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Déclaration sur le RSA : Macron poursuit sa guerre sociale

Lien publiée le 18 mars 2022

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Déclaration sur le RSA : Macron poursuit sa guerre sociale | Le Club (mediapart.fr)

En déclarant vouloir imposer une activité aux allocataires de RSA, Macron s’en prend une fois de plus aux plus modestes, alors même que c’est la puissance publique qui manque à tous ses devoirs. De plus, en s’attaquant en permanence aux plus pauvres, c’est bien l’ensemble du monde du travail que le gouvernement n’a de cesse de fragiliser.

Dans un monologue habillé en conférence de presse et consacré à la présentation de son programme, Emmanuel Macron a déclaré, rapporte Le Monde , qu’il souhaitait conditionner l’ouverture du droit au RSA à « l’obligation de consacrer quinze à vingt heures par semaine pour une activité permettant d’aller vers l’insertion professionnelle ». Il précise ensuite : « Je n’ai pas voulu le RSA pour les 18-25 ans et je l’assume totalement parce que je considère que c’est en quelque sorte nous satisfaire d’une idée qu’on traiterait la pauvreté ou la précarité uniquement à travers des prestations monétaires. Oui, il faut des prestations monétaires mais il faut, en plus de ça, reconnaître la dignité de chacun, demander une part d’effort pour toutes celles et ceux qui le peuvent. » 

Rappelons d’abord quelques chiffres qui disent une petite partie des difficultés que rencontrent les allocataires du RSA

Le RSA concerne près de 2 millions de ménages, 56% des ménages allocataires du RSA sont des foyers avec enfants ; parmi eux plus de 220 000 femmes seules avec enfants. (DREES 2021) Le taux de pauvreté des enfants est de 21% en France

Le montant du RSA pour une personne seule est de 565,35 euros en 2022, mais en pratique c’est moins de 500 euros car la plupart des allocataires se voient retirer un « forfait logement » de 67 euros.  Attention le montant de 500€ n’est pas le montant du droit, mais le montant maximum : il ne s’agit pas de verser 500€, mais de remonter vos ressources à 500€ : si votre famille vous aide de 200€ par mois, le RSA ne sera que de 300€. Deux bénéficiaires du RSA sur trois vivent sous le seuil de pauvreté[1]. Enfin, le RSA n’est pas ouvert aux personnes de moins de 25 ans sans enfants, ce qui veut dire qu’à cet âge on peut se retrouver durablement sans aucune ressource, dépendant des aides ponctuelles de l’entourage, des associations ou des centres d’action sociale. 

Conscient ou ignorant de cette réalité, Emmanuel Macron a une nouvelle fois choisit de s’en prendre aux plus modestes

Ses propos visent d’abord à stigmatiser les plus pauvres et à les livrer à la vindicte, notamment des plus riches qui vont discuter de leur sort. La mise en question permanente des droits des plus pauvres[2], le fait d’alimenter les soupçons vis-à-vis des allocataires du RSA, est une attaque directe contre les personnes concernées.  Ces propos méconnaissent la réalité des personnes vivant au RSA, déjà soumises à des obligations administratives très lourdes, et à qui on ne laisse ni le temps ni les moyens de construire leur vie dans de bonnes conditions. Comme s’il ne suffisait pas lutter pour sa survie économique, il faut en plus supporter les mises en question permanente par un président de la République qui s’est toujours opposé à soutenir le revenu des plus jeunes et des personnes pauvres sans ressources.

Une puissance publique qui ne répond pas à ses obligations 

Comme le souligne Nicolas Duvoux cité dans cet article de Médiapart, en réalité c’est la puissance publique qui ne répond pas à ses obligations vis-à-vis des allocataires du RSA, notamment en ne mettant pas les moyens suffisant pour leur donner accès à une formation, ou à un accompagnement personnalisé. On pourrait ajouter qu’en maintenant les minima sociaux à un niveau très faible. La puissance publique est également en défaut lorsqu’elle interdit l’accès aux minima aux moins de 25 ans, sans doute la catégorie d’âge parmi laquelle la détresse financière a été la plus forte en 2020. Bref, ce ne sont pas les plus pauvres à qui il faut demander des comptes, mais c’est au gouvernement qui manque à tous ses devoirs en ignorant les principes de liberté d’égalité et de fraternité tout en protégeant encore et toujours plus les riches et les puissants (la parenthèse est trop courte pour faire ici la liste des cadeaux aux plus riches faits depuis cinq ans).

