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Amianto, une histoire ouvrière
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https://npa2009.org/idees/culture/amianto-une-histoire-ouvriere
Récit d’Alberto Prunetti, Éditions Agone, traduit par Serge Quadruppani, 144 pages, 12 euros.
Dur et touchant, le récit oscille entre les souvenirs familiaux et une dénonciation acerbe de la condition ouvrière. Dans ce sixième ouvrage, Alberto Prunetti nous emmène dans la Toscane ouvrière des années 1970 et 1980. Retraçant les différents lieux de travail de son père pour pouvoir prouver la responsabilité des divers employeurs dans sa dégénérescence physique, Prunetti livre une « histoire ouvrière », un portrait d’homme que l’industrie a condamné simplement parce qu’il travaillait.
Longue et saisissante déchéance
Au milieu des cocasseries propres à tout récit de souvenirs d’enfance, Prunetti expose la vie des ouvrierEs dans cette période de plein-emploi, où les paies correctes (relatives) se faisaient au détriment de la sécurité. À côté de l’horreur des ouvrierEs tout bonnement assassinéEs par les machines, Prunetti nous décrit la liesse des dimanches autour du football, et le sentiment de fierté que les travailleurEs industriels tenaient de leur travail, dans une tradition que l’auteur qualifie de stalinienne.
Envoyé travailler sur des sites industriels aux quatre coins de l’Italie, au milieu du fer, de l’acier et du titane, le père, Renato, est exposé à toutes les saloperies que ce monde industriel peut produire, jusqu’à cette fibre d’amiante qui trouve son chemin jusqu’à ses poumons. L’auteur nous donne à voir la longue et saisissante déchéance de son père, qui, à 40 ans déjà, se connecte au monde à l’aide d’appareils auditifs, portant lunettes et dentier. Si l’auteur s’attarde (un peu trop ?) sur des souvenirs personnels, la force du récit tient dans cette tendresse d’un fils pour un père que la soif du profit et le mépris des grands pour les petits ont détruit.
En filigrane, nous apercevons la déchéance et précarisation de la classe ouvrière italienne, orchestrée par le patronat, accompagnée par les organisations ouvrières. Le combat du père finira par s’inscrire dans un cadre syndical et judiciaire, pour dénoncer les conditions de travail et, plus tard, faire reconnaître son statut d’handicapé du travail – combat repris par sa femme et son fils à sa mort.
Selma Timis