[RSS] Twitter Youtube Page Facebook de la TC Articles traduits en castillan Articles traduits en anglais Articles traduits en allemand Articles traduits en portugais

Newsletter

Ailleurs sur le Web [RSS]

Lire plus...

Twitter

Joël Cabalion, Maoïsme et lutte armée en Inde contemporaine, 2011

Inde

Lien publiée le 17 juillet 2022

Tweeter Facebook

Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Joël Cabalion, Maoïsme et lutte armée en Inde contemporaine, 2011 – Et vous n’avez encore rien vu… (wordpress.com)

L’État indien lutte depuis plus de quarante ans contre la guérilla maoïste. Cette confrontation a aujourd’hui gagné en ampleur et le gouvernement de Manmohan Singh a fait de la lutte contre ces mouvements une de ses priorités. Cet article revient sur les sources et l’actualité du maoïsme indien.

Le 3 mars 1967 un groupe de militants issus du Parti Communiste Indien (CPI) et réunis autour de Charu Mazumdar, Kanu Sanyal et Jangal Santhal fomente une révolte violente contre des grands propriétaires terriens dans le village de Naxalbari au Bengale-Occidental. Le choix de se dissocier radicalement du CPI institutionnel, l’ambition de propager la révolution armée dans les campagnes indiennes et la référence au maoïsme donnent naissance au naxalisme, du nom du village où eut lieu ce premier soulèvement. Quarante-trois ans plus tard, après de nombreux déboires et d’incessantes recompositions, le mouvement naxalite en Inde est aujourd’hui unifié. Quelle est son histoire ? Qu’en est-il aujourd’hui de son impact et quelles sont les raisons qui expliquent l’attrait de ce mouvement dans les campagnes ?

L’Inde est un pays où la violence politique prospère. Des émeutes interconfessionnelles aux atrocités de caste en passant par la violence plus impersonnelle des nouvelles logiques économiques des réformes néolibérales dites de la deuxième génération, le pays de Gandhi connaît aujourd’hui une recrudescence des actions de groupes armés comme celles des naxalites. « La plus grande démocratie du monde » fait toutefois preuve d’une grande résilience face aux multiples crises qu’elle traverse depuis son indépendance et, à ce titre, parvient assez habilement à contenir les secousses qui ne laissent de la déstabiliser. Selon son Premier Ministre Manmohan Singh, la menace interne la plus sérieuse serait actuellement la menace naxalite [1]. Les confrontations entre l’État indien et la guérilla maoïste semblent aujourd’hui dans l’impasse alors que le Parti Maoïste Népalais mit fin en 2006 à une décennie de guerre populaire et fait aujourd’hui l’expérience du jeu parlementaire.

Une histoire du communisme sud asiatique : « all land to the tiller ! » [2]

L’Inde occupe une place intéressante dans l’histoire du communisme. Si les circonstances de la naissance du Parti Communiste Indien restent aujourd’hui discutées, on sait tout du moins que son existence est ancienne et son développement rapide. Celui-ci aurait été fondé à Tachkent en octobre 1920 suite au Deuxième Congrès de l’Internationale Communiste [3]. L’historiographie indienne relie en premier lieu l’histoire de la genèse du maoïsme indien à celle du mouvement du Telangana (aussi appelé Mouvement Vetti Chakiri) de 1946 à 1951 [4]. Ce dernier fut un moment clé de l’histoire agraire nationale. En opposition aux grands propriétaires terriens (jagirdarsdeshmukhs) puis au Nizam (nabab) d’Hyderabad, qui ne souhaitait pas s’intégrer à l’Inde mais revendiquait son indépendance princière, le Parti du Congrès Indien envoya l’armée suite au soulèvement des masses rurales afin de réclamer le rattachement de la région à l’Union et pour entériner l’abrogation obtenue de facto d’un ensemble de lois foncières en défaveur de la paysannerie. Dès 1944, un rassemblement d’organisations et de militants politiques sous la bannière de l’Andhra Mahasabha (du CPI) déclenche des centaines de manifestations et organise l’opposition aux grands propriétaires terriens de la région et à la politique de conversion forcée du Nizam. Le rôle du Parti Communiste Indien dans le mouvement du Telangana fut capital et nombreux furent les activistes de ce mouvement qui furent arrêtés, emprisonnés voire torturés et tués au cours des luttes (menant à environ 4000 morts [5]). Ces évènements, historiquement à la fois au carrefour des luttes de l’indépendance et des nouvelles luttes agraires, constituent encore aujourd’hui un épisode éponyme loué et remémoré dans l’imaginaire collectif du communisme et du maoïsme indien. Selon une vision téléologique, les révoltes agraires et politiques du Telangana semèrent la révolte à venir dans l’Inde entière. En 1957, au Bengale, le CPI était le premier parti d’opposition aux élections.

