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Lip, Charles Piaget et le « socialisme de tous les jours »

histoire lip

Lien publiée le 12 juillet 2023

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Lip, Charles Piaget et le « socialisme de tous les jours » - CONTRETEMPS

L’expérience autogestionnaire des Lip a non seulement marqué son époque, les effervescentes années 1970 où tous les espoirs révolutionnaires étaient permis, mais encore la mémoire populaire comme celle du mouvement ouvrier. En proposant de publier ici un entretien paru en octobre 1974 avec Charles Piaget, l’un des leaders de cette puissante lutte qui dura plusieurs années, et en le remettant en contexte historique et politique, Théo Roumier souligne les importants axes stratégiques que les Lip en général et Piaget en particulier avançaient: sur l’autonomie ouvrière, la forme parti, la pratique autogestionnaire, la manière de construire le socialisme et l’éthique révolutionnaire. Parce qu’ils sont encore inspirants aujourd’hui.

En 1973, l’usine Lip de Palente, à Besançon, est un fleuron de l’industrie horlogère. Elle n’en est pas moins menacée de démantèlement et d’un plan de licenciements massifs qui va rencontrer une résistance ouvrière opiniâtre. Le 12 juin, cette dernière prend un tournant décisif avec la « mise à l’abri » du stock de montres de l’usine. Le 18 juin 1973, les ouvrières et ouvriers de Lip se réunissent en assemblée générale et vont encore plus loin. La décision qui y est prise est un défi à l’ordre et à la légalité capitaliste : relancer la production de montres, les vendre, s’assurer ainsi un « salaire de survie » en s’octroyant – directement – une « paie ouvrière ». Les Lip sont les « Hors-la-loi de Palente » (1).

Par son imagination, son audace, sa détermination, leur lutte a frappé les esprits des contemporain·es. Tout l’été, elle bénéficie d’un véritable enthousiasme populaire : dans la presse, au transistor, on suit les nouvelles du combat des Lip. Le bulletin des grévistes, Lip Unité, est diffusé par des dizaines et des dizaines de « comités Lip » locaux ; les ventes de montres sont le fait d’autant de receleurs et receleuses solidaires. Au mois d’août, 200 ouvrières et ouvriers de Lip font le déplacement dans le Larzac pour soutenir la lutte paysanne contre l’extension du camp militaire. L’acmé de la solidarité avec Lip sera la manifestation de 100 000 de ses soutiens à Besançon le 29 septembre 1973.

Par le processus profondément démocratique qui s’y est développé – appuyé sur les décisions de toutes et tous en assemblée générale souveraine –, par l’ébauche d’une légalité ouvrière alternative à la domination patronale et à l’aliénation du Capital, le combat des Lip a incarné le renouveau de l’action ouvrière des années 68 et alimenté la perspective autogestionnaire des espoirs socialistes d’alors.

L’irruption du féminisme a également impacté Lip : des militantes comme Alice Carpena, Fatima Demougeot ou Monique Piton, toutes actives dans le Comité d’action, participent à la création d’un Groupe Femmes dans l’usine en 1974. La brochure qu’il publie en 1975, Lip au féminin – traduit dans sept langues et diffusé à des milliers d’exemplaires –, rendra visibles certains des travers patriarcaux de la lutte. Jusque dans les syndicats : les délégués sont très majoritairement des hommes, et « laisser la place » est loin d’être une évidence.

À tout point de vue, Lip est une brèche qui a déchiré le tissu du « monde comme il va » – ou plutôt comme il ne va pas –, et elle est le fait des ouvrières et ouvriers de Besançon, et d’elles et eux seul·es. « À combien de Lip simultanés un pouvoir central capitaliste peut-il tenir tête sans entrer dans une période de crise grave ? » demande alors Frédo Krumnow, secrétaire à l’action revendicative de la CFDT, tenant d’une ligne révolutionnaire en son sein (2).

Charles Piaget, syndicaliste de la CFDT lui aussi, militant du PSU et partisan de l’autogestion, a indéniablement été le porte-parole des Lip. De cette lutte, il va tirer des réflexions militantes à propos du « débouché politique ».

