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Trump, l’Amérique et le monde
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
https://aplutsoc.org/2019/06/02/trump-lamerique-et-le-monde-juin-2019/
Présentation :
Ce long article consacré à la première puissance capitaliste mondiale, à la crise de son exécutif et à ses rapports au monde est aussi disponible au format PDF.
Une situation qui déroute les commentateurs «normaux».
Depuis le 23 mars, jour où le procureur Mueller a rendu son «rapport» au procureur général (ministre de la Justice) de Trump, William Barr, les États-Unis, et le monde avec eux, sont installés dans une situation institutionnelle et politique des plus étranges, apte à dérouter (voire à ne pas être aperçue du tout) par les commentateurs ordinaires des médias dominants(1). Tous ont en effet, peu ou prou, avalisé le fait que Trump était censé s’être sorti des menaces extrêmement lourdes qui ont caractérisé son mandat présidentiel depuis ses débuts. Nous n’étions pas de cet avis, allant jusqu’à dire que si la crise n’avait pas été ouverte au sommet, à savoir la pression ouverte pour faire démissionner Trump ou pour son impeachment, c’était en raison de l’impasse totale que tant le maintien que l’évacuation de Trump représentent pour la «gouvernance», comme ils disent, de la puissance capitaliste centrale de la planète.
Lentement mais sûrement, la crise revient au-devant de la scène, au grand dam des géniaux commentateurs de tout acabit, et nullement parce que les supposés ennemis institutionnels de Trump, à savoir le Congrès démocrate et sa présidente Nancy Pelosi, l’auraient souhaité. Bien au contraire, Mme Pelosi ne cesse d’aller répétant qu’à l’impeachment il ne faut point penser, s’érigeant en protectrice n° 2 de Trump dans la situation politique nord-américaine. Selon elle, vouloir chasser Trump serait faire le jeu de Trump …(2)
Ce retour de ce qui avait été faussement refoulé par l’opération du 23 mars dernier, s’effectue parallèlement à la montée des tensions internationales depuis la Maison blanche, concernant le commerce international, c’est-à-dire les relations avec la Chine, et concernant l’Iran, notamment. Ces deux aspects doivent être analysés en connexion l’un avec l’autre sous peine de ne pas saisir les enchaînements réels.
23 mars – 18 avril – 29 mai, ou le court printemps trumpiste.
L’opération initiale de désinformation, consistant à faire croire que le rapport Mueller «disculpait» Donald Trump de ce que quiconque de censé avait cru comprendre, à savoir qu’il est tenu par le FSB depuis des décennies (pour des raisons n’ayant rien de politique et tout de mafieux, liées notamment à l’immobilier), a, il est vrai, assez bien marché, silence complice ou consterné des Démocrates aidant.
Le 18 avril ce rapport est publié : 448 pages dont plus du dixième sont noircies, censurées pour des raisons dites de «sécurité nationale». Mais ce qui n’est pas censuré établit nettement d’une part que «la Russie» a agi en faveur de l’élection de Trump et que des contacts entre équipe de Trump et «services» russes ont bien eu lieu, d’autre part que Trump et ses hommes ont agi pour faire obstruction à l’enquête (une dizaine de tentatives directes d’entraves au pouvoir judiciaire sont répertoriées). La collusion directe (Trump en personne/«Russie») n’y est pas, mais Mueller se refuse à dire qu’elle est démentie : elle n’est pas établie, toutes les tentatives du pouvoir exécutif d’empêcher de l’établir étant, elles, parfaitement établies …
Le 29 mai, Robert Mueller a pris – sans en avoir avisé préalablement les autorités et plus tôt qu’on ne l’attendait généralement – l’initiative de mettre fin à ses fonctions de procureur spécial, ceci lui permettant immédiatement de sortir de sa réserve par une interview sur CBS d’une dizaine de minutes, dans laquelle il s’exprime de manière sibylline, mais non pas voilée.