Du côté institutionnel, divergences idéologiques, différences régionales, grèves, et expériences précoces des rébellions armées dans la paysannerie eurent raison de l’unité du Parti Communiste Indien qui se scinda une première fois en 1964 pour aboutir à la création du CPI-M (Communist Party of India – Marxist). Trois tendances émergeaient déjà au sein du CPI pour se cristalliser ensuite lors de la guerre sino-indienne. L’opposition principale élevait les « internationalistes » (soutien à la Chine) contre les « nationalistes » (soutien à l’URSS), les « centristes » adoptant une position neutre.

La ligne de fracture principale au sein du CPI concernait ainsi la soumission aux intérêts soviétiques. Les partenariats stratégiques avec l’Inde de Nehru impliquaient une modération de la critique sociale et de la posture d’opposition (au Parti du Congrès), chose impossible pour les franges plus radicales du Parti qui refusaient de concevoir une mise en suspens des priorités de la lutte des classes dans un pays comme l’Inde, qu’ils définissaient comme semi-féodal. Les évolutions du CPI dépendaient étroitement des mauvaises relations entre l’URSS et la Chine de Mao. Lorsque l’Inde et la Chine entrèrent en conflit ouvert en 1962 suite à des différends frontaliers, des centaines d’activistes communistes du CPI furent emprisonnés en raison de leurs prises de position prochinoises. La faction du soutien à l’URSS est dès lors devenue minoritaire au sein du parti et s’est fait taxer de « droitisme » (rightism). De 1964 à 1967, suite à la scission, ce fut la faction du CPI-M qui monta en puissance. Celle-ci est aujourd’hui la principale force politique derrière la coalition au pouvoir du Front de Gauche (Left Front) qui gouverne depuis 1977 au Bengale-Occidental, au Kerala et au Tripura, le CPI historique ne représentant aujourd’hui plus qu’environ 4% des votes parmi les partis du Front de Gauche. Jusqu’en 1967 cependant, le CPI-M se trouvait à la fois soutenu et contré par des éléments du CPI, qui construisit quelques alliances avec le Bangla Congress, l’équivalent du Parti du Congrès au Bengale. Sa victoire aux élections lui permit de gouverner mais pas de faire nommer un Chief Minister provenant du Parti, celui-ci restant jusqu’en 1970 le candidat du Bangla Congress (Ajoy Mukherjee). Le Bengale-Occidental se vit également imposer un régime présidentiel (President’s Rule) à deux reprises de 1968 à 1969 et de 1970 à 1971, notamment suite aux évènements de la guerre de libération au Bangladesh voisin et en raison des évènements de Naxalbari.

Un factionnalisme incessant

Nombreux sont les propos, surtout contemporains, qui voient dans la survivance de mouvements maoïstes à travers le monde une sorte d’anachronisme politique même s’ils concèdent qu’il s’agit en fait de la marque d’un manque de développement social et économique. Il ne faut pourtant pas sous-estimer l’importance des enjeux idéologiques qui sous-tendent la genèse de ces mouvements ainsi que l’attrait que représentent encore aujourd’hui, matériellement et symboliquement, les carrières miliciennes révolutionnaires (ou contre-révolutionnaires [6]). Les enjeux présidant à leur formation et à leur développement tendent à se particulariser toujours plus pour aboutir à des factionnalismes particulièrement puissants. Ces derniers ont miné ces organisations quasiment depuis leur naissance mais expliquent aussi l’attrait durable qu’elles exercent sur différents groupes sociaux. Le contexte mondial encourage à prendre ces mouvements au sérieux tant la question des inégalités sociales reste entière et dans la mesure où le modèle capitaliste contribue à leur accroissement. Enfin, on constate aujourd’hui à un niveau transnational des convergences de luttes de type communistes et écologistes qui se sont manifestées en Inde, par exemple, avec le Forum Social Mondial parallèle organisé à Bombay en 2004, Mumbai Resistance.

La scission du CPI avec le CPI-M annonçait déjà l’importance des divergences qui se cristallisèrent encore suite aux évènements de Naxalbari. Ces dernières aboutirent à l’exclusion des éléments radicaux de la nouvelle faction du CPI-M ayant participé aux révoltes. Charu Mazumdar et ses acolytes créèrent ainsi le CPI-ML (Marxiste-Léniniste) en 1969 faisant de nécessité vertu et revendiquant une proximité idéologique encore plus pure avec les origines des thèses communistes révolutionnaires. Sous-estimer l’importance des enjeux idéologiques de ces scissions reviendrait à s’interdire de comprendre la place majeure de certains débats qui animent les milieux cultivés indiens, voire le champ académique de manière transposée, portant sur la place de la démocratie bourgeoise, le caractère féodal ou non de la structure sociale indienne ou bien la nécessité urgente de propager la lutte armée [7]. Ces questions, à l’exception peut-être du caractère nécessaire d’une révolté armée qui se veut une mise en question plus normative et propre aux mouvements militants, animèrent fortement différents débats intellectuels en Inde dès l’Indépendance. L’historiographie de l’Inde a par exemple souvent débattu de la pertinence du qualificatif de « féodal » en ce qui concernait l’Inde précoloniale [8], l’enjeu étant de reconsidérer la catégorie de classe dans un contexte précapitaliste. L’attribution par des historiens comme Ram Sharan Sharma d’un caractère universel à la catégorie de féodal a pour but, entre autres, de s’opposer à une vision idéaliste rétrospective d’une « paysannerie libre » [9].

