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Un sondage donne Mélenchon à 13% (24% chez les ouvriers) à deux points du second tour
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
La première étude d'opinion réalisée par Cluster17 pour « Marianne », avec une méthode novatrice, laisse entrevoir une élection présidentielle particulièrement serrée : derrière le président sortant, Valérie Pécresse, Éric Zemmour, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon sont dans un mouchoir de poche.
Et si l'élection présidentielle 2022 était aussi serrée que la précédente ? Notre sondage exclusif, qui inaugure le partenariat entre le nouvel institut Cluster17 et Marianne, laisse entrevoir, à quatre mois du premier tour, une course à suspense, dans laquelle des écarts extrêmement faibles séparent les différents candidats.
Cette étude a été réalisée auprès d'un échantillon de 2 252 personnes représentatif de la population française, via un questionnaire auto-administré en ligne entre le 27 et le 31 décembre 2021. En plus des traditionnels résultats, notre sondage offre deux outils d'analyse supplémentaires : le découpage de la population française en 16 clusters permet d'analyser avec davantage de finesse les stratégies électorales et les potentiels de voix de chaque candidat, tandis que le mode de calcul original de l'abstention, la donnée qui pose le plus de difficultés aux sondeurs, permet de s'approcher d'un niveau de participation vraisemblable.
Dans un entretien, Jean-Yves Dormagen, professeur de science politique et fondateur de Cluster17, détaille pour Marianne sa démarche. Bien sûr, il ne sera pas facile, dans un premier temps, de s'approprier les 16 clusters, qui demandent un minimum d'attention et de connaissance pour être maîtrisés. Mais passé cette phase d'assimilation d'une méthodologie nouvelle, les enseignements sont nombreux.
VERS UN PREMIER TOUR TRÈS SERRÉ
Le premier constat à retenir est bien sûr la situation politique extrêmement indécise que dessine ce sondage : en première position et en nette progression, Emmanuel Macron (23 %) dispose d'une confortable avance sur les autres candidats, à quatre mois du premier tour. Derrière le chef de l'État, en revanche, on retrouve trois rivaux avec des scores presque identiques : Valérie Pécresse (15 %), Éric Zemmour (15 %) et Marine Le Pen (14,5 %) sont à « à touche-touche ».
Quant à Jean-Luc Mélenchon (13 %), il les talonne et bénéficie du désert présenté par la gauche : ni Yannick Jadot (4 %), ni Anne Hidalgo (2 %), ni Fabien Roussel (1,5 %), ni Arnaud Montebourg (1,5 %), ni même la nouvelle venue Christiane Taubira (4,5 %) ne parviennent à mobiliser autant que l'Insoumis. Cette situation peut évidemment être bouleversée par la campagne, mais il est à noter que les électeurs de Macron, Le Pen, Zemmour et Mélenchon se déclarent davantage certains de leur vote d'avril que ceux des autres candidats… dont Valérie Pécresse, assise sur un socle plus fragile.
MACRON MOBILISE CHEZ LES PLUS ÂGÉS ET LES PLUS BOURGEOIS
L'étude des clusters livre des éléments d'analyse supplémentaires. Le score élevé d'Emmanuel Macron s'explique ainsi par deux raisons : le président sortant mobilise à la fois un nombre élevé de familles politiques (plus de 20 % dans 9 familles sur 16), mais également les clusters les plus âgés et bourgeois de la population. Hégémonique chez les Centristes (88 %), plébiscité par les Sociaux-Démocrates (49 %), les Sociaux-Républicains (41 %) et les Libéraux (37 %), le chef de l'État dispose d'une base solide et motivée.
A droite, on peut mesurer l'échec de la stratégie de Marine Le Pen entre 2017 et aujourd'hui : alors qu'elle ambitionnait d'élargir son socle essentiellement constitué de classes populaires, la candidate du Rassemblement national a vu Éric Zemmour capter à lui tous ces segments de classes moyennes et supérieures qu'elle convoitait. Il lui faudra vraisemblablement miser à nouveau sur une ligne « populiste », tant elle se maintient uniquement grâce à des clusters d'ouvriers et d'employés comme les Réfractaires (38 %), les Sociaux-Patriotes (41 %) ou les Eurosceptiques (48 %). Zemmour, lui, s'appuie sans surprise sur un fort soutien des Identitaires (43 %) mais bénéficie d'un électorat plus varié.
MÉLENCHON POPULAIRE CHEZ LES MULTICULTURALISTES
À gauche, Jean-Luc Mélenchon apparaît comme le seul capable de mobiliser ces clusters populaires, même s'il y demeure nettement minoritaire et plus faible qu'en 2017 : les autres candidats, très faibles en niveau global, n'attirent plus que des Français des classes moyennes ou supérieures, diplômés et habitant majoritairement les métropoles. Mélenchon base son socle sur trois piliers : une popularité quasiment intacte chez les Multiculturalistes (41 %), le cluster de la gauche radicale culturelle, et les Solidaires (44 %), le cluster de la gauche de classe historique, ainsi qu'un soutien élevé chez les Révoltés (50 %), nombreux à habiter les quartiers des villes de banlieue.
Sa possibilité à accéder au second tour dépendra de la capacité de l'Insoumis à s'adresser à deux catégories d'électeurs plus difficiles à convaincre, les classes moyennes partisanes d'une gauche modérée (Sociaux-Démocrates, Progressistes) et les classes populaires en quête de solutions plus radicales (Réfractaires, Eurosceptiques, Sociaux-Patriotes).
