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Le référendum d’initiative citoyenne : la solution à la crise démocratique ?

Lien publiée le 15 décembre 2018

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://www.regards.fr/idees/article/le-referendum-d-initiative-citoyenne-la-solution-a-la-crise-democratique

Au-delà des demandes économiques et sociales, les gilets jaunes formulent une profonde critique de la démocratie représentative. Le "RIC" est désormais avancé comme la priorité pour remédier aux faillites institutionnelles.

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C’est vrai, les gilets jaunes se sont dans un premier temps mobilisés et révoltés sur une histoire de hausse des prix du carburant. Et le "pouvoir d’achat" fut, par ricochet, l’une de leurs principales demandes. Ainsi se sont-ils adressés directement à Emmanuel Macron en attendant une réponse de l’Etat – tout en demandant la démission du Président.

Qui aurait cru après tout ça qu’émergerait de cette mobilisation inédite, teintée de jaune fluo, une demande aussi institutionnelle que le Référendum d’Initiative Citoyenne (RIC). La macronie n’imaginait pas une seconde que le peuple français puisse être autant politisé, autant soucieux de ses institutions. Nous même ne l’avions- nous pas oublié ? C’est que, comme le souligne la responsable du programme de La France insoumise Charlotte Girard à Regards« il y a une culture démocratique profondément inscrite dans la population et elle se manifeste d’autant plus dans les moments de crise ».

Force est de constater que depuis plusieurs jours, les gilets jaunes n’ont plus que ce mot à la bouche : RIC. C’était d’ailleurs le cœur du propos de François Verger, récemment converti au mouvement des gilets jaunes, qui était l’invité de #LaMidinale le 13 décembre dernier. Tous, ou presque, évoquent le RIC, parfois à l’excès, comme la bonne solution pour sortir de la crise démocratique dans laquelle nous nous trouvons en France, et plus particulièrement la crise de la démocratie représentative.

Dégagisme 2.0

Les élus ne représentent plus les électeurs. Voilà pour le constat. Les citoyens veulent « reprendre la parole pour décider de ce qui les regarde ». Voilà pour le leitmotiv. Et le RIC porte en lui une force purement politique d’autant plus grande qu’elle est partagée quasi unanimement par les gilets jaunes, et bien au-delà.

Contacté par Regards, le député communiste Pierre Dharréville voit d’un bon œil cette proposition : « Que le peuple lui-même puisse se saisir d’une question et demander à ce qu’une décision soit prise, c’est plutôt une bonne idée ». Il faut dire que cette idée-là a déjà été portée par plusieurs partis, dont le PCF, mais aussi La France insoumise, l’UPR ou encore le RN (ex-FN). Mais le RIC version gilets jaunes repose sur plusieurs volets, que voici :

  • un volet législatif : pour que les citoyens fassent des propositions de loi
  • un volet révocatoire : pour que les citoyens puissent « obtenir, à tout moment, la destitution d’un représentant, d’un élu, d’un ministre, d’un haut fonctionnaire »
  • un volet abrogatoire : pour que les citoyens se prononcent sur « l’abrogation, totale ou partielle, d’un traité, d’une loi »
  • un volet constituant : pour que les citoyens puissent « réviser eux-mêmes leur constitution »

Concrètement, il faudrait réunir un certain nombre de signatures – 700.000 est souvent évoqué – afin de déclencher le processus. Le référendum serait alors organisé à l’échelle nationale dans un délai d’un an, après débats et amendements du Parlement (tous ne s’accordent pas sur ce dernier point).

Sur le site "giletsjaunes.e-monsite.com", le RIC est décrit comme un outil substituant les élus par le peuple « en vue de mettre fin à un système de démocratie représentative et laisser place à un système de démocratie participative ». De même, sur le site Article 3 (qui milite en faveur du RIC), il est clairement affirmé que « cette procédure fait du peuple le législateur en dernier ressort ». Certains poussent même l’idée qu’on pourrait se passer des députés, parce qu’« avec Internet, on peut tous voter par référendum ».

Le plus étonnant – et sans doute faut-il s’en réjouir – dans cette proposition et ce retour de la question démocratique par les gilets jaunes, c’est cette volonté de "repolitisation" du citoyen. Et l’on ne peut que s’incliner devant leur lucidité : la crise économique et sociale ne trouvera pas d’issue sans que soit réglée la crise démocratique et institutionnelle.

Très "Vème République compatible"

Un peuple souverain, seul face à lui-même… ou presque. A lire les différents argumentaires en faveur du RIC, quelque chose saute aux yeux par son absence. C’est que les partisans du RIC ne semblent pas s’inscrire en dehors du cadre de la Vème République. Car s’ils se passent volontiers de tout représentant, le gouvernement et le président de la République restent quant à eux en bonne place.

