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SYRIZA pourrait-il devenir un "nouveau PASOK" ?

Lien publiée le 2 décembre 2012

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Traduction d'un texte d'un camarade de l'OKDE Spartakos ; on pourra lire le texte en anglais sur le blog http://4thinternational.blogspot.fr/

Nikos Tamvaklis: SYRIZA pourrait-il devenir un "nouveau PASOK»?

Introduction

Le succès inattendu de SYRIZA, deuxième plus grand parti dans les deux dernières élections en Grèce, et l'éventualité que Tsipras Alexis soit le prochain Premier ministre a incité de nombreuses personnes à penser que SYRIZA occupe déjà la position tenue auparavant par le PASOK depuis bientôt quarante ans . Beaucoup voient pour Tsipras un rôle de leader autrefois occupé par Andréas Papandréou, un rôle décisif pour la période après la chute de la dictature militaire de 1967 à 1974. Selon la terminologie dominante de la majorité de la gauche grecque (y compris SYRIZA), nous sommes confrontés à la consolidation d'un nouveau «système bipartite", c'est à dire une dualité de partis prétendant à gouverner au-dessus des distinctions de classe et en excluant la lutte des classes. Mais si le terme «bipartisme» dans le passé occultait une lecture correcte de la situation politique, aujourd'hui, le même terme non seulement obscurcit la réalité politique actuelle, mais masque la gravité de la situation sociale tragique et l'impasse politique actuelle. Certes, les ressemblances extérieures entre l'actuel parti SYRIZA après les élections, et le PASOK de 1974 à 1981, sont évidents. La question cruciale est de savoir si ces similitudes apparentes sont importantes entre ces deux partis politiques, et si elles détermineront prochainement l'avenir social et politique.

La montée et l'intégration du PASOK

Le PASOK de 1974 à 1981 s'est constitué autour des couches populaires et en particulier celles qui étaient encore sous la forte influence de la tradition et du souvenir du grand mouvement de libération nationale (EAM 1940-44) avec de solides références au socialisme.Le «Socialisme réellement existant», avait perdu l'éclat séduisant de la révolution et du renouveau social, mais son existence même confirmait encore la possibilité de faire fonctionner une économie post-capitaliste avec la planification étatique centralisée. L'alliance des couches populaires autour du PASOK dans la période 1974-1981 se développe et la construction en parallèle des structures du parti se stabilise. Les membres du parti ont été actifs dans les mouvements sociaux et sur d'autres sujets, pas seulement dans les couches petites-bourgeoises, de petits agriculteurs et petits commerçants, qui ont incontestablement formé l'épine dorsale du parti. Ils étaient aussi dans le mouvement ouvrier qui avait émergé dans les usines, les coopératives rurales et dans les municipalités après la chute de la dictature. Le terme «auto-organisation» a d'abord été utilisé par Andreas Papandreou pour désigner le développement impétueux et largement spontané des sections locales du parti national.

Le PASOK a présenté un programme radical qui comprenait la création de l '«État-providence» (enseignement public et gratuit, d'un système national de santé) et a promis la sortie de la Grèce de l'OTAN et de la CEE. Il cultivait et représentait un nationalisme simpliste face à l'impérialisme avant son accession au gouvernement. Le PASOK a défilé aux élections du 18 Octobre 1981 avec un slogan démagogique qui reflètait les attentes populaires: «Le 18 octobre socialisme». Sans aucun doute, le jour de son accession au gouvernement, la direction du PASOK a instantanément oublié le socialisme et aussi la sortie de l'OTAN et de la CEE. Le programme radical de la «troisième voie» vers le socialisme a fait place à la gestion et à la modernisation de l'Etat bourgeois. Les réformes effectuées sont globalement en accord avec les besoins du capitalisme en Grèce. Les structures du parti ont suivi le chemin d'une intégration rapide dans la bureaucratie d'Etat, tout en menant une longue lutte interne pour neutraliser, isoler et marginaliser son secteur ouvrier. Les minorités radicales qui avaient rejoint le parti depuis sa fondation ont été soit expulsées par la voie administrative, ou ont été pleinement intégrées dans l'appareil bureaucratique.