Les différents groupes de Français selon Cluster17 :
Les identitaires
Ce groupe, assez masculin, comprend retraités, militaires, policiers, agriculteurs, commerçants. Très pessimistes quant à l’avenir de la France, ils nourrissent des positions radicales sur les questions de migration. En matière économique, ils s’inscrivent dans un libéralisme de droite classique.
Les multiculturalistes
Ils sont professeurs, journalistes, cadres de la fonction publique, ou travaillent dans les secteurs associatif et culturel et constituent la gauche culturelle. « Citoyens du monde » autoproclamés, ils défendent l’accueil inconditionnel des migrants, un antiracisme inclusif et un féminisme militant.
Les sociaux-patriotes
Ouvriers et employés aux petits salaires vivant à la campagne ou dans le périurbain. Extrêmement hostile à l’islam et au multiculturalisme ; extrêmement favorable à l’intervention de l’État dans l’économie, à la protection des salariés et des services publics, ainsi qu’au Frexit.
Les conservateurs
Des Français plutôt âgés, appartenant aux classes populaires et moyennes : agriculteurs, artisans, maçons, plombiers, travailleurs du privé qui gagnent peu, mais disposent d’une épargne raisonnable. Ils défendent l’idée d’une France chrétienne devant protéger son identité, sans pour autant prôner un départ de l’Union ou des mesures radicales.
Les libéraux
Issue de la bourgeoisie, ils se distinguent par une certaine aisance financière. Cadres dans le privé, chefs d’entreprise ou exerçant des professions libérales, ils sont vent debout contre l’augmentation des impôts pour les plus riches, les 35 heures, les aides sociales et les services publics, tout comme ils rejettent nettement les discours anti-élites et souverainistes.
Les solidaires
C’est la gauche historique : classes populaires et moyennes, petits fonctionnaires, techniciens, cheminots, ouvriers et artisans, largement non croyants. Ils vivent dans de petites villes de province ou des communes rurales, loin des grands centres urbains. Nette sensibilité marxiste, ils ont soutenu les « gilets jaunes ».
Les centristes
La face droite des sociaux-démocrates : ils détiennent des diplômes prestigieux, gagnent bien leur vie, vivent dans les métropoles et s’informent beaucoup. Ils prônent la modération, sauf en matière de construction européenne, qu’ils soutiennent avec la foi du charbonnier.
Les réfractaires
La France « gilet jaune » qui travaille et souffre de la désindustrialisation. Cette famille très féminine (avec beaucoup de mères célibataires occupe des positions sociales précaires, fréquemment dans le domaine des services : aide-soignante, assistante de vie, caissière, chauffeur livreur… Exprime une forte défiance à l’égard des politiques et des plus riches.
Les eurosceptiques
Ces maçons, routiers, femmes de ménage et aides à domicile de la France périphérique ont du mal à boucler leurs fins de mois et ne sont pas propriétaires de leur logement. Ils souhaitent en large majorité que la France quitte l’Union européenne.
Les anti-assistanat
Petits patrons et artisans à faibles revenus, ils accordent une place capitale au mérite. Ils ont le sentiment d’être les vaches à lait d’un système social qui fonctionnerait à leur détriment pour nourrir des groupes de profiteurs incarnés par les immigrés et les fonctionnaires. Ils sont aussi très conservateurs sur les sujets de société.
Les sociaux-démocrates
Enseignants, cadres du public ou du privé, ces électeurs aisés dotés de diplômes de haut niveau et d’un fort capital culturel ont historiquement composé le cœur battant de la gauche modérée en France ; mais il y a cinq ans, ils ont préféré Macro. Très favorables à la construction européenne, ils ont de l’urticaire en pensant aux gilets jaunes.
Les progressistes
C’est une jeunesse urbaine, diplômée, largement issue de familles aisées et ouverte sur le monde. Ce groupe, aux deux tiers féminin et très étudiant, se caractérise par ses engagements : lutte contre le réchauffement climatique, antiracisme, féminisme, droits LGBT…. Ils sont plus modérés, voire indifférents, en ce qui concerne l’économie.
Les révoltés
Un groupe marqué par une surreprésentation de Français d’origine maghrébine et de confession musulmane. C’est le peuple des banlieues, à la condition sociale précaire et peu diplômé. Dégagisme antisystème marqué, bienveillance envers l’islam et conservatisme en matière de mœurs.
Les apolitiques
Un groupe habitant les petites villes et la France périphérique, peu diplômé, appartenant aux classes populaires. Ils s’abstiennent massivement, s’informent peu sur le sujet et n’ont pas l’habitude d’exprimer des opinions tranchées.
Les sociaux-républicains
Cette France profonde est traditionnelle sans être traditionaliste : modérément conservatrice sur les questions d’identité, elle défend les fondamentaux du modèle social français (aides, services publics), tout en restant attachée à l’Union européenne. Elle oscille entre la gauche et la droite aux élections sans s’aventurer vers les extrêmes.
Les éclectiques
Optimistes mais hostiles aux élites, pour l’Europe mais favorables aux frontières, opposés au multiculturalisme sans rejeter les étrangers, contre l’étatisme et l’assistanat mais favorables à une politique sociale et écologique… Inclassables sans être pour autant incohérents, ils rejettent largement le clivage gauche/droite.