Un des enjeux internes les plus puissants du mouvement révolutionnaire indien porte aujourd’hui encore sur la stratégie de lutte armée. Celle-ci doit-elle suivre l’organisation préexistante d’un mouvement paysan de masse pouvant soutenir la révolte ou faut-il précipiter la révolte armée quand bien même la masse paysanne n’est pas acquise à la révolution ? Ainsi, le CPI-ML de Charu Mazumdar qui prônait la lutte armée (sans pour autant avoir sérieusement réfléchi sur les formes et les modes de développement d’une « armée populaire » [10]) ne mobilisait pas l’adhésion de tous les maoïstes indiens. Dès 1969, en Andhra Pradesh (et dans une partie du Bihar), était créé le Maoist Communist Centre (MCC), qui ne remettait en question ni ne soutenait uniquement la stratégie de lutte armée. Cette scission importante correspond en partie à l’existence de différents foyers régionaux de l’idéologie naxalite. L’Andhra Pradesh joua un rôle des plus importants dans la suite du mouvement. Au Bihar, où le mouvement était né de la révolte, les scissions n’en demeuraient pas moins multiples. Elles aboutirent à divers courants du CPI-ML, alors que la première réelle milice du parti ne fut créée qu’en 1971, à peine un an avant la mort de Charu Mazumdar en détention policière. L’ensemble des factions maoïstes indiennes partage toutefois la volonté de s’appuyer sur la paysannerie et n’apporte que peu d’importance directe à la bureaucratie dans la lutte armée.

À la même époque le gouvernement du Parti du Congrès d’Indira Gandhi emprisonnait et interdisait la majorité de ces mouvements. En l’occurrence, comme le montre Nicolas Jaoul [11], les stratégies du mouvement maoïste sont aussi des stratégies d’arrangements politiques avec le pouvoir institutionnel, une hypothèse presque paradigmatique de la théorie des mouvements sociaux portant sur « les structures d’opportunités » politiques. Et à ces petits arrangements avec le pouvoir politique s’ajoutent des collusions avec les élites économiques locales, notamment dans le cadre de l’attribution de marchés publics, comme l’a bien montré Alpa Shah dans le cas du Jharkand [12].

Le mouvement maoïste indien ne cesse de démontrer en son sein des tensions à la fois idéologiques et pratiques oscillant entre l’idée du développement d’un mouvement de masse d’une part, et le développement d’un parti clandestin de lutte armée d’autre part. Ceci renvoie in fine à une définition d’offre politique soumise à la géométrie des offres et des failles du champ politique institutionnel lui-même, c’est-à-dire dépendant des dispositions des gouvernants des États régionaux et/ou de l’État central, de la volonté de l’État (peu importe lequel) de réprimer ou de dialoguer aves les maoïstes [13]. Aussi, il ne s’agit pas tant d’une lutte entre « révisionnistes » (c’est-à-dire adeptes du jeu parlementaire) et « aventuristes » (adeptes de la lutte armée) au sein du CPI-M, comme le veut la lecture interne officielle émanant du mouvement maoïste, que d’une lutte constante portant sur les moyens légitimes de définir ce qui constitue une lutte politique réellement maoïste émanant des masses opprimées. C’est à l’aune de telles considérations qu’on peut comprendre le factionnalisme incessant du mouvement maoïste et le fait qu’il put aboutir par moments à des violences presque aussi régulières et destructrices en son sein qu’à l’encontre de ses « ennemis de classe ». Le cas des meurtres politiques dans le district de Lalgarh dans l’État du Bengale-Occidental est un prolongement récent de ces querelles incessantes entre naxalites et agents politiques villageois des partis institutionnels (du CPI-ML ou du Trinamool Congress). Ces éliminations peuvent également servir des objectifs matériels restreints : on tue celui dont on souhaite récupérer une parcelle foncière puis on le fait passer pour un indicateur des forces de l’ordre ou un « révisionniste » du parti communiste institutionnel. C’est ainsi qu’on entend souvent en entretiens, avec des policiers ou des agents du renseignement intérieur indien, l’idée que l’idéologie naxalite se dilue ou se récupère à des fins souvent « purement » criminelles.