Y figure cette phrase: « If we had confidence that the president clearly did not commit a crime, we would have said that. » Traduction : Si nous étions certains que le président n’avait clairement pas commis de crime, nous l’aurions dit.(3)
Et la présomption d’innocence ? La réponse est que si l’ancien chef du FBI de 2001 à 2013 qu’est R. Mueller dit ce qu’il dit là, c’est que les faisceaux de preuves réunis, sur l’ingérence russe et les contacts avec l’équipe Trump d’une part, sur les obstructions et entraves à l’enquête de celui-ci d’autre part, constituent du point de vue judiciaire une claire présomption de culpabilité, même si (en raison des entraves signalées ? ) la collusion directe n’est pas établie avec certitude.
Dans ces conditions, la phrase de sa déclaration selon laquelle l’inculpation du président «n’est pas une option» signifie simplement que le pouvoir judiciaire n’a pas ce pouvoir, ce qui est un constat constitutionnel. Mais Mueller précise que «la constitution prévoit une procédure en dehors du système judiciaire pour mettre en accusation un président en exercice.»
Et il conclut en précisant qu’en ce qui le concerne, il se rendrait à une éventuelle demande d’audition devant le Congrès, mais qu’il n’aura rien de plus à dire à cette institution.
Symptômes …
Si cette intervention doit effectivement être décryptée, elle n’en est pas moins spectaculaire, et elle constitue une grosse pierre mise dans le jardin, non pas tant de D.Trump, que de son ennemie officielle qui tente en réalité de faire durer la cohabitation en le protégeant : Mme Pelosi, présidente démocrate du Congrès.
Car on peut faire semblant de ne pas avoir compris, mais ce que Mueller a dit, c’est bien que le Congrès dispose de tout ce qu’il lui faut pour un impeachment!
Ont suivi des tweets présidentiels dont l’un est tout à fait remarquable au point d’avoir obligé son auteur à le contredire ensuite : « Russie, Russie, Russie! C’est tout ce qu’on entendait depuis le début de cette chasse aux sorcières. Et aujourd’hui la Russie a disparu parce que je n’avais rien à voir avec le fait que la Russie m’aide à être élu. » SIC!
Pendant que Trump recommence ainsi à s’enfoncer, W. Barr est interviewé par CBS-News et entreprend de secourir son chef en contredisant Mueller sur le fait que son rapport aurait pu conclure à une culpabilité judiciairement démontrée (et donc que s’il ne l’a pas fait, c’est que ce n’est pas le cas), tout en affirmant de manière contradictoire que son enquête ne pouvait en aucun cas servir à un éventuel impeachment, car celui-ci ne relève pas du droit pénal fédéral dans le cadre duquel se situait l’enquête Mueller. Ces arguties n’apparaissent pas comme un signe de force …
Parmi les congressistes démocrates, Nancy Pelosi de même que le «favori des primaires» Joe Biden se sont tus dans l’immédiat, cependant que Jerry Nadler, chef de la Commission judiciaire de la Chambre des représentants, déclarait qu’«il revient au Congrès de répondre aux crimes, mensonges et autres méfaits du président Trump» relevés par le rapport Mueller. Le nombre de congressistes démocrates se prononçant pour déclencher sans attendre la procédure d’impeachment est passé de 40 à 52 sur 235.
S’y est ajouté un élu républicain, Julian Amash, dont la prise de position n’est pas anecdotique, car il représente le courant «libertarien» (ultra-libéraux extrémistes partisans du démantèlement de l’État fédéral), et parce qu’il a avancé un argument de poids, avant même les déclarations de Mueller de mercredi dernier et lors d’un meeting dans sa circonscription du Michigan : ne pas entamer l’impeachment de Trump maintenant serait faire jurisprudence en privant à l’avenir le Congrès de cette possibilité – employée, rappelons-le, contre Nixon en 1973.
