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Retraites : les Japonais incités à mettre 170.000 euros de côté avant leurs 65 ans

Japon

Lien publiée le 2 décembre 2019

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://www.europe1.fr/economie/retraites-les-japonais-incites-a-mettre-170000-euros-de-cote-avant-leurs-65-ans-3934355

Alors que le gouvernement français se réunit ce dimanche en séminaire pour discuter de la réforme des retraites, au Japon, le débat sur le sujet est également très vif. Le pays connaît le plus fort taux de senior au monde. Et l'exécutif est face à un casse-tête. 

REPORTAGE

Le gouvernement français est en séminaire ce dimanche, pour caler la feuille de route sur la réforme des retraites. Syndicats et patronat ont à nouveau été consultés cette semaine, et tout le monde a en tête la grande mobilisation sociale prévue jeudi contre la future réforme

Faudra-t-il travailler plus vieux ? Les pensions seront-elles moindres, les cotisations plus élevées ? Beaucoup de questions demeurent au sujet du futur texte qui devrait instaurer, à terme, un seul régime, universel au lieu des 42 existants. Mais ce n'est rien à côté du casse-tête auquel fait face le Japon !

Des mesures chocs pour un système qui va dans le mur 

Avec 28% de la population qui a plus de 65 ans, un record mondial, le Japon est dans une situation délicate. Le système de retraites va droit dans le mur. Les retraites doivent être payées de plus en plus longtemps car les Japonais vivent de plus en plus vieux. Et il y a de moins en moins d'actifs qui cotisent aux régimes de retraite, à cause d'un phénomène de dénatalité.

Comment le pays compte-t-il réagir ? Récemment, deux rapports officiels ont provoqué un coup de tonnerre dans l'opinion. Une première étude a carrément recommandé à chaque Japonais de mettre de côté 20 millions de yens – ce qui fait environ 170.000 euros – avant l'âge de 65 ans. La seconde est venue avertir que le montant des pensions allait diminuer dès l'année 2040. Il ne correspondra plus qu'à 50% voire 40% du salaire perçu avant le départ à la retraite, contre plus de 60% en ce moment.

Ces annonces ont tétanisé les Japonais. "20 millions à économiser avant 65 ans ?! Mais j’ai 35 ans, moi ! On aurait dû me le dire plus tôt", a réagi un Tokyoïte au micro d'Europe 1. "Plus on vieillira, moins on aura de ressources financières, mais plus nos dépenses de santé vont augmenter : à cause du coût des soins de santé. C'est si stressant comme perspective que, bon, j’essaye de ne pas trop y penser", poursuit une autre. "C'est pénible. Je ne me vois pas du tout travailler jusqu'à 75 ans !", enchaîne une troisième. "Ce système de retraites va devenir un fardeau trop lourd à gérer pour les prochaines générations", conclut un dernier. 

Parmi tous les Japonais préoccupés par leurs vieux jours, il y a beaucoup de femmes. Car au Japon, elles occupent deux fois plus souvent que les hommes des emplois précaires et irréguliers. Et elles ont souvent des carrière incomplètes. "Je n'ai commencé à travailler qu'il y a quatre ans. Quand, à la suite de mon divorce, j'ai dû subvenir toute seule à mes besoins. J'arrive à peine à joindre les deux bouts. Dans ces conditions, vous pensez bien que je n'ai pas du tout les moyens de mettre de l'argent de côté", indique une caissière interrogée par Europe 1.

55% des seniors Japonais continuent de travailler

Un retraité japonais sur deux n’a actuellement pas d’autres ressources que sa petite pension de retraite. "Vous voyez, ça, c'est tout ce qu'il me reste comme argent jusqu'à la fin du mois", nous montre une dame, veuve, de 66 ans. Par "ça", il faut comprendre les 600 à 700 yens qui lui restent par jour pour manger, soit cinq à six euros. Du coup, elle ne fait que deux repas par jour, pas trois.

Au Japon, un senior sur cinq vit sous le seuil de pauvreté, c’est le record des pays industrialisés. Ce qui explique que beaucoup de retraités continuent à travailler : c'est le cas de 55% des hommes et de 35% des femmes. Au total, ça fait neuf millions de seniors qui travaillent. A eux seuls, ils représentent 13% de la population active. C'est deux fois plus qu'en France.

"Il n'y a pas 36 solutions, il y en a 2. D'abord, augmenter les recettes. En clair, faire en sorte qu'il y ait davantage de gens qui cotisent aux régimes de retraite. Par exemple, les entreprises devraient se montrer plus souples : accepter d'employer du personnel âgé, pas seulement à temps plein, mais aussi à mi-temps, comme beaucoup de retraités le souhaiteraient", analyse Yuri Okina, spécialiste des régimes de retraites.

"Ensuite, il faudra réduire les dépenses, en étant plus équitables en termes de prestations sociales. Dans un tel système, les seniors aisés verraient leurs dépenses de soins de santé moins bien remboursées par la Sécu que les personnes âgées défavorisées", poursuit la spécialiste.

L'État devrait obliger les entreprises à garder jusqu'à 70 ans leur personnel 

Pour l'heure, le gouvernement tarde à se prononcer sur la réduction des dépenses de l'État, notamment sur le remboursement des dépenses de Santé. Un sujet politiquement sensible, vu le poids électoral des personnes âgées. Par contre, on y voit plus clair sur l'autre grand axe de la réforme : comment faire pour que davantage de gens cotisent aux régimes de retraite, ce qui les ferait sortir du rouge. L'État va sans doute obliger les entreprises à garder jusqu'à l'âge de 70 ans leur personnel âgé qui désire continuer à travailler, et non plus les garder jusqu'à 65 ans comme maintenant.

Le Japon va aussi essayer d’aider les 30% de Japonaises qui n'occupent pas d'emploi à en trouver un. Souvent parce qu'elles ont dû y renoncer à la naissance de leur enfant, à cause de la pénurie de crèches. On essaie donc de résorber cette pénurie, en créant des places de crèche.

Dernière mesure envisagée : tous les travailleurs précaires devraient être autorisés à cotiser au principal régime de retraite. Aujourd'hui, ce régime est réservé aux employés réguliers et à temps plein. Les précaires, eux, n'ont accès qu'à un sous-régime de retraite qui alimente peu les caisses de la Sécu. Or, ils sont très nombreux, au Japon : 40% des salariés occupent un emploi sous-statutaire.