Dans les moments critiques, Andreas Papandreou, un personnage puissant et charismatique, a montré qu'il pouvait s'approcher au plus près des sentiments et des désirs de larges couches, et cultiver ou redynamiser leurs illusions pour un parlementarime indolore, «troisième voie» vers le socialisme. Certes, le capitalisme mondial depuis le début des années 80, après avoir sombré dans la longue vague de récession, a lancé sa grande offensive contre les acquis du mouvement ouvrier. Le néolibéralisme de Reagan et de Thatcher a ouvert la voie.Le capitalisme grec, cependant, semble avoir la capacité de faire certaines concessions à «l'Etat providence». Ces politiques ont été au moins partiellement en contradiction avec les principales politiques capitalistes dans le monde.

Les bons scores électoraux et la mutation de SYRIZA

SYRIZA, après les élections de 2012, s'est allié la majorité de la classe ouvrière qui se réfèrent toujours, d'une manière assez générale et abstraite, à la tradition idéologique de la gauche. Certes, après l'effondrement du «socialisme réellement existant», plus de deux décennies de domination idéologique du néo-libéralisme ont semés la confusion et la désorientation dans la classe ouvrière et les couches populaires. Mais SYRIZA (et auparavant SYNASPISMOS) n'a jamais tenté d'analyser cette situation avec une claire et honnête autocritique sur les limites et l'attitude de la direction historique du KKE-intérieur et SYN en faveur des bureaucraties du «socialisme réellement existant ". Bien plus, la faiblesse idéologique générale et le déclin de l'organisation de la gauche a ouvert la voie aux fortes tendances à une hausse de la xénophobie et du racisme dans la société grecque, et a finalement permis, dans les conditions de crise économique aiguë, l'émergence de la droite et des partis néo-nazis.

Le ralliement des travailleurs à SYRIZA s'est fait principalement dans le cadre des élections parlementaires. Ce n'était pas le résultat de l'évolution des structures du parti et de l'activité de ses membres dans le mouvement ouvrier, ni du nouveau mouvement de résistance des assemblées populaires locales d'auto-organisation. La présence de SYRIZA dans les mobilisations de masse reste timide, limitée et liée à son ascension lors des élections législatives. Les campagnes électorales de SYRIZA comptent beaucoup plus sur les «contacts» avec les couches populaires à travers les médias et les slogans publicitaires, et beaucoup moins sur le contact direct et l'activation du potentiel de sa base sociale. Les discours publics de Tsipras se déplacent de plus en plus vers la promesse d'une meilleure gestion de l'Etat bourgeois et de l'économie capitaliste. En outre Tsipras (comme le jeune A. Papandreou) tente de s'élever au-dessus de l'appareil du parti et de traiter directement avec les ressentis populaires et les espoirs d'un parlementarisme soft pour résoudre le cauchemar de la crise - au sein des institutions de l'UE. Les couches populaires se sont ralliées, à contrecœur et sans enthousiasme, à SYRIZA, parce qu'ils sentent à la fois la gravité de la situation et le caractère utopique des promesses faciles. Une partie importante des cadres SYN est déjà intégrée dans la bureaucratie d'État. Le programme électoral de SYRIZA reste strictement dans le cadre de la gestion de l'Etat bourgeois. Les déclarations légendaires pour "le rééchelonnement de la dette" à travers les institutions de l'UE sont d'une crédibilité douteuse et se limitent à venir au secours des restes de l'Etat-providence et la vague «reconstruction productive» de l'économie capitaliste. La perspective du socialisme, avec l'économie planifiée, la nationalisation des banques et des grandes entreprises, comme la seule alternative réelle à la crise du capitalisme n'a pas été vraiment mentionnée dans la période pré-électorale, et beaucoup moins après la proclamation des résultats. Le mot «socialisme» a été supprimé, apparemment pour toujours, du vocabulaire de Tsipras.

Pire encore, avec l'ascention rapide de l'Aube dorée fasciste (GD), SYRIZA se limite à la défense des institutions de la démocratie bourgeoise en faillite. C'est une démocratie qui s'enfonce dans le discrédit général, immergée dans des scandales qui reflètent la panique générale des politiciens capitalistes. Au moment même où la perspective socialiste devrait être avancée contre le régime corrompu, SYRIZA libère l'espace pour les slogans et la démagogie d'Aube dorée. Au moment même où SYRIZA devrait appeler à manifester face à la terreur fasciste dans les rues et les quartiers avec des mobilisations de masse, il invoque la légitimité bourgeoise en s'appuyant sur les flics - qui sont fortement infiltrés et rongés par le fascisme. En outre, la première tentative d'intégrer ou d'éliminer les radicaux qui composent SYRIZA a commencé rapidement, en Septembre dernier,avec la proposition de la direction SYN d'un appareil de parti unique . Cette évolution est censée le rendre plus fiable aux yeux de la classe dirigeante.