Le passage, la transition au socialisme est alors au cœur des débats, c’est un objectif vécu comme « proche » à l’époque, presque à portée de main, tangible. Nourri tant des expériences et des leçons de l’Unité populaire chilienne de 1970-1973, que de la révolution des Œillets au Portugal en 1974-1975. Ce socialisme, doit-on le construire « par en haut » – c’est la voie du Programme commun de gouvernement signé par les partis de gauche en 1972 –, en comptant donc avant toute chose sur le changement électoral ? Ou bien est-ce qu’il doit surgir « d’en bas à gauche », des luttes et des formes de pouvoir populaire qu’elles construisent ? Piaget parie indéniablement sur la seconde option. Au titre du rôle qu’il a eu dans la lutte des Lip, il multiplie les interventions, en meeting ou dans la presse. Qu’y défend-t-il alors ? Quatre grandes pistes peut-être.

D’abord qu’il faut être révolutionnaire. L’image qu’il utilise dans un de ses entretiens pour cela est percutante : « Notre objectif n’est pas de remplacer les patrons et les préfets dedroite par des directeurs et des préfets de gauche. » Il faut construire un authentique pouvoir populaire qui ne peut pas se réduire à la composition d’un gouvernement, à « l’occupation » de l’État tel qu’il est. Mais bien au contraire, un pouvoir qui s’y oppose et le remplace. Tout au plus concède-t-il que l’utilité d’un éventue gouvernement de gauche résiderait dans le soutien qu’il pourrait apporter au mouvement des luttes, seul « moteur de la transformation sociale »… et appelé, de ce fait, à déborder ce gouvernement.

Ensuite qu’il s’agit, pour cela, « de faire en sorte que se développe, en toute occasion, l’actio autonomede la classe ouvrière ». Piaget ne fait que repartir de la devise de la Première Internationale : « l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes ». Il n’y aura pas de politique d’émancipation et d’égalité sans l’intervention et les mobilisations directes des classes populaires.

Il en découle une conception du « socialisme de tous les jours », qui parte des pratiques militantes elles-mêmes, sur le terrain. De l’ancrage au sein des classes populaires et de leurs combats – au travail, mais aussi dans la vie. C’est par l’expérience quotidienne qu’on construit un projet politique qui puisse se prétendre « socialiste ». Parler de socialisme au quotidien, c’est aussi remettre en cause radicalement l’organisation de nos vies, comme du temps de travail, ce que Piaget traduit ainsi : « On ne pourra pas parler de bonheur si, pendant 40 heures par semaine ou plus, on est soumis à tous les caprices de la hiérarchie, d’un despotisme de tous les instants. »

Interrogeant à partir de tout cela la forme « parti », Piaget en propose enfin une formule qui ne soit ni « de type “parlementaire-électoral” » ni « de type “avant-garde éclairée” ». Plaidant pour « l’intellectuel collectif » qu’il peut représenter, le parti selon Piaget tient aussi de ce qu’on pourrait appeler un « parti-atelier », terrain et outil collectif d’expérimentation autogestionnaire : en son sein comme vers l’extérieur ; dans et pour les luttes. Il y a là indéniablement matière à nourrir les échanges de la gauche syndicale et politique d’aujourd’hui si elles veulent pouvoir représenter une alternative réelle aux urgences de l’heure, (re)trouver les chemins d’un projet anticapitaliste, d’un espoir socialiste – ou écosocialiste – à même de changer le monde.

L’entretien avec Charles Piaget qui est reproduit ci-dessous a été publié dans Politique Hebdo n°145 du 3 au 9 octobre 1974. Ce titre de presse paraît régulièrement de 1970 à 1978 avec la volonté de s’adresser au « courant de mai ». Sans attachement partisan, mais avec une ligne éditoriale donnant la parole à la gauche révolutionnaire dans sa diversité. Quelques éléments de contexte sur cet entretien : il intervient après l’élection présidentielle de mai 1974, et la tentative de « candidature des luttes » de Charles Piaget (3) et avant la conclusion de l’opération des Assises du socialisme qui se tiennent les 12 et 13 octobre 1974. Cette opération a été lancée par les directions du PS, de la CFDT et du PSU fin mai 1974 et visait à engager ces trois « composantes » dans la construction d’un seul grand parti socialiste. La direction du PSU est fortement contestée en interne sur cet engagement : le comité national de ce parti qui se tient le 5 octobre voit un retournement de majorité – l’entretien avec Piaget qui suit est directement lié à cette échéance. Le PSU ne sera pas finalement, en tant que tel, parti prenante de cette absorption dans le PS mitterrandien. Ce qui provoque le départ de l’ancienne majorité, derrière Michel Rocard.