Les années 1970 continuèrent de témoigner de la force des organisations maoïstes mais aussi de leur division. En plus du CPI-ML et du MCC, on vit se créer différentes factions comme le CPI-ML Liberation, le CPI-ML Unity Organization (1978) ou le CPI-ML Party Unity (1983) tandis que le MCC aboutissait en Andhra Pradesh à la formation du People’s War Group (1980). Parallèlement, comme le retrace Nicolas Jaoul à propos du cas du Bihar, la mouvance maoïste pouvait prendre des formes légalement reconnues et populaires comme ce fut le cas à partir de 1982 avec la plateforme politique du Indian People’s Front. L’influence du mouvement (peu importe quelle faction) au sein des campagnes de cet État fut telle qu’on parla par moments d’un lal sarkar (en hindi, « gouvernement rouge »). En effet, l’existence des naxalites contribua à la « multiplication des médiations entre les organisations agraires et les autorités administratives locales » au point que dans certaines zones, assez paradoxalement, « la violence illégitime des naxalites contribu[a] à la restauration de l’État de droit » [14]. Bien que souvent grevée de l’intérieur par des volontés de « corriger » les trajectoires révisionnistes ou aventuristes des factions opposées, l’expérience naxalite s’est directement et indirectement construite comme une entreprise de défense des pauvres aboutissant à une amélioration des services publics minimaux de l’État là où ils faisaient défaut. Si l’État se montrait uniquement oppresseur, la stratégie de la lutte armée avait tendance à s’imposer dans ces zones. Il faut cependant relativiser cette image romantique des naxalites comme défenseurs des opprimés, non seulement parce que leur violence tend à devenir de plus en plus indiscriminée en s’intensifiant, mais aussi parce que leur participation à la « gouvernance » informelle – de l’économie notamment – dans certains de leurs bastions tend à entretenir les pratiques clientélistes et plus généralement le cadre capitaliste de l’économie qu’ils prétendent dénoncer [15].

Aujourd’hui, ce n’est pas dans la zone de naissance du naxalisme indien mais plutôt du côté des jungles de l’Inde centrale que se concentre fortement le « problème naxalite ». Dans cette région, les différents partis naxalites se sont dans un premier temps unifiés en 1998 par la fusion du CPI-ML Unity et du People’s War Group. Ce travail d’unification, entrepris en fait depuis le début des années 1980 mais ralenti par l’affaiblissement du mouvement dû à ses pertes et ses défections, donna d’abord naissance au People’s War (PW). En 2001, la trêve scellée entre toutes les factions naxalites parachève ce travail de réconciliation avec l’avènement du CPI-M (Maoist). Plusieurs raisons sont avancées pour expliquer l’unification du mouvement. Il s’agit d’abord d’un chantier de longue haleine qui ne peut être réduit à des contraintes récentes. Toutefois, il est possible que les lois de répression antiterroristes indiennes (Prevention Of Terrorist Activities Act) de 2001 aient contribué à précipiter ce regroupement qui répondait aussi aux crises de vocation militantes auxquelles faisai(en)t face le(s) parti(s).

Les enjeux forestiers du naxalisme

La compréhension du mouvement naxalite aujourd’hui passe en grande partie par une compréhension des enjeux politiques et économiques qui animent l’Inde Centrale. Si les campagnes du Bihar ainsi que celles du Bengale-Occidental restent des zones particulièrement affectées, les régions concernées par le naxalisme au Chhattisgarh et au Maharashtra laissent entrevoir certains enjeux qui structurent aujourd’hui le mouvement et le situent en prolongement des mouvements sociaux œuvrant dans la légalité. Il s’agit en l’occurrence d’enjeux qu’on peut qualifier de « forestiers » et qui concernent en grande partie des populations qu’on nomme en Inde les adivasis (en hindi, « premiers habitants ») ou tribaux [16]. À la différence du Maharashtra, de l’Orissa (et Jharkand) et du Chhattisgarh, le mouvement naxalite au Bihar témoigne d’une composition sociale essentiellement basée sur des castes tandis que les autres régions illustrent de plus en plus des recrutements exclusivement tribaux qui à terme pourraient devenir le talon d’Achille du naxalisme, en le privant d’une diversification de ses soutiens populaires analogue à celle qui a conduit les maoïstes népalais au pouvoir [17].


Extrait :

Le cas de Gadchiroli au Maharashtra ou le travail de mobilisation des tribus

La fin des années 1970 et le début des années 1980 virent une forte répression des naxalites à travers tout le pays. Les naxalites d’Andhra Pradesh opérèrent au début des années 1980 un repli stratégique dans les forêts du Sud-Est du Maharashtra dans le district de Chandrapur, aujourd’hui subdivisé dans sa partie orientale avec le district de Gadchiroli, qui reste le seul district affecté du Maharashtra à présent. Cette région a la plus grande couverture forestière de l’État et plus d’un tiers de sa population est adivasi. Les naxalites arrivèrent à Gadchiroli en 1980 du côté de Sironcha et en 1983 dans le canton de Bamragarh. La population des groupes tribaux Madia-Gond [18] ne connaissait peu ou pas d’agents étrangers. Ils n’avaient affaire depuis le début des années 1970 qu’à quelques officiels du département des forêts, la police et l’administration étant sinon totalement absente. Ils connaissaient au mieux les travailleurs sociaux du Projet de la Fraternité Populaire (Lok Biradri Prakalp) de Prakash Amte, fils de l’éminent gandhien Baba Amte de la région de Chandrapur, installé depuis 1974 dans la jungle pour y créer une école et un dispensaire. L’arrivée des naxalites et leur entreprise de défense des pauvres tombait en quelque sorte à point nommé tant les populations tribales étaient harcelées et malmenées par les gardes forestiers. « Il ne fallut que quelques années, comme le précise un travailleur social de la région, pour que les naxalites parviennent à obtenir le soutien des tribaux » [19]. L’arrivée progressive des gardes forestiers puis d’officiers du cadastre dans la région accentua l’exploitation des adivasis qui se retrouvèrent confrontés à la raison bureaucratique consignant droits sur la terre et droits sur les ressources forestières. Étant donné que ces derniers ne disposaient pas de titres fonciers et encore moins de droits forestiers, ils furent pendant de nombreuses années l’objet de toutes les corruptions et exploitations minuscules possibles. « Comme ils n’avaient aucun droit ou comme l’État n’était pas en mesure de défendre leurs droits constitutionnels, les quelques officiels présents se permettaient de les exploiter. On leur demandait de l’argent pour le bois coupé, leurs poules pour des infractions qu’ils ne comprenaient pas, de l’alcool pour éviter les sanctions, […]. » [20]

