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Mexique. Les personnages de droite qui accompagnent AMLO
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Par Eliana Gilet
L’alliance du Mouvement national de régénération (Morena) avec le Parti de la rencontre sociale (PES), évangélique [au programme libéral, ce parti a été créé en 2006 par Eric Flores], a déplacé Andrés Manuel Lopez Obrador (AMLO) politiquement à droite. L’accord pour campagne électorale a été annoncé publiquement à la fin décembre 2017. La coalition «Ensemble nous ferons l’histoire» permettra aux PES et au PT (Parti du Travail, d’Alberto Anaya qui a soutenu AMLO depuis les élections de 2006] d’amplifier leur présence institutionnelle, puisqu’ils occuperont la moitié des sièges parlementaires remportés par l’alliance.
En plus de ces figures politiques, d’autres personnalités conservatrices se sont ralliées à la coalition. L’un des premiers à le faire a été l’ancien footballeur Cuauhtemoc Blanco (Cuau), qui est devenu le seul candidat au gouvernement de l’Etat de Morelos [petit Etat au centre du pays] après que l’ancien recteur de l’université d’Etat, Alejandro Vera, qui visait également le poste, a cédé la place au sportif.
En file indienne derrière ledit «Cuau», Morena a été rejoint par des figures telles que Manuel Espino. Ce dernier fut président du PAN [Parti d’action nationale de 2005 à 2007; il en fut écarté suite à ses liens avec la formation plus que conservatrice Desarrollo Humano Integral.] Bien qu’il l’ait nié, il est lié à un groupe d’extrême droite appelé El Yunque [organisation semi-clandestine, catholique intégriste]. Peu de temps après, l’officier à la retraite Julián Leyzaola s’est également joint à Morena. Selon la journaliste Marcela Turati, «son histoire est marquée par 19 dénonciations pour violations des droits de l’homme et 25 enquêtes préliminaires et rapports détaillés devant les autorités de l’Etat et une enquête menée par le Procureur général pour des crimes tels que la torture et l’homicide.» (Hebdomadaire Processo, 18 mai 2018).
Un magnat à la barre
Un autre membre de l’équipe de campagne de López Obrador est Alfonso Romo, un magnat du Nuevo León [Etat du nord-est du Mexique, ayant une frontière avec le Texas], chef du Grupo Pulsar (holding), qui dirige des entreprises dans divers domaines, y compris les OGM. Romo a été une personne clé dans la rédaction du «Projet pour le pays» de López Obrador. C’est candidat qui défend publiquement une position «contre la mafia du pouvoir». Dans un entretien publié cette semaine dans El Heraldo de México, Romo a expliqué que lorsqu’ils ont commencé à travailler ensemble, l’instruction de López Obrador était qu’il devait «construire la confiance», et que c’est pourquoi Romo avait fait «un plan de gouvernement situé au centre, mais qui prenne en compte les oubliés».
Le projet présenté par Romo se concentre sur l’élimination de la corruption, qui permettrait de récupérer l’équivalent de 10 % du PIB et de financer les travaux d’infrastructure et la création d’emplois dont le pays a besoin. López Obrador a approuvé l’analyse selon laquelle la corruption est le vrai mal qui explique l’inégalité. Dans un entretien qu’il a accordé à Televisa, il a déclaré : «Le problème n’est pas que le monde des affaires accumule la richesse et ne la distribue pas. Au Mexique, la principale cause des inégalités est la corruption. L’inégalité monstrueuse que nous avons n’est pas due à l’exploitation par l’entrepreneur des travailleurs, elle l’est peut-être, mais ce n’est pas le facteur déterminant. L’essentiel, c’est que l’inégalité du Mexique a été maintenue et augmentée et qu’elle est monstrueuse à cause de la corruption. Rien n’a fait plus de mal au Mexique que la malhonnêteté, c’est la cause principale de l’inégalité sociale.»
Trois jours avant les élections, lors d’une réunion publique, López Obrador a annoncé que, s’il était élu président, Romo serait son chef de cabinet. Il avait déjà annoncé qui seraient ses ministres à la mi-décembre 2017. Parmi ces désignations, celle du portefeuille de l’éducation, qui a été confiée à Esteban Moctezuma Barragán, responsable de la Fundación Azteca, qui fait partie du conglomérat de médias mexicain TV Azteca, fut une surprise.
Mais le nom le plus inquiétant est probablement celui du futur secrétaire à l’Agriculture: Víctor Villalobos. Les seuls qui ont dénoncé leur présence dans un futur gouvernement Morena furent les militants de Greenpeace. «Notre réaction a été immédiate. Greenpeace est une organisation non partisane, mais non apolitique, et dans ce sens, nous dénonçons les candidats qui ont ou promeuvent des comportements qui détériorent l’environnement et affectent la santé humaine», a déclaré à Brecha María Colin, conseillère juridique de Greenpeace au Mexique.
Transgénique
Victor Villalobos, a expliqué l’avocate – qui est en charge du contentieux des communautés mayas de Campeche et du Yucatan, et qui a réussi au milieu de l’année dernière à faire révoquer le permis de plantation de soja génétiquement modifié de Monsanto — a occupé plusieurs postes gouvernementaux depuis le début de ce siècle. Il a été le premier directeur de la Commission interministérielle sur la Biosécurité des organismes génétiquement modifiés. «Nous avons suivi sa trajectoire pro-transgénique au fil du temps, et notre grande critique contre lui, parmi tant d’autres, est qu’il a permis l’accord appelé le «Tlc transgénique» (TLC : traité de libre commerce] entre le Canada, les Etats-Unis et le Mexique, dans lequel, grâce à un accord régional, une tolérance de 5 % de semences transgéniques est autorisée dans les transferts entre les trois pays», nous a expliqué Maria Colin.
M. Colin a suggéré que le lien entre le candidat López Obrador et Villalobos a probablement été forgé par Alfonso Romo, propriétaire de l’entreprise semencière Seminis, qui l’a vendu en 2003 à un entrepreneur américain, Fox Paine, qui deux ans plus tard a fusionné l’entreprise avec Monsanto.
Depuis 2016, lorsque la cause désignée «demande collective de maïs» a échoué, donc interdisant la plantation de maïs génétiquement modifié au Mexique, le secteur agricole industriel a exercé des pressions pour ouvrir la voie à cette technologie [le maïs constitue la nourriture de base au Mexique; les petits agriculteurs de ce secteur sont déjà étranglés]. Comme le souligne Maria Colin, il y a encore beaucoup de doutes et «il reste à voir si la nomination de Villalobos signifie un feu vert pour les grandes sociétés transnationales qui concentrent le marché de la production de semences, à un moment où leurs progrès au Mexique sont au point mort».
Selon la juriste, «Villalobos fait la promotion de cette technologie depuis de nombreuses années, pourquoi devrait-il soudainement adopté une position différente concerna une politique à l’échelle nationale?» (De Ciudad de Mexico, publié dans l’hebdomadaire Brecha, le 29 juin 2018; traduction A l’Encontre)