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Les Gilets jaunes, entre professionnels du désordre et salafistes

Gilets-jaunes

Lien publiée le 20 février 2019

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

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Sous l’œil avisé de ses experts en manifestants “issus de l’ultraviolence”, BFMTV retransmettait le match du samedi entre les Bleus et les Jaunes… Jusqu’à ce que s’invitent les insultes proférées contre Alain Finkielkraut. Seule la formidable réussite du grand débat national pouvait me consoler.

« On parle de la violence des manifestants. » Comme tous les samedis. La présentatrice de BFMTV nuance : « Mais, il faut le rappeler, la plupart des manifestants ont manifesté pacifiquement. Et justement nous allons retrouver Loïc Besson sur l’esplanade des Invalides. » Et justement, « il y a eu une première charge des forces de l’ordre, qui sont la cible de nombreux projectiles… A l’instant, des jets de gaz lacrymogène ».

 

Cinq minutes plus tard. « On va retrouver Raphaël Maillochon, quelle est la situation ? » « Les forces de l’ordre avancent, vous entendez ces grenades de désencerclement alors qu’il tombe véritablement une pluie de gaz lacrymogène. » Cinq minutes plus tard. « Clémence Dibout est sur place… » Comme tous les samedis, pas moins de trois équipes et deux heures d’antenne sont dédiées à la retransmission des violences. « Tous les samedis, c’est extrêmement sensible. »

 

Entre deux averses de grenades, on parle donc de la violence des manifestants. « Comment l’exécutif peut-il sortir de ces violences de fin de manifestation ? » « C’est compliqué, admet Jannick Alimi, du Parisien. Pour Christophe Castaner et le gouvernement, il n’est pas question de passer pour des laxistes. » D’où leurs efforts répressifs. « Les statistiques sont là pour montrer que les gardes à vue, les interpellations sont d’une ampleur inédite. » Ce gouvernement a brillamment battu les records du précédent.

 

« Mais, d’un autre côté, le gouvernement ne veut pas faire d’erreur, entre guillemets ne veut pas faire de bavures… » Il ne manquerait plus que ça. « Il ne faut pas qu’il y ait des blessés, des blessés graves… » S’il y en avait eu, ça se serait su. « Et encore moins des morts. Dans l’absolu, c’est évidemment quelque chose souhaité par tout le monde. » Mais dans la pratique…« Parce que ça pourrait en plus se transformer en martyr pour les Gilets jaunes si bien sûr les blessés graves ou les morts – Dieu merci il n’y en a pas encore jusqu’à présent – étaient du côté des Gilets jaunes. » Dieu merci, ça n’est pas arrivé. Aucun leader des Gilets jaunes n’a perdu un œil, touché par un tir de LBD place de la Bastille, aucune octogénaire n’a perdu la vie, touchée par une grenade le 1er décembre à Marseille.

« Là on voit le DAR, dispositif d’action rapide », admire un syndicaliste policier, expliquant comment ses collègues procèdent pour interpeller « des gens issus de l’ultraviolence ». « Des professionnels de la casse et du désordre », précise Dominique Rizet. « Ils savent exactement comment opèrent les policiers et les gendarmes, ils sont rodés, complète Driss Aït Youssef. C’est dans ces circonstances qu’on a quelquefois des accidents. » Maudites circonstances. « Des policiers ou des gendarmes font usage de grenades de désencerclement ou de LBD et blessent injustement un manifestant qui n’est pas un Black Bloc. » Alors qu’ils doivent mutiler seulement les Black Blocs.

 

Comme tous les samedis, les experts s’extasient à l’arrivée de la cavalerie. Selon le syndicaliste, « c’est des chevaux de très haute stature. Et c’est des charges en bonne et due forme ». On n’est pas chez les sauvages. « Les policiers de la brigade équestre ont la capacité d’interpeller des individus en restant sur leur cheval. »Comment ça ? Au lasso ? « Ça permet de figer les situations. » En effet, il n’y a pas plus figée qu’une situation ayant reçu un coup de matraque sur la tête. « C’est totalement désorganisé, c’est une manifestation qui n’a ni queue ni tête », désespère Dominique Rizet, à deux doigts de cotiser à la CGT.

