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    La SNCF offre ses auto-trains aux camionneurs

    SNCF

    Lien publiée le 3 mai 2019

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    https://www.anti-k.org/2019/05/03/rail-la-sncf-offre-ses-auto-trains-aux-camionneurs/

    19 avril 2010. Gare de Bellegarde. SNCF. Train ECR tractant wagons porte autos © FOTORESO / Christophe RECOURA

    L’Humanité, 3 mai 2019

    L’opérateur public a annoncé la suppression du secteur d’acheminement de véhicules longue distance. Un abandon orchestré en interne, sur des critères de rentabilité.

    Terminus pour l’auto-train. Annoncée il y a quelques semaines aux représentants des salariés, la date du 14 décembre 2019 fixe l’arrêt définitif du service de transport ferroviaire longue distance de véhicules de particuliers. À contre-courant de l’exigence écologique et sur des critères uniques de rentabilité, l’opérateur ferroviaire public met ainsi le point final à six décennies d’histoire.

    Sur le cliché noir et blanc signé Lucien Delille, des cheminots s’affairent au chargement d’une Mercedes 220 sur un wagon porte-automobiles « à destination de Lyon », explique la légende. La scène, immortalisée en gare de Boulogne-Maritime, date de 1957, année de naissance de l’auto-train. La voiture individuelle est alors en plein essor et les usagers plébiscitent cette nouvelle forme de transport combiné. À l’époque, le service public révolutionne le départ en vacances en permettant à l’automobiliste de voyager en couchette, sur le même train que son auto. Le 5 juillet 1961, le journal télévisé relatant l’inauguration de la toute nouvelle liaison Paris-Biarritz fait l’éloge d’une « solution avantageuse qui permet, tout en gardant sa voiture sous la main, d’oublier les soucis de la route ». C’est l’avènement des trains-auto couchettes (TAC). « Bagages à volonté, dormir et rêver en toute sécurité, en toute tranquillité », dit la publicité.

    Dans les années 1980, les TAC convoient 200 000 véhicules à l’année. Pourtant, déjà plus soucieuse d’engranger des bénéfices que de répondre aux besoins de mobilité des usagers, la direction de la SNCF les abandonne dans les années 1990, remplacés par les auto-trains. Un changement de stratégie duquel résultera, en réalité, la lente érosion de l’offre, prémices de son abandon définitif.

    L’offensif discours marketing de la SNCF

    Dans un courrier qu’elle a adressé, mi-avril, à Guillaume Pepy, la sénatrice PCF de Seine-Saint-Denis Éliane Assassi, qui exhorte le président de la SNCF à abandonner « ce funeste projet », rappelle qu’« en trente ans, le service a perdu 80 % de trafic ». Une casse organisée en interne par l’entreprise publique avec une singulière accélération ces dernières années. Ainsi, en 2017, la direction de la SNCF prend-elle la décision unilatérale de supprimer treize destinations auto-train, parmi lesquelles la desserte de Lyon et de tout le grand Sud-Ouest. L’activité auto-train enregistre l’année suivante une perte sèche de 6 millions d’euros. « La logique est donc toujours la même, poursuit la présidente du groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste au Sénat. On asphyxie à petit feu le service public, le rendant inopérant et marginal, pour ensuite l’abandonner au motif de sa dégradation et de son inadéquation à la demande. » En gare de Paris-Bercy, point de chargement des wagons porte-automobiles, les emplois de onze cheminots de la manœuvre sont directement menacés, qui s’ajoutent à la vingtaine de postes sur la sellette en Provence- Alpes-Côte d’Azur et à la direction d’auto-train. En tout, résume Dominique Fallacara, secrétaire du CTN exploitation à la fédération CGT des cheminots, « 33 postes équivalents temps plein sont directement concernés ».

    À l’autre bout du fil, l’entreprise publique tente de se justifier : « Notre démarche aujourd’hui est d’assurer des places dans les TGV à nos clients et d’organiser leur voyage de bout en bout, location de voiture comprise », explique-t-on à grand renfort d’un discours marketing offensif vantant une offre commerciale qui va « au-delà de l’auto-train ». Mais, côté cheminots, c’est la colère qui l’emporte. « En 2017, l’argument de l’entreprise à la suppression des dessertes du Sud-Ouest, c’était l’optimisation du taux de remplissage sur les destinations restantes », se souvient Dominique Fallacara. Argument peu convaincant, poursuit le cheminot, qui rappelle que « dans le même temps, la direction renforçait alors son partenariat avec le loueur de véhicules Avis », organisant, en somme, « les conditions de sa propre concurrence ».

    Expedicar, l’obscur « partenaire » de l’entreprise ferroviaire

    À 68 % aujourd’hui contre 51 % en 2017, le fameux taux de remplissage des auto-trains reste pourtant considéré comme trop faible par la direction de l’entreprise. « L’arrêt de cette activité ne signifie en rien la fin du service de transport de véhicules », argumente la SNCF. Qui enchaîne : « Des solutions alternatives sont proposées à nos clients qui couvrent, en sus, bien plus de destinations que l’auto-train. » Et c’est là, sans doute, que réside le scandale dans le scandale. « La SNCF supprime l’auto-train et renvoie l’internaute sur les offres d’Expedicar », explique Dominique Fallacara.

    Obscur « partenaire » de l’entreprise ferroviaire, la start-up propose certes des solutions de transport de véhicules longue distance, mais au moyen d’un chauffeur privé ou d’un transporteur routier. Le tout à des tarifs prohibitifs – plus de 500 euros pour un Paris-Nice en camion et jusqu’à 800 euros avec chauffeur privé, contre moins de 300 euros par le train. « Expedicar vend ses prestations en utilisant le réseau de distribution public de la SNCF », relève, scandalisé, le cégétiste, qui note en passant que les « 33 500 véhi­cules transportés en train en 2018 vont se retrouver sur la route ».

    Une démarche « anti-écologique », dénonce Éliane Assassi, là où la SNCF devrait mener tambour battant une « stratégie de reconquête du rail sur la route pour en finir avec le dumping social, économique et écologique ».

    Marion d’Allard