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Ombres et lumières de la "voie démocratique" vers le socialisme. Réflexions à partir de Poulantzas

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Lien publiée le 5 novembre 2024

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Ombres et lumières de la « voie démocratique » vers le socialisme. Réflexions à partir de Nicos Poulantzas - CONTRETEMPS

La réédition aux éditions Amsterdam en format poche de l’ouvrage de Nicos Poulantzas L’État, le pouvoir, le socialisme – dont nous avions publié la préface de Razmig Keucheyan – nous permet de revisiter le débat sur l’État et la stratégie révolutionnaire dont le théoricien marxiste a été le protagoniste central dans les années 1970.

Dans l’article qui suit, Martín Mosquera analyse à la lumière des expériences révolutionnaires du dernier siècle la « voie démocratique vers le socialisme » que le théoricien marxiste grec a proposée comme alternative à la social-démocratie et au modèle insurrectionnel d’Octobre 1917. Il plaide en faveur de sa validité à condition d’en cerner certaines faiblesses, en particulier sur la question de la « dualité du pouvoir » au cours du processus révolutionnaire.

La stratégie socialiste en Occident souffre d’un déficit historique dont l’origine première est l’absence de victoires révolutionnaires dans les pays capitalistes avancés. Cette absence a produit un décalage entre les références stratégiques dominantes au sein de la gauche marxiste, issues des révolutions réussies dans les pays périphériques, et les formes de domination politique existant réellement dans le capitalisme occidental. Comme l’a observé Perry Anderson :

« L’État représentatif qui avait progressivement émergé en Europe occidentale, en Amérique du Nord et au Japon, après la chaîne complexe des révolutions bourgeoises dont les épisodes finaux ne datent que de la fin du 19e siècle, était encore un objet politique largement inconnu des marxistes lorsque la révolution bolchevique a eu lieu ».[1]

Le 20e siècle s’est accompagné d’une « occidentalisation » progressive du monde. Par conséquent, le problème de la stratégie socialiste en Occident, qui, au début du siècle passé, se limitait à une poignée de pays industriellement avancés, s’étend maintenant à une grande partie de la périphérie capitaliste. Il est donc nécessaire de formuler une approche stratégique qui corresponde à un monde où un État complexe s’est consolidé et ramifié dans la société civile, où la bourgeoisie dispose d’une force sociale bien supérieure à celle des pays qui ont connu des victoires révolutionnaires (Russie, Chine, Vietnam, Cuba), où un contexte de légalité prévaut pour la lutte politique et où la démocratie libérale règne en tant que mécanisme de métabolisation étatique des revendications sociales.

Ces dernières années, une vague de larges mobilisations sociales et l’émergence de forces de gauche revendiquant électoralement le pouvoir gouvernemental (Grèce, Espagne, Amérique latine) ont conduit à un renouveau partiel du débat stratégique. La discussion actuelle traduit une polarisation entre une « voie démocratique vers le socialisme » et l’approche « insurrectionnelle » traditionnelle qui remonte à Lénine et Trotski. Nous avons là deux « modèles » alternatifs qui semblent s’opposer terme à terme : la voie vers le pouvoir (électorale ou insurrectionnelle), le type de parti nécessaire (parti de masse ou parti d’avant-garde), le type de polarisation politique envisagé (un conflit conduisant à une scission de l’État de l’intérieur ou une lutte entre l’État et un contre-État extérieur) et le type de régime politique post-révolutionnaire (radicalisation de la démocratie parlementaire ou démocratie soviétique).

Quel que soit le mérite des réflexions actuelles, cette discussion reproduit assez fidèlement les termes du débat des années 1970, probablement la dernière grande polémique sur l’État et la révolution en Occident. Le tournant eurocommuniste, la découverte de la pensée de Gramsci au-delà de son pays natal et l’impact des expériences de l’Unité populaire chilienne et de la Révolution portugaise, toutes deux très éloignées des canons classiques, ont été au cœur des discussions qui ont marquées ces années. Dans ce contexte, des travaux importants ont vu le jour, comme ceux de Nicos Poulantzas et Ralph Miliband sur la théorie marxiste de l’État, de l’eurocommunisme de gauche représenté par des figures comme Christine Buci-Glucksmann ou Pietro Ingrao, ainsi que les essais critiques de Perry Anderson et Ernest Mandel contre l’eurocommunisme, le débat allemand sur la dérivation de l’État ou les approches néo-francfortoises de Jürgen Habermas ou de Claus Offe.