C’est en l’occurrence le libertarien qui situe le mieux les enjeux. Au point où en sont les choses, la capitulation du Congrès, dans la ligne des Hillary Clinton, Nancy Pelosi et Joe Biden, signifie carte blanche à l’aggravation des tendances bonapartistes de la présidence, dans le cadre de ce qui est bien une crise de l’État nord-américain et de sa constitution. Mais réciproquement, un Congrès jouant son rôle porterait un coup mortel à l’institution présidentielle en tant que telle. La sacro-sainte «constitution» touche ainsi, dans les conditions de la crise contemporaine du capitalisme, à ses limites historiques …
La «guerre commerciale» avec la Chine.
C’est de manière rigoureusement parallèle au rebond de cette crise institutionnelle de fond, que Trump s’est lancé dans des gesticulations de politique étrangère d’une ampleur et d’une cohérence apparente sans précédents.
Contre la Chine, d’abord. La «guerre commerciale» entre États-Unis et Chine ne date ni d’hier ni de Trump et elle est indissociablement liée à l’intrication croissante de leurs échanges, flux de capitaux compris puisque les federal bonds (dette publique) US détenus en Chine (leur premier détenteur mondial, soit 7% du total actuel, suivi du Japon), sont une donnée structurelle des rapports de force mondiaux. Mais cette «guerre commerciale» vient clairement de franchir un seuil.
Le 10 mai dernier, Trump a annoncé lui-même la hausse de 25% des droits de douane sur 200 milliards d’importations en provenance de Chine, à compter (a-t-il été annoncé le 15 mai) du 1° juin (composants informatiques, circuits imprimés, meubles, aspirateurs, luminaires …), et la Chine a annoncé le 13 mai riposter, dans les mêmes proportions, pour 60 milliards d’importations nord-américaines (cosmétiques, articles de cuisine et de sport, préservatifs, jouets, pianos …: on notera que la Chine n’importe guère de matériel industriel moderne en provenance des États-Unis !). En même temps, les États-Unis tentent de casser la puissance de Huawei, le quasi n°1 mondial des smartphones.
C’est dans les tout derniers jours que les discours officiels chinois ont monté d’un cran : le 30 mai – lendemain de l’interview de R. Mueller sur CBS, Zhang Hanhui, vice-ministre chinois des Affaires étrangères, a déclaré : « Nous nous opposons résolument à ce recours systématique aux sanctions commerciales, aux droits de douane et au protectionnisme. Cette instigation préméditée d’un conflit commercial constitue du terrorisme économique, du chauvinisme économique et du harcèlement économique à l’état pur. Nous sommes contre la guerre commerciale, mais nous n’en avons pas peur. »
Le régime chinois se pose en défenseur du libre échange et de la mondialisation capitaliste soi-disant «harmonieuse», alors que ses méthodes sont largement aussi étatiques et autoritaires que celles des États-Unis. De part et d’autre, il est prégnant que le conflit commercial a des implications stratégiques et géopolitiques, voire militaires, directes, dans lesquelles la Chine est encore encerclée, tout en cherchant à contourner cet encerclement, par exemple par les très à la mode «nouvelles routes de la soie».
Le but des États-Unis et de Trump dans cette affaire est donc très loin de n’être que commercial, ou plus exactement, la balance des échanges est l’expression d’enjeux plus fondamentaux, à savoir la tentative – tardive, coûteuse, risquée …- de l’impérialisme nord-américain de bloquer la croissance de son rival impérialiste, sachant qu’il y a eu un précédent : le blocage de la «haute croissance» japonaise à compter du krach mondial de 1987, dont seul le Japon ne s’est jamais remis. Sauf que le capitalisme chinois a des assises énormes et que le capitalisme nord-américain est entré en crise, par rapport aux années 1980. Précisons toutefois qu’écrire «assises énormes» pour le capitalisme chinois ne signifie pas «assises solides» : les contradictions sont énormes elles aussi.