Certes, les chances d'obtenir le pouvoir gouvernemental dans un pays européen comme la Grèce, par un des partis traditionnels de gauche comme SYRIZA pour la première fois après des décennies, alarme les dirigeants européens. Pas en raison des risques posés par SYRIZA, mais à cause de l'instabilité générale et de développements incontrôlés susceptibles de se dérouler,que de larges couches percevront comme un gouvernement de gauche, comme leur propre victoire, et en raison des réactions en chaîne susceptibles de se produire dans d'autres pays européens. Ils savent très bien que les conditions de la crise économique ont créé une poudrière sociale qui peut exploser à tout moment, indépendamment des désirs, des plans et des estimations de la direction réformiste de gauche.

D'autre part, la majorité de la gauche radicale européenne semble être hypnotisée par la perspective d'une victoire électorale de SYRIZA. La plupart des partis européens de gauche se sont précipités pour apporter un soutien inconditionnel à la direction SYN du parti, sans comprendre la relation entre les classes, leurs forces et leurs luttes au sein de la société grecque, sa réflexion sur la scène politique, et la vraie nature et l'histoire du parti SYN. Certes, le désir d'une victoire de la gauche en Europe, après près de trois décennies de déclin continu, est pleinement justifié et compréhensible. Mais substituer ses désirs aux réalités dans les conditions actuelles est extrêmement dangereux. Pires encore sont les caractérisations injustes et les attaques contre les forces qui tentent de construire une gauche anticapitaliste cohérente et communiste dans ces conditions difficiles.

* Il s'agit d'une traduction d'un article paru dans Spartakos, l'analyse de OKDE-Spartakos, section grecque de la 4ème Internationale.

NOTES

SYRIZA: Coalition de la gauche radicale - c' est un parti de gauche politique, fondé à l'origine avant l'élection générale de 2004, une coalition de partis avec les SYNASPIMOS un large éventail de petits groupes politiques de la gauche radicale en indépendance avec les politiciens. Lors de l'élection générale de 2004, la coalition a rassemblé 3,3% du total des voix. Lors des élections générales du 17 Juin 2012 SYRIZA qui a recueilli 27% du total est devenu le deuxième plus grand parti au parlement grec derrière la Nouvelle Démocratie (droite) et est maintenant le principal parti d'opposition.

PASOK: Mouvement socialiste panhellénique, le parti principal centre gauche et historiquement l'un des deux principaux partis politiques en Grèce (l'autre est le parti de la Nouvelle Démocratie). Il a été fondé par Andreas Papandreou après la chute de la dictature en 1974. En 1981, le PASOK est devenu en Grèce le premier parti social-démocrate a obtenir une majorité au Parlement.

EAM: Front de libération nationale a été le principal mouvement de la résistance grecque pendant l'occupation de la Grèce durant la Seconde Guerre mondiale. Sa principale force motrice était le Parti communiste grec (KKE). EAM est devenu un mouvement social de masse et a créé son propre gouvernement dans les domaines qu'il avait libérés au printemps 1944. Le mouvement atteint son apogée après la Libération, fin 1944, quand il contrôlait la plupart des régions du pays, avant de subir une défaite catastrophique militaire et politique après une série d'erreurs tragiques commises par la direction stalinienne.

Parti communiste grec - Intérieur a été formé après une fracture majeure du Parti communiste grec (KKE) en 1968. KKE-Intérieur a surtout rompu ses liens face à la la subordination idéologique du KKE à la direction du Parti communiste de l'Union soviétique. Plus tard, il a établi des liens avec des partis comme le Parti communiste italien (PCI) et le Parti Communiste Roumain de Nicolae Ceauşescu, en adoptant une perspective euro-communiste. Le parti a également opté pour un «renouveau de la gauche» et adopté le concept de «socialisme à visage humain». KKE - Intérieur a été dissous quelques mois après son 4e Congrès en 1986, se divisant en deux parties: à gauche un nouveau «Parti communiste de Grèce (intérieur) - Renouveau de la gauche» et à droite «la gauche grecque", l'ancêtre de SYN aujourd'hui principale composante de SYRIZA.