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Grand coup de froid sur l’économie mondiale
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
https://www.anti-k.org/2019/08/22/conjoncture-grand-coup-de-froid-sur-leconomie-mondiale/
L’Humanité, 22 août 2019
À la veille du G7 de Biarritz, les signaux les plus alarmants s’accumulent sur la montée des risques de récession en Europe et aux États-Unis, alors que nombre de pays émergents sont d’ores et déjà frappés de plein fouet par une crise gravissime.
Les symptômes les plus alarmants surgissent sur l’état de santé de l’économie mondiale, à la veille de la réunion à Biarritz du petit groupe des sept puissances occidentales. Les spécialistes du Fonds monétaire international (FMI) revoient sans cesse à la baisse leurs prévisions de croissance planétaire. Ils l’ont ramenée à 3,2 % pour 2019, la réduisant de 0,1 point sur leur précédent pronostic publié en avril, lequel avait déjà été abaissé par rapport à celui de janvier qui avait déjà été revu en baisse sur son prédécesseur… Leurs homologues de la Banque centrale européenne (BCE) anticipent des résultats encore plus préoccupants à l’échelle du Vieux Continent.
On voit mal comment la première économie de la zone euro pourrait échapper à une entrée en récession en bonne et due forme (la répétition d’une croissance négative ce trimestre après celle enregistrée durant les trois mois précédents), elle, dont l’industrie manufacturière est déjà en récession depuis fin 2018. Même les États-Unis, qui semblaient échapper au coup de mou général en continuant d’afficher une expansion de près de 3 % de l’activité, devraient être contaminés à leur tour et plonger dans les affres d’une croissance négative au plus tard en 2021, affirment une majorité d’économistes dits d’affaire (voir notre édition du 20 août).
Pourquoi les pays émergents sont touchés de longue date
D’aucuns font mine de découvrir l’émergence simultanée de ces terribles signaux comme une surprise. Pourtant les symptômes du déclenchement d’une crise, non pas passagère, conjoncturelle, mais systémique, apparaissent déjà depuis plusieurs années. À l’origine de cet aveuglement : l’obstination, très partagée par les dirigeants du G7, à considérer que le salut passerait par un sauvetage coûte que coûte du processus de financiarisation de l’économie mondiale. Nous allons voir que c’est précisément lui qui empêche le changement copernicien, si crucial aujourd’hui pour le genre humain, de l’affectation de l’argent aux biens communs de l’humanité, comme à la lutte contre les dérèglements climatiques.
La crise, qui rejaillit de façon évidente désormais sur les centres névralgiques du système jusqu’en Europe et aux États-Unis, est déjà bien installée dans nombre de pays émergents. De la Turquie à l’Argentine, nombre de pays sont frappés de plein fouet par un effondrement de leur activité, avec à la clé une explosion de la pauvreté et un renforcement des inégalités, grand thème alibi de ce G7. Les fameux Brics (acronyme de Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), présentés, il y a peu de temps encore, comme le cœur de la dynamique mondiale, ne sont pas épargnés. Tous se sont massivement endettés en dollars, profitant des taux nuls de la Réserve fédérale, la banque centrale états-unienne, pour financer de nouveaux investissements.
Seulement cette utilisation du billet vert, doté de telles prérogatives qu’il fonctionne, de fait, comme une monnaie commune mondiale, a depuis deux à trois ans des effets très pervers. Le processus de remontée des taux enclenché par la Fed à partir de décembre 2015 renchérit en effet mécaniquement le poids des dettes de ces pays, au point de les étrangler.
En conséquence, nombre de ces économies à l’arrêt ont réduit considérablement leurs achats en biens d’équipement ou en automobiles. Ce qui est directement en relation avec la récession qui paraît programmée désormais outre-Rhin. L’industrie germanique, tournée massivement vers l’export, voit se réduire très sensiblement ses carnets de commandes. Ce qui rend la situation d’autant plus préoccupante pour l’Allemagne, et derrière elle pour ses partenaires de la zone euro, que la consommation intérieure n’apparaît pas franchement en mesure de prendre le relais, compte tenu de la persistance d’un énorme secteur à bas salaire et de l’explosion des prix de l’immobilier et des loyers.
Le national-libéralisme de Trump and Co comme facteur aggravant
Parfois appréhendé comme une sauvegarde populiste ou (et) autoritaire de ce système global en crise, le national-libéralisme présente en fait toutes les caractéristiques d’un facteur aggravant qui pourrait au contraire précipiter rapidement le monde vers l’abîme. Les dumpings fiscal, social et environnemental pratiqués par Donald Trump ont déjà commencé à montrer leurs limites. Ils sont même entachés d’un effet boomerang déjà bien perceptible, si l’on en croit une majorité d’analystes états-uniens.
On a vu les incidences des privilèges du dollar. Ceux-là permettent, de fait, un endettement considérable de l’hyperpuissance, qui s’est notamment lancée dans une débauche inédite de dépenses militaires. De quoi rajouter des tensions internationales, voire des menaces de guerre à l’instabilité ambiante. D’autant que le président des États-Unis ne cache pas sa volonté d’imposer d’ici à la fin de l’année un nouveau deal commercial à la Chine en usant de toutes les cartes dont il dispose pour infléchir le rapport de forces.
Les enseignements, pas si vieux, du krach de 2007-2008, oubliés !
L’obsession à jouer dans la main de la finance – consensuelle parmi les dirigeants du G7 – est au cœur de la crise du système. Oubliés, les enseignements pourtant encore si frais du krach de 2007-2008. Pis, les nationaux-libéraux comme Donald Trump ou Boris Johnson, le petit nouveau du club des sept, très attendu à Biarritz, qui vient de faire son entrée au 10 Downing Street, ne croient qu’en de nouvelles dérégulations. Le président des États-Unis a déjà envoyé par-dessus bord les quelques timides garde-fous, les lois Dodd-Frank, instaurés en 2009 pour contenir l’influence des agioteurs et protéger les épargnants, consommateurs de services financiers. Et le premier ministre britannique entend mettre la City au diapason sur le Vieux Continent.
Résultat de cette soumission générale à la finance : les politiques développées partout à la suite de l’effondrement de 2008 pour réduire le loyer de l’argent, relancer le crédit et stimuler la croissance n’ont eu que peu d’effets sur l’activité réelle. L’utilisation de l’argent a été massivement détournée par les banques et les grands opérateurs boursiers vers des investissements réputés rapidement lucratifs. Ce qui contribue à l’accumulation de nouvelles bulles financières.
Le crédit gratuit n’est pas en soi une mauvaise recette. À condition cependant de mettre en place une sélectivité de l’accès à cet argent pour qu’il aille à l’économie réelle et ne soit plus confisqué par les marchés financiers. Si le G7 est bien incapable de penser un tel saut, les citoyens du monde y auraient, eux, tout intérêt.
Bruno Odent
Le contre-sommet ou l’antithèse d’un G7 bunkerisé. « Nous ne nous tairons pas » : le contre-sommet du G7 qui a débuté hier à Irun (Espagne) et Hendaye (France) se veut la caisse de résonance de toutes les contestations du « capitalisme forteresse » qu’incarnera Biarritz, complètement « bunkerisée ». Des dizaines d’organisations ont assisté au coup d’envoi de ce rassemblement, pour trois jours d’échanges et de débats, avant une importante