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Arlette Laguiller : "Je veux bien reconnaitre que j’ai mis un petit coup de pied dans la fourmilière"
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
De nature modeste et timide, le militantisme chevillé au corps, Arlette Laguiller a ouvert la voie aux femmes en politique. Elle évoque son parcours, ses convictions inoxydables et le sexisme auquel elle a fait face.
Léa Salamé et Arlette Laguiller © Radio France / Alexandre Gilardi
Imaginez, on est en 1974, il y a une éternité, dans la France de Giscard et de Pompidou, une femme, la première en France, se présente à l’élection présidentielle et c’est une révolution ! Elle rempilera à six reprises. Porte-parole inlassable de la classe ouvrière, Trotskiste for ever, elle suscite la sympathie et parfois les moqueries, devient une vedette populaire chantée par Souchon, elle a même sa marionnette aux Guignols de l’info. Insoumise, rebelle, elle dit que le militantisme aura été toute sa vie, depuis la première grande grève au Crédit lyonnais au début des années 70 alors qu’elle était employée, elle y fera d’ailleurs toute sa carrière. Aujourd’hui, octogénaire, elle n’a perdu ni sa fougue ni ses convictions. Elle nous a reçu aux Lilas où elle habite toujours, au 13ème étage d’une tour, on ne quitte pas son enfance. Arlette Laguiller est notre invitée.
Insoumise, rebelle, le militantisme a été toute sa vie.
Une femme pionnière en politique
"Arlette Laguiller est née en 1940, alors que les femmes n’avaient pas encore le droit de vote, trente ans plus tard elle amène le thème de la condition des femmes au cœur de la campagne. Mais lorsqu’on lui parle de "puissance", elle temporise... :
Je veux bien reconnaître que j’ai mis un petit coup de pied dans la fourmilière… mais la seule puissance que je pourrais représenter ce serait celle de mon camp, la classe ouvrière.
Léa Salamé : Quand vous menez la grande grève de 74, vous êtes employée du Crédit Lyonnais que vous allez faire plier, vous vous sentez puissante ?
Arlette Laguiller : "La grève de 74 dure deux mois, à chaque fois que je prends la parole j’ai la boule au ventre, c’est plutôt un sentiment de responsabilité que de puissance qui m’habite alors."
Quand vous présentez votre candidature en 1974, vous avez conscience du caractère historique de votre geste ?
"J’ai contribué à amener le thème des femmes dans la campagne présidentielle quand personne n’en parlait. A l’époque je parlais de la « double journée des femmes » (l’équivalent de la charge mentale actuelle). J’ai été heureuse d’avoir été choisie par mon parti, même si c’était une épreuve que de me confronter aux médias."
Vous vous êtes présentée à six reprises à la présidentielle, avec des scores variables et parfois modestes, (entre 2 et presque 6 %), cela a-t-il entamé votre confiance en vous ?
"C’est cette constance qui a fait ma notoriété, en ce qui concerne les scores, ça ne m’a pas entamée, c’était un encouragement à continuer le combat."
Alain Souchon a chanté votre manière singulière de mener vos campagnes, ça vous a fait plaisir ?
"J’ai rien demandé, il y a peut-être un certain paternalisme dans le texte de Souchon, il me présente comme une fille « gentille », je peux aussi être en colère ou combattante. D’autres m’ont qualifiée d’aboyeuse…"
Vous avez touché beaucoup de monde mais vous n’en avez pas convaincu beaucoup… les Français ne sont pas prêts à la Révolution ?
"Les gens travaillent, ils sont abasourdis, ce n’est pas une période très combative."
Dépasser sa timidité et le sexisme ambiant
Ségolène Royal a raconté avoir été méprisée, Anne Hidalgo dit avoir souffert d’un procès en illégitimité. Vous n’avez jamais souffert de sexisme ?
"Non jamais au sein de mon parti, j’avais tout le soutien de mes camarades. A Lutte Ouvrière, même si nous n’avons que 35 % de femmes, on essaie de les propulser.
Les femmes parfois il faut les pousser, on est issues d’une longue histoire de patriarcat, elles pensent souvent qu’elles n’y arriveront pas…
J’ai toujours de l’angoisse quand je suis sur le devant de la scène, j’ai dû forcer ma nature. Mais une jeune génération arrive qui a l’air nettement plus libre. Quand je vois Nathalie Arthaud, (porte-parole à Lutte ouvrière dès 2012), je trouve qu’elle assume vraiment bien."
