être conjuguées à la tenue d’assemblées, au sein desquelles les sujets sociaux actifs sur le terrain définissent les lignes programmatiques les plus à même de combattre le néolibéralisme dans la communauté de Madrid. L’objectif central de ce geste consiste à engager un processus empêchant la fermeture par le haut de Podemos ou un autre accord des bouteilles [allusion au «toast» porté, le 9 mai 2016, par le dirigeant d’Izquierda Unida, Alberto Garzon, et Pablo Iglesias à l’issue de la conclusion d’une liste électorale commune pour les législatives de juin] entre Podemos et IU, incapable d’engendrer une dynamique d’élargissement à la base.
Actuellement, IU de la Communauté de Madrid a fait montre de fermeté dans la défense d’un processus comportant de telles caractéristiques. Il s’agit là d’une ironie de l’histoire, de celles où le perdant apparent du cycle assume le programme que défendait à l’origine la force hégémonique. Sommes-nous donc face à une idée radicale, extrémiste, des anticapitalistes? Cette proposition serait-elle folle alors qu’elle reprend le genre de processus enthousiasmant qui a permis de remporter la municipalité de la capitale, Ahora Madrid? Rien de cela; il s’agit en revanche d’apprendre des erreurs de cette expérience: le sauveur suprême ne se trouve ni parmi les rois, ni les juges, ni les tribuns [allusion au début du deuxième couplet de l’Internationale en castillan].
Afin de débloquer une situation politique dont le risque est de s’aggraver, afin d’établir une ligne de résistance et d’une progression possible favorable à la majorité sociale, une force comme Anticapitalistas a pour obligation de défendre ce qu’elle estime être le plus correct pour le mouvement à chaque instant. Elle a pour obligation d’encourager, de contribuer à aller de l’avant. C’est ce qu’elle a fait lorsque des dirigeants importants de Podemos baptisaient IU de schtroumpf grognons; elle défendait que l’accord était positif pour la population laborieuse et finalement IU a cessé d’être un adversaire pour devenir un allié. Il en est allé de même lorsqu’elle a défendu un projet municipaliste large au sein d’Ahora Madrid. Dans ces deux cas, c’est la raison qui s’est imposée, malgré le mépris initial.
Ne faisons pas de bêtises!
Alors que Ciudadanos accroît son audience, que le PP est en crise et que la mobilisation est à nouveau au centre (paradoxes de la politique), un projet politique d’ouverture et d’unité est indispensable. La direction de Podemos a la responsabilité de l’impulser, mais les autres secteurs ne peuvent être des acteurs passifs dans une logique de fraction qui n’aboutit qu’à des conflits sans solution ainsi qu’à une véritable perte de temps usant la passion militante et engendrant des dynamiques de repli individuel.
Dans une telle situation, il est logique que des options différentes existent quant à la manière. Seules les pensées totalitaires considèrent que la diversité des opinions est une entrave à l’unité. La tâche des secteurs anticapitalistes et de mouvement n’est pas facile, mais c’est la seule possible face à l’urgence du moment. Il s’agit de remobiliser, patiemment, d’une manière presque moléculaire, les forces sociales qui se tiennent à l’écart ou qui sont étrangères à certaines logiques mais actives socialement, afin d’affirmer que nous voulons un projet dans lequel tout le monde puisse s’intégrer, où tout le monde peut apporter sa contribution à la transformation de la société.
Cela demandera du temps, car la déception est grande: réunions, conversations, alliances, regroupement, tenter de convaincre ceux qui sont partis et faire venir ceux qui restent observateurs, régénérer et redécouvrir des pratiques qui semblaient enterrées. Ce capital politique collectif accumulé par les secteurs critiques (députés et députées, conseillers municipaux, maires, figures publiques) n’est pas un capital qui nous appartient comme quelque chose qu’il faudrait thésauriser, conserver dans un coffre sans bien savoir pourquoi. Ce capital politique doit être au service de processus politiques utiles à la population laborieuse et aux mouvements.
Il n’y a pas d’excuses: sans candidature d’unité populaire à Madrid à même de déborder les logiques des intérêts partidaires, une unité plurielle, fondée sur des primaires démocratiques permettant une représentation diverse et proportionnelle, ouverte à tout le monde et dont le programme soit élaboré grâce à la participation de personnes qui, quotidiennement, luttent pour changer les choses, nous nous retrouverons dans un scénario qui n’avantagera personne. Sauf à Ciudadanos. (Article publié le 12 mai 2018 sur le site ctxt.es; traduction A l’Encontre)
Lorena Cabrerizoet Manuel Garisont économistes et membres d’Anticapitalistas.
____
[1] Le PP est plongé dans des affaires de corruption de grande ampleur ainsi que par divers scandales révélant que plusieurs de ses dirigeants ont bénéficié de titres universitaires «cadeaux», c’est d’ailleurs ce qui a entraîné la démission de la présidente de la Communauté de Madrid, Cristina Cifuantes. (Réd. A l’Encontre)
Carolina Bescansa
[2] Carolina Bescansa, politologue spécialiste des sondages, cofondatrice de Podemos, a exprimé publiquement ses désaccords, à l’automne 2017, sur la manière dont la direction de la formation s’est positionnée dans la «crise catalane». Elle a notamment affirmé qu’il était préférable de s’adresser à tous les Espagnols plutôt qu’aux seuls indépendantistes (sic). En avril, elle a lancé une bombe sur Telegram (application de messagerie cryptée de discussion en direct) en proposant une alliance à Iñigo Errejón pour la répartition des postes au sein de la Communauté de Madrid. Cette manœuvre a ouvert une crise interne dans Podemos, laquelle s’est conjuguée au conflit entre les deux figures Iglesias/Errejón et leurs «courants» respectifs.
Elle s’est refermée – provisoirement – par la marginalisation accrue de Bescansa et un accord visant à présenter une liste commune des deux courants pour les élections à venir, en 2019!, de la Communauté de Madrid. La composante Anticapitalistas a refusé de s’engager dans ce conflit ainsi que de présenter des candidats aux primaires. Il est impossible de résumer (pour ne pas dire de saisir les multiples virages et manœuvres) les tenants et les aboutissants de conflits internes, propres à un petit cercle qui, depuis de longs mois, s’est largement coupé d’une implantation sociale. En effet, la direction de Podemos a fait le choix de construire une organisation «machine de guerre électorale» au prix d’un dépérissement des centaines de cercles implantés dans des quartiers et des localités, ainsi que les cercles organisés par secteurs, qui étaient apparus en 2014. Une fois le cycle électoral refermé (2015-2016), et alors que la percée a été plus modeste qu’espéré, les dynamiques de «cliques» se sont accentuées, s’autonomisant toujours plus vis-à-vis du problème complexe de bâtir une formation qui tente de s’implanter dans la société et répercute dans ses activités des besoins sociaux dans un contexte de crise sociale et institutionnelle – conjuguée à la question catalane – qui se prolonge. L’une des conséquences de cette dynamique a été le passage d’une condamnation du bipartisme PP-PSOE à la recherche d’accords avec le Parti socialiste. Plusieurs articles sur le site alencontre abordent les épisodes de cette évolution. (Réd. A l’Encontre)