Les ressources provenant des forêts sont aujourd’hui encore la source principale de revenu des habitants de ces zones. En quelques années les naxalites surent mobiliser l’adhésion en intimidant les quelques agents administratifs qui harcelaient les adivasis. Une fois de plus, ils remplirent une fonction presque étatique en prenant la défense sur le terrain de populations oubliées en faveur desquelles les lois de l’Inde sont pourtant souvent, en théorie, très généreuses. Les naxalites obligèrent par exemple les entrepreneurs de chantiers forestiers (contractors) à mieux rémunérer les ressources forestières principales grâce auxquelles les adivasis subsistaient, en l’occurrence les feuilles de tendu avec lesquelles sont fabriquées les beedies (cigarettes indiennes). Tandis que dans les régions où les naxalites ne sont pas présents 100 poodé [21] de beedie se vendent aujourd’hui au prix gouvernemental minimum de 69 roupies, leur prix varie de 130 à 150 roupies dans la région de Gadchiroli.

Six membres à leur arrivée, les naxalites créèrent en quelques années plusieurs unités de combat, les dalams, en général composées de sept à vingt membres et supervisées par un commander. Si les premiers naxalites arrivés à Gadchiroli n’étaient pas originaires de la région mais de l’Andhra Pradesh, le recrutement local se fit quasi exclusivement au sein des catégories tribales. Plusieurs jeunes recrues de la région sont aujourd’hui devenues commander au sein de dalams très mobiles évoluant entre les États du Chhattisgarh, du Maharashtra et de l’Andhra Pradesh. Les confrontations avec les forces de police devinrent importantes à partir de 1987-1988 quand l’État du Maharashtra prit conscience de sa perte de contrôle sur ses territoires frontaliers. Il s’agit en effet essentiellement d’une question de contrôle du territoire. La continuation des confrontations policières avec les naxalites à Gadchiroli recèle quelques leçons car elle s’explique difficilement aujourd’hui du point de vue de la situation des tribaux. Le Maharashtra a depuis 2005 régularisé les titres fonciers de ses populations et amélioré en partie les conditions de vie de ces habitants, tandis que dans l’État voisin du Chhattisgarh les droits humains se détériorent. « Si on est éduqué ici on part ailleurs, sinon on devient policier ou naxal. » [22] En effet les naxalites ne sont pas les seuls à recruter des adivasis en leur sein. Plus récemment, l’État du Maharashtra a spécialement créé des commandos appelés « C-60 » afin de combattre l’insurrection. Ceux-ci font appel de plus en plus à de jeunes tribaux ayant une bonne connaissance de la région et peu d’avenir professionnel. Comme le répète un militant rencontré, « il n’est pas difficile de devenir policier mais c’est une autre affaire de devenir haut fonctionnaire ici » [23], un parallèle que certains établissent avec le Nord-Est de l’Inde pour mieux comprendre la situation. « Contrairement au Nord-Est [de l’Inde] où les adivasis deviennent collectors [préfets] et Superintendants of Police, ici l’administration n’est pas aux mains des adivasis. […] Tout au plus certains deviennent politiciens mais ils oublient leur communauté et ne pensent plus qu’à eux-mêmes, ils ouvrent éventuellement une ou deux écoles ou plutôt un magasin d’alcool et restent ensuite dans leur nouvel appartement de fonction à Mumbai. » [24] Si les luttes sur les droits aux ressources forestières sont loin d’être gagnées, ces populations ne subissent pas encore de plein fouet dans cette région les projets gigantesques d’appropriation de ressources menés par l’État indien et diverses grandes entreprises comme c’est le cas au Chhattisgarh. Toutefois, à Gadchiroli, on aime rappeler que « lorsqu’un naxalite ou un policier est tué, il s’agit neuf fois sur dix d’un tribal qui meurt ».


