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États-Unis : à gauche, une convergence entre Black Lives Matter et la cause palestinienne
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Le parti démocrate est divisé sur la question israélo-palestinienne, avec une aile gauche qui voit le conflit sous l’angle de la justice raciale, et une frange plus centriste, incarnée par le président Joe Biden, réticente à condamner les bombardements israéliens.
Depuis le début des hostilités qui ont fait 227 morts du côté palestinien et douze du côté israélien, le président américain Joe Biden est resté très discret sur le conflit. Même si le locataire de la Maison Blanche a en début de semaine invité Benjamin Netanyahou à se diriger vers un cessez-le-feu, il reprenait le 12 mai la position étasunienne habituelle déclarant qu’« Israël [avait] le droit de se défendre quand des milliers de roquettes sont tirées vers son territoire». Et sa porte-parole de préciser que le président se concentrait sur des efforts diplomatiques en privé plutôt que sur des déclarations publiques.
À la Chambre des représentants, plusieurs élus démocrates ont adopté un ton très différent. En rupture avec une tradition de soutien presque inconditionnel à l’État hébreu, la jeune aile gauche du parti démocrate parle un langage très militant qui fait le lien entre la cause palestinienne et le combat antiraciste de Black Lives Matter. Sur Twitter, le hashtag « Palestinian Lives Matter » est d’ailleurs utilisé par des activistes à travers le monde pour partager des images des victimes palestiniennes. « Il est de notre devoir de mettre fin au système d’apartheid qui soumet les Palestiniens à un traitement inhumain et raciste » a déclaré Rashida Tlaib, première palestino-américaine élue à la Chambre des représentants, lors d’un discours au Congrès le 13 mai.
Cori Bush, une élue du Missouri active dans le mouvement contre les violences policières a fait le parallèle entre la « police militarisée » aux États-Unis et en Israël, et déclaré qu’elle continuerait « de se battre pour nos droits, jusqu’à ce que tous nos enfants soient en sécurité, en Palestine et à Ferguson », la ville qui a vu naître le mouvement Black Lives Matter. La représentante du Massachusetts Ayanna Pressley a elle aussi fait une comparaison similaire dans son discours : « On dit aux Palestiniens la même chose que l’on dit aux Noirs américains - "il n’y a pas de forme de résistance acceptable" ».
UNE DICHOTOMIE QUI ÉVACUE LE RÔLE DU HAMAS
Vu à travers ce prisme racial calqué sur l’histoire américaine, Israël est l’oppresseur et les Palestiniens sont les opprimés, une dichotomie qui évacue le rôle du Hamas. Or, cela fait plusieurs années que la convergence entre un certain antiracisme et le militantisme pro-palestinien divise les Démocrates. Lorsqu’en 2016, le mouvement Black Lives Matter avait inclus dans son programme politique une phrase impliquant que les États-Unis étaient « complices du génocide commis contre le peuple palestinien », de nombreuses associations et personnalités de gauche avaient pris leurs distances. Le soutien au mouvement de boycott d’Israël BDS par des élues comme Rashida Tlaib et Ilhan Omar est aussi une source de discorde.
À l’opposé, il y a, chez les Démocrates, des élus qui refusent toute critique d’Israël. Ainsi, Ted Deutsch, un représentant de Floride, a déclaré à la Chambre : « Si on me demande de choisir entre une organisation terroriste et notre allié démocratique, je choisis Israël ».
TROISIÈME VOIX
Entre ces deux pôles, une troisième voie se dessine. En effet, le gouvernement Netanyahou, avec sa politique d’annexions en Cisjordanie et ses alliances avec l’extrême droite et avec Donald Trump, a commencé à rebuter des Démocrates centristes. Ces derniers jours, vingt-huit sénateurs et une centaine de Démocrates à la Chambre ont écrit à Biden pour lui demander d’appeler à un cessez-le-feu immédiat. Et des élus démocrates proches du lobby pro-Israël AIPAC ont commencé à prendre leurs distances, même timidement. Le représentant de New York Gregory Meeks a tenté de retarder des ventes d’armes à Israël, avant de changer d’avis, et le sénateur du New Jersey Robert Menendez s’est dit « profondément troublé par les actions militaires israéliennes qui ont causé la mort de civils innocents à Gaza », une phrase qui pourrait sembler anodine mais qui a partout été soulignée comme une rupture signifiante.
Depuis une dizaine d’années, des voix pro-israéliennes plus modérées se font entendre, comme l’indique l’émergence de J Street, une organisation pro-Israël et pro-paix qui n’hésite pas à critiquer le gouvernement Netanyahou, et se veut une alternative à l’influent lobby AIPAC. Mais si le parti démocrate est moins unanime dans son soutien à Israël, Biden a jusqu’ici plutôt ignoré cette nouvelle tendance, évitant pour l'instant de condamner publiquement les actions du gouvernement Netanyahou.