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Gilets jaunes et gilets rouges: l’heure de la riposte est arrivée, par Chastaing

Gilets-jaunes

Lien publiée le 1 décembre 2018

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://blogs.mediapart.fr/jean-marc-b/blog/271118/gilets-jaunes-et-gilets-rouges-lheure-de-la-riposte-est-arrivee-par-j-chastaing

La jonction gilets jaunes/gilets rouges n'est pas loin de provoquer la panique tout autant au gouvernement que chez les patrons ou militants d'extrême droite.

27 Novembre 2018- Jacques Chastaing

L’image contient peut-être : 6 personnes, personnes assises

La situation s’accélère.

La durée de la mobilisation des gilets jaunes qui en sont à leur dixième jour de lutte, leur détermination sur les Champs Elysées, le glissement progressif de leurs revendications sur un terrain de plus en plus social, SMIC, CSG, APL, salaires, retraites, pensions, emploi, contrats aidés... face à un gouvernement sourd, fait que certains d'entre eux se mettent à chercher des alliés du côté du mouvement ouvrier organisé.

Cela donne la dynamique du mouvement mais plus largement de la situation elle-même puisque de leur côté, de plus en plus de militants syndicalistes de base ou de structures, CGT comme Solidaires voire FO, appellent à la convergence ou l'unité des gilets jaunes et des gilets rouges dans les blocages ou de manière complémentaire par la grève ou encore en agissant ensemble le 1er décembre.

Ainsi six fédérations CGT et deux de Solidaires, plusieurs UD et un bon nombre d'UL, à ce jour appellent à soutenir, participer ou encore à faire grève en lien avec la mobilisation des gilets jaunes ; des dockers CGT participent à des blocages à Calais ; au Havre nombre de blocages se font ensemble ; à la Raffinerie de la Mède, ce sont les gilets jaunes qui viennent aider au blocage par la grève des militants CGT ; des gilets jaunes applaudissent le cortège des femmes du 24 novembre à Montpellier et bien d'autres jonctions moins médiatisées se font dans de nombreuses villes. De leur côté, des mouvements de lycéens, de degré divers, viennent apporter leur soutien aux gilets jaunes dans 28 villes lors de la semaine du lundi 19 au vendredi 23 novembre.

Le premier tournant global est venu de la direction de la CGT qui jusque là refusait de manifester avec les gilets jaunes pour ne pas se retrouver selon elle aux côtés de partis ou groupes d'extrême droite. Sous la pression des gilets jaunes et de sa base, le 26.11 elle a renoncé à se rendre à la rencontre du gouvernement du 27.11. Elle a donc renoncé – au moins momentanément - à sa politique de collaboration avec le gouvernement sous couvert de dialogue social pour appeler à la mobilisation du 1er décembre tout en précisant dans son communiqué que "quelle que soit la couleur du gilet nos revendications convergent."

Par ailleurs Solidaires explique que si dans un premier temps ils avaient été opposés à manifester aux côtés de militants d'extrême droite, ils ne pouvaient que constater la différence entre le mouvement social profond et l'instrumentalisation que voulaient en faire certains, en souhaitant au final une convergence jaune, verte, rouge...

Enfin un appel déjà large de syndicalistes a vu le jour le 27.11 pour que le mouvement ouvrier emboîte le pas à la colère exprimée par les gilets jaunes.

C'est un premier succès des gilets jaunes.

Cependant l'infléchissement de la politique des directions syndicales révèle un bien plus profond tournant dans la situation sociale.

Avant le 1er décembre

La détermination des gilets jaunes trouvant la sympathie de 80% de la population a exercé une très forte pression sur les salariés eux-mêmes et a redonné espoir et combativité à bien d'entre eux. Ainsi a-t-on pu assister à des grèves et débrayages provoqués par ce regain de mobilisation, chez PSA notamment comme on en n'avait pas vu depuis 1989 à l'usine de Mulhouse, mais aussi actuellement dans la chimie où le taux de grévistes dans la majorité des raffineries à l'appel de la CGT et de FO est très élevé, allant parfois jusqu'à 80%. Cette grève qui dure depuis le 21.11 dans la majorité des raffineries et dans plusieurs centres pétroliers, additionnée aux blocages des gilets jaunes, commence à avoir des effets sur les difficultés d'approvisionnement en carburants dans certaines régions. Cet effet pourrait être amplifié dans les jours qui viennent contribuant ainsi au renforcement du sentiment "c'est le moment" qui commence à se faire jour.

Par ailleurs, la CGT chimie veut à nouveau intensifier et élargir sa lutte le 29 novembre en même temps que la CGT Energie aura également une journée d'action ce jour-là, que les postiers du 92 tenteront peut-être à nouveau d'élargir leur grève à toute l'Ile de France et que les deux syndicats de lycéens UNL appellent les lycéens à la mobilisation les 29 et 30.11. Enfin des mobilisations régionales auront lieu à l'appel des UD CGT le 29.11 en Haute Garonne, dans le Gers et dans le Tarn et Garonne où dans ce dernier département l'UD CGT appelle à une grève générale illimitée à partir du 29.