L’État Central indien n’est pas dupe de l’importance de la question des ressources forestières dans la question naxalite. Si l’exemple de la région de Gadchiroli (voir encadré) plaide en partie en faveur des autorités comme un exemple de transmission réussie des droits forestiers aux communautés locales, le département des forêts dispose encore des droits éminents sur les ressources dans la majorité du pays [25]. Il existe pourtant depuis 2006 une loi qui devrait régulariser les droits de ces « communautés forestières » (forest communities), le Forest Rights Act 2006. Celle-ci met en place en théorie une gestion locale des ressources forestières (à l’exception du gros bois) par les communautés. Cette loi leur donne le contrôle sur les ressources forestières secondaires (Minor Forest Produce), comme le bambou, les feuilles de tendu et la fleur mahua à partir de laquelle de l’alcool traditionnel est produit. Les deux premières de ces ressources représentent plus de la moitié du revenu du département des forêts. Toutefois, la loi de 2006, en particulier à Gadchiroli, n’a servi qu’à officialiser les situations de possession foncière des tribaux et n’a généralement que peu ou pas du tout contribué à transférer les droits sur les ressources forestières. Ce dernier élément était pourtant la partie la plus importante de la loi, parfois même considéré comme un moyen du combat indirect mené contre les naxalites. En effet, si ces droits étaient réellement donnés aux communautés villageoises, les naxalites se verraient privés d’un terrain d’action idéal en faveur des populations tribales. Plusieurs organismes de l’État indien, voire divers ministères, s’opposent sur l’interprétation de cette loi et l’opportunité de sa mise en œuvre. Une chose est sûre : celle-ci déplaît fortement aux milieux d’affaires et aux grandes entreprises minières, qui pourraient se voir refuser l’acquisition facile de terres. Ils présentent ce risque comme le premier obstacle à leur développement voire, au développement du pays qu’ils envisagent, par un accroissement des activités industrielles à capitaux intensifs.

Enfin, le naxalisme « tribal » n’est pas sans intérêt historique si l’on relie celui-ci aux épisodes fréquents de résistance qui ont pu exister par le passé chez les Murias, les Santhals ou d’autres groupes de l’Inde Centrale lors de la période coloniale. Le naxalisme incarne, de ce point de vue, l’opportunité la plus accessible de protestation chez ces catégories sociales, et la revendication de droits totalement séculiers sur les ressources forestières révèle qu’il n’est pas besoin d’assimiler automatiquement ces luttes à une idéologie nécessairement communiste ou maoïste.

L’escalade de la violence au Chhattisgarh

Il est parfois reproché aux naxalites indiens de privilégier la stratégie militaire au détriment des actions d’organisation sociale et communautaire dans les zones qu’ils contrôlent. Si les situations ne sont pas toutes comparables en fonction des États et des diverses factions concernées, malgré le travail d’unification entrepris, l’accroissement du conflit visible aujourd’hui n’est pas attribuable uniquement aux naxalites. Le Chhattisgarh, État du Centre de l’Inde, est confronté depuis plusieurs années à une escalade de la violence.

Cet État est depuis 2003 dirigé par un politicien du nom de Raman Singh, membre du Bharatiya Janata Party (Parti du Peuple Indien). Engagé dans des croisades anti-corruption, cet homme a la réputation de « Mr Propre » aux yeux d’une partie de la presse. Il est cependant très controversé et a contribué à accroître les confrontations entre les forces de police et les naxalites via une paramilitarisation du conflit. L’État du Chhattisgarh possède un des sols les plus riches en minerais. Depuis le premier mandat de Raman Singh en 2003 et suite à sa réélection comme Chief Minister en 2008, plus de 53 protocoles d’accord (Memorandums of Understanding, MoU) furent signés avec des grandes entreprises à la fois nationales et internationales, essentiellement minières. Selon divers rapports officiels, environ 9620 hectares de terres privées seraient en voie d’acquisition par le gouvernement pour permettre l’installation de ces entreprises. Comme le note Anand Teltumbde dans un ouvrage virulent portant sur un épisode d’atrocité de caste [26], il existe une synchronie troublante entre la signature de ces accords et l’émergence (orchestrée ?) du mouvement Salwa Judum (chemin de la paix en langue tribale gondi). Le Salwa Judum, un mouvement populaire de protestation contre l’ultra-gauche armée des naxalites, est né le 4 juin 2005. Il recrute en grande partie au sein des catégories tribales et reprend des stratégies moins efficaces dans d’autres États consistant à encourager les villageois à interdire l’entrée dans les villages aux maoïstes. Ces projets, qu’on nomme gaonbandi (interdiction d’entrée au village), passent par l’attribution de financements spécifiques des États régionaux dans le but de permettre aux villageois de s’opposer, par la force si nécessaire, au travail d’endoctrinement et de recrutement des naxalites. Ces initiatives sont majoritairement restées lettre morte et relèvent de la propagande étatique car les villages identifiés n’ont jamais reçu les financements promis. Mais le Salwa Judum semble être devenu, en revanche, un pur projet étatique sur le terrain. Son existence et sa réussite dépendent étroitement du soutien de l’État par les moyens à la fois humains et matériels qu’il dispense. Tous les rapports indépendants écrits sur la situation des droits humains au Chhattisgarh insistent sur le fait que le Salwa Judum fut en partie, voire totalement, armé et entraîné par l’État [27], et que celui-ci entraîna directement le déplacement et la migration forcée en camps surveillés de dizaines de milliers de villageois de la zone de Dantewara. Suite à une procédure judiciaire entamée par deux chercheurs et un ancien haut fonctionnaire retraité (Nandini Sundar, Ramachandra Guha, E.A.S. Sharma) auprès de la Cour Suprême à New Delhi, ce mouvement a fini par être officiellement interdit et démantelé en mars 2008. Il renaît aujourd’hui de ses cendres sous le nom de Ma Danteswari Samanvay Samiti. Il n’avait, de fait, pas réellement disparu, les cadres du mouvement continuant à contrôler de force, depuis son interdiction, l’ensemble des camps qui avaient été créés pour vider les villages du territoire naxalite.

