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Brève histoire du néolibéralisme, de David Harvey

Lien publiée le 19 septembre 2024

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

https://lanticapitaliste.org/opinions/culture/breve-histoire-du-neoliberalisme-de-david-harvey

Éditions Amsterdam, livre de poche 2024, 416 pages, 13 euros.

Il faut féliciter les éditions Amsterdam pour leur réédition de cet ouvrage de David Harvey initialement paru en 2005. L’auteur est un géographe et économiste marxiste dont l’Anti­capitaliste la Revue a déjà traité parlé 1. Harvey résume ainsi l’objet de ce livre : fournir une « histoire politico-­économique des origines du néolibéralisme et de sa prolifération généralisée sur la scène mondiale ».

L’avénement du néolibéralisme

Avant la déferlante néolibérale, fonctionnait ce que l’auteur qualifie de « libéralisme intégré » basé sur un « compromis de classe » entre le capital et le travail. À la fin des années 1960, le modèle commença à s’effondrer tant au niveau national qu’à l’échelle internationale. Ce fut donc l’heure du néolibéralisme dont les pères fondateurs avaient brandi l’idéal de liberté individuelle. Sous cet habillage, le projet politique du néolibéralisme était en fait le rétablissement des conditions d’accumulation du capital et la restauration du pouvoir des élites économiques.

Le rôle de l’État dans la théorie néolibérale est relativement simple : garantir le fonctionnement du marché. Pour se protéger des menaces que les processus électoraux pourraient faire peser sur la stabilité du marché, les gouvernements néo­libéraux donnent des pouvoirs à des institutions « indépendantes », comme les banques centrales, les cours de justice. En fait, malgré son discours, l’État néolibéral se méfie de la démocratie, et ses résultats économiques et sociaux sont en décalage par rapport à ses proclamations. Tandis que, aussi bien les États nationaux que les institutions internationales comme le FMI, tous font des entorses aux principes pour sauver des institutions financières qui se sont mises elles-mêmes en ­difficulté.

Nationalisme et méthodes policières

Harvey souligne que l’État néo­libéral est instable. Pour faire face aux mécontentements, l’autoritarisme et les méthodes policières se renforcent tandis que l’État néolibéral en appelle de plus en plus au nationalisme face aux désordres internes et à la compétition internationale. Harvey souligne que les contradictions du néolibéralisme peuvent être porteuses de dérives encore plus dangereuses, centrées sur les valeurs morales, le racisme, etc. 

Dans un chapitre intitulé « Le néolibéralisme en procès », Harvey revient sur les résultats de la néolibéralisation. Il souligne leurs limites : les politiques néolibérales n’ont pas réussi à impulser une nouvelle phase de croissance mondiale. L’Asie de l’Est (avec la Chine) et l’Inde semblent infirmer ce diagnostic mais il s’agit d’États poursuivant des politiques spécifiques et non alignées sur le « consensus de Washington ». Le seul succès du néolibéralisme est en fait le contrôle de l’inflation.

Mouvements contestataires

Harvey conclut son livre en évoquant les crises dont est porteur le néolibéralisme. Des crises financières violentes sont inévitables. Par ailleurs, la néolibéralisation génère de nombreux mouvements ­contestataires dont une grande partie se distingue des mouvements à base ouvrière autrefois dominants. Ce qui ne signifie pas, souligne Harvey, la mort des mouvements ouvriers, ni dans les vieux pays industriels ni dans les nouveaux. Ces nouveaux mouvements, enracinés dans le quotidien et le local, ont certes produit ou favorisé la production d’une pléthore d’idées alternatives mais ont, souligne l’auteur, souvent du mal à aller au-delà de la question sur laquelle chacun d’entre eux s’est constitué pour appréhender la nature de classe des politiques auxquelles ils se heurtent. 

Certaines obscurités ou confusions ne réduisent pas l’intérêt d’un livre extrêmement utile pour comprendre le néo­libéralisme dans sa globalité.

Henri Wilno

1 – Voir « Petite invitation au marxisme de David Harvey », de Thierry Labica, Revue L’Anticapitaliste n° 146 (mai 2023),
https://lanticapitaliste…