De fait, les coups de Trump visent à empêcher Xi Jin ping de réussir ce qu’il appelle le plan « made in China 2025 », c’est-à-dire une montée en gamme technologique articulée sur le marché intérieur. Il est remarquable de constater que la première puissance capitaliste du monde ne veut pas d’un développement capitaliste «normal» dans ce qui est devenu la seconde puissance capitaliste de ce même monde. Cela dit, un tel développement «normal» n’est pas possible aujourd’hui,et ne le serait pas même sans pression nord-américaine : parasitisme, pollution, accumulation par dépossession, atteignent des proportions gigantesques. Mais cette pression va accentuer tous les déséquilibres, et cela pas seulement à l’échelle chinoise, mais à l’échelle mondiale. Et si les États-Unis gagnent, ce sera une victoire à la Pyrrhus dans une spirale de destruction.
Que dans ce cadre, l’État nord-coréen affiche à nouveau ouvertement sa poursuite de la voie nucléaire, les résultats des risettes publiques entre Trump et Kim-Jong-Un étant très faibles sinon nuls, apporte une très forte relativisation aux démonstrations de force de Trump.
La menace de guerre tout court avec l’Iran.
Encore est-il à peu près sûr, sur le terrain du différend commercial structurel avec Beijing, d’être appuyé par l’ensemble des intérêts capitalistes états-uniens. Il n’en va pas de même de l’autre grande série de gesticulations, celles-ci en mode «au bord du gouffre», engagées à l’encontre de l’Iran, depuis début mai 2019 là aussi.
Auparavant, Trump avait, on le sait, dénoncé l’«accord nucléaire iranien» signé entre l’Iran et les États-Unis, la Russie, la Chine, la France, l’Allemagne et l’UE en 2015. Rappelons que cet accord n’avait rien d’un heureux pas vers la paix entre les humains et entre les peuples. Il découlait cyniquement de la concession de facto par Obama du premier rôle contre-révolutionnaire à la Russie et à l’Iran contre le peuple syrien. La période de l’accord nucléaire iranien a été celle de l’écrasement physique de la révolution syrienne.
Des centaines de milliers de morts, de réfugiés, de viols et de tortures plus tard, la place faite à l’Iran dans ce cadre commençait à inquiéter sérieusement les dirigeants saoudiens (Mohamed Ben Salman, «MBS», engagé dans une guerre meurtrière au Yémen qui a achevé de faire des Houthis une force liée à l’Iran) et israélien (Benyamin Netanyahou, «Bibi»).
Quelles que soient les obsessions de Trump et de John Bolton à propos de l’Iran, retrouver pleinement la position érodée du grand frère pour Washington envers Ryad et Tel-Aviv, et signifier à l’Iran que massacrer les Syriens est une chose mais que prendre des positions stratégiques en Syrie et au Liban en est une autre, nécessitait, du point de vue de l’impérialisme nord-américain, de passer à une autre phase des relations avec l’Iran.
Mais la conjonction de la crise au sommet à Washington, où il n’y a même pas de directeur du Moyen-Orient au Département d’État comme avant Trump, mais une bande de «faucons» et de clients (John Bolton, Mike Pompeo, Jared Kushner …), et de la fuite en avant de «Bibi» et de «MBS», a donné à cette nouvelle phase tous les caractères d’une guerre imminente, qui semble en même temps totalement absurde et contre-productive pour tous ses promoteurs.
Hassan Rohani, le président iranien, peut donc se donner la posture du «résistant», les sanctions économiques et le blocus permettant au régime islamiste de se maintenir alors qu’en 2009 puis en 2017 il a failli s’effondrer sous les coups d’une révolution sociale, et il est de plus fatalement engagé à reprendre sa marche vers le nucléaire, et donc à susciter celle de l’Arabie saoudite …
Au motif de menaces iraniennes dans le golfe persique, les États-Unis ont, début mai, annoncé un plan de déploiement de 120.000 soldats et approché porte-avions et bombardiers. Mais en même temps des signes de scepticisme sont envoyés par les autres «partenaires» des États-Unis, dont les européens, et par certains secteurs de l’administration nord-américaine elle-même (ainsi le 15 mai, Mike Pompeo a rencontré le sultan d’Oman, réputé non belliciste).