Les districts indiens affectés par le naxalisme (2007)
Source : Wikipédia.

Suite à la désignation depuis novembre 2009 du mouvement naxalite comme la plus grande menace interne à laquelle la démocratie indienne est confrontée, le gouvernement de l’Union Indienne de New Delhi a lancé une grande opération conjointe à travers cinq États pour combattre les rebelles. Cette opération est appelée « opération chasse verte » (Green Hunt) dans les médias suite à diverses expériences anti-insurrectionnelles vécues au Chhattisgarh. Cette campagne de militarisation galopante et de regroupement des forces à la fois policières, militaires et paramilitaires pour combattre les naxalites fait à l’heure actuelle couler beaucoup d’encre [28] et s’apparente déjà pour beaucoup à une guerre civile larvée opposant le gouvernement à ses populations. La criminalisation croissante des militants pour la défense des droits de l’homme [29] s’ajoute au problème et révèle le visage agressif des États régionaux et l’État Central. Il y a fort à parier que cette opération va continuer à polariser les populations contre l’État et aboutir à des résultats contre-productifs. L’Inde semble aujourd’hui incapable d’élaborer une stratégie pour parvenir à des négociations avec les naxalites, tandis que le camp naxalite est lui-même dans une impasse à la fois militaire et sociale. Il ne présente pas de programme politique réaliste ou unifié lui permettant de dépasser ses bases forestières et ne semble pas en capacité d’attirer largement d’autres catégories sociales comme les dalits, dont le soutien est pourtant crucial pour le développement du mouvement. Les deux protagonistes sont donc à l’heure actuelle englués dans une confrontation militaire préoccupante car elle affecte les populations civiles et entraîne une répression policière de plus en plus importante envers l’ensemble des mouvements sociaux.

Joël Cabalion est doctorant en sociologie
au Centre d’Études de l’Inde et de l’Asie du Sud (EHESS-CNRS)
et actuellement affilié au Centre de Sciences Humaines (CSH) à New Delhi.
Sa thèse porte sur des déplacements de population
en Inde centrale, dans l’État du Maharashtra.

Article publié sur le site La Vie des idées le 9 mars 2011.


[1] Il n’existe en français qu’un seul ouvrage traduit de l’anglais et traitant de l’histoire du naxalisme, celui-ci ayant été écrit par un ancien haut fonctionnaire des forces de police indiennes. Voir Singh Prakash, « Histoire du Naxalisme (1967-2003) ».

[2] Ce slogan signifiant « toute la terre aux cultivateurs ! » n’est pas propre à l’histoire agraire sud asiatique mais trouve également une résonance en Asie du Sud-Est, en Chine ou même à Taiwan. Il a ensuite été repris dans différents contextes socioculturels de luttes foncières à travers le monde.

[3] Il est assez peu connu qu’un des principaux personnages de l’Internationale Communiste à ses débuts était un indien, celui qu’on nomma le “Brahmane du Kommintern”, Manabendra Nath Roy. Il fut l’un des fondateurs du communisme indien. Voir Jean Vigreux, « Manabendra Nath Roy (1887-1954), « représentant des Indes britanniques » au Komintern ou la critique de l’impérialisme britannique », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, URL : http://chrhc.revues.org/index2075.html

[4] Voir le livre d’un des premiers fondateurs et participants au mouvement communiste indien en lutte contre le Nizam d’Hyderabad : Puccalapalli Sundarayya, Telangana people’s struggle and its lessons, Foundation Books, (Publication du Parti Communiste Indien), Calcutta, 2006.

[5] Voir Sarkar Sumit, Modern India : 1885-1947, Mac Millan, Delhi, 2007.

[6] Voir Gayer Laurent et Jaffrelot Christophe (dir.), Milices armées d’Asie du Sud, Paris, Presses de Sciences-Po (Coll. Académique), 2008.

[7] Ces différentes discussions animent par exemple fortement le courant des Subaltern Studies au moment de sa genèse.

[8] Voir Sharma, R.S., “How feudal was Indian feudalism ?”, in Social Scientist, Vol.12, n°2, 1984, p. 16-41 ; Sharma R.S., Early Medieval Indian Society, Hyderabad, Orient Longman, 2001 ; Mukhia Harbans (éd.), The Feudalism Debate, Delhi, Manohar, 2000.

[9] Ce débat renvoie à la question des outils permettant d’appréhender le plus justement la « réalité sociale », à la nature des universaux et rejoue en quelque sorte l’opposition entre réalisme et nominalisme.

