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Interview d’un camarade la LIT sur la situation en France

Lien publiée le 25 mars 2023

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Interview sur la situation en France | Liga Internacional de los Trabajadores (litci.org)

Depuis des mois, des luttes, des grèves et des mobilisations de masse ont lieu en France contre la « réforme » des retraites. Le 16 mars, Macron a annoncé qu’il utiliserait l’article 49-3 de la Constitution pour éviter un vote à l’Assemblée nationale et tenter de mettre fin aux grèves. Cet article prévoit que le gouvernement peut adopter une loi (dans ce sas-ci la « réforme » des retraites) sans consulter l’Assemblée nationale. C’est un acte autoritaire, mais qui n’apporte pas les résultats escomptés par le gouvernement et le patronat. Tout le pays continue d’être traversé par des grèves, des blocages et des manifestations. Nous avons interrogé Michael Lenoir, camarade de la LIT en France.

Pour commencer : Comment s’est déroulée la grève et la mobilisation du 7 mars ?

Dans quels secteurs d’activité ont-elles été les plus touchées ? Y a-t-il eu des grèves et des manifestations également dans les jours qui ont suivi ?

La journée de grève du 7 mars était la 6ème journée de grèves et de manifestations décidée par l’intersyndicale nationale depuis le 19 janvier. Ce jour-là, il y a eu de très grandes manifestations, probablement les plus importantes depuis le début du mouvement. La police a dénombré 1,3 million de manifestants dans toute la France, et la CGT 3,5 millions.

Mais il semble que le nombre de grévistes ait été un peu moins important que le 19 janvier, premier jour de la grève nationale interprofessionnelle.

Par exemple, à la SNCF, 39% de grévistes (selon une source syndicale) contre 46% le 19 janvier. Mais malgré cela, 76% des conducteurs de train étaient en grève le 7 mars.

Dans l’enseignement, le principal syndicat a recensé 60 % de grévistes dans les lycées. A EDF (production d’électricité), la direction annonçait à la mi-journée 41,5% de grévistes, contre 44,5% le 19 janvier. Chez TotalEnergies, les expéditions des raffineries sont bloquées. 

Des routes ont été bloquées et des coupures d’électricité ont été décidées, de manière sélective, au détriment notamment des macronistes. Et plus d’une vingtaine d’universités ont été bloquées le 7 mars, ainsi que plus de 300 lycées, dont 40 en région parisienne.

Après la manoeuvre de Macron et du gouvernement, voici que les médias (TV, presse etc.) disent que les manifestations continuent et qu’il y a aussi d’importantes grèves ouvrières dans certaines régions du pays (avec aussi des usines occupées) est-ce exact ? Les grèves ont-elles un programme pour les jours à venir ?

Quand vous dites « manœuvre de Macron », je suppose que vous voulez parler du passage en force avec l’article 49-3 de la Constitution, qui a été décidé pour éviter un vote à l’Assemblée nationale, qui aurait probablement été négatif pour Macron et son gouvernement ? C’était le jeudi 16 mars.

Non seulement les manifestations se poursuivent, mais elles ont changé de nature. Cet autoritarisme a accru la colère populaire, et les manifestations sont spontanées, elles ont lieu tous les jours, surtout la nuit. Elles sont souvent interdites, et des affrontements avec la police ont lieu, à Paris et dans de nombreuses villes. On a l’impression que la lutte commence à échapper aux directions syndicales, qui n’ont rien prévu d’autre qu’une nouvelle journée de grèves et de manifestations demain, jeudi 23 mars, alors que le projet de loi a été adopté au forceps, sans même qu’une seule motion de censure ait pu réunir 287 voix à l’Assemblée nationale. Il a manqué 9 voix (278 sur 577) pour dissoudre le gouvernement d’Elisabeth Borne.