Enfin, la situation extrêmement tendue continue à la Réunion avec une très forte mobilisation populaire appelée à résister à l'intervention de la gendarmerie et l'appel de l'UGT à la grève générale reconductible en Guyane complètent le tableau d'ensemble.

Le 1er décembre et après : un tournant ?

Enjeux, écueils et dangers

Cette ambiance nouvelle en train de se créer fait que beaucoup de militants espèrent que la mobilisation du 1er décembre, gilets jaunes et gilets rouges, sera un succès suffisamment important pour envisager une suite immédiate et ne pas se limiter à une journée d'action sans suite de plus. Ainsi voit-on un nombre inhabituel de militants syndicalistes se préparer dés maintenant à construire, organiser une suite d'autant que la seule suite qui circule pour le moment dans les tuyaux internes de la CGT serait le 3 février 2019.

Bien sûr, cela ne suffira peut-être pas pour que la jonction gilets jaunes/gilets rouges du 1er décembre soit totale.

L'opposition encore si proche des directions syndicales à se mobiliser aux côtés de ce qu'ils présentaient à tord comme un mouvement manipulé par l'extrême droite et le dégoût d'un certain nombre de militants contre les gestes et les déclarations racistes, sexistes ou homophobes de quelques gilets jaunes, développées et amplifiées à satiété par le gouvernement et la grande presse aux ordres, rendent les réticences ou les prudences encore très présentes.

Par ailleurs le comportement des directions syndicales rend les gilets jaunes méfiants, craignant une récupération.

Si tout ne sera probablement pas accompli le 1er décembre, le mouvement d'unité est amorcé et la pression à l'unité par la suite ne peut que s'amplifier avec d'autant plus de poids que la journée sera réussie.

Ainsi la marche vers un large mouvement d'ensemble, une grève générale à cours ou moyen terme, pourrait être amorcé dans les jours qui viennent.

Globalement, cette tendance à la jonction gilets jaunes/gilets rouges n'est pas loin de provoquer la panique tout autant au gouvernement que chez les patrons ou militants d'extrême droite engagés pour le moment dans le mouvement des gilets jaunes.

Ainsi a-t-on vu une pitoyable intervention de Macron le 27.11 complètement à côté de ce dont témoignent les gilets jaunes, ne sachant pas quoi proposer sinon d'intégrer des représentants des gilets jaunes aux côtés des patrons, des syndicalistes, des associations à des négociations de trois mois pour... quasi rien au final, en tout cas rien qui puisse répondre au cri de colère populaire dénonçant la misère dans la quelle le gouvernement et le patronat les enfonce.

Par ailleurs, on assiste à l'apparition d'une multiplication de porte-paroles auto-proclamés des gilets jaunes, presque tous patrons ou militants de droite ou d'extrême droite, tous pressés d'arrêter ce mouvement qui glisse vers le rouge et qui affiche de plus en plus des revendications ouvrières. Ce qui explique que tous se présentent comme les seuls porte-paroles du mouvement prêts à se précipiter pour les uns dans les négociations du gouvernement ou pour les autres de solliciter une rencontre avec le gouvernement afin de gagner une légitimité nationale, comme le collectif des 8. Leur but à tous est d'arrêter le mouvement.

On perçoit donc bien l'inquiétude des patrons dans cette précipitation à trouver des porte-paroles. Mais on voit aussi le calcul des militants d'extrême droite, qui pour réussir ne peuvent qu'espérer un échec de mouvement, un découragement des gilets jaunes afin qu'il soit alors possible à des démagogues populistes d'expliquer que cet échec est la faute des syndicats qui ne les ont pas soutenus parce qu'ils défendent exclusivement l'aristocratie ouvrière des CDI et fonctionnaires autour de l'unique question des salaires. Ainsi ces démagogues fascisants ou populistes pourraient alors proposer d'exprimer la force des gilets jaunes dans les urnes en créant un "vrai" parti des travailleurs français.

Leur précipitation au rôle de porte-parole exprime ce double calcul : freiner le glissement du mouvement vers le rouge et le récupérer dans les urnes contre la gauche.

Mais contre tous ces calculs, pour le moment, le mouvement continue et il le pourrait bien jusqu'à la période de Noël.

Il nous reste ce temps-là.

Il est alors de la responsabilité des militants ouvriers de tout faire pour que la convergences des gilets rouges et jaunes se fasse dés maintenant avant le 1er décembre, le 1er décembre et après le 1er décembre avec un agenda de luttes autour de revendications ouvrières incluant les salaires et le pouvoir d'achat mais qui ne s'y limitent pas et intègrent toutes les revendications des gilets jaunes qui sont aussi celles des gilets rouges, l'emploi, la protection sociale contre la maladie, la retraite, le chômage, la défense des services publics mais aussi représentent les "petits", petits artisans, commerçants, auto-entrepreneurs, travailleurs indépendants écrasés par le grand capital afin de reprendre globalement tout ce que Macron et les gouvernements avant lui nous ont volé à tous.

L'heure de la riposte est arrivée.

Construisons-là. Nous n'avons pas trop de temps.