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Portugal: progression du parti socialiste, recul de la "gauche radicale"
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Le bloco recule d'un point, le parti communiste recule de deux points
A l’ère d’une Europe bousculée par le « dégagisme » et la vague de candidats « antisystème », la victoire sans nuance du traditionnel Parti socialiste (PS, gauche) portugais aux élections législatives relève de la prouesse.
Dimanche 6 octobre, personne à Lisbonne n’ignorait que cette performance incombait en grande partie à son leader, le social-démocrate Antonio Costa, premier ministre sortant et auteur de ce que tous désignent désormais comme « le miracle portugais ». Au bord de la banqueroute en 2010, le pays a renoué avec la croissance économique, sans laisser déraper les comptes publics. Une prouesse, donc.
Frisant la majorité absolue, le PS a raflé dimanche, selon les résultats provisoires, 36,65% des voix, laissant loin derrière lui le Parti social-démocrate (PSD, centre droit) à 27,9% mais aussi ses anciens alliés du Bloc de gauche (gauche radicale, 9,3 %) et du Parti communiste (6 %).
Seule entorse à ce scénario classique d’un vieux monde politique est l’émergence du Parti des personnes, des animaux et de la nature (PAN), un jeune mouvement écologiste « ni de gauche, ni de droite » qui parvient à récolter près de 3 % des votes s’approchant du score de la droite libérale du CDS-PP, autour de 4 %.
Abstention record
Adoubé, Antonio Costa parvient ainsi à assurer sa réélection, tout juste troublée par une abstention record (45,5%), en partie liée au départ massif d’actifs lors de ces dernières années. Une consécration pour ce social-démocrate qui, sous ses faux airs nonchalants, est parvenu à faire taire la montée d’un discours anti-euro et anti-Europe dans un pays ravagé par la cure d’austérité drastique imposée par la « troïka » (Banque centrale européenne, Fonds monétaire international et Commission européenne) de 2011 à 2014.
Rares étaient pourtant ceux à imaginer, quatre ans plus tôt, que le quinquagénaire, d’une famille originaire de Goa, en Inde, parviendrait à s’imposer. Perdant lors des élections de 2015 derrière la coalition de centre droit, le PS n’est parvenu à gouverner qu’avec l’alliance du Bloc de gauche et du Parti communiste, à l’époque favorable à la sortie du pays de la zone euro. Très vite, les analystes ont qualifié cet improbable mélange de « geringonça », un truc, un bidule, destiné à se dissoudre dès les premiers désaccords.
C’était sans compter sur les dons de négociateur d’Antonio Costa – « un charmeur » disent ses ennemis –, capable avec son ministre de l’économie de mêler responsabilité budgétaire et politiques sociales. Résultat : chassant la droite sur son discours de « contas certas » (les bons comptes), l’homme a aussi su amadouer les syndicats.
« Antonio Costa n’en a pas fait assez pour les travailleurs, mais d’un autre côté, nous avons pu regagner une partie des droits que nous avions perdu avec la troïka », reconnaît Jose Manuel de Oliveira, coordinateur national de la Fédération des syndicats de transports et de communications. « Antonio Costa n’a pas fait un gouvernement de gauche mais le soutien du Bloc de gauche et du Parti communiste ont permis quelques conquêtes sociales », ajoute-t-il.
Construire une majorité solide pour relancer le pays
Dimanche, depuis l’hôtel Altis à Lisbonne, où il suivait les résultats, l’ancien maire de la capitale portugaise s’est pourtant gardé de tout triomphalisme. « Nous sommes conscients que le contexte international nous met face à des défis importants. Il y a des réalités qu’aujourd’hui, personne ne peut ignorer, comme les bouleversements climatiques qui imposent des décisions urgentes et déterminantes pour notre futur et exigent une stabilité politique », a-t-il expliqué.
Après une croissance à plus de 2 % en 2018, que beaucoup jugent dopée par le tourisme et les investissements étrangers, le Portugal devra affronter le ralentissement prévu de l’économie mondiale. Ce coup de frein pourrait mettre au jour les fractures d’un pays qui a dû délaisser ses investissements publics pendant de longues années et souligner les fragilités de son modèle où, en dépit d’un chômage au plus bas, les emplois créés restent en majorité mal payés et précaires.
Tour à tour surnommé le « Gandhi de Lisbonne » pour la politique sociale qu’il a mise en place dans la capitale ou le « Tigre de Malaisie » pour ses colères imprévues, Antonio Costa sait qu’il ne pourra plus mener une politique de « petites doses » et qu’il lui faudra construire une majorité solide.
A la veille de former son gouvernement, le score du PS autorise le leader socialiste à s’allier avec un petit parti comme le PAN, à même de séduire un électorat plus jeune.
Mais si la droite sort défaite de ce scrutin, les analystes observent que les radicaux du Bloc de gauche, dirigés par la virulente Catarina Martins, disposent d’un électorat fidèle. « Avec environ 9 %, le Bloc de gauche est un parti qui compte. Et il vaut mieux pour Antonio Costa, être son allié que son opposant. Refaire une alliance avec les radicaux et les communistes serait sans doute le plus stable et le plus présentable socialement », observe le politologue Antonio Costa Pinto.
Claire Gatinois
- Défaite historique des vétérans de la guerre contre la Serbie aux législatives kosovares. C’est un résultat historique dans la courte existence du Kosovo. Pour la première fois depuis l’indépendance de ce petit pays des Balkans obtenue en 2008, le Parti démocratique du Kosovo (PDK) de l’actuel président Hashim Thaçi a subi une lourde défaite aux élections législatives organisées dimanche 6 octobre et ne devrait plus être en mesure de gouverner. Après onze ans de participation au pouvoir, le PDK n’obtiendrait que 21 % des voix, selon des résultats représentant 85 % des suffrages. Ce résultat est un camouflet pour M. Thaçi, ancien commandant de l’Armée de libération du Kosovo (UCK), la guérilla albanophone qui a combattu la Serbie en 1998-1999. A 51 ans, celui que l’on surnomme aussi « Le Serpent » dominait la vie politique kosovare de manière ininterrompue depuis le conflit. Le gouvernement de coalition que son parti formait avec d’autres anciens commandants de l’UCK était tombé en juillet, après des divisions sur le sujet des relations avec Belgrade, qui ne reconnaît toujours pas l’indépendance de son ancienne région. A la place, les Kosovars ont plébiscité les deux partis d’opposition, qui incarnent l’aile plus « pacifiste » du nationalisme albanophone. Selon les résultats encore partiels, le parti Vetëvendosje (Autodétermination), une formation nationaliste de gauche, arriverait légèrement en tête, avec 26 % des voix, devant la Ligue démocratique du Kosovo (LDK, centre droit), créditée de 25 % des voix. Si cette première place se confirme, c’est le fondateur et chef charismatique de Vetëvendosje, Albin Kurti, qui devrait être désigné en priorité pour former un gouvernement, ce qui serait un second bouleversement majeur pour le pays.