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Gilets Jaunes. Victor, incarcéré, "mon procès, expéditif, n’a même pas duré 10 minutes "
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
(Illustration) LP/ Frédéric Dugit
L’Humanité, 14 novembre 2019
Victor*, 33 ans, père de famille à la voix posée et au casier judiciaire vierge, à être incarcéré près de 3 mois à la prison de Montpellier en mars dernier. La trajectoire de ce plombier ressemble à celle de milliers de gilets jaunes.
Rien ne prédestinait Victor, 33 ans, père de famille à la voix posée et au casier judiciaire vierge, à être incarcéré près de 3 mois à la prison de Montpellier en mars dernier. La trajectoire de ce plombier qui se définit comme « zen, très calme, anti-violence » dans la vie quotidienne est pourtant emblématique de celle des milliers de gilets jaunes qui ont adopté, et revendiquent, la casse et l’affrontement avec la police comme gestes politiques.
« Avec les gilets jaunes, les soi-disant “casseurs” sont devenus M. Tout-le-Monde, analyse-t-il. On ne s’en sort pas économiquement et voter ne change rien. Expliquer avec des mots non plus. Donc, on doit saccager le pays pour faire entendre notre colère. » Au risque d’en payer le prix fort. Le 9 mars, lors de l’acte 16, sur la place de la Grande-Comédie, il déclenche un feu d’artifice à 22 coups : « Les 3 premiers partent en l’air et les suivants sur le cordon de CRS à 20 mètres en face de moi. » Il est immédiatement interpellé et placé en garde à vue, sans connaître ses droits – silence, appel d’un proche, visite médicale.
Il reconnaît les faits et accepte la comparution immédiate, conseillée par un avocat commis d’office. « Je pensais pouvoir reprendre mon travail le lundi. » Son procès, expéditif, « n’a même pas duré 10 minutes ». Jugé pour « violences sur personne dépositaire de l’autorité publique » et « participation à un groupement formé en vue de commettre des violences », il écope de 4 mois de prison ferme, 8 mois de sursis et 800 euros d’amende.
« Au début, je n’ai pas compris ce qui m’arrivait. Je n’avais jamais imaginé terminer en prison. » Il reste pendant cinq jours au quartier des « arrivants », en situation de choc, puis est placé dans une cellule exiguë avec un autre détenu incarcéré depuis un an, « dans des conditions honteuses ». Une forte solidarité va l’aider à tenir tant bien que mal. « À l’intérieur, les détenus m’appelaient “le gilet jaune”. Il y avait du respect, du soutien. Une surveillante m’appelait “camarade”, même la psychologue a fini par reconnaître que j’avais raison d’aller en manifestation. »
En son absence, sa compagne doit tout gérer, tout en cachant la situation à leurs enfants pour les protéger. Elle s’endette de 3 000 euros pour payer l’avocat, les loyers, le « cantinage » (somme d’argent envoyée au détenu pour payer les frais courants à l’intérieur). Mais le soutien s’organise. « J’ai bénéficié de cagnottes, je recevais des dizaines de lettres de solidarité, j’ai même pu à mon tour aider d’autres détenus. » Le dimanche soir, les soutiens se rassemblent devant la prison pour faire des « casserolades » et des feux d’artifice. « Toute la prison criait, c’était de la folie. C’était mon moment de gloire », se rappelle-t-il, ému.
Depuis sa sortie en juin, Victor purge son sursis, assorti d’une mise à l’épreuve de 2 ans. Il a pu être réemployé dans son travail précédent. Et, malgré des cauchemars récurrents, il se sent « encore plus déterminé ». « Le système ne veut pas répondre à notre colère, donc il met les gens en prison pour les détruire. Sur moi, ça a produit l’effet inverse. J’ai pris conscience que les prisonniers n’étaient pas la caricature qu’on en fait. Et je ne regrette absolument pas mon geste. » Il continue d’aller en manifestation « tous les samedis, en première ligne, avec (s)a femme… Mais les mains dans les poches ! rigole-t-il. (Il) ne peu (t) pas lâcher le mouvement, après toute cette solidarité qui (l)’a entouré ».
(*) Le prénom a été changé.
Propos recueillis par P. B.