Quelques minutes plus tard, branle-bas de combat, la vidéo de la violente agression verbale contre Alain Finkielkraut s’invite dans le flux des violences pour les recouvrir toutes. Triste conclusion d’une journée de manifestation qui m’aura tout de même procuré le bonheur de revoir l’écran de BFMTV consacré à un tweet de Manuel Valls (qui manifestait avec l’extrême droite le week-end précédent à Madrid). Ça me manquait.

 

Le lendemain, dimanche, le caillassage d’un véhicule de police fait jeu égal avec les horreurs proférées contre Alain Finkielkraut. Le véhicule caillassé n’étant pas disponible, Apolline de Malherbe reçoit le philosophe. « Vous avez été hué, insulté avec hargne par des manifestants qui portaient le gilet jaune. » La présentatrice lui soumet une de ces alternatives dont elle a le secret. « Est-ce qu’il faut minimiser ou est-ce qu’il faut rendre compte d’un climat de haine qui s’installe en France ? »Quelle question ! Il faut minimiser, évidemment.

 

Je retiens du discours d’Alain Finkielkraut ce que Daniel Schneidermann met aussi en exergue ce lundi matin (et j’ajouterai à ses liens opportuns cette tribune de Claude Askolovitch). « Le plus vindicatif, il n’est clairement pas un petit Blanc, diagnostique Alain Finkielkraut. C’est lui qui me dit “Elle est à nous, la France.” (…) Cette phrase est extraordinairement menaçante parce que qu’il est en train de dire : “Nous sommes le grand remplacement et tu vas être le premier à le payer.” » Brrr… Eric Zemmour ne s’était pas trompé. Heureusement, ce discours de raison devrait apaiser « le climat de haine qui s’installe en France ».

 

« Il vous dit : “Dieu va te punir” », relance Apolline de Malherbe. « Il n’y a pas dans l’antisémitisme européen une rhétorique qui dise “Dieu va te punir”. C’est Allah en l’occurence qui parle. » Allah était dans le 15e arrondissement samedi dernier ? Et je n’en ai pas été informé ? « C’est le discours de l’islamisme le plus extrémiste. » Apolline de Malherbe confirme : « D’après nos informations, l’un des individus est connu des services de police et il évolue dans une mouvance salafiste. » CQFD. Le grand remplacement a enfilé un gilet jaune.

Au terme d’un implacable plaidoyer contre l’odieux complot islamo-gauchiste, Alain Finkielkraut assène : « L’antisémitisme d’aujourd’hui est devenu un antiracisme. » OK, c’est noté. Désormais, je vais me proclamer raciste. Je n’ai pas envie de passer pour un antisémite.

Dans la soirée, entre deux rediffs de Finkie et trois caillassages de fourgon de police, une question surgit de la bouche d’une présentatrice : « Emmanuel Macron est-il en train de reprendre la main ? » Encore !? Mais laquelle ? Il en a repris au moins une dizaine.

 

A 23h29, après une pause pub, de doux mots s’inscrivent à l’écran : « Police nationale. Sécurité privée. Douane. Administration pénitentiaire… » La voix off déclare : « Ce programme avec la MGP, la mutuelle de toutes les forces de sécurité. » Je comprends les raisons de l’intérêt de BFMTV pour les blindés, les DAR, les cavaliers, etc. : ils sont clients de la Mutuelle générale de la police.

 

Il est minuit, Gilane Barret présente le succédané de la journée. « Un dimanche de Gilets jaunes qui ne fait pas le plein, loin de là. Environ 1 500 personnes ont défilé dans la capitale. » Puis, développant ses titres : « Vraiment peu de monde dans les rues de Paris. On a dénombré 1 500 manifestants. » On ? On qui ? Une reporter témoigne : « Beaucoup de monde a participé à cette marche. » En résumé, il y a eu vraiment beaucoup peu de monde.

