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Commission des droits de l’Homme: La France "bafoue les droits fondamentaux" des migrants
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Dans un avis consultatif publié ce mardi 19 juin, la Commission nationale consultative des droits de l'Homme se dit "profondément choquée" par les "violations des droits" des migrants à la frontière franco-italienne.
Le réquisitoire est sévère. Dans un rapport publié ce mardi 19 juin et dévoilé par La Croix , la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) se dit "profondément choquée" par la politique de la France vis-à-vis des migrants à la frontière franco-italienne, estimant que "la République bafoue des droits fondamentaux". Sorti le jour où le projet de loi Asile et immigration doit être discuté au Sénat, le texte martèle pendant une quarantaine de pages que Paris "renonce aux principes d'humanité et se rend même complice de parcours mortels".
Première cible de la CNCDH : les autorités sur place. La Commission épingle très sévèrement les membres de la police aux frontières (PAF), dont elle juge "inquiétante" la "conviction de ne faire qu'appliquer la loi, sans conscience de l'indignité imposée aux personnes migrantes". Les agents frontaliers effectueraient des contrôles au faciès, interrogeant uniquement, d'après les témoignages des associations présentes sur place, les personnes "d'apparence étrangère" : "La CNCDH s'oppose une nouvelle fois aux contrôles discriminatoires, qui (...) constituent une faute lourde pouvant entraîner la responsabilité de l'Etat", note le rapport. Mais au-delà du comportement individuel des agents frontaliers, la République française serait "hors droit" et se rendrait coupable de ne pas respecter ses propres règles d'accueil à la frontière.
En juin 2015, la France a rétabli le contrôle aux frontières et installé des "points de passage autorisés" (PPA). Chaque personne contrôlée sans titre de séjour y est notifiée d'une procédure de "non-admission" et est reconduite en Italie. Or, dans la pratique, la CNCDH "a constaté que les garanties entourant la procédure de non-admission n'étaient pas respectées".Nombre de migrants ne passent pas l'entretien approfondi qui leur est dû. Ils n'ont pas non plus la possibilité de demander le "jour franc qui (leur) permet de disposer de 24 heures" avant leur retour en Italie. Manifestement, les autorités frontalières ayant "indiqué qu'aucune demande d'asile n'avait été déposée à la frontière", ils ne pourraient même pas enclencher la procédure de demande d'asile, remarque le rapport, "ce qui ne peut qu'interroger".
Le délit de solidarité dénoncé
L'organisme note que parmi les migrants qui tentent de passer cette frontière, majoritairement originaires d'Erythrée, d'Afghanistan, du Soudan ou d'Afrique de l'Ouest, se trouvent de nombreux mineurs, "isolés pour une grande partie d'entre eux", qui effectuent des "parcours de plus en plus dangereux à travers les Alpes". La Commission préconise de "cesser tout renvoi immédiat" de ces derniers vers l'Italie, s'indignant : "Alors qu'en principe la minorité est déclarative à la frontière, les mineurs sont questionnés et il leur est demandé de remettre tout document pouvant attester de leur minorité". Certains d'entre eux se sont également vu remettre des formulaires où la case "repartir en Italie immédiatement" était pré-cochée.
LIRE AUSSIL'interdiction de la rétention des migrants mineurs réclamée par le Contrôleur général des prisons
La Commission dénonce en outre "des lieux de privation de liberté improvisés et non respectueux des droits fondamentaux", à l'exemple de celui de Menton Pont-Saint-Louis. Dans ce commissariat comprenant des locaux d'attente "qui offrent des conditions d'accueil très spartiates", les migrants restent coincés dans des "blocs modulaires (...) dépourvus de tout mobilier et même d'électricité". Selon les agents frontaliers, jusqu'à 40 personnes peuvent s'entasser dans ces blocs vétustes, enfermés dans une cour placée sous vidéo-surveillance. La CNCDH réclame leur "fermeture immédiate" et s'indigne de l'hypocrisie des pouvoirs publics qui assurent "qu'il ne s'agit pas officiellement ni d'une privation de liberté, ni d'une rétention", puisque les migrants sont libres… de repartir vers l'Italie quand ils le désirent. Elle déplore "l'inaction de l'Etat" en matière d'accueil, "laissé à la seule générosité des citoyens, parfois même en opposition avec l'Etat". A ce sujet, la CNCDH demande à la puissance publique de mettre un terme au délit de solidarité, pour concentrer ses efforts "dans le renforcement de la capacité d'accueil des personnes migrantes" au lieu de "cibler jusqu'au harcèlement ceux qui leur viennent en aide".
"Aucune politique ne peut justifier de mettre à ce point en danger de mort ou de souffrances extrêmes des êtres humains"
Ce tableau très noir n'est visiblement pas arrivé aux oreilles de l'exécutif. Interrogé sur France 2 ce mardi 19 juin au sujet de la politique migratoire de Donald Trump, qui sépare parents et enfants à la frontière des Etats-Unis et du Mexique, le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux a dépeint la France comme un modèle de vertu en matière d'accueil des migrants : "Nous n'avons pas le même modèle de civilisation. Manifestement nous ne partageons pas certaines valeurs. Ces images évidemment sont choquantes. Et à l'évidence, nous, nous sommes là pour défendre un idéal européen qui est un idéal de paix, de liberté".
Une réponse qui trouve un écho contraire dans le daignostic de la Commission consultative des droits de l'Homme : "La République française semble pourtant sourde aux dangers et aux souffrances que sa politique engendre.La CNCDH rappelle qu'aucune politique ne peut justifier de mettre à ce point en danger de mort ou de souffrances extrêmes des êtres humains".