Théo Roumier a coordonné avec Christian Mahieux et Patrick Silberstein l’anthologie Lip Vivra ! sortie récemment aux éditions Syllepse, et publié Autogestion et révolution. Charles Piaget, interventions, 1974, aux éditions du Croquant.

***

Il faut rejeter toute attitude de démission

Voici un an [le 29 septembre 1973], c’était la marche de soutien aux Lip sur Besançon. Avant le Conseil national du PSU, organisation dont il est membre, nous avons pensé utile d’interroger Charles Piaget pour qu’il nous dise les leçons politiques qu’il a tirées du combat des Lip et quelles positions elles lui font adopter dans les débats qui se déroulent actuellement au sujet de l’opération PS-PSU-CFDT.

Politique Hebdo : Les majoritaires du PSU disent que les luttes sociales, à elles seules, sont insuffisantes pour régler la question du pouvoir. Et en effet, il est bien vrai que leur développement actuel et leur intensification prévisible pose de manière urgente le problème du débouché politique.

Charles Piaget : C’est un problème fondamental auquel des réponses très divergentes sont apportées. Tu sais que la direction du PSU a engagé le processus d’une « grande force socialiste » avec le PS et la direction de la CFDT. La force d’un tel projet tient au fait qu’il est rassurant.

Pour des militants qui luttent depuis des années, souvent dans l’isolement, avec des moyens dérisoires, comment ne pas être tenté par cette « grande force » qui serait à la fois électoralement crédible et active sur le terrain des luttes ? Comment ne pas penser un instant : et si c’était vrai que le PS a changé, que Mitterrand est devenu réellement socialiste ?

Après une longue réflexion et de nombreux débats, je suis convaincu qu’une telle opération conduirait à l’impasse. Le PS a changé c’est vrai. Mais ce qui le caractérise toujours, c’est que le réseau de notables (conseillers, maires, parlementaires) constitue son véritable système nerveux. Les sections ouvrières, les militants engagés dans les luttes, ne sont que des greffons.

Alors il n’y a que deux possibilités : ou bien y entrer sur la base de nos acquis actuels, avec la volonté de les faire fructifier, et alors nous épuiserons 80 % de notre énergie dans la bataille interne ; ou bien y aller comme Chapuis le propose, en se coupant du CERES (4), en renonçant a priori à tout travail de tendance, et dans un an nous serons noyés ou dégoûtés définitivement.

L’aiguillon des « gauchistes »

Oui, mais la troisième composante… (5)

Elle ne modifie pas les données du problème. Elle ne constitue d’ailleurs pas un bloc homogène. Entre les camarades CFDT de Rhône-Alpes et les dirigeants de la Métallurgie, par exemple, il y a plus que des nuances. À Besançon, on n’oublie pas que les décisions importantes, tout au long du conflit Lip, ont été prises par nous contre l’avis des dirigeants fédéraux (contacts avec la Suisse, paye ouvrière, marche, rejet du plan Giraud…). Alors, leur signature au bas de l’appel pour des Assises du socialisme refroidit ceux qui auraient pu être tentés.

Il y a, c’est incontestable, une montée très sensible du réformisme, et c’est un phénomène populaire. Parce que la grande masse des travailleurs s’efforce de croire qu’il est possible, sans affrontement majeur, d’en finir avec le capitalisme. De la même façon que dans une boîte, avant d’en venir à la lutte, les travailleurs espèrent toujours que la discussion au comité d’entreprise ou la démarche des délégués sera suffisante. Seule l’expérience vécue les amène à modifier leur attitude, et quand ils sont convaincus de la nécessité de la lutte, ils sont capables de déployer une énergie étonnante. L’important est d’être avec eux, même quand ils ont des illusions, pour les aider à les dépasser dans l’action de classe.

En admettant avec toi que la « grande force » mène à l’impasse, cela ne règle pas la question du débouché politique. D’autant que tout le monde s’accorde à constater l’impuissance de l’extrême gauche.