Aujourd’hui, nous ne disposons toujours pas d’ouvrages équivalents. L’absence de progrès par rapport à la discussion des années 1970 est peut-être le symptôme d’une impasse qui réside dans « les choses mêmes ». En effet, d’une part, la dynamique des processus actuels de radicalisation sociale et politique prend bien les contours envisagés par l’hypothèse de la voie démocratique : les larges luttes sociales ne conduisent pas à l’éruption volcanique de conseils d’ouvriers et de soldats, mais installent généralement à l’horizon la possibilité d’un gouvernement de gauche dans le cadre de l’État capitaliste. Mais, d’un autre côté, ces expériences se heurtent à chaque fois aux mêmes obstacles : la capitulation social-démocrate des directions (Autriche, Suède, Portugal, France, Brésil, Grèce…) ou l’incapacité à répondre à la réaction des classes dominantes (Chili). L’accumulation des expériences  qui ont échoué est trop importante pour que l’on puisse se contenter de l’ignorer et d’espérer avoir plus de chance la prochaine fois.

Dans ces conditions, la polarisation entre les options est prévisible. Les « insurrectionnalistes » qui critiquent la « voie démocratique » mettent en cause la tendance des forces électorales de gauche à capituler devant les classes dirigeantes, et iels ont de nombreux arguments en leur faveur. Les partisans de la « voie démocratique vers le socialisme », pour leur part, rappellent souvent l’observation de Carmen Siriani selon laquelle non seulement il n’y a pas eu de révolutions réussies dans les pays démocratiques, mais que, dans une démocratie capitaliste, l’idée d’une insurrection armée contre le gouvernement n’a jamais obtenu de soutien au-delà d’une très petite minorité de la classe ouvrière, même en période d’agitation sociale intense[2]. Il n’y a pas de voies démocratiques réussies, mais il n’y a pas eu non plus d’insurrections, même infructueuses.

Malheureusement, si l’on examine le problème sans se bercer d’illusions sur soi ni de faux optimisme, il faut reconnaître que, dans une certaine mesure, les deux positions sont justes. La situation semble alors conduire à une impasse stratégique. Dans les lignes qui suivent, j’essaierai de formuler un point de départ pour  une approche partiellement alternative aux deux grandes options, qui s’organise autour de ces cinq hypothèses interdépendantes :

1/ L’observation de Siriani est sans doute correcte : dans une démocratie capitaliste, l’idée d’une insurrection armée contre le gouvernement n’a jamais obtenu d’adhésion significative, même sous une forme symbolique. Il n’est donc pas raisonnable de s’attendre à ce que les révolutions de notre siècle soient semblables à celles de la période 1917-1921.

2/ Sur le plan théorique, la tradition insurrectionnelle souffre d’un déficit fondamental dans sa compréhension de l’État capitaliste et de la démocratie, ce qui la conduit à l’objectif stratégique de « briser » l’État tout entier et à l’attente de son extinction progressive.

3/ Il existe néanmoins un point de rencontre aux conséquences politiques importantes entre la tradition léniniste traditionnelle et la critique « socialiste démocratique » : toutes deux identifient de façon erronée la direction d’un processus de changement radical et les organes politiques d’un éventuel régime de transition vers le socialisme (soviets, parlement, etc.).

4/ Les tenants de la « voie démocratique » (de façon paradigmatique Nicos Poulantzas) tendent à privilégier une conception socio-centrique, selon laquelle l’État se réduit à une condensation de rapports de force sans pouvoir propre. En lui ôtant son agentivité [au sens de agency], le problème de la lutte stratégique pour le contrôle de l’État tend à se déplacer vers la force plus ou moins grande du mouvement populaire qui fait pression sur lui, ce qui implique le rejet de toute forme de dualité de pouvoir.

