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Lula sort de prison après plus d’un an et demi d’incarcération
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
L’ancien chef de l’Etat, condamné dans l’affaire « Lava Jato », était sous les verrous depuis avril 2018 pour corruption. Vendredi, la justice a autorisé sa libération.
Luiz Inacio Lula da Silva tient un discours à sa sortie de prison, dans la ville de Curitiba, dans le sud du Brésil, le 8 novembre 2019. CARL DE SOUZA / AFP
L’ancien président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010) a été libéré, vendredi 8 novembre, et a été accueilli à sa sortie par une véritable marée rouge de militants de gauche devant la prison de Curitiba, dans le sud du pays, après plus d’un an et demi d’incarcération.
La justice brésilienne avait autorisé, une heure plus tôt, la libération de l’ancien président brésilien, condamné à l’issue d’un procès controversé pour corruption dans l’affaire « Lava Jato » (« lavage express »). Portant une veste sombre, Lula, 74 ans, est sorti à pied, souriant aux côtés de sa compagne, la sociologue Rosangela da Silva, embrassant chaleureusement des sympathisants et saluant la foule d’un poing levé.
Combatif, il a rapidement harangué la foule de sa voix rauque. « Je veux continuer à lutter pour améliorer la vie du peuple brésilien », a-t-il dit, attaquant d’emblée le gouvernement du président d’extrême droite Jair Bolsonaro. « Le peuple a de plus en plus faim, il est au chômage, le peuple travaille pour Uber ou livre des pizzas », a lancé Lula, qui avait pu, au cours de ses deux mandats (2003-2010) extraire près de 30 millions de Brésiliens de la pauvreté dans une période de forte croissance économique.
Après ce premier bain de foule à Curitiba, Lula doit aller samedi près de Sao Paulo, au syndicat des métallurgistes de Sao Bernardo do Campo, où il était resté retranché avec ses partisans avant de se rendre aux autorités pour commencer à purger sa peine en avril 2018.
L’ancien chef de l’Etat avait engrangé une victoire juridique décisive, jeudi, à l’annonce d’une décision de la Cour suprême jugeant inconstitutionnelle la jurisprudence selon laquelle un condamné peut être emprisonné avant l’épuisement de l’ensemble de ses recours si sa condamnation a été confirmée en appel.
L’Amérique latine réagit
« La Cour suprême a voté contre le peuple », a déploré Major Olimpo, le leader au Sénat du PSL, la formation du président Jair Bolsonaro animée par une farouche haine du PT, le parti des Travailleurs fondé par Lula en 1980. Le président Bolsonaro, habituellement très disert sur Twitter, est resté muet sur le sujet, préférant tweeter sur l’action de son gouvernement. En 2018, il avait lâché en pleine campagne qu’il souhaitait voir Lula « pourrir en prison ». Son fils député Eduardo a en revanche déploré sur Twitter qu’« on libère les brigands ».
Le président élu argentin, le péroniste de centre gauche Alberto Fernandez, a salué sa sortie de prison, soulignant son « courage » et son « intégrité » et dénonçant le « processus judiciaire arbitraire auquel il a été soumis ». « Le peuple vénézuélien est heureux et salue la libération du frère Lula », s’est quant à lui exclamé le président du Venezuela Nicolas Maduro.
Cuba s’est aussi félicité de sa libération après « 580 jours de détention injuste ».
Suites de l’enquête « Lava Jato »
Approuvée par six voix contre cinq, la décision enterre une mesure mise en place il y a trois ans et qui a contribué au succès de l’enquête anticorruption « Lava Jato ». Cette enquête est centrée sur des entreprises du bâtiment et des travaux publics (BTP) qui ont arrosé de pots-de-vin des responsables politiques et d’anciens cadres d’entreprises nationales en échange de contrats avec la compagnie pétrolière nationale Petroleo Brasileiro (Petrobras) et avec d’autres sociétés. Lula avait été accusé d’avoir bénéficié d’un triplex dans la station balnéaire de Guaruja, près de Sao Paulo, en échange de contrats accordés à une entreprise du BTP.
La perspective d’être emprisonné immédiatement après avoir perdu un premier procès en appel encourageait les suspects à négocier des accords de plaider-coupable avec les procureurs en leur fournissant des informations dans le cadre de l’enquête anticorruption. Le président de la Cour suprême, Jose Antonio Dias Toffoli, dont la voix a été décisive, a déclaré que les libérations ne seraient pas automatiques mais décidées par les tribunaux au cas par cas.
Les libérations décidées au cas par cas
Le magistrat Sergio Moro, qui a conduit l’enquête « Lava Jato » avant de devenir ministre de la justice du gouvernement de Jair Bolsonaro, avait averti avant la décision de la Cour suprême que revenir sur cette interprétation du code pénal constituerait un grand revers infligé à la lutte contre la corruption.
Les procureurs de « Lava Jato » ont déploré une décision qui compliquera leur tâche et favorisera l’impunité en raison des procédures d’appel « excessives » du système judiciaire brésilien. Le Parti des travailleurs (PT), dont est issu Lula, a salué l’arrêt de la Cour suprême. Sa présidente, Gleisi Hoffmann, l’a qualifié d’« étape très importante pour renforcer la démocratie et la Constitution à un moment où elles sont menacées par un gouvernement d’extrême droite ».
Selon le Conseil national de justice, près de 4 900 personnes pourraient potentiellement bénéficier de cet arrêt. Le barreau brésilien a fait valoir que la prison obligatoire violait la Constitution en ne respectant pas la présomption d’innocence des accusés tout au long de la procédure d’appel.