Arlette Laguiller et Nathalie Arthaud © Getty / Guillaume Bouys
Et dans le regard de vos adversaires politiques : Giscard, Mitterrand, Chirac, Sarkozy ?
"Je n’ai jamais été en face des pointures, en revanche j’ai affronté Fabius, Bayrou, Xavier Bertrand… C’était plutôt un léger mépris social que du sexisme. J’ai pu lire des choses comme "Elle est sûrement très bonne dactylo, mais qu’elle reste à sa place" (le Figaro)…"
L’engagement et la vie personnelle
"Le peu de femmes en politique, comme les grandes carrières en entreprise, cela s’explique par le fait que ce sont encore les femmes qui portent l’éducation des enfants et les tâches domestiques."
C’est pour cela que vous n’avez jamais eu d’enfant ?
"Je n’ai jamais eu de vrai désir d’enfant, je ne suis pas la seule. Et puis j’ai un peu élevé mes frères, je savais ce que cela demandait comme temps et comme dévouement
Je n’ai pas fait d’études, je suis sortie de l’école avec le brevet des collèges, il m’a fallu beaucoup travailler pour acquérir des connaissances, il a fallu que je me forme. Je voulais que ce parti pèse, on ne compte pas ses heures."
Et votre enfance, vous avez grandi en banlieue, c’est là que vous avez découvert la lutte des classes et la honte d’être pauvre ?
"Oui, on était pauvres, on notait les courses sur l’ardoise, c’était une période difficile, heureusement j’avais les livres, mon père lisait, il m’a donné le goût de lire. Autour de moi, beaucoup de familles vivaient des malheurs semblables, ça m’a forgée politiquement. La guerre d’Algérie a coïncidé avec mon engagement et ma première manifestation."
Arlette Laguiller: "Les livres m'ont aidée dans les temps difficiles" © Radio France / A. Gilardi
Luttes des femmes
Vous êtes pour les quotas ?
"J’ai longtemps été contre les quotas, au grand dépit de Gisèle Halimi, je me disais : les femmes doivent se battre pour y arriver. Finalement, j’ai un peu revu mon point de vue au sujet des quotas."
Je voulais des femmes combattantes, des femmes puissantes, après tout, c’est le bon mot.
Vous avez cité Gisèle Halimi, c’est un de vos modèles ?
"Je l’aimais beaucoup oui, elle a eu le courage de défendre les accusés du FLN, et celui de faire reconnaitre le viol lors du procès d’Aix en Provence (1978)."
Vous avez d’ailleurs répondu à son invitation en témoignant à la barre, pour y dire quoi ?
"J’étais allée dire qu’il fallait au moins autant de respect pour le corps des femmes que celui qu’on avait pour les banques… mais on m’a tout de suite expulsée.
Le combat de Simone Veil en faveur de l’avortement, je l’ai aussi partagé, il y avait des hommes à nos côtés, je tiens à le dire."
Avez-vous des modèles de femmes qui vous ont guidée ?
Léa Salamé au domicile d'Arlette Laguiller © Radio France / Amlexandre Gilardi
"Dans l’Histoire, j’ai beaucoup d’admiration pour Rosa Luxembourg, elle a été assassinée par la Sociale démocratie, ça a joué un rôle dans mes choix politiques et puis c’est une très bonne écrivaine."
Qu’est-ce que vous pensez du mouvement MeToo ?
"C’est bien que la parole sorte et que les victimes puissent se défendre. C’est un mouvement libérateur. Il y a aussi des hommes victimes. Il faut libérer la parole pour avancer et se reconstruire."
Vous avez l’impression que l’on oppose trop souvent les hommes et les femmes ?
Arlette Laguiller :
Je défends les intérêts d’une classe ouvrière sans frontières, ni de sexe ni de couleurs.
Bilan de parcours
Vous avez plus de 80 ans, quand vous vous retournez sur votre parcours vous vous dîtes quoi ?
"Je me dis que j’ai vieilli, mais je me sens jeune dans ma tête et pleine d’espoir pour un avenir meilleur, ça n’a pas changé, ça soutient."
Vous aimeriez qu’on dise quoi de vous plus tard ?
"Elle a toujours été fidèle à ses idées !"