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TEMOIGNAGE sur l’acte XI des Gilets jaunes à Lyon
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
http://www.frontsyndical-classe.org/2019/01/temoignage-sur-l-acte-xi-des-gilets-jaunes-a-lyon.html
SOURCE : Pierre Alain Millet sur :
L'incroyable campagne médiatique du "grand débat", avec la mise en scène d'un président qui se met à répondre aux questions des citoyens, n'y a rien changé. Les mobilisations ont été au moins aussi importantes dans beaucoup de villes, comme à Lyon. Une banderole résumait bien cette situation "100 balles et ça repart" !
J'ai participé ce 26 janvier à la manifestation lyonnaise, qui confirme la détermination que je constatais les samedi précédents, avec cette semaine plus de banderoles et de panneaux, et pour la première fois à Lyon me semble-t-il, un service d'ordre en brassard orange présent tout au long de la manifestation, jouant un rôle important pour maintenir le défilé dans le parcours prévu, intervenant pour éviter les dérapages le long de la manifestation... Le défilé, parti de Perrache à 13h, a d'ailleurs emprunté pour la première fois l'avenue Albert Thomas, passant à la hauteur de la voie ferrée, lieu traditionnel de départ des manifestations syndicales, et retournant par Félix Faure puis Gambetta jusqu'à Bellecour.
Pour ce que j'ai vu [1], il y avait moins de heurts avec la police, même si à la hauteur de la guillotière, une intervention massive de lacrymogènes a coupé pendant un moment la manifestation en deux. C'est à ce moment que des brassards orange du service d'ordre ont annoncé une décision de dispersion des organisateurs, décision sans effet sur le défilé, puisque l'immense majorité des manifestants n'en savaient rien, et que les premiers étaient de toute façon déjà engagés sur le pont vers Bellecour.
Je ne peux que confirmer une nouvelle fois que l'immense majorité des manifestants ne sont ni des fascistes, ni des violents, et que si certains se font avoir dans l'excitation de la confrontation avec la police, ce n'est pas plus marqué que dans les mouvements sociaux dont j'ai le souvenir, de mes premières manifestations de lycéens dans les années 70, aux dernières manifestations contre la loi travail. Il y a par contre une vraie volonté d'agir, de faire quelque chose. S'il manque bien sûr une organisation, de l'expérience, des consignes claires, si beaucoup de manifestants vont et viennent en fonction de leurs discussions avec ceux qu'ils connaissent, rien ne justifie le traitement policier de l'ensemble de la manifestation, les interpellations préventives, le gazage massif, l'usage des "lanceurs de balles" qui ont encore blessé gravement des manifestants ce samedi en France.
Je crois que le bilan important de la journée, c'est que malgré le matraquage médiatique quotidien, beaucoup de gens en colère se rendent compte que le débat est une impasse pour leurs revendications. Les efforts de Macron eux-mêmes, cherchant à tout prix à justifier sa politique en répondant aux interpellations dans son débat le démontre. De toute façon, il ne prendra aucune décision en faveur des salaires, des pensions et allocations, ni des services publics, et il ne touchera pas aux très haut revenus, ni aux grandes fortunes !
A quoi sert de discuter avec les riches si la question est de réduire les inégalités ? De toute façon, ils feront tout pour ne pas se faire rogner leurs privilèges, donc le débat est pipé d'avance, son seul enjeu est de faire accepter ces inégalités, les bas salaires, la précarité, le recul des services publics. Cela me rappelle le film "Allende" dans lequel l'ambassadeur US de 1973 au Chili explique, 30 ans plus tard, les raisons du coup d'état : "Allende ne croyait quand même pas que la bourgeoisie allait se suicider dans la joie"... Tout est dit !
C'est pour cela que les gilets jaunes doivent surmonter une difficulté. Beaucoup de manifestants considèrent que le problème, ce sont les parlementaires et donc sont réceptifs à l'idée de réduire leur nombre. Mais Macron est bien d'accord ! On peut d'ailleurs supprimer l'assemblée nationale, le capitalisme peut très bien fonctionner avec un "régime présidentiel unique" ! Au contraire, les citoyens qui veulent "prendre le pouvoir" ont besoin d'une assemblée nationale qui soit l'expression de leur souveraineté, et pour cela, il faut des députés qu'on connaisse, et donc proche des habitants. Il n'en faut pas moins, il en faut d'autres, issus du monde du travail, des quartiers populaires !
Le mouvement social découvre une réalité que les formes d'actions syndicales des "journées nationales de mobilisation" ces dernières décennies avaient tendance à masquer. L'enjeu n'est jamais de "convaincre" les décideurs de la justesse des revendications, mais de les "contraindre" à reculer sur leurs propres objectifs parce-que le rapport de forces est tel qu'ils prennent conscience qu'ils ont plus à perdre dans le refus que dans le recul ! Et pour cela, le rapport des forces doit se compter en millions de citoyens acteurs !