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Il faut lire cet écrivain brésilien, fils d’opposant assassiné
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Dans un article du "New York Times", l'écrivain brésilien Marcelo Paiva se souvient des heures sombres de son pays. Pour lui, l'élection de Jair Bolsonaro ne présage rien de bon.
"L'erreur de la dictature a été de torturer sans tuer". Voici ce que Jair Bolsonaro, ancien capitaine de l'armée brésilienne, avait déclaré en 2016. Dimanche 28 octobre 2018, l'homme qui n'a jamais caché son admiration pour la dictature militaire au Brésil (1964-1985), a été élu président du pays avec plus de 55% des voix.
Alors que certains Brésiliens célèbrent cette victoire de l'extrême droite, d'autres y voient une réminiscence d'un passé qu'ils auraient voulu ne jamais voir ressurgir. C'est notamment le cas de l'écrivain brésilien Marcelo Paiva qui raconte, dans un article du "New York Times", à quel point cette période sombre de l'histoire du Brésil a été dévastatrice et tragique pour toute sa famille.
"Un rappel effrayant de notre passé"
Si Marcelo Paiva n'a pas participé à la liesse collective, il en a été le spectateur direct. De sa fenêtre, il raconte avoir notamment aperçu un sympathisant de Jair Bolsonaro brandissant une pancarte sur laquelle étaient inscrits les mots "Ustra lives" ["Ustra vit", NDLR].
En 2016, lors de la destitution de la présidente Dilma Rousseff, Jair Bolsonaro, alors député, avait dédié son vote "à la mémoire de Carlos Alberto Brilhante Ustra", chef de la police politique de 1970 à 1974. Responsable d'au moins 60 morts ou disparitions d'opposants au régime, décédé en 2015, il reste fortement soupçonné de centaines d'autres. Marcelo Paiva écrit :
"C'était un rappel effrayant de notre passé."
L'écrivain brésilien explique que l'ascension de Bolsonaro a été motivée par "la colère et la désillusion" d'un grand nombre de Brésiliens. Il dit :
"Pour beaucoup, peu importe que sa rhétorique incendiaire dénigre les femmes, ainsi que les homosexuels, les Noirs et les autochtones, ou qu'il parle avec nostalgie de la torture et de la dictature. […]
Je pense que les Brésiliens ont oublié ce que signifie être gouverné par une arme à feu."
En 2014, la Commission de la vérité concluait que la dictature militaire au Brésil avait fait au moins 434 victimes. Parmi elles, figure le père de Marcelo Paiva.
"J'avais 11 ans quand mon père a été arrêté"
Le père de Marcelo Paiva était socialiste et membre du congrès de l'Etat de São Paulo. En 1964, lors du coup d'Etat de la junte militaire, il est révoqué et retrouve un travail en tant qu'ingénieur civil. Marcelo se souvient bien du moment où tout a basculé :
"J'avais 11 ans quand il a été arrêté, avec ma mère et ma sœur. C'était une matinée ensoleillée de janvier à Rio de Janeiro, en 1971, et nous nous préparions à nous rendre à la plage de Leblon, qui se trouvait en face de notre maison."
Ce jour-là, six hommes armés de mitraillettes font irruption par la porte de derrière. Très vite, la maison est encerclée. "Le gouvernement avait intercepté des lettres et des documents d'organisations de gauche envoyés à mon père par des dissidents du Chili. Ils pensaient qu'il avait un rôle à jouer […]", raconte l'écrivain.
Dans les minutes qui suivent, le père de Marcelo, alors en maillot de bain, est mené à l'étage pour enfiler des vêtements avant d'être conduit par les militaires qui souhaitent l'interroger. Les autres membres de la famille sont priés de rester assis sur le canapé. Quand Marcelo voit son père franchir le seuil de la porte, il ne se doute pas qu'il ne le reverra jamais.
Des années sans savoir
Pendant près de vingt-quatre heures, les militaires prennent leurs quartiers dans la maison familiale. Puis, ils finissent par conduire la mère et la sœur de Marcelo dans les locaux du DOI-CODI à Rio de Janeiro, l'agence de renseignements chargée d'éliminer les opposants au régime militaire.
"Ma sœur et ma mère ont été harcelées et intimidées. Elles sont restées assises pendant 24 heures, sans nourriture ni eau. Un haut-parleur entonnait 'Jesus Cristo', une chanson de Roberto Carlos, par-dessus les cris d'un homme en train d'être torturé – probablement mon père."
Le lendemain, la sœur de Marcelo est libérée, mais sa mère passera 12 jours dans "une cellule sombre, portant les mêmes vêtements que le jour de son arrestation". Chaque nuit, elle est réveillée par des gardes qui lui hurlent dessus et la somment de regarder des visages d'hommes et de femmes recherchés.
Et aujourd'hui l'écrivain écrit, amer :
"Merci de ne pas l'avoir tuée."
Son père, lui, ne reviendra pas. Des années durant, la famille doit se contenter de rumeurs.
"On disait qu'il avait été tué après avoir été torturé, que son corps avait été découpé en morceaux", écrit Marcelo Paiva. Il faudra attendre 2014 pour que des officiers ayant assisté aux faits soient entendus par le bureau de la procureure générale et que la vérité éclate enfin :
"Il est mort moins de 48 heures après son arrestation. Le procureur a déclaré que les intentions militaires étaient d''infliger un maximum de souffrance physique et mentale dans le but de lui soutirer des informations'. […] Nous ne saurons jamais exactement ce qu'ils lui ont fait."
"Priez pour nous"
En 1988, quand la Constitution citoyenne qui rétablit les droits des peuples autochtones et des Quilombolas, a été approuvée, Marcelo a cru que la page était tournée. Mais aujourd'hui, face à la hausse de la criminalité, des actes homophobes, des violences à l'égard des journalistes, Marcelo s'inquiète.
"La dictature nous a appris l'importance de la démocratie, de la tolérance et de la primauté du droit. Les Brésiliens ne doivent pas être dupes, M. Bolsonaro n'est pas le sauveur dont notre pays a besoin."
Puis il conclut :
"Je pensais que la vie de mon père et les souffrances de ma famille et celles de nombreuses autres étaient un chapitre essentiel pour permettre au Brésil de réfléchir et d'évoluer. Nous n'avons jamais imaginé que notre lutte et notre douleur ne serviraient à rien. Que notre lutte pour le droit de vote serait utilisée pour revenir en arrière. Priez pour nous."
Pour lire le témoignage de Marcelo Paiva publié sur Le New York Times, rendez-vous ici.