5/ Il ressort de ce qui précède qu’il est nécessaire de repenser une approche stratégique adaptée à une démocratie capitaliste consolidée, ce qui implique d’accorder une importance centrale à la lutte politique au sein des institutions démocratiques, mais aussi de repenser un concept de dualité de pouvoir dépouillé de certaines connotations inutiles qui lui ont été attribuées dans la tradition insurrectionnelle.

Démocratie et révolution

Il existe une notion largement partagée, bien que souvent de façon tacite, qui identifie l’organe de direction politique d’un processus révolutionnaire avec les institutions d’un régime politique post- révolutionnaire, qu’il s’agisse des conseils (soviets), du parlement ou du parti.

Cette identification apparaît de manière paradigmatique dans la conception des conseils de Lénine : les soviets ne sont pas seulement les instruments de la mobilisation de masse dans le contexte d’une crise révolutionnaire, mais aussi les embryons du nouvel État prolétarien. Chez les auteurs qui se démarquent du soviétisme russe (comme Kautsky, les austro-marxistes et les eurocommunistes), le raisonnement est similaire : le parlement ou le gouvernement exécutif, dominé par les socialistes, doit conduire le processus politique, dans tous les cas soutenu par la mobilisation sociale.

Cette idée est souvent acceptée de manière générale sans examen suffisant et sans évaluation des conséquences politiques qu’elle implique. À mon avis, contrairement à ce que pensent tant les partisans de la voie démocratique que ceux de la voie insurrectionnelle, il n’est pas nécessaire que la direction d’un processus révolutionnaire soit identique au pouvoir politique socialiste qui en découle. L’analyse concrète des expériences révolutionnaires montre qu’une telle continuité n’a pas existé.

Au cours d’un processus révolutionnaire, émergent des formes d’auto-organisation qui mobilisent et rassemblent les masses (conseils, assemblées, comités d’usine, etc.). Bien qu’une révolution triomphante ait besoin d’un soutien social de masse, les organes qui dirigent le processus sont toujours basés sur un secteur d’avant-garde actif. Par conséquent, la nature progressiste de ces organes et leur caractère démocratique sont inséparables du développement d’une crise révolutionnaire. Une révolution peut être « l’acte démocratique le plus gigantesque » (Trotski) dans la mesure où une large section des classes populaires se tourne vers l’action politique et détruit l’ordre ancien. Mais il s’agit là de la dynamique d’une insurrection de masse, pas de celle d’un régime politique. Un pouvoir politique démocratique et stable nécessite une légitimation sociale qui l’est tout autant ; il ne peut dépendre de l’hyper-activisme d’un secteur d’avant-garde, et encore moins de l’hyper-activisme permanent de l’ensemble de la société.

Ainsi, l’émergence indispensable d’organes d’auto-organisation lors d’une crise révolutionnaire n’en fait pas nécessairement des organes de gouvernement. De leur lien indissociable avec le moment de la poussée révolutionnaire, il résulte que ces organismes ont une existence transitoire. Leur vitalité dépend d’une atmosphère politique effervescente et extraordinaire, évidemment provisoire. En effet, si l’on examine honnêtement et rigoureusement l’expérience historique, il est clair qu’ils n’ont jamais joué systématiquement un rôle gouvernemental, pas même en Russie, dans la période 1917-1923, comme on peut aisément le constater par la perte de substance progressive des soviets et la brusque désaffection politique qui a suivi la révolution d’Octobre.

Cependant, il ne s’ensuit pas, comme Poulantzas et d’autres théoriciens de la « voie démocratique » l’ont affirmé, que la polarisation politique caractéristique d’un processus de changement peut se passer d’organes de double pouvoir pendant une période de rupture anticapitaliste. Les institutions de double pouvoir ont un rôle stratégique à jouer, même si elles ne doivent pas nécessairement être comprises comme des organes proto-étatiques.