 

« Nous sommes à mi-chemin du grand débat, enchaîne le présentateur. Voilà un mois que les Français discutent, on vous a rassemblé quatre images. Un président, Emmanuel Macron, qui discute dans l’Indre, il y a un ministre, Bruno Le Maire, dans les Alpes-Maritimes, il y a des citoyens dans des salles communales et même dans une église dans la Somme ou même dans une prison dans le Vaucluse. »Et pourquoi pas à la piscine, chez le dentiste, dans un Centre de rétention administrative ?

Gilane Barret présente son invitée, Isabelle Falque-Pierrotin, « garante du Grand débat national ». Je ne connaissais pas ce métier. « Vous êtes cinq garants à garantir l’indépendance, la régularité de grand débat », précise le présentateur. Choisis par qui ? « A mi-parcours, est-ce que vous diriez que c’est un succès ou pas ? » « Les quatre thématiques qui ont été proposées par le gouvernement intéressent de façon à peu près équanime. » Preuve de la pertinence des thématiques du gouvernement. « 25 % des réunions locales sont à l’initiative non pas d’élus mais de particuliers, poursuit la garante. Ça veut dire que les particuliers se sont saisis de la parole que l’on a offerte. » Avec une immense générosité. « Donc les Français se l’approprient d’eux-mêmes sans qu’on les incite forcément », déduit Gilane Barret. « Absolument. C’est déjà un signal positif. » Relayé avec zèle sur BFMTV.

 

« On va regarder les chiffres qui émanent du Grand débat national, propose le présentateur, et il les détaille. « Des chiffres assez impressionnants, il est vrai. »Infiniment plus que le nombre de Gilets jaunes à Paris. « Comment on va synthétiser tout ce qui se passe ? » « Ça va être la difficulté parce que tous ces capteurs sont hétérogènes, explique Isabelle Falque-Pierrotin. Il va falloir prendre tout ce gisement informationnel et en tirer quelque chose. Un certain nombre de prestataires ont été sélectionnés. » Des prestataires privés, comme la société de sondologie Opinion Way, préférés à d’obscurs universitaires recommandés par la Commission nationale du débat public, comme le Laboratoire d’études et de recherches appliquées en sciences sociales (Lerass) de Toulouse, dont les représentants ne fréquentent même pas les plateaux télé. « Nous, en tant que garants, nous sommes chargés de vérifier que les méthodes de ces prestataires permettent une restitution fidèle et efficiente. » Pourvu que ça efficie.

« Nous allons travailler avec ces prestataires sur les méthodes d’intelligence artificielle mais aussi, peut-être, je dirais humaines pour exploiter toute cette masse de données. » Des humains ? N’est-ce pas accroître le risque de biais ? Il paraît plus sûr de se fier à l’intelligence artificielle – dont les algorithmes sont conçus par des humains. « L’intelligence artificielle, agrée le présentateur, ça veut dire recours aux ordinateurs. » Autogérés. « Humains, ça veut dire quoi ? On va embaucher des gens pour synthétiser concrètement, lettre par lettre, revendication par revendication ? » « Bien sûr. »

 

« On sait que le gouvernement avait trois défis à relever à travers ce Grand débat. » En tout cas, Jannick Alimi le sait. « Le premier, c’est la fréquentation, elle est plutôt au rendez-vous. Le dernier, c’est la restitution en termes de décisions. » Au hasard : réforme des retraites, de la fonction publique, baisse de l’impôt sur les sociétés, etc. « Entre les deux, il y a la deuxième étape que vous incarnez aujourd’hui, c’est-à-dire l’impartialité, la transparence. » La vertu incarnée. « Je voudrais juste vous demander : comment se passe une journée de garante ? Ou une semaine, si vous voulez. » Bonne question, je m’interrogeais justement sur le quotidien de ce métier atypique.

« Combien de temps vous faudra-t-il pour dire au gouvernement : “Voilà tout ce qui a été dit, tout ce qui est remonté ”? », s’impatiente Laurent Neumann. « A quel moment, quelle date le gouvernement pourra dire : “Ça y est, le Grand débat est terminé, maintenant, la balle est dans notre camp” ? » Parce qu’elle est dans quel camp, en ce moment ?