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Le 26 mai, touTEs ensemble pour l’interdiction des LBD et des grenades mutilantes
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
« Vous avez 19 personnes devant vous et vous n’avez que 26 yeux qui vous regardent. Faites le compte, il y a un problème », c’est par ces mots que Jérôme Rodriguès a commencé son intervention lors de la création du « collectif des mutiléEs pour l’exemple », dimanche 28 avril à Gennevilliers. Une initiative importante des victimes pour relancer la campagne d’interdiction de l’utilisation des lanceurs de balles de défense 40 (LBD), des GLI-F4, essentiellement composées de TNT, et des grenades de désencerclement.
Le nom du collectif a été choisi en référence aux « fusillés pour l’exemple » de la guerre de 14-18, nommant ainsi les mutilations, avec lesquelles ils et elles vont devoir vivre, pour ce qu’elles sont : des blessures d’armes de guerre, faites en pleine connaissance de cause pour frapper les corps et les esprits. Et plus immédiatement dissuader les manifestantEs de descendre dans la rue.
Une question politique
Ils et elles ont recensé les victimes les plus gravement blessées depuis le 17 novembre dernier : « Ça fait 22 personnes qui ont perdu un œil ou l’usage de leur œil, c’est ça la vérité. Cinq personnes ont eu une main arrachée et il y a eu d’autres mutilations. Axel a perdu son odorat et Fabien a reçu un tir dans un testicule qui a dû être amputé » a ainsi expliqué Robin Pagès, lui-même handicapé depuis sa grave blessure au pied survenue durant une précédente manifestation en 2017 à Bure (Meuse) contre le projet du site d’enfouissement de déchets nucléaires. Et il ajoute que « d’autres blessures sont moins visibles, mais de nombreuses personnes ici présentes ont des plaques en titane et des vis dans le visage ».
Cette mobilisation est une question politique à part entière : les méthodes de répression sont un indicateur du rapport du pouvoir avec la population. Quand un pouvoir est incapable, non seulement d’obtenir l’adhésion sur son programme, mais tout simplement d’entendre l’expression des besoins pourtant fortement formulés, il ne reste que la prétendue « violence légitime de l’État ». « Violences légitimes » des forces de l’ordre pendant les manifestations, et « violences légitimes » des peines pénales imposées par l’appareil judiciaire. Et, de ce point de vue, les chiffres sont éloquents. Début mars, le ministère de l’Intérieur comptabilisait 13 095 tirs de LBD depuis le premier acte des Gilets jaunes, et 83 enquêtes pour des tirs potentiellement problématiques.
Lutter contre l’impunité
Le 26 avril, sur France Info, Castaner faisait la promotion de la probité des interventions policières : « Dès qu’il y a une plainte, il y a une enquête. Il y a 220 enquêtes confiées à l’IGPN [Inspection générale de la police nationale] qui sont en cours ». Et d’ajouter, sans rire : « Ce sont des enquêtes judiciaires. Elles prennent un peu de temps. […] Je vous le dis, s’il y a des décisions judiciaires, il y aura évidemment des sanctions administratives ».
Les 6 000 manifestantEs convoquéEs devant la justice depuis le début des mobilisations des Gilets jaunes, les 2 000 condamnéEs (chiffres de fin mars), dont 40 % à de la prison ferme, la plupart pour des faits bénins, apprécieront ce « deux poids, deux mesures ». Quant aux assertions de Castaner, c’est le serpent qui se mord la queue : il ne peut y avoir de poursuites judiciaires tant que les enquêtes administratives ne sont pas terminées ; mais s’il y a condamnations judiciaires alors là il y aura sanctions administratives ! En termes plus prosaïques, on appelle cela garantir l’impunité.
Le collectif a mis une nouvelle date dans le paysage : il appelle à une manifestation nationale à Paris, le dimanche 26 mai, pour l’interdiction des LBD et des grenades qui mutilent. Il faut faire de cette échéance une mobilisation de masse. D’abord en solidarité avec celles et ceux dont la vie a été irréversiblement bouleversée par les mutilations. Mais aussi parce que nous ne pouvons pas laisser faire ces pratiques qui sont une remise en cause traumatisante du droit de manifester. Et enfin parce qu’il y a un enjeu à mettre un stop à ce pouvoir, qui est dans la toute-puissance et prétend l’exercer de manière de plus en plus martiale.
Cathy Billard