Les grèves (avec occupations) et les luttes se sont intensifiées dans certains secteurs, surtout depuis le 16 mars : les raffineries et le secteur des déchets en particulier : des tonnes de déchets jonchent les trottoirs parisiens. A la SNCF, la grève continue, même si elle s’est affaiblie depuis le 7 mars. Mais il est aussi possible qu’elle reprenne. Tout le pays est touché par les grèves, les blocages et les manifestations, mais la région la plus mobilisée dans la lutte est sans conteste Marseille, où la CGT est plus militante que la direction confédérale.

Du côté des étudiants, la situation s’est considérablement améliorée : d’importantes assemblées ont eu lieu et les étudiants sont dans la rue, en lien avec les travailleurs en grève (cheminots, éboueurs, etc.).

Le grand problème est que les grèves reconductibles sont décidées localement, spontanément par la base, et durent plus ou moins longtemps. Les grèves reconductibles sont affaiblies par l’isolement organisé par les bureaucraties intersyndicales.

Comment agissent les principales directions syndicales et politiques du mouvement ouvrier ? Le 23 mars, une nouvelle journée de grève est prévue : qui sont les syndicats qui y appellent ?

L’intersyndicale refuse d’appeler à une grève interprofessionnelle reconductible et de bloquer sérieusement le pays. C’est ce qu’il faut faire. La question est de savoir si nous pouvons imposer une option stratégique alternative à celle des bureaucrates syndicaux.

C’est le sujet d’articles à venir. C’est toujours la même stratégie des directions syndicales majoritaires, unies ou divisées : des « journées d’action » avec des grèves et des manifestations à intervalles variables. En France, on appelle cela des grèves « saute-mouton ». Il faut bloquer la machine à profit, la lutte doit coûter cher au capital. Le pire, c’est que des proches de Macron et même des membres du gouvernement le disent ! Mais les directions syndicales ne veulent toujours pas l’entendre…

Cela use la l’esprit combatif des travailleurs, car le rapport de force ne s’améliore pas pour notre classe, et Macron passe en force ! Il faut à la fois exiger des directions syndicales qu’elles appellent à la grève générale (car malheureusement beaucoup de travailleurs, même critiques, suivent ces directions plutôt que des petits groupes syndicaux ou des politiciens d’extrême gauche), et construire une auto-organisation suffisamment solide et démocratique pour tenter de faire émerger une direction alternative de la lutte. Tant que les bureaucrates syndicaux imposeront leur stratégie de lutte, nous perdrons. En ce sens, les directions syndicales sont de véritables machines à perdre ! Le 23 mars (demain), tous les syndicats appellent à la grève, mais Macron s’en moque.

Mais il est possible que le centre de gravité de la lutte se déplace. Nous le verrons très bientôt. Pour l’instant, la combativité remonte, après un recul après le 7 mars. Le 49-3 a électrisé la colère et la combativité, visiblement.

La répression est-elle très forte ?

La répression augmente. Macron et son gouvernement sont minoritaires partout : dans la rue, dans une grande majorité de la population, dans l’opinion publique, dans le monde du travail…  La cote de popularité de l’Élysée est au plus bas, et même au Parlement il n’a pas la majorité, mais le président reste arrogant ! Alors, pour imposer sa volonté, il est logique qu’il accentue la répression ! Il y a déjà eu plusieurs milliers d’arrestations dans toute la France depuis le 16 mars (292 rien qu’à Paris le 16 mars). Les personnes arrêtées sont placées en garde à vue, et la grande majorité d’entre elles sont relâchées car elles ne sont pas inculpées. La police, super-violente au moment des Gilets jaunes et sous le commandement de l’ancien préfet de police de Paris Didier Lallement, avec des dizaines de blessés graves et de morts, a calmé sa brutalité ces derniers mois. Dans les manifestations syndicales, la situation était plutôt calme depuis janvier. Maintenant, la police gaze et frappe de plus en plus… et la police commence à bloquer les manifestants à des endroits où ils ne peuvent plus bouger…