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Blocage de la BNF jeudi
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
L'accès aux salles de lecture et aux expositions était fermé toute la journée de jeudi par les grévistes de l'intersyndicale CGT-FSU-SUD culture afin de protester contre le nouveau régime universel.
Opéra Garnier, Louvre, Comédie-Française… Le monde des arts et des savoirs se mobilise en masse, secteur par secteur, depuis le 5 décembre. Des actions qui marquent souvent. Ce jeudi matin, des personnels de la Bibliothèque nationale de France ont voté le blocage pour la journée du site situé quai Mauriac (XIIIe arrondissement de Paris). Quelques fans de fantasy, venus pour l’expo Tolkien, et une poignée de lecteurs égarés ont pu entrer dans les lieux avant que la grille ne se referme – bloquant également l’accès principal à une partie du cinéma MK2.
Dans la bibliothèque de recherche, en rez-de-jardin, quelques chercheurs errent parmi des milliers de places vides, le blocage a fonctionné – il n’y a plus qu’une seule entrée contre deux auparavant, les économies ont facilité la lutte. Les fonctionnaires en charge de distribuer les ouvrages réclamés s’ennuyaient ferme. «Mais comment êtes-vous passé ? En tout cas, toute sortie sera définitive je pense», rigole l’une d’entre elles. A midi, il n’y a toujours pas foule, entre les étudiants et ceux venus pour les expos en haut, les doctorants en bas et le personnel, un peu partout. On a l’impression d’être un vendredi 16 août au petit matin.
Même budget, plus de missions
Dehors, la grille grise reste fermée, des drapeaux syndicaux CGT, FSU ou SUD au vent, un souffle froid et qui cisaille. Quelques policiers sont en retrait, des personnes attendent de voir si cela va se débloquer. Aucune tension, c’est plutôt bon enfant. «On est en grève reconductible depuis le 5 décembre, explique Fabrice de SUD cultures solidaires. On est dans la continuité des actions au Louvre, au musée Picasso ou à Radio France et de lundi, pour les vœux de Franck Riester.» Il explique : «Ce blocage, c’est une action symbolique, surtout pendant l’expo Tolkien, qui marche bien. Le but est de demander le retrait de la réforme des retraites mais aussi de dénoncer l’impact qu’a le macronisme sur notre travail, comme le manque de postes ou le mot "management" qui s’implante même ici, à la BNF.»
Le dialogue social de plus en plus compliqué à la BNF ainsi que les moyens financiers sont aussi en jeu, car si le budget ne baisse pas, le nombre de missions, lui, a augmenté. Le nombre de contrats précaires (quelque 200 sur les 2 300 personnes qui travaillent à la bibliothèque) est un grief récurrent, une situation encore plus compliquée pour les personnes concernées depuis le passage de la réforme sur l’assurance chômage.
L’un de ses collègues se joint à la discussion et parle également des priorités dans les budgets, qui touchent par exemple les «acquisitions de collection, en diminution. Récemment, une vente à Cannes concernant des documents de l’après-Révolution française a été un échec pour la BNF car l’enchère était bien trop basse. Plusieurs chercheurs ont pourtant expliqué l’importance de ces documents». Il parle aussi du retrait au niveau des collections étrangères, notamment avec l’arrêt des abonnements à des revues : «Cela commence à se faire sérieusement ressentir.»
Convergence des luttes
Sur l’esplanade de la BNF, un groupe de personnes mobilisées se frottent les mains pour se réchauffer, replacent leur bonnet ou manteau pour rester au chaud. Ils ne travaillent pas sur le site. «Je suis comédienne, dit l’une d’entre eux, je n’ai pas tellement de marge pour me mobiliser dans mon métier. Alors j’ai multiplié les actions interprofessionnelles, notamment dans des dépôts de bus. On est souvent dans nos microcosmes, donc c’est important ces espaces de rencontre. Ça donne du courage.» Les nombreuses personnes qui ne font pas partie du contingent de la BNF expliquent toutes être là dans un esprit de convergence des luttes.
«Je viens par solidarité mais aussi parce que je suis mobilisé dans mon université, abonde Florian, doctorant et chercheur à Paris Saclay. Mais la BNF, c’est aussi mon lieu de travail et c’est important de soutenir les gens ici, avec qui, finalement, je travaille toute l’année.» Quelque chose d’utile, car, pour la comédienne mobilisée, la violence qui a touché les gilets jaunes ou les manifestations sur les retraites «atteint le courage». Elle ajoute : «S’ils ne lâchent rien là, c’est qu’ils veulent vraiment passer le message que cela ne sert plus à rien de manifester ou de se mettre en grève. Ce serait un 49.3 contre la rue.»