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Extinction Rebellion est-il le Nuit debout écologiste ?
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
https://www.marianne.net/debattons/entretiens/extinction-rebellion-est-il-le-nuit-debout-ecologiste
Manuel Cervera-Marzal revient sur le mouvement "Extinction Rebellion", ses origines et ce qu’il défend.
Après avoir bloqué le centre commercial Italie 2, dans le XIIIe arrondissement de Paris, ce samedi 5 octobre, les militants d’Exction Rebellion occupent depuis plusieurs jours la place du Chatelet. D’où vient et que défend ce mouvement qui semble ringardiser Greenpeace et WWF ? Avons-nous affaire à une nouvelle forme de "dégagisme", qui toucherait aujourd’hui les associations écologistes ?
Propos recueillis par Kévin Boucaud-Victoire
Marianne : D’où vient Extinction Rebellion (XR) ? Quelles idées défend cette organisation ?
Manuel Cervera-Marzal : C’est un mouvement qui a été créé il y a une bonne année en Angleterre. Sa première action avait été de bloquer des ponts de Londres, avec deux revendications essentielles. La première, c’était que les gouvernants disent toute la vérité sur la nécessité de l’urgence climatique. La seconde, c’était d’atteindre la neutralité carbone d’ici une dizaine d’années.
Un point important à souligner : elle est composée de militants assez jeunes. Il y a un renouvellement générationnel au sein de la cause écologique, avec des militants qui ne se satisfont plus du travail réalisé par les grandes ONG type WWF ou Greenpeace. Ils estiment que ces dernières sont trop dans le plaidoyer et l’expertise et pas assez dans l’action directe.
Justement, XR semble ringardiser les associations écologiques comme Greenpeace ou WWF. Comment expliquer son succès ? Pouvons-nous parler d’un "dégagisme associatif" ?
Oui, elle les ringardise en un sens, en attirant l’attention sur le fait que sur les trois dernières décennies ces grandes ONG ont énormément grossit et ce sont professionnalisées. Rappelons qu’au départ, elles ont pris naissance autour de petits groupes d’activistes très radicaux, dans les années 1970. Elles menaient des actions de désobéissance civile, contre le nucléaire, notamment militaire.
Aujourd’hui, ce ne sont plus des groupes de militants, mais de plusieurs centaines de salariés, avec des financements qui reposent toujours sur des dons particuliers, mais aussi sur des subventions publiques. Ces associations se sont rapprochées de l’appareil étatique et sont passées d’une posture de contestation du pouvoir à une posture de collaboration avec le pouvoir. Cela se voit à leurs participations régulières à des "Grenelle de l’environnement" ou des conventions sur l’écologie organisées par le gouvernement. C’est pour cela qu’elles ont perdu en potentiel subversif et n’ont plus d’attrait aux yeux des jeunes générations qui rejoignent XR ou même Youth for Climate. Ces dernières attirent l’attention sur le caractère obsolète de ces ONG, qui manquent de "radicalité".
Greeanpeace est interpellée par la montée de XR. Du coup, elle réinvestit davantage ce qui avait fait son ADN à l’origine. Greenpeace a par exemple soutenu la campagne des décrocheurs de portraits de Macron. Cela invite ces mastodontes de l’écologie de revenir vers un répertoire d’action qu’elle avait un peu délaissé, afin d’attirer à nouveau la jeunesse.
Ils espèrent toucher l’opinion publique par les médias, puis les décideurs, qui ont les yeux rivés sur leurs cotes de popularité
Pourquoi choisir la désobéissance civile comme mode d’action ?
Le mouvement constate qu’il y a une vraie urgence et que chaque année perdue, c’est un dixième de degré en plus. A terme, ce sont des dizaines millions de réfugiés climatiques et plusieurs espèces animales qui disparaissent. L’urgence climatique est attestée par chaque rapport du GIEC. Face à cela les moyens traditionnels d’agir sur le politique sont trop longs. Attendre de changer de gouvernement pour enfin avoir des mesures à la hauteur, c’est trop long.Aller en justice, afin d’obtenir des juges des décisions qui forceraient les gouvernements plus soucieux de l’environnement, c’est pareil, on connaît la lenteur de la justice. Les manifestations font de moins en moins parler. Les pétitions restent très symboliques. Elles permettent de se compter et de constater que nous sommes nombreux. Mais aucune pétition n’a forcé un gouvernement à revenir sur ses décisions. En fait, la désobéissance civile semble être la seule action à la hauteur. Dans ces actions, je perçois deux dimensions.
Il y a ce qui relève de la bétonisation des terres arables ou cultivables. Quand des militants occupent à Notre-Dame-des-Landes ou à Gonesse, il s’agit vraiment d’empêcher tout de suite et maintenant le remplacement de champs par un aéroport ou par un centre commercial. Ces actions directes ont pour objectif d’empêcher la destruction du vivant.
Mais il y a aussi la volonté, par ces actions spectaculaires ou coup de poing, d’interpeler les médias. L’occupation de la place du Châtelet n’a pas pour but d’empêcher une bétonisation. Il y a un bel écho médiatique de leur action. Ils espèrent toucher l’opinion publique par les médias, puis les décideurs, qui ont les yeux rivés sur leurs cotes de popularité.
Avec XR, assistons-nous à une sorte de Nuit debout écologiste ?
Je pense qu’il y a une continuité entre les deux mouvements, à un double niveau. D’abord,dans le mode d’action utilisé : il s’agit dans les deux cas d’occuper. Nuit debout, occupait des places publiques de manière permanente sur le modèle des Indignés. L’idée était de se réapproprier un espace public qui était de plus en plus un espace privatisé, avec des magasins, de la publicité ou des festivals sponsorisés par NRJ. Concrètement, en occupant Italie 2 ou la place du Chatelet ou une ZAD – j’en avais compté 104, il y a deux ans de cela en France –, ils font pareil.
Ils sont souvent précaires ou menacés par le déclassement économique
Mais ce n’est totalement neuf, si nous regardons l’histoire des mouvements sociaux. Les ouvriers occupaient leurs usines et les étudiants leurs universités. Mais cela se fait de moins en moins. Il n’y a presque plus d’usines. Et quand les étudiants tentent d’occuper les universités, les présidents appellent les préfets, qui envoient les forces de l’ordre afin de les déloger dès la nuit même. Cela ne se faisait pas il y a une dizaine d’année. Comme il n’est plus possible d’occuper les usines et les universités, ce sont les places qui sont occupées.
Le deuxième lien entre les deux mouvements, est sociologique. XR et Youth for Climate, concernent, dans les grandes lignes – on trouvera toujours aussi quelques retraités ou quelques enfants issus de l’immigration –, des Blancs, plutôt urbains, entre 15 et 30 ans, diplômés ou en voie d’obtenir des diplômes de bac+2 et bac+5. Mais ce ne sont pas pour autant des privilégiés. Ils sont souvent précaires ou menacés par le déclassement économique. C’est aussi ce qui explique que XR existe déjà dans 40 pays ou pourquoi le mouvement des occupations de places, qui comprend Nuit debout, les Indignés en Espagne, Occupy Wallstreet aux États-Unis, est autant international. Il y a une forte circulation de ce mode d’action. Car nous sommes en présence d’une jeunesse, qui a voyagé pendant son adolescence, a parfois fait Erasmus et a un accès privilégié à la circulation internationale.




