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Non à la casse de La Poste ! Un exemple en Ariège

Laposte

Lien publiée le 22 avril 2021

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

A Dreuilhe, en Ariège, une partie des postiers se sont mis en grève illimitée. Les facteurs protestent contre la réorganisation des services de La Poste.


La quatrième semaine de grève a commencé pour les salariés de la plate-forme de distribution de courrier de Dreuilhe, près de Lavelanet. Les 46 employés de ce site sont chargés de distribuer les colis, le courrier et la publicité dans une cinquantaine de communes situées en zone rurale et en zone de montagne. Des missions difficiles, différentes du travail en zone urbaine, que les facteurs de Dreuilhe doivent accomplir en 29 tournées quotidiennes au total. Enfin, pour l’instant, car la direction de La Poste considère en effet que les activités des facteurs de Dreuilhe ne sont plus rentables. Pour l’affirmer, elle s’appuie sur la diminution supposée du trafic à cause de la crise sanitaire, et sur le développement de la dématérialisation des services ; tout ça aurait diminué la circulation du courrier.

Tous les deux ans, La Poste réorganise ses sites. Par un savant calcul dont la classe dirigeante a le secret, l’objectif de ces réorganisations est de faire plus avec moins. Ainsi, quand un salarié quitte La Poste (mutation, départ en retraite), il est remplacé temporairement par un intérimaire, un facteur en CDD… Lors de la nouvelle réorganisation, on met un terme à ce contrat temporaire, mais on n’embauche pas ! Ce qui importe, c’est que les objectifs de productivité soient atteints au moindre coût.

Casse sociale : un exemple type

A Dreuilhe, cette réorganisation aura lieu le 27 avril (elle était initialement prévue le 20). Une partie des facteurs considèrent que lorsque leur direction leur a présenté le projet de réorganisation, tous les éléments n’ont pas été mis correctement en lumière, que la vérité a été enrobée, et exigent d’être consultés à nouveau. A grands coups de principes, la direction départementale de La Poste refuse d’organiser une nouvelle consultation. Quelles sont les conséquences concrètes de cette réorganisation ? Sur le papier, le nouveau projet prévoit d’abord de supprimer 5 tournées sur les 29. La charge de travail, elle, ne disparaît pas, mais se retrouve répartie sur les 24 restantes. La question de l’auto-remplacement des salariés se pose ensuite : actuellement, les facteurs effectuent leur tournée du lundi au samedi. Le projet final prévoit que chaque facteur fera sa tournée du lundi au vendredi et aura un jour de repos un samedi sur deux, mais le samedi travaillé consistera à remplacer les facteurs en repos. Et sans surprises, la direction envisage également de supprimer dix postes, sans en avoir informé les salariés du site, qui l’ont appris grâce aux syndicats. En bref, la conclusion logique de ce projet, c’est d’augmenter la charge de travail pour tout le monde, sur une zone géographique plus grande, et de remplir les mêmes objectifs de productivité avec moins de moyens matériels.

Un autre aspect de ce projet porte sur la mise en place de facteurs guichetiers : la Banque postale transfère son activité aux facteurs en guichet, qui partageront leur temps de travail entre le guichet et la distribution. Premièrement, certains services bancaires risquent donc de ne plus être assurés, dans une zone où il est déjà difficile d’y avoir accès, mais en plus de cela, ces postiers-là ne recevront que le strict minimum en termes de formations pour travailler en guichet. En reprenant dix postes, la direction assigne autant de facteurs à d’autres missions. Pour Anne Boïago, représentante syndicale de Sud PTT Haute-Garonne, il s’agit d’une stratégie en deux temps : on met en place un facteur guichetier tout en réduisant l’amplitude d’ouverture du guichet, ce qui pousse les usagers à se déplacer vers d’autres guichets dans le département. La conclusion de ce cercle vicieux, c’est que sous prétexte de rentabilité, on peut finalement fermer les guichets qui sont automatiquement moins fréquentés. Certaines mairies peuvent également ouvrir une agence postale communale : un employé municipal se retrouvera donc à effectuer des missions auxquelles il sera à peine formé, pour pallier le désengagement de La Poste.

Mobilisation

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Le 25 mars, 17 salariés de la plate-forme de Dreuilhe se sont mis en grève illimitée pour protester contre cette réorganisation, à la suite d’un préavis déposé par la CGT FAPT 09 et Sud PTT 31. Ils sont actuellement 13 en lutte, qui doivent aussi faire face à la pression exercée par la direction départementale sur les salariés non-grévistes. Ces travailleurs en grève veulent avant tout conserver un maximum de tournées et maintenir l’activité guichet à la Banque postale contre la casse sociale prévue par la direction. Ils luttent également pour leurs usagers : en zone rurale, les facteurs jouent un rôle social très important. Les habitants connaissent leur facteur, qui assure une présence rassurante parmi une population vieillissante. Les grévistes dénoncent un service public dégradé, « de moins en moins humain ». Le projet de réorganisation prévoit d’imposer une pause du midi aux facteurs, alors que jusqu’à présent, ces derniers faisaient leurs heures en continu. La pause du midi permet de faire passer les facteurs en journée mixte, de les maintenir sur le terrain au maximum, et d’en faire des agents polyvalents pour accomplir des prestations sociales, assurées par des agents dont ce n’est pas le métier, et que La Poste peut ainsi facturer. Cerise sur le gâteau : en obligeant les facteurs à prendre une pause à midi, non rémunérée, la direction de La Poste récupère à son compte les 20 minutes initialement prévues pour la pause, qui font actuellement partie de la journée d’un facteur et qui, de fait, sont payées. À la fin de l’équation, ces petites économies se chiffrent en volumes horaires, et donc en emplois dont on peut se passer.

Les facteurs de Dreuilhe sont en grève pour défendre leurs conditions de travail, le bon fonctionnement des services publics, et le respect de leurs usagers. Certains habitants des environs se sont regroupés en un collectif de soutien, qui organise des évènements autour de la grève. Des usagers se rendent sur le piquet, apportent un soutien moral et financier aux grévistes. Plusieurs élus se sont également rendus devant la plate-forme en solidarité avec les grévistes, notamment les deux députés France Insoumise de l’Ariège.

La situation de ces facteurs n’est pas un cas isolé. A l’heure actuelle, un millier de réorganisations sont prévues dans tout le pays : Anne Boïago dénonce un « plan social déguisé », sur le modèle de Dreuilhe. A toute vitesse, La Poste abandonne le courrier, mise tout sur les colis sans proposer d’alternative face aux services privés (Amazon, Mondial Relay) qui sont plus avantageux pour les usagers. Le PDG du groupe cherche à développer encore les guichetiers, au détriment des facteurs.

De nombreux mouvements ont lieu en France parmi les postiers, contre ce plan global de destruction d’un service public. Des mouvements comme celui des factrices de Miélan (Gers) en 2019, qui sont restées en grève 109 jours, sont inspirants par leur détermination. Les grévistes de Dreuilhe et d’ailleurs ont besoin de la solidarité de l’ensemble de notre classe. Une caisse de grève a été mise en ligne, et nous vous invitons à faire un don.