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Crépuscule: succès fulgurant pour le livre de l’avocat Juan Branco
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Ancien avocat de Jean-Luc Mélenchon, ancien conseiller de Julian Assange en France, jeune avocat et grande gueule, controversé, Juan Branco rencontre un vrai succès avec Crépuscule, violente charge contre le système.
Juan Branco est assis à la terrasse d’un café de l’ile Saint-Louis, à moitié enfoui dans les bras de son amie, une étudiante en médecine qui porte un appareil photo manuel en bandoulière. La vie va mieux pour lui. Après des mois de galère, ce jeune avocat de 29 ans qui semble avoir déjà dix vies derrière lui, réelles et rocambolesques, ou rêvées façon mégalo, a offert toutes ses forces militantes et révolutionnaires aux Gilets jaunes.
En même temps qu’il s’est engagé auprès d’eux - il se trouve être aujourd’hui l’avocat de Maxime Nicolle - Juan Branco a diffusé avant Noël et sur Internet - faute d’éditeur - un livre, Crépuscule, véritable brûlot destiné à faire exploser le monde d’Emmanuel Macron, celui qui aurait permis son élection. Le manuscrit a ensuite été repéré, saisi et retravaillé par le journaliste Denis Robert, puis finalement publié le 21 mars par deux éditeurs associés: Marion Mazauric (Au Diable Vauvert) et Florent Massot (Massot Éditions). Une association qui fonctionne puisque le livre cartonne. Pas une prétention d’éditeur, un vrai carton pour un livre de ce type: entre 16 000 et 20 000 exemplaires vendus, peut-être plus.
«La face obscure de ce pouvoir déliquescent»
Une semaine après sa sortie, l’essai était déjà en cinquième position «Essai et documents» du classement GfK, l’organisme de référence des ventes de livre ( hors Amazon), derrière quatre poids lourds et devant «L’Archipel français», de Jérôme Fourquet, au Seuil. Selon Marion Mazuric, «le chiffre des «sorties caisses» selon GfK au 9 avril est de 16 000». Sachant que 50 000 exemplaires ont été commandés par les différents points de vente du livre. Une montée en puissance que l’auteur accueille avec beaucoup de calme, sans étonnement excessif, comme si son talent dont il n’a jamais douté était enfin révélé au grand public. Juan Branco, franco-espagnol, fils d’un artiste producteur de cinéma et d’une psychanalyste, a grandi à Saint-Germain-des-Prés, dans la très élitiste École alsacienne, avant de rompre avec cet environnement. Il revient tout juste d’une tournée dans le Sud de la France. Son essai qui, selon Denis Robert dans la préface, éclaire «la face obscure de ce pouvoir déliquescent», semble y avoir rencontré un certain succès populaire.
L’édition d’Aix-en-Provence du quotidien La Provence parle d’un véritable braquage de la librairie Goulard le 3 avril dernier avec «une foule impressionnante». «Une foule très dense buvait les paroles de l’intervenant dans une concentration quasi divine», raconte la journaliste, visiblement impressionnée, qui précise que des haut-parleurs avaient été installés à l’extérieur faute de pouvoir faire rentrer tout le monde. «Avec mes propos, je peux aller en prison. Si je dois y aller, j’irai», a déclaré ce jour-là Branco aux Aixois. Prêt à se sacrifier pour la cause. Il n’y a pas si longtemps que cet ancien candidat LFI aux législatives en Seine-Saint-Denis a rompu avec les Insoumis. Mais l’ex avocat de Jean-Luc Mélenchon, qui fut avant le conseiller juridique de Julian Assange en France, a bien fermé la porte. «Jean-Luc pense encore qu’avec des stratégies de contournement, on pourra faire vivre nos idées mais c’est une illusion totale. A système constant, il n’y a rien de possible». Et pour lui, «si nous ne faisons rien, si nous n’agissons pas, nous aurons Marine Le Pen au pouvoir en 2022». Un bandeau jaune barre son livre, sur lequel est écrit d’un côté: «Macron et les oligarques. L’enquête vérité». Au dos: «Ils ne sont pas corrompus, ils sont la corruption».
En janvier, la porte-parole des députés LREM, Aurore Bergé, avait signalé à la justice certains de ses propos
Branco, qui n’est pas idiot, prend soin de préciser que la révolution qu’il appelle de ses vœux «ne passera pas par un coup d’État», ni par «une forme autoritaire». Il jure qu’il n’a rien à voir avec la page Facebook appellant le 1er mai à un «acte ultime» des «black bloc et Gilets jaunes» avec Paris comme «capitale de l’émeute».
En janvier, la porte-parole des députés LREM Aurore Bergé avait signalé à la justice certains de ses propos relevant, selon elle de la «provocation aux crimes et délits». L’avocat le brandit comme un fait d’armes. Même le député d’Amiens François Ruffin, un peu en marge des Insoumis par sa radicalité, ne trouve pas grâce à ses yeux. «Il se laisse être présenté comme candidat à la présidentielle et il imagine donc pouvoir changer le système tel qu’il est», ce qui constitue aux yeux de Branco «un délire égomaniaque».
Son livre pourrait-il entrer dans cette même catégorie? Marion Mazauric balaie l’argument. À l’entendre, la participation de Denis Robert «est un gage de rigueur». «Tout a été sourcé et nous avons retiré les éléments qui relèvent de la vie privée», indique-t-elle. «Il y a eu de nombreux refus pour ce manuscrit mais au sein de l’édition, nous sommes tous attachés à ce qu’il n’y ai pas de censure. La France est même un modèle dans le monde pour la libre circulation des idées. Espérons qu’elle le reste... Nous y participons». «Ce livre n’est pas anticapitaliste, ajoute-t-elle. Il est républicain, il s’adresse à tous». Elle cite les scores d’audience de Branco dans quelques médias spécialisés. Interrogé le 21 décembre sur le site «La-bas si j’y suis», de l’ancien journaliste de France Inter Daniel Mermet, Juan Branco serait sur le point de dépasser le million de vu. Idem pour les deux heures d’entretien accordé en mars à Thinkerview sur You Tube, qui dépassent les 830 000 vues sous ce titre: «L’illusion de la démocratie en France?» Mazauric affirme observer «un phénomène nouveau»: «Ce livre ne fonctionne que par le bouche-à-oreille, par les réseaux sociaux».
Ce livre se diffuse seul, comme dans un monde parallèle
Branco n’a bénéficié d’aucun support médiatique grand public. «Il y a un problème de légitimité de l’émetteur», admet-il. Les polémiques sur son parcours dont il se dit «victime» ont écorné son image. Et il en est convaincu: «Il y a une peur panique face aux discours déviants». Pour Denis Robert, qui en a rédigé un texte sur Facebook, «ce livre se diffuse seul, comme dans un monde parallèle, et personne ne peut dire jusqu’où cela ira».