L’État et la stratégie socialiste chez Poulantzas

Dans L’État, le pouvoir, le socialisme[3], Poulantzas soutient que l’État devrait être analysé dans des termes analogues à la conceptualisation du capital par Marx. Comme le capital, l’État n’est pas une chose ou un instrument, mais une relation sociale. Ou, plus précisément, il est « la condensation matérielle d’un rapport de force entre les classes »[4].

L’État cristallise l’hégémonie structurelle des classes dominantes mais aussi les luttes et la force des classes dominées. L’État capitaliste n’est pas une forteresse à conquérir comme s’il s’agissait d’un territoire étranger. La relation entre l’État et les classes populaires n’est pas une relation d’extériorité totale : les classes populaires et leurs luttes y sont présentes de différentes manières, inscrivant leurs conquêtes dans des formes institutionnelles et des politiques publiques (libertés démocratiques, droits sociaux, etc.). L’État n’est pas seulement un « veilleur de nuit » ou une « bande d’hommes armés » mais une structure capillaire installée dans la société civile, sensible aux contradictions sociales et aux rapports de force entre les classes.

Cette conceptualisation de l’État donne lieu à un nouveau cadre stratégique qui rompt avec la tradition léniniste du double pouvoir. La « voie démocratique vers le socialisme » propose une stratégie duale qui opère à la fois au sein de l’appareil d’État, conçu comme un « champ stratégique », et dans la lutte de masse. La conception léniniste d’un « contre-État » ouvrier reposait sur le fait que l’État était considéré comme un simple instrument des classes dirigeantes.

En revanche, comprendre l’État comme une « condensation » implique d’aborder la stratégie socialiste comme un processus qui implique à la fois la conquête de positions en son sein – y compris l’accès au gouvernement par le biais des élections – et le développement de mobilisations de masse et d’expériences d’autogestion qui exercent une pression de la base pour une transition vers le socialisme. Ce processus de longue haleine n’évitera pas les confrontations et les moments de rupture.

L’État dispose-t-il d’un pouvoir propre ?

Malgré les mérites de ce remaniement, des problèmes théoriques et politiques se posent. Pour Poulantzas, l’État a une autonomie « relative » à une condition invariante : la détermination « en dernière instance » par l’économie. Ceci inscrit Poulantzas dans la longue liste des théories que Michael Mann qualifie de « réductionnistes », la tendance commune des théories libérales, pluralistes et marxistes à réduire l’État « à des structures préexistantes dans la société civile », en l’occurrence au pouvoir de la classe dirigeante[5].

Le caractère relatif de l’autonomie de l’État a été traditionnellement compris dans le marxisme comme une forme de garantie ultime à l’égard de l’orthodoxie. Admettre un pouvoir étatique autonome, c’est-à-dire non soumis à une « instance déterminante en dernière instance », est considéré comme identique à la conception réformiste de la social-démocratie qui fait de l’État une entité neutre, arbitre de la concurrence entre les groupes sociaux. Une autonomie tout court – ou une reconceptualisation du concept d’« autonomie relative » qui ne se réfère pas à une « détermination en dernière instance » – nous rapprocherait, dans cette optique traditionnelle, d’une problématique réformiste-pluraliste selon laquelle les différentes classes peuvent exercer une influence égale sur le gouvernement et où l’État est capable de réguler les déséquilibres  économiques ou sociaux générés par le capital.

Poulantzas l’a reconnu dans sa dernière interview avec Stuart Hall et Alan Hunt : « Je ne suis moi- même pas absolument certain d’avoir raison d’être marxiste. Qui peut en être certain ? Mais si l’on est marxiste, le rôle déterminant des rapports de production, dans son sens le plus complexe, doit signifier quelque chose ; et si c’est le cas, on ne peut parler que ‘d’autonomie relative’, c’est la seule solution »[6]. Comme le montre sa célèbre polémique avec Ralph Miliband dans les pages de la New Left Review[7], cela signifie pour Poulantzas que l’État n’a pas de pouvoir propre. Les institutions étatiques « ne peuvent qu’être référées aux classes sociales qui détiennent le pouvoir » ou, en d’autres termes, l’État est « un lieu et un centre d’exercice du pouvoir, mais sans posséder de pouvoir propre ».