Et Trump lui-même envoie des «signaux contradictoires», comme on dit : un coup c’est «Si l’Iran veut se battre ce sera la fin de l’Iran», un coup c’est «Nous ne voulons pas de changement de régime», et ainsi de suite(4).
En fait, si le pouvoir iranien dit refuser de discuter dans les conditions imposées et menace de reprendre son programme nucléaire, il ne dit rien de ce que seraient, pour «Bibi» et pour «MBS», les reculs vraiment sérieux attendus de lui, à savoir la fin ou l’atténuation forte de la présence de ses forces et de ses affidés en Syrie, au Liban, au Yémen, en Irak, ainsi que ses liens avec le Qatar qui ont valu à cet émirat le blocus par «MBS» et ses alliés (mais il faut noter que les 4 bombardiers B52, de sinistre mémoire au Vietnam, envoyés par Washington, se sont basés le 8 mai au Qatar).
Le test effectif dont le régime iranien ne dit mot se déroule donc à Idlib, cette enclave où des centaines de milliers de Syriens et des dizaines de milliers de combattants résistent encore à Bachar el Assad, avec un soutien turc mesuré pour pouvoir contrôler les groupes armés. Or, depuis début mai, a commencé une offensive meurtrière visant avant tout les civils, avec bombardements russes, visant des hôpitaux, emploi de gaz chloré, et silence de mort des chancelleries occidentales. Sans l’aide russe, l’armée «syrienne» de Bachar, corrompue et décomposée, ne pourrait probablement pas briser la résistance désespérée des défenseurs d’Idlib. Mais il n’y a pas de signes apparents de forces iraniennes ou de milices chiites et du Hezbollah. Cela dit, les intérêts iraniens sont structurellement intégrés à l’État prédateur et parasite de Bachar tel qu’il tente de se reconstituer …
Ajoutons que «Bibi», en Israël, vient de préférer des élections anticipées juste après avoir gagné les dernières, pour tenter à tout prix d’avoir une majorité lui évitant des poursuites judiciaires pour sa corruption légendaire, ce qui ne renforce pas l’option «guerre avec l’Iran», les généraux israéliens pouvant considérer que des opérations ciblées sur les positions iraniennes acquises en Syrie et en Irak lui sont largement préférables. Au demeurant, une conférence internationale sur «le plan de paix israélo-palestinien», bel euphémisme, est prévue à Bahreïn fin juin, alors que cet émirat serait en première ligne en cas de véritable guerre.
On peut donc résumer les données réelles de la situation concernant la menace d’une guerre contre l’Iran, ce dernier grigri des années G.W. Bush, ainsi : gesticulations à propos d’une guerre qui n’est en réalité pas prévue, et pressions réelles pour que l’Iran modère et régule sa présence en Syrie, Irak, Liban, Yémen. Mais un tel résumé laisserait de côté une dimension essentielle : la possibilité effective de «dérapages» non contrôlés de ces chefs d’État aussi lamentables les uns que les autres, de développements les prenant par surprises, alors qu’en dernière analyse, tous, s’il faut choisir entre la destruction de tout le Proche et Moyen Orient et le développement des révolutions et soulèvements populaires à la syrienne, repris récemment en Algérie et au Soudan, choisiront la première option …
Conclusion : Chasser Trump.
Les gesticulations de Trump au plan international sont donc bien des gesticulations, ce qui n’en atténue en rien le danger énorme et la portée concrète. Il en va de même des autres «fronts», notamment latino-américain, avec l’enlisement de la confrontation entre les deux camps capitalistes en présence au Venezuela, et les pressions grotesques sur le Mexique visant à taxer les importations si le «problème de l’immigration» n’est pas résolu.
