https://lanticapitaliste.org/opinions/culture/quelques-livres-loccasion-du-centenaire-de-la-mort-de-lenine

Des nouveautés, mais aussi des rééditions pour tout comprendre de l’actualité de Lénine.

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Lénine, la révolution, le parti, d’Ernest Mandel

Éditions Librairie La Brèche, janvier 2024, 168 pages, 7 euros.

La pensée de Lénine, de Georg Lukács

Éditions sociales, janvier 2024, 138 pages, 13 euros.

Le point commun de ces deux ouvrages par-delà les années — le « Lukács » date d’il y a un siècle ; les cinq textes de Mandel démarrent en 1953 — c’est le concept d’actualité de la révolution. Non pas comme nombre de gauchistes d’alors et d’aujourd’hui l’entendent — qui voient la révolution s’avancer à la moindre péripétie de la lutte des classes, confondant dans une agitation fébrile leur naissance à la politique avec la naissance de la politique — mais comme objectif historique d’une époque de guerres et de révolution, époque ouverte par août 1914.

Lukács a parfaitement saisi ce en quoi Lénine incarnait la vague révolutionnaire : non pas l’icône, la momie du mausolée de la place Rouge au service du totalitarisme dans un seul pays, mais sa pensée totalisante qui perçoit la Révolution mondiale comme un tout, où la Russie arriérée n’occuperait qu’une place secondaire, où le privilège, l’inégalité sont l’ennemi partout dans le monde.

Mandel, dès les années 1950, reprend le flambeau : l’actualité de la révolution est une perspective historique. Lénine, et c’est son génie, a su la percevoir et s’en saisir pour brusquer son parti (avril 1917) et faire aboutir une révolution prolétarienne. La Quatrième Internationale s’inscrit dans cette époque de guerres et de révolutions. Les masses exploitées ne sont plus les mêmes, les modes d’exploitation diffèrent, la révolution n’est plus imminente sauf par intermittence (la Chine, Cuba, le Che, l’année 1968 au niveau mondial…) et la conscience de classe reste la clé. Mandel n’a de cesse de nous faire comprendre qu’un révolutionnaire doit s’organiser, que l’organisation marxiste révolutionnaire s’éduque en éduquant. La conscience de classe, son niveau, son développement, c’est la tâche sine qua non des révolutionnaires. Comme pour Lukács, la théorie révolutionnaire est apportée de l’extérieur à la classe ouvrière mais n’acquiert sa légitimité que confrontée à la pratique des luttes quotidiennes, sous peine d’inanité. 

L’objectif central de Lénine, des écrits de Lukács, de la pratique et des textes de Mandel, c’est de faire intégrer par le plus de travailleurEs possible que l’État est la cristallisation des privilèges, la justification de l’inégalité — derrière l’idéologie majoritaire du « je vote donc je suis l’égalE… du bourgeois » —, l’ennemi à abattre. Le comprendre est le pas décisif de l’adhésion au parti d’avant-garde, chez nos trois auteurs. Ce parti d’avant-garde, s’il n’est pas autoproclamé, est l’expression de la classe en mouvement et n’est qu’un moyen vers la Révolution, elle-même étant une voie de passage obligée vers la société sans classes. 

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Découvrir Lénine, de Marina Garrisi

Éditions sociales, janvier 2024, 184 pages, 10 euros.

Publié par les Éditions sociales, dans la collection Les Propédeutiques, ce Découvrir Lénine est un petit ouvrage efficace et utile : 11 thèmes, traités de façon méthodique, avec pour chacun une citation de texte original issu des œuvres complètes, une rapide contextualisation, une série de questions suivies d’un développement à vocation pédagogique — mais qui énonce un point de vue — puis d’une proposition Pour aller plus loin...

Choisir 11 thèmes dans l’œuvre colossale de Lénine n’est certainement pas une mince affaire. Mission accomplie : la sélection proposée permet à la fois de découvrir la pensée de Lénine, d’aborder certaines questions d’une brûlante actualité (sur le parti, la guerre, la révolution, les élections...), d’autres entrées moins évidentes (sur la question nationale, sur la bureaucratie), le tout dans une perspective de formation et d’action, ce qui va bien à l’œuvre, et surtout à l’engagement politique, de Vladimir Illich Oulianov !