[10] Pahari, Anup K., « Unequal Rebellions : the continuum of People’s War in Nepal and India », in Lawoti, Mahendra and Pahari, Anup K. (eds.), The Maoist Insurgency in Nepal. Revolution in the Twenty-First Century, London/New York, Routledge, 2010, p. 198.

[11] Voir Jaoul, Nicolas, Chapitre 1 : « Les naxalites du Bihar, entre les armes et les urnes », in Milices armées d’Asie du Sud (dir. Gayer, Laurent et Jaffrelot, Christophe), Paris, Presses de Sciences-Po (Coll. Académique), 2008, p. 39-68.

[12] Shah, Alpa, « Markets of Protection : The ‘Terrorist’ Maoist Movement and the State in Jharkand, India », Critique of Anthropology, 26 (3), Sept. 2006, p. 297-314.

[13] Comprendre les déterminants, les formes et changements de la conflictualité paysanne indienne dépasse largement l’objectif visé par ce texte. Il faudrait disposer d’études plus précises traitant des interactions entre syndicats paysans, l’État et les milices armées maoïstes. Outre le rapport aux organisations, fussent-elles étatiques ou syndicales, il est difficile d’étudier les rapports sociaux au sein des groupes armés pour des raisons évidentes liées au risque d’une telle démarche ou à l’hermétisme relatif de ces organisations.

[14] Ibidem, p.47.

[15] Shah, Alpa, « Markets of Protection », art. cit.

[16] Ceux-ci sont nommés et regroupés administrativement par le terme de « Scheduled Tribes  » qui signifie Tribus Répertoriées. Ce terme a pour conséquence des politiques de discrimination positive au même titre que pour les « Scheduled Castes », qui représentent les anciennes catégories « intouchables ». Le terme d’adivasi est sensé renvoyer à une autochtonie de ces groupes dans le sens d’une hiérarchie du peuplement en Asie du Sud. Il est essentiellement idéologique et un enjeu de lutte car cette ancienneté est par exemple refusée par les groupes sociaux proches des mouvements nationalistes hindous qui les nommeront plus volontiers vanvasis, c’est-à-dire habitants de la forêt. Le gouvernement Indien ne reconnaît pas de peuples indigènes sur son territoire.

[17] Pahari, Anup K., « Unequal Rebellions », art. cit., p. 206.

[18] Le terme Madia-Gond n’est anthropologiquement pas approprié car il regroupe (on a pu entendre souvent dans cette région le terme de « fédération des groupes Gonds » Rajgond, Pardhan et Madia) arbitrairement des groupes sociaux se sentant différents et dont les langues diffèrent. Dans le district de Gadchiroli, les « Madias » se nomment eux-mêmes GaitéMadia signifiant en fait « gens des collines » et étant vécu comme péjoratif.

[19] Entretien à Hemalkasa avec un travailleur social, Gadchiroli, novembre 2010.

[20] Ibidem.

[21] Il faut 70 feuilles de tendu pour faire un pooda, la rémunération du produit étant calculée sur la base de 100 poodé. Les naxalites à leur arrivée à Gadchiroli avaient fait augmenter la rémunération de 100 poodé de un à dix roupies, ce qui était à la fois considérable et inespéré.

[22] Entretien à Gadchiroli, février 2009.

[23] Entretien à Hemalkasa, Gadchiroli, novembre 2010.

[24] Ibidem.

[25] Voir le numéro de novembre 2010 du bimensuel indien Down to Earth portant sur la question des droits forestiers, Novembre 1-15 2010, p. 27-37.

[26] Voir Teltumbde Anand, Khairlanji. A strange and bitter crop, New Delhi, Navayana, 2008, p. 119-121 ; Teltumbde Anand. (2008) Khairlanji. A Strange and Bitter Crop, New Delhi, Navayana, published in La vie des Idées, URL : http://www.laviedesidees.fr/La-violence-de-caste-en-Inde.html

[27] Voir la page suivante du site internet de « Campaign for Peace and Justice in Chattisgarh  » qui recense la majorité des rapports établis sur la question des droits humains au Chhattisgarh ainsi que sur le Salwa Judum : http://cpjc.wordpress.com/reports-by-fact-finding-teams-on-salwa-judum/

[28] Voir le reportage d’Arundhati Roy, « Ma marche avec les camarades », paru initialement en anglais dans la revue Outlook. On trouve une version française sur le site suivant : <http://www.secoursrouge.org/Ma-marche-avec-les-camarades&gt;

[29] On peut se référer par exemple au cas du docteur Binayak Sen qui fut emprisonné pendant pratiquement deux ans sur des charges inventées. Le vendredi 24 décembre 2010, son cas fut jugé et délibéré à la Haute Cour de Raipur au Chhattisgarh. Le Dr Sen a été condamné à vie pour « sédition », c’est-à-dire l’équivalent français de haute trahison. On lui reproche d’avoir à de multiples reprises passé du courrier entre un détenu maoïste de haut rang et un entrepreneur de Calcutta. Cette décision fut un tollé général en Inde et passera en appel.