Pas question donc de changer de République. D’ailleurs, une pétition en faveur du RIC propose d’amender l’article 3 de la Constitution de 1958, qui donnerait alors : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum [d’initiative citoyenne, en toutes matières y compris constitutionnelle et de ratification des traités ; cet article ne peut être modifié que par voie référendaire]. »

Charlotte Girard rappelle qu’il faut « contextualiser cette revendication. Elle est brandie dans un face-à-face entre le peuple et le Président. Il y a une compatibilité extrême avec le césarisme de la Vème république. C’est donc une proposition de circonstance pour répondre à une situation immédiate. »

Doit-on y voir une victoire de l’antiparlementarisme alors que l’Assemblée nationale et le Sénat voient chaque jour leurs maigres pouvoirs se faire raboter par l’exécutif ? Au point que lorsque le chef de l’Etat propose de renforcer encore et toujours ses pouvoirs par le truchement de la diminution du nombre de parlementaires, nombreux sont ceux qui n’y ont rien trouvé à redire. Comme si on s’était collectivement habitué à ce que le Parlement ne soit plus la voix du peuple.

Antiparlementarisme triomphant

Pour Pierre Dharréville, le constat est limpide :

« Il faut voir où est le pouvoir en France : institutionnellement, entre les mains du Président ; dans le réel, entre les mains des grands propriétaires. Si l’on veut s’attaquer aux problèmes de notre démocratie, il faut s’attaquer au pouvoir exorbitant, personnel, monarchique du président de la République, peut-être même discuter le fait d’avoir un Président. Car le cœur du problème, c’est ce pouvoir. »

Et Charlotte Girard d’ajouter que le RIC « est une mesure de démocratie directe qui, prise toute seule, est un antiparlementarisme ». Elle propose de « l’inclure dans un bouquet de mesures institutionnelles qui pondère la démocratie représentative et la démocratie directe. Il faut à la fois rendre plus directe la démocratie – ouvrir des possibilités d’intervention directe du peuple dans la décision – et rendre les élus plus responsables. C’est l’idée du référendum révocatoire. »

Si l’idée même du RIC n’a pas encore convaincu tout le monde, c’est bien le référendum révocatoire qui affiche le plus de réticence. Ainsi, là où le communiste Pierre Dharréville y voit « une démarche plébiscitaire à l’envers », l’insoumise Charlotte Girard juge « primordial » de « réintroduire une responsabilité politique en échange du lien de représentation ». Et cette dernière de développer :

« S’il faut mettre une dose d’impérativité dans le mandat, le référendum révocatoire doit avoir des conditions, par exemple en ne le rendant possible qu’à mi-mandat, en requérant un nombre de pétition assez important comme 20% du corps électoral, etc. »

Dictature du "50% + 1" ?

Sur le site Article 3, on assure que le RIC « relancera l’intérêt des Français pour la politique, les incitera à s’inscrire sur les listes électorales et fera reculer l’abstention ». Mais l’on peut s’interroger : le RIC ne change-t-il pas seulement la périodicité du vote ? Le RIC ne rend-il pas les choses binaires ? Que faire de la proposition des gilets jaunes selon laquelle une loi « avalisée » par le RIC ne peut plus être « remise en cause ». Imaginez maintenant un référendum national "pour ou contre la GPA, la peine de mort, l’avortement, le voile, etc. ?"

Pierre Dharréville tempère quelque peu l’enthousiasme giletjaunien : « Le référendum n’est pas toujours le bon outil, toutes les questions ne se tranchent pas par "oui" ou par "non" », rappelant aussi qu’« on peut avoir les meilleures institutions du monde et prendre les pires décisions ». (Coucou la Suisse !)

« Le RIC n’est pas la panacée, lance Charlotte Girard. La démocratie directe pure ne doit pas être le seul moyen de gouverner. » Magie populaire, parmi les diverses propositions des gilets jaunes, on trouve également la « création d’une Assemblée citoyenne ». Preuve que l’antiparlementarisme n’a peut-être pas complètement gagné la partie, finalement.

En articulant le RIC avec une démocratie réellement représentative, avec une République où les pouvoirs seraient équilibrés, alors peut-être trouverons-nous un système politique s’approchant de l’idéal. Comme le dit Pierre Dharréville : « La politique, ça n’est pas la dictature de la majorité, c’est le respect d’une diversité ». Il n’y a plus qu’à faire la révolution !