Mais dans chacun de ces dossiers, se mêlent deux facteurs. Le facteur profond est le besoin récurrent de l’impérialisme nord-américain de réaffirmer sa puissance et le fait qu’ainsi, c’est son impuissance croissante qu’il exhibe de plus en plus, non sans risques pour tous selon le vieux proverbe qui veut que la «bête blessée» soit plus dangereuse. Le facteur conjoncturel, mais non moins important et significatif, est que tout ceci passe par le biais des foucades contradictoires de Trump.
Il ne saurait guère faire de doute que la manière dont il a, avec un caractère systématique et, malgré tout, une relative cohérence, pris en politique internationale les initiatives que nous venons de balayer, est liée à la menace latente de l’impeachment, des procédures, de la décomposition de sa position au plan intérieur, cela bien malgré l’establishment démocrate qui a aussi sinon plus peur de la chute de Trump que de son maintien voire de sa réélection.
La question démocratique de mettre Trump dehors est donc d’une première importance tant pour le peuple américain qu’au niveau international. Les contradictions internes du capital et de cet État font que l’homme qui est allé le plus loin contre lui est l’ancien directeur – républicain! – du FBI. Mais la solution des conflits dans la classe dominante et dans les sommets du pouvoir ne doivent pas être laissés à ces messieurs. Ils les résolvent toujours sur le dos du plus grand nombre. Et en plus, ils ne les résolvent même pas, mais ils font payer l’humanité.
La crise constitutionnelle des États-Unis soulève la question centrale d’une vraie démocratie.
Dans une vraie démocratie, les fanatiques évangéliques de l’Alabama ne sauraient engager de croisade contre les droits des femmes.
Dans une vraie démocratie, le pouvoir exécutif serait au service de la population et ne pourrait jamais menacer de détruire avec ses drones et ses bombes quelque pays, quelque nation, quelque continent, quelque village, quelque être humain que ce soit.
Dans une vraie démocratie, nulle politique d’austérité n’interdirait aux enfants de la classe ouvrière d’accéder à des écoles de qualité.
Dans une vraie démocratie, les droits des femmes seraient respectés. Dans une vraie démocratie, « black live matters » serait la loi.
Faire des États-Unis une vraie démocratie est un objectif pour la classe ouvrière et la jeunesse de ce pays, partagé avec celles du monde entier.
02-06-2019.
Notes :
(1) Au nombre de ces «médias mainstream» il faut ranger aussi les spécialistes de la soi-disant contestation, anti-impérialiste ou autre, des supposés «médias mainstream». C’est ainsi que le Monde Diplomatique français s’est distingué, en mai 2019, par un article éditorial de M.M. Serge Halimi et Pierre Rimbert littéralement pro-Trump, prenant pour argent comptant la fable dominante selon laquelle le rapport Mueller l’avait totalement «disculpé», et se réjouissant de cette cuisante défaite supposée des diables que sont«les néocons»et«les médias démocrates»!
(2) Les mêmes, Halimi et Rimbert, se montrent dans cet édito convaincu que Hillary Clinton et tout l’establishment démocrate rêvent d’en finir avec Trump, alors qu’il est clair qu’ils ont bien plus peur encore de sa chute !
(3) «Crime» en anglo-américain n’est pas un faux ami pour les francophones : il se traduit bien par «crime». Et non par «délit», ainsi qu’il l’est dans toute la presse française !!
(4) Serge Halimi, cette fois-ci dans son édito du Monde Diplomatique de juin 2019, récidive : «la paix», explique-t-il, dépend (et elle est certes «bien fragile»!) – de quoi ? Hé bien, elle dépend «de la capacité de M. Trump à maîtriser les conseillers enragés qu’il a nommés.» SIC!