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Climat social : du réchauffement au débordement ? Par Laurent Degousée

Lien publiée le 1 février 2022

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Climat social : du réchauffement au débordement ? Par Laurent Degousée – Arguments pour la lutte sociale (aplutsoc.org)

En effet, pour voir des cortèges interprofessionnels un tant soit peu conséquent dans autant de villes, même si ils restent composés avant tout de militant-es mais aussi de jeunes, il faut remonter à la longue lutte des retraites de 2019.

La mobilisation monstre des professeurs du 13 janvier dernier, tout comme les nombreuses grèves sur les salaires qui ont cours depuis plusieurs semaines dans le secteur privé, y compris dans des entreprises qui n’ont pas de tradition de lutte, ne sont pas étrangères à ce relatif succès que les directions syndicales veulent non seulement capitaliser mais les oblige à lui donner une suite en mars prochain. Les prudes CGC et UNSA ne s’y sont pas trompées, elles qui rejoignent l’intersyndicale là où la CFDT doit organiser sa propre journée de mobilisation des travailleurs essentiels le 3 février prochain.

Avec un taux de croissance pas vu depuis un demi-siècle qui, plus que le rattrapage des restrictions engendrées par le Covid, traduit une envie de retour à la normale et amène y compris une décrue du chômage, les exigences salariales s’aiguisent, à commencer dans les métiers en tensions, et alors que de fortes revalorisations du salaire minimum sont décrétées dans plusieurs autres pays européens. C’est un juste retour des choses au regard de l’indécence du bondissement du patrimoine des ultra-riches, dopé lui par… la pandémie !

Une élection en avril prochain, vraiment ?

Évidement, les candidat-es de gauche ont fait leur miel de cette journée qui (re)met la question sociale au premier plan, éclipsant celle identitaire que les médias, au travers de leur complaisance envers un candidat pourtant condamné à trois reprises pour ses déclarations racistes, veulent imposer dans la campagne présidentielle.

Comment cette relative ébullition, qui surgit à l’approche d’un scrutin électoral majeur, peut faire bouger les lignes ? Comment séparer l’aspiration à une vie digne de celle à plus de libertés là où la lassitude engendrée par un pass aux mailles toujours plus resserrées, à coups de règles et de protocoles absurdes et à contretemps de ce qui se fait ailleurs, qui laisse pour autant passer le virus concerne aussi bien les vaccinés, qui risquent de ne plus être considérés comme tels faute de troisième dose, que les non-vacciné-es ?

La campagne présidentielle, si tant est qu’elle en soit une au regard du contexte sanitaire encore chancelant et du faux suspens autour de sa candidature entretenu par le sortant, parait à mille lieux des préoccupations du plus grand nombre. Elle est partagée entre :

– Un Président qui ne se déclarera pas tant que l’épidémie ne sera pas censément sous contrôle, sous peine qu’une gestion trop hasardeuse du Covid demeure le dernier souvenir des électeurs, et qui se donne y compris la possibilité, en lien avec le Conseil constitutionnel, d’un report du scrutin pour que ne se reproduise pas le fiasco de celui du second tour des Municipales de 2020. Macron sait bien aussi qu’on ne sort de l’ambiguïté qu’à son propre détriment : quand il aura revêtu officiellement le costume de candidat et alors que son niveau dans les sondages est le même que celui au moment de sa candidature de 2017, c’est à la fois son bilan et son programme qu’il lui faudra défendre d’où son refus de se fondre dans la mêlée en comptant mener une campagne éclair tout en s’épargnant de participer aux débats du premier tour. Il faut avoir en tête qu’aucun président sortant de la Vème République n’a jamais été réélu au suffrage universel, hors période de cohabitation : c’est dire le tour de force que constituerait sa réélection. Même s’il a réussi, en dépit des crises des Gilets jaunes, des retraites puis du virus, à consolider sa base électorale en tant que candidat de la « raison » et en prétendu bouclier des extrêmes.

– A droite, c’est à celui ou celle qui lui fera face au second tour sans certitude pour autant, même du côté des Républicains alors que l’effet de souffle de l’intronisation de Pécresse est retombé, de pouvoir l’emporter tant les thèmes traditionnels de ce camp ont été préemptés par En Marche, entre finalisation de la destruction de notre régime de retraites, idolâtrie des forces de l’ordre et appel à la fierté nationale. Il ne reste guère que la politique étrangère, dont le rapport à la construction européenne, pour les démarquer. Il s’agit plus, comme le suggère Le Monde, de préparer les législatives pour se partager, en cas d’échec, ce qui restera de la droite traditionnelle, qui jouit encore d’un ancrage local, et du RN avec la faillite de la franchise Le Pen, amorcée dès les Régionales, et une prétendue normalisation qui ne passe pas, à commencer dans ses propres rangs.

– A gauche enfin, le résultat, couru d’avance, de la Primaire Populaire est tombé : c’est Taubira qui se présentera, ajoutant dans un premier temps à la confusion dans une offre politique déjà morcelée avant de tenter de rallier derrière son panache blanc ce qui reste de la social-démocratie. Mais, tout simplement, où était-elle ces cinq dernières années ? Le quinquennat d’Hollande aura donc enfanté de Macron, qui aura poussé les feux de sa politique de régression de nos droits sociaux et démocratiques, puis d’une sainte laïque, supposée en soigner les plaies… Pas sûr que Mélenchon, qui reste en tête des sondages de cette famille et mène une campagne qui séduit, ne tire néanmoins pas son épingle du jeu.

Pourtant, loin de tout cela monte une petite musique autour du boycott du scrutin présidentiel, pas comme désintéressement des enjeux politiques qu’il charrie mais, au contraire, comme l’expression la plus achevée de la volonté de rompre avec un système séculaire, rétrograde et liberticide, incarné par le pouvoir d’un seul. Voilà l’orientation que pourrait condenser la force qui se cherche à travers les affrontements sociaux, menés sans répit depuis 2016. Contre Macron et son monde, dans de nouvelles formes de mobilisations (occupation, manifestations sauvages et grèves au long cours), une force implantée dans les lieux de vie, d’études et de travail, qui ne réduit pas la politique aux seuls scrutins, vise le temps long, l’hégémonie, prompte à s’emparer des ruptures à venir, bref à même d’incarner, d’abord pour les centaines de milliers de personnes, déjà impliqués dans ces mobilisations et fortes d’une expérience, plutôt que d’un choix par défaut derrière son clavier, à même dans un premier temps d’éviter que le monde ne se défasse davantage, un changement radical de société, à commencer par la sauvegarde de la planète et donc notre espèce …

Le 30-01-2022.