Claude Moro

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Lénine et l’arme du langage, de Jean-Jacques Lecercle

Éditions La Fabrique, janvier 2024, 208 pages, 15 euros.

Qu’avons-nous, cent ans après sa disparition, à apprendre de Lénine et de son œuvre ? À une époque où l’abstraction, les périphrases et la langue de bois sont la norme en politique, quelles leçons pouvons-nous tirer de la lecture des 45 volumes de l’œuvre de celui qui avait le verbe haut, l’emportement et l’indignation faciles et pour qui la vérité était essentielle ? 

S’il ne s’est aucunement intéressé au langage en tant que tel, il en maîtrisait les subtilités, les paradoxes et la portée. Lénine connaissait la nécessité de tenir compte de la conjoncture et de revenir sur des mots d’ordre donnés, lorsque les circonstances l’imposaient. Il avait compris le pouvoir des mots et l’importance fondamentale, dans la lutte de classe, de se réapproprier ceux dévoyés par l’adversaire. 

En analysant ces textes, Jean-Jacques Lecercle nous apprend comment parler politique selon Lénine afin de pouvoir, « grâce à lui et parfois malgré lui » penser la révolution.

Cyrielle L. A.

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Que faire de Lénine ?, de Guillaume Fondu

Éditions Critiques, 2023, 202 pages, 18 euros.

Si Lénine est incontestablement un grand théoricien, la plupart de ses textes sont directement polémiques ou bien ce sont des discours, voire des décrets. Il représente une certaine façon de faire de la politique : partir des outils théoriques marxistes et matérialistes de compréhension du monde (sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire) pour analyser une situation concrète (la formation sociale russe, le rapport de forces entre les classes…) et en déduire un scénario possible pour formuler les mots d’ordre capables de faire comprendre la situation et les tâches aux masses pour les mobiliser. Ce sont les différents moments de cette pratique politique que le livre explore. C’est d’ailleurs une des grandes forces du livre que de présenter de nombreux textes inédits pour comprendre la parole des adversaires socialistes de Lénine, les thèses des « économistes », des mencheviques ou des socialistes-révolutionnaires, trop souvent réduits à des caricatures. Cela permet d’inscrire Lénine dans les débats de son époque et de comprendre pourquoi il tranche avec les autres dirigeants. Ce livre a le mérite d’utiliser Lénine pour nous inviter à formuler des questionnements sur notre époque et nos pratiques politiques.

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Les Dilemmes de Lénine, de Tariq Ali

Sabine Wespieser, 2017, 485 pages, 25 euros.

La biographie de Lénine par le révolutionnaire et écrivain britannique Tariq Ali est parue en français il y a six ans. Il explore les aspects les moins connus de Lénine : son rapport à la tradition populiste, anarchiste et terroriste russe, son rôle dans les années terribles de la guerre civile, ses positions sur l’amour libre et la libération des femmes. Sous la plume du romancier, le personnage de Lénine reprend vie, avec ses doutes et ses contradictions, loin de l’image d’un homme sans relief ni émotions, automate au service de la révolution.

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Le Dernier Combat de Lénine, de Moshe Lewin

Syllepse, 2015, 193 pages, 17 euros.

Ce livre de l’historien soviétique Moshe Lewin revient sur les derniers mois de la vie de Lénine. Atteint de paralysie et gravement malade, coupé des moyens de communiquer avec le parti par un Staline qui cherche à préserver son pouvoir, Lénine va faire le diagnostic de la contre-révolution qui est en train de naître à l’intérieur même du nouvel État soviétique. Il va alors rassembler ses dernières forces pour mettre sur pied une alliance avec Trotski et mener la lutte dans le parti contre Staline et les bureaucrates sur lesquels il fonde son pouvoir. Un livre essentiel pour comprendre la destinée tragique de la révolution russe mais aussi contre les mensonges du stalinisme.

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Le Léninisme sous Lénine, de Marcel Liebman

Samsa, 2017, 780 pages, 23 euros.

Le livre de Marcel Liebman est la somme la plus complète et la plus rigoureuse sur les évolutions politiques de Lénine, de la formation du bolchevisme à la création de la IIIe Internationale en passant par sa compréhension à partir de 1905 des soviets comme organe fondamental de la dictature du prolétariat ou sa défense acharnée du droit à l’autodétermination des peuples. Un livre inégalé depuis sa première parution en 1975