En réduisant le « pouvoir d’État » au « pouvoir de classe », Poulantzas éprouve de grandes difficultés à affirmer simultanément l’autonomie relative et le caractère structurellement capitaliste de l’État. Par son attachement au concept d’autonomie relative comme moyen de conserver le caractère de classe de l’État, Poulantzas ne parvient pas à déterminer la manière concrète dont l’État capitaliste remplit effectivement son rôle préconçu de classe. En réalité, le concept d’autonomie relative de Poulantzas est un obstacle plutôt qu’une ressource pour établir le lien structurel entre l’État et le capital.

Contrairement à ce que suggère une interprétation répandue, une analyse qui affirme que l’autonomie de l’État est irréductible au pouvoir de classe peut donner aux fondements structurellement capitalistes de l’État une assise plus solide. Sur ce point, l’approche de Fred Block semble plus appropriée. Block affirme que les « gestionnaires de l’État » disposent d’une autonomie effective, non réductible au pouvoir de classe.

Mais l’insertion de l’État dans l’économie capitaliste les oblige, dans leur propre intérêt, à rechercher les conditions propices à la reproduction du capital. Le monopole privé sur l’investissement crée une pression objective sur les autorités politiques pour promouvoir des règles favorables aux intérêts capitalistes. Le risque de grève des investisseurs et de fuite des capitaux, avec leurs effets déstabilisateurs sur la politique et le gouvernement, les incite à maintenir un « climat favorable aux affaires »[8]. L’autonomie du pouvoir étatique n’est pas contradictoire avec son caractère de classe, qui dépend fondamentalement de son insertion dans les rapports de production capitalistes.

Le rejet par Poulantzas de la distinction entre pouvoir de classe et pouvoir d’État pour tenter de se prémunir contre le réformisme conduit à une impasse. En minimisant l’action de l’État, le problème de la lutte stratégique pour son contrôle tend à se déplacer vers la force plus ou moins grande du mouvement populaire qui fait pression sur lui. Inévitablement, l’auteur de L’État, le pouvoir, le socialisme s’attend à ce que la pression sociale conduise à la radicalisation des directions réformistes majoritaires.

Poulantzas poursuit ainsi l’analyse classique qui considère le caractère relatif de l’« autonomie relative » comme une limite pour établir le caractère de classe de l’État. Cependant, à bien y regarder, on peut observer ici une curieuse complicité entre une réserve orthodoxe en théorie et un « virage à droite » en politique. Si Poulantzas avait raison, comment évaluer l’expérience historique qui semble montrer que les mobilisations populaires hors de l’État, aussi intenses soient-elles, se heurtent toujours à la marge de liberté dont dispose et use toute direction politique ? N’est-ce pas l’effet ultime du pouvoir propre de l’État ? Le prix que Poulantzas paie pour sa conception de l’État comme condensation n’est-il pas d’atténuer la lutte proprement politique entre des projets stratégiques antagonistes ?

Pour prendre un exemple classique, la révolution de novembre 1918 en Allemagne, qui se termine par l’arrivée au pouvoir des sociaux-démocrates majoritaires et l’assassinat de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht par les Freikorps sous le commandement du social-démocrate Noske, a-t-elle échoué faute de pression de la base sur le gouvernement Ebert ou parce que les sociaux-démocrates se sont emparés du pouvoir pour contenir la révolution et ont utilisé l’État à cette fin ?

