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Congo: Fayulu contre-attaqu

Congo

Lien publiée le 13 janvier 2019

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://alencontre.org/afrique/congo/rdc-martin-fayulu-contre-attaque.html

Par Colette Braeckman

Martin Fayulu est persuadé d’avoir gagné la présidentielle dans les urnes. Et il a décidé de saisir la Cour constitutionnelle. C’est le bras de fer à Kinshasa: Martin Fayulu, candidat de l’opposition donné perdant, revendique la victoire. Il contre-attaque en justice. L’Eglise en appelle à l’ONU pour faire publier   les procès-verbaux du scrutin.

Martin Fayulu réunit ses partisans et met en question les résultats

A Kinshasa, une proclamation chasse l’autre. Alors que Martin Fayulu conteste la victoire de Félix Tshisekedi et se prépare à saisir la Cour constitutionnelle, en s’appuyant sur des sacs entiers de procès-verbaux recueillis dans les bureaux de vote, l’attention de la classe politique et de l’opinion est déjà requise par d’autres enjeux.

D’un moment à l’autre en effet, la Céni compte annoncer le résultat des élections législatives, qui redistribueront les cartes à l’Assemblée nationale et apporteront peut-être un peu de baume au cœur des grands perdants que sont les membres de la coalition du Front commun pour le Congo. Il semble déjà que la majorité des députés sera issue des grands partis, la majorité présidentielle mais aussi l’UDPS, la formation de Félix Tshisekedi et l’UNC (Union nationale pour le Congo), le parti de son coéquipier Vital Kamerhe tandis que le parti MLC (Mouvement pour la libération du Congo) de Jean-Pierre Bemba s’en sortira très honorablement. Les formations membres de Cach (coalition pour le changement), qui soutiennent Félix Tshisekedi, ne cessent de rappeler que Martin Fayulu, même s’il revendique une – probable – victoire au scrutin présidentiel, ne peut s’appuyer sur un parti important et qu’il ne dispose donc pas de réelle base opérationnelle ni de relais au sein des forces armées et de sécurité, qui demeurent fidèles au président Kabila…

Le mécontentement persiste

Si les Kinois, joints par téléphone, se déclarent soulagés après la longue nuit qui a mené à la proclamation de la victoire de Félix Tshisekedi, dans les provinces le mécontentement persiste. A Mbandaka, capitale de la province de l’Equateur, des centaines d’étudiants ont brûlé des pneus afin de protester contre la fraude électorale. Ils ont été rudement dispersés à coups de gaz lacrymogènes et plusieurs blessés ont été signalés. A Kikwit, dans le Bandundu, fief de Martin Fayulu, la situation est restée explosive, Kinshasa a dû envoyer des troupes en renfort et des interlocuteurs nous citent le chiffre de 16 morts. Internet étant toujours coupé, ainsi que les SMS et les communications via WhatsApp, on est sans nouvelles de la situation du Katanga, fief de Moïse Katumbi, l’un des soutiens de Martin Fauyulu. En revanche, depuis Goma et Bukavu, des interlocuteurs joints par téléphone nous informent du soulagement de la population, qui se réjouit du changement à la tête de l’Etat, de l’éviction du dauphin Shadary et du rôle important qu’un fils du pays, Vital Kamerhe, originaire de Walungu au Sud-Kivu, sera amené à jouer aux côtés de Félix Tshisekedi. Les ressortissants du Kivu, même s’ils avaient réservé un bon accueil à Martin Fayulu, symbole du changement, se déclarent aussi soulagés car en cas de victoire du candidat présenté par la coalition Lamuka, ils redoutaient une réaction violente des forces armées: «Des officiers tutsis congolais nous avaient déjà fait savoir qu’ils rejetteraient Martin Fayulu», nous précise un ressortissant de Bukavu.

Kabila vote «avec une totale confiance» pour le futur «vainqueur officiel»

La bataille des urnes s’est donc déplacée à la fois sur le terrain juridique et sur la scène internationale. Des leaders de la coalition Lamuka, soutenant Martin Fayulu, entendent bien saisir la Cour constitutionnelle, d’autant plus que l’Eglise catholique refusant de communiquer le nom du candidat qui, à son avis aurait remporté les élections, insiste pour que le dernier mot revienne à ce tribunal. Il s’agit cependant d’une arme à double tranchant parce que la Cour constitutionnelle se compose de juristes qui ont souvent été accusés d’être des partisans de Joseph Kabila. Si la Cour constitutionnelle, faisant droit à leurs requêtes, se décidait à annuler le scrutin pour cause d’irrégularités, le seul bénéficiaire de cette décision serait le chef de l’Etat sortant, Joseph Kabila, qui pourrait ainsi se maintenir au pouvoir dans l’attente d’une nouvelle élection!

Appel à la transparence

Sur le plan international, les voisins de la RDC se sont bien gardés de jeter de l’huile sur le feu et depuis Brazzaville (capitale de la République du Congo), Denis Sassou Nguesso, qui préside en ce moment la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL), a «pris note» de la victoire de Félix Tshisekedi, invitant tous les acteurs congolais à poursuivre dans le calme le processus électoral.

Le Conseil de sécurité a également examiné la situation en RDC, prenant en compte le témoignage de la Cenco (conférence épiscopale), selon laquelle les résultats provisoires ne correspondraient pas aux données collectées par les 40’000 observateurs. L’ambassadeur de Belgique, siégeant désormais au Conseil de sécurité, a suggéré à la Céni de publier les procès-verbaux de chaque centre de compilation et de permettre à des observateurs neutres d’avoir accès à son serveur central afin d’assurer une «transparence maximale» au processus.

Martin Fayulu, s’adressant aux évêques, leur a d’ailleurs demandé «de révéler au peuple congolais et au monde entier le nom de la personne qui a réellement incarné le choix de notre peuple». (Colette Braeckman tient un log sur le quotidien Le Soir. Depuis de très nombreuses années elle suit les évolutions dans la RDC; cet article a été publié le 12 janvier 2019)