C’est trop facile de railler « l’impuissance de l’extrême gauche », surtout pour une gauche qui est reléguée dans l’opposition depuis 16 ans. C’est tout de même bien l’extrême gauche qui a posé, de manière offensive, les problèmes de la contraception, des prisons, de la santé, etc.

C’est en bonne partie sous l’aiguillon des « gauchistes » que nous avons ré-appris les pratiques démocratiques dans les luttes, que nous avons découvert l’importance des problèmes des travailleurs immigrés, etc.

Aujourd’hui, encore, l’extrême gauche se montre efficace sur un terrain pourtant difficile : celui de l’armée (6). Alors soyons plus modestes dans nos jugements.

Pour ma part, je refuse deux attitudes confortables : l’une qui consiste à se satisfaire de certitudes théoriques sans souci d’efficacité concrète ; l’autre qui consiste à chercher refuge dans une « grande maison » crédible et présentable. Ce sont deux attitudes de démission face aux exigences de la révolution socialiste.

Le débouché politique des luttes sociales, cela ne peut pas se résoudre d’abord en termes d’organisation. La division entre « social » et « politique » est imposée par la bourgeoisie pour mieux perpétuer son pouvoir. Toute réponse qui contribue à entretenir cette division est insatisfaisante, que cette réponse soit de type « parlementaire-électoral » ou de type « avant-garde éclairée ». Dans un cas comme dans l’autre, la politique reste une affaire de spécialistes.

Action autonome de la classe ouvrière

Existe-t-il d’autres réponses que celles-là ?

Il faut faire en sorte que se développe, en toute occasion, l’action autonome de la classe ouvrière. C’est dans la pratique collective que les travailleurs découvrent leur identité de classe, et surmontent concrètement les fausses catégories (employés-ouvriers, social-politique). Cela implique pour les militants autogestionnaires, de promouvoir cette pratique collective (débat démocratique, prises de responsabilité, liaisons horizontales, etc.). En schématisant, je dirai : le problème n’est pas d’offrir un débouché politique aux luttes sociales, il est de tout faire pour que les travailleurs découvrent collectivement ce débouché, qui est la prise du pouvoir par eux-mêmes en tant que classe (et pas seulement par un parti agissant en leur nom). La construction d’un parti pour l’autogestion, dont le PSU est un élément de base, n’a de sens que si elle s’intègre dans un tel processus d’émancipation des travailleurs.

Dans cette perspective, un parti est-il vraiment nécessaire ?

Il est indispensable. Mais ce n’est plus une délégation spécialisée dans les problèmes politiques. Ses militants sont insérés activement dans les luttes de masse : ils doivent confronter leurs expériences avec l’acquis théorique du mouvement ouvrier, analyser la stratégie de l’ennemi de classe, proposer des orientations, des mots d’ordre qui permettent l’avancée collective et, à terme, la victoire.

Ils doivent veiller également à la liberté d’expression et de débat chez les travailleurs, au respect des processus démocratiques de décision et de contrôle. Leur ligne de conduite générale, c’est le développement de l’action autonome de la classe ouvrière, en vue de l’instauration du socialisme.

Ce parti joue véritablement un rôle d’intellectuel collectif, rôle qu’a pu jouer le PSU, de manière globalement satisfaisante, tout au long du conflit Lip.

Les doubles pouvoirs

Action autonome de la classe ouvrière et ses alliés, cela se traduit en période révolutionnaire pas le développement de doubles pouvoirs. Ce qui fait question c’est l’articulation entre l’action institutionnelle (gouvernement, administration) et les organes de double pouvoir (comités, conseils).

Tout le monde reconnaît la nécessité de cette articulation, mais les perspectives sont divergentes. Pour les réformistes, le mouvement des masses a des limites précises : il sert de point d’appui et de soutien à l’action gouvernementale ; s’il déborde ces limites, il est désavoué et rapidement combattu. Au contraire, pour nous, ce mouvement est le moteur de la transformation sociale.