Poulantzas n’ignore pas le problème du réformisme. Selon lui, il peut prendre deux formes : celle de  la capitulation des dirigeants (« social-démocratisation ») ou celle de l’incapacité typique du réformisme à faire face à la réaction des classes dominantes (cas d’Allende). Cependant, la réponse qu’il trouve à ces risques est l’existence d’un « large mouvement populaire » qui fait pression à partir  de la base. Poulantzas règle ainsi trop rapidement la question des risques les plus graves pour la stratégie socialiste. Il écrit :

« On ne peut affronter ce danger qu’en s’appuyant activement sur un large mouvement populaire. Disons les choses clairement : de toute façon, et face à la stratégie ‘avant-gardiste’ du double pouvoir, la réalisation de cette voie et des objectifs propres qu’elle comporte, l’articulation des deux démarches qui vise à éviter l’étatisme et l’impasse social-démocrate, suppose le support décisif et continu d’un mouvement de masse fondé sur de larges alliances populaires. Si ce mouvement déployé et actif (la révolution active, disait Gramsci, en l’opposant à la révolution passive) n’existe pas, si la gauche ne parvient pas  à la susciter, rien ne pourra empêcher la social-démocratisation de cette expérience. Ce large mouvement populaire constitue un garant face à la réaction de l’adversaire, même s’il ne suffit pas et doit être toujours allié à des transformations radicales de l’État ».[9]

Il ajoute ensuite que ce mouvement populaire ne peut remplir son rôle que dans la mesure où il ne prétend pas s’ériger en centre politique alternatif qui défie l’État, c’est-à-dire en double pouvoir. Le pouvoir populaire doit se limiter à être un facteur de pression sur l’État. Son refus du double pouvoir est une conséquence naturelle de sa définition de l’État comme une condensation dépourvue de pouvoir autonome. Ce n’est pas que l’émergence d’un double pouvoir soit improbable dans une démocratie consolidée, mais qu’elle est considérée comme tout simplement indésirable. Sur ce point, il est catégorique :

« Une situation de double pouvoir, même entre deux pouvoirs de gauche, n’a rien d’un jeu de pouvoirs et de contre-pouvoirs qui s’équilibrent pour le plus grand bien du socialisme et de la démocratie. Cette situation conduit rapidement à une opposition ouverte entre les deux, avec le risque d’élimination de l’un en faveur de l’autre. Dans l’un des cas, c’est la social-démocratisation (cas du  Portugal), dans l’autre (élimination de la démocratie représentative), ce n’est pas le dépérissement de l’État et le triomphe de la démocratie directe, mais, à plus ou moins long terme, une dictature autoritaire de type nouveau ».[10]

Poulantzas raisonne ici de manière analogue à la tradition insurrectionnelle en identifiant les organes de direction d’un processus révolutionnaire à la forme institutionnelle d’un pouvoir politique socialiste, tout en modifiant l’appréciation portée sur chaque terme de l’équation. L’État capitaliste comporte des acquis politiques qui doivent être préservés dans un futur pouvoir politique socialiste, principalement la démocratie représentative (parlement, suffrage universel, multipartisme, libertés démocratiques, etc.).

En revanche, la délégation du leadership à une instance extra-étatique ne signifie pas « le triomphe de la démocratie directe » mais « l’élimination de la démocratie représentative », et « à plus ou moins long terme, une dictature autoritaire d’un genre nouveau ». A l’instar de la tradition insurrectionnelle, Poulantzas en déduit que si, au cours du processus révolutionnaire, la direction est déléguée à une instance de « démocratie directe », cette logique s’imposera à l’ensemble du régime politique ultérieur, mais, à l’inverse des « insurrectionnalistes », il ne s’agira pas alors, selon lui, d’une forme de démocratie de base mais d’une nouvelle « dictature autoritaire ».

Les organismes qui émergent et prennent le contrôle de la situation politique dans une situation révolutionnaire ont certes un impact sur la vie politique et institutionnelle ultérieure. Mais l’hétérogénéité  de l’expérience historique ne confirme pas le fatalisme suggéré par Poulantzas, qui rappelle les critiques de Kautsky à l’égard de la révolution russe. On peut penser au Comité central de la Garde nationale parisienne, qui a dirigé l’insurrection de 1871 et a ensuite démissionné en faveur de la Commune de Paris ; ou aux révolutions de février et d’octobre en Russie, avec leurs différentes relations entre les soviets, le gouvernement provisoire et l’Assemblée constituante (la combinaison des soviets et de l’Assemblée constituante a été défendue par une grande partie de la direction bolchevique avant et après la révolution). Bien que Poulantzas ne mentionne pas la question, l’exemple historique le plus pertinent qui réfute son fatalisme est celui des révolutions bourgeoises elles-mêmes, qui ont eu pour corollaire l’émergence d’institutions libérales et républicaines. Il n’y a  pas eu de « voie démocratique » vers les institutions démocratiques de l’État capitaliste.