L’idée de forcer à l’activité, qui plus est sous-payée, les allocataires du RSA n’est ni souhaitable, ni même praticable

Alors que les allocataires du RSA ont déjà du mal à pouvoir en cas de besoin s’adresser à un agent ou à être correctement accompagnés dans leur démarche par manque de travailleuses et travailleurs sociaux, il semble douteux que le gouvernement actuel soit décidé à mobiliser suffisamment d’agent pour, trouver une activité et encadré, les plus de deux millions d’adultes des ménages allocataires. 

Mais si l'idée d'obliger à l'activité devait être mise en pratique (et avec ce gouvernement on peut toujours s’attendre au pire), il y a fort à parier qu’il s’agirait non pas de réel travail, mais de renforcer les dispositifs de contrôle et de sanction vis-à-vis des allocataires, sous peine de diminuer ou de suspendre leur allocation (convocation à des entretiens, preuve de recherche d’emploi, comme cela se pratique déjà bien trop durement pour le contrôle des personnes au chômage, parfois radiées pour un rendez-vous dont elles n’ont même pas reçu la convocation).

Il va sans dire qu’être occupé, par obligation, 15h par semaine, ne serait pas une aide mais un obstacle supplémentaire (et ils sont déjà très nombreux) pour des personnes qui doivent à la fois trouver les rechercher un logement, un emploi, ou un minimum de stabilité nécessaire à une vie sociale normale. En réalité une majorité des allocataires du RSA est à la recherche d’une activité rémunérée (environ un cinquième travaille d’ailleurs à temps partiel) et un quart des personnes au RSA une année n’y est plus l’année suivante. Il y a aussi des allocataires qui ne sont pas en recherche immédiate d’emploi, parfois par découragement, mais aussi parce qu’elles et ils peuvent être dans l’incapacité de travailler (difficultés de santé lourdes non reconnue comme handicap, enfants jeunes sans solution de garde alternative, absence de logement…).

Dans les deux cas, un renforcement des contrôles et des sanctions rendrait la vie encore plus dure, et risquerait même fortement de conduire une partie des personnes concernées à renoncer à leur droits (une personne sur trois qui aurait droit au RSA n’y a déjà pas recours).

Quand à suspendre les droits d’une personne au RSA, comme « sanction » quel que soit le motif c’est inacceptable. Il n’y a pas de bonne raison de laisser quelqu’un dans la pauvreté. La société a des devoir envers toutes et tous, c’est l’intérêt général : garantir un toit, des ressources, une formation, la possibilité de construire sa vie, de vivre avec quelqu’un ou de se séparer, de trouver un emploi qui correspond à sa qualification. C’est ce que nous défendons avec l’AEC, et notamment avec la garantie d’autonomie de 1063€ par mois.

On sait par ailleurs, contrairement à ce que dit et répète Macron, que soutenir le revenu des personnes sans emploi n’est pas un frein au retour à l’emploi. Au contraire, c’est souvent parce qu’on n’a plus de ressources suffisantes que l’insertion professionnelle devient inatteignable. Et l’idée qu’il serait plus avantageux financièrement de vivre sans emploi est également un mensonge.  

Macron s’attaque aux plus pauvres, et il leur doit immédiatement des excuses. Mais en faisant cela il s’attaque aussi à tout le monde : avec la réforme de l’assurance chômage, l’annonce du report de l’âge de la retraite à 65 ans ou encore la menace de sanction nouvelles contre le RSA, affaiblir encore et toujours plus les allocataires de minima sociaux, les chômeuses et chômeurs, c’est mettre toujours plus sous pression le marché du travail, pour peser contre les salaires et les droits.

[1] La pauvreté a des conséquences immédiates sur la vie des personnes, notamment sur leur santé physique, psychique, ou encore sur les apprentissages scolaires. Voire par exemple les écarts d’espérance de vie par niveau de vie. 

[2] Voire par exemple à ce sujet Colombi, D. (2020). Où va l'argent des pauvres: fantasmes politiques, réalités sociologiques. Éditions Payot.