En effet, le pouvoir n’appartient pas à un petit groupe (le gouvernement) mais à une classe sociale : la bourgeoisie. Notre objectif n’est pas de remplacer les patrons et les préfets de droite par des directeurs et des préfets de gauche. Il faut que la classe ouvrière en tant que telle conquiert le pouvoir. Cela implique des rapports tout différents entre les travailleurs en mouvement et un éventuel gouvernement de gauche.

Si celui-ci se pose en arbitre au-dessus des classes qui s’affrontent ou, pire, s’il réprime les travailleurs, la voie est ouverte pour la contre-offensive réactionnaire. À mon avis, l’action gouvernementale doit consister à ouvrir des champs d’action pour le pouvoir collectif des travailleurs. Généralisation du contrôle ouvrier dans les entreprises bien sûr. Mais il y a plus : des domaines entiers comme la justice, le contrôle économique, la gestion communale et régionale, la santé, la Sécurité sociale, peuvent d’emblée être confiés aux organes de pouvoir populaire, ou pour le moins placés sous leur contrôle.

L’action gouvernementale doit, très rapidement, désarticuler les appareils répressifs conçus par la bourgeoisie : organisation et contrôle des services de police au niveau communal, droits politiques et syndicaux pour les soldats, dissolution des corps spécialisés (CRS, Sécurité militaire…), constitution de « piquets de sécurité » dans les entreprises (embryons d’une armée populaire).

Il n’y a pas de voie médiane pour un gouvernement de gauche. Ou bien il se fait l’instrument conscient de la conquête du pouvoir par la classe ouvrière dans toute la société, ou bien il reste un appareil contrôlé plus ou moins directement par la bourgeoisie.

Nous ne sommes pas hostiles a priori à la participation au gouvernement. Nous y posons une condition : c’est qu’il reconnaisse dans les organes populaires (comité d’usine, de quartiers, etc.) la base objective de son pouvoir.

Notes

1. C’est le titre de la bande dessinée de Piotr et Wiaz publiée par les éditions de la LCR et diffusée par ses militant·es au troisième trimestre de 1974.

2. Frédo Krumnow (1927-1974) est d’abord employé dans l’industrie textile en Alsace, formé à la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC), il est permanent de cette organisation dès 1946 avant de consacrer l’essentiel de son temps au militantisme syndical CFTC puis CFDT au sein de la Fédération Hacuitex (Habillement, Cuir, Textile) puis de la confédération. Syndicaliste autogestionnaire et révolutionnaire, membre du PSU, c’est lui qui prend la parole pour la CFDT lors du meeting au stade Charléty le 27 mai 1968. Il est l’une des figures les plus importantes et marquantes de la centrale dans la première moitié des années 1970. Il est emporté par un cancer le 19 mai 1974.

3. « Leçons d’un candidat des luttes. Enquête sur l’éphémère candidature de Charles Piaget à la présidentielle de 1974 », La Revue du Crieur n°20, mars 2022

4. La direction du PSU favorable aux Assises – que Robert Chapuis représentait, avec Michel Rocard – n’envisageait pas de maintenir un courant des ex-PSU au sein du « nouveau PS », ni de se rapprocher de la tendance de gauche existante, incarnée par le CERES.

5. La « troisième composante » désignait les militant·es d’associations et de syndicats qui avaient annoncé collectivement rallier l’initiative des Assises du socialisme – dans une tribune donnée au quotidien Le Monde le 12 juin 1974.

6. Le 16 mai 1974, dans l’entre-deux tours de l’élection présidentielle, un appel, « Cent soldats prennent la parole », est publié simultanément dans Rouge et Libération. Il s’appuie sur l’éclosion, à compter du printemps 1973, de Comités de soldats dans les casernes, composés de jeunes appelés et dans lesquels les militants d’extrême gauche sont actifs. Le 10 septembre 1974, fait spectaculaire, deux cents soldats, un quart des effectifs du 19e régiment d’artillerie, défile en manifestation dans les rues de Draguignan. Le « mouvement des soldats » perdurera plusieurs années encore, voir « Contester dans l’Armée. Comités de soldats, antimilitarisme et syndicalisme dans les années 1970 », Les Utopiques n°5, juin 2017.

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Illustration: Charles Piaget lors du conflit Lip de 1973 • © Bibliothèque municipale de Besançon, Photographies de L’Est Républicain (Bernard Faille), PH 49341