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Crash de la France insoumise aux européennes: Mélenchon à l’heure des comptes
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
La France insoumise n'a pas su capitaliser dans ces élections européennes sur son excellente campagne présidentielle de 2017. Le résultat médiocre de la liste menée par Manon Aubry sanctionne une stratégie peu lisible. Le mouvement de Jean-Luc Mélenchon est largement distancée par Europe Ecologie-Les Verts.
C'était le rêve de Jean-Luc Mélenchon : poursuivre sur sa lancée de la présidentielle, et effectuer une démonstration de force aux européennes en écrasant les autres partis de gauche, réduits à l'état de groupuscules. Dans l'esprit du chef de file de la France insoumise (LFI), les élections de ce dimanche 26 mai devaient finir de régler la question à gauche de l'échiquier, poussant socialistes, communistes, écolos et pièces rapportées à se ranger derrière son panache dans l'optique des municipales voire de 2022.
A l'heure des comptes, le pari est raté dans les grandes largeurs : non seulement les Insoumis ont divisé leur score de la présidentielle par plus de deux, totalisant seulement 6,2% des suffrages d'après les premières estimations et égarant plus de 5 millions d'électeurs, mais ils ont de surcroît été dépassés par Europe Ecologie-Les Verts (EELV)... et se retrouvent même au coude-à-coude avec le Parti socialiste (6,2%), pourtant largement distancé en 2017 ! La liste conduite par Yannick Jadot, qui a bénéficié à plein de "l'effet européennes" traditionnellement favorable aux écologistes et d'une montée en puissance des préoccupations liées au dérèglement climatique, termine avec un score de 12,7%, quasiment le double de celui de LFI après une campagne menée en direction des électeurs de centre-gauche. Les Insoumis se retrouvent dans l'incapacité de clamer leur suprématie sur le reste de la gauche.
ERREUR STRATÉGIQUE
Pourtant, Jean-Luc Mélenchon et les siens n'ont pas ménagé leurs efforts pour tenter de séduire l'électorat traditionnel de gauche, tournant en partie le dos à la stratégie populiste qui avait été mise en oeuvre lors de l'élection présidentielle de 2017. Modérant leur discours souverainiste, notamment en écartant explicitement toute perspective de sortie de l'Union européenne, les Insoumis se sont choisi une tête de liste, Manon Aubry - une ancienne d'Oxfam et de l'Unef - au profil idoine, et ont mené une campagne aux allures de retour vers les codes traditionnels de la gauche. En interne, ce mouvement n'a pas fait que des heureux ; quelques cadres, comme François Cocq, Djordje Kuzmanovic ou Andréa Kotarac, ont ainsi quitté LFI en dénonçant l'abandon de la stratégie "fédérer le peuple". Une vision des choses vivement contestée par Jean-Luc Mélenchon, qui fait valoir son soutien inconditionnel au mouvement des gilets jaunes. Quoi qu'il en soit, cet entre-deux a nourri la confusion autour de la ligne de la France insoumise, qui semble avoir pâti du fait d'être restée au milieu du gué : ni assez "populiste" pour séduire l'électorat des classes populaires, ni assez "de gauche" pour nettement surclasser EELV, le Parti socialiste ou Génération.s. En renonçant à leur identité propre pour concurrencer plusieurs autres partis déjà concentrés sur un créneau électoral très restreint, Jean-Luc Mélenchon et les siens semblent avoir commis une erreur stratégique.
Au total, à l'issue d'élections traditionnellement défavorables à la gauche radicale - le Front de gauche avait accumulé 6,61% des suffrages en 2014 -, les Insoumis se retrouvent largement dépassés à gauche, mais également éclipsés dans la lutte face à Emmanuel Macron. Alors qu'à l'automne 2017 Jean-Luc Mélenchon était considéré comme le premier opposant à la politique du président, le score élevé du Rassemblement national (23,2%) indique que c'est désormais Marine Le Pen qui occupe cette position. Il reste trois ans aux Insoumis pour retrouver l'élan de 2017.