Nous devons à Poulantzas une avancée décisive vers une conception relationnelle plutôt qu’instrumentale de l’État. Mais le processus historiquement inédit de « désimbrication » des rapports sociaux qui donne naissance à l’État moderne (c’est-à-dire la séparation de l’État et de l’économie comme sphères indépendantes) confère au pouvoir étatique – et donc aux leaderships politiques qui le dirigent – une autonomie réelle qui implique que l’État n’est jamais en proie à des rapports de force extérieurs, mais qu’il agit sur eux, tout comme il est constitué par eux. Si l’État n’est que la condensation de rapports de force entre classes, « une condensation ne peut pas exercer le pouvoir » (Block). Comprendre la légalité et la dynamique propres au niveau du politique nous ramène sur le terrain de la lutte entre des projets stratégiques antagonistes. Et, en définitive, au problème du réformisme.

Repenser la dualité des pouvoirs dans un nouveau cadre stratégique

Si l’on abandonne le rejet poulantzien du pouvoir autonome de l’État, la question du double pouvoir  se pose sous un jour nouveau. Si l’État ne se comporte jamais comme un simple reflet des rapports de force, il peut agir en réaction contre eux jusqu’à les briser. Soit en maintenant un noyau irréductible de l’appareil répressif de l’État, même dans les cas où celui-ci est affaibli ou démantelé, soit, ce qui est plus habituel, en utilisant son pouvoir autonome pour contenir politiquement une situation critique. Le rôle de la social-démocratie le démontre à d’innombrables reprises : République de Weimar, révolution portugaise, etc.

Il est clair que Poulantzas ne rejette pas la centralité de la mobilisation populaire. Il n’adhère pas non plus à une sorte de gradualisme réformiste, contrairement à ce que nombre de ses critiques « insurrectionnalistes » ont régulièrement mis en avant. Ce qu’il rejette, c’est plutôt la centralisation des organes de la démocratie de base et leur transformation en un point concentré de pouvoir populaire indépendant. Il comprend bien les conséquences de la centralisation dans les contextes de poussée révolutionnaire. Lorsque les organes d’auto-organisation sont centralisés, un pouvoir émerge qui peut prendre l’initiative, devenir indépendant et apparaître comme un centre politique alternatif : une situation de double pouvoir est créée, capable non seulement d’exercer une pression sur le gouvernement mais de contester également l’orientation même du processus politique.

L’utilité historique effective dont les organes du double pouvoir ont fait preuve est leur capacité à mieux exprimer les relations de pouvoir dans le contexte d’une poussée révolutionnaire. Les vieilles institutions résistent à l’impact d’un changement brutal des relations de pouvoir ou l’amortissent. Un pouvoir social énorme peut s’exprimer par des révoltes, des mobilisations ou des explosions sociales. Mais si cette force sociale n’est pas centralisée dans une forme institutionnelle qui peut décider d’agir de façon coordonnée, la mobilisation sociale la plus impétueuse peut se volatiliser, et l’initiative est entièrement laissée aux institutions et organisations préexistantes.

L’État (surtout au sommet : le gouvernement exécutif, le parlement, la haute bureaucratie) est, en  règle générale, l’espace où les pressions pour l’adaptation et la capitulation sont les plus fortes. D’autre part, un pouvoir qui vient d’en bas, basé sur la participation massive des secteurs populaires, permet d’exprimer plus directement et plus clairement les changements rapides des masses, la modification de l’équilibre du pouvoir et donc de changer l’équilibre entre les courants modérés, qui ont plus de poids dans les organes de l’État, et les courants radicaux, qui tendent à se frayer un  chemin dans les instances d’auto-organisation.

Quelques exemples historiques permettent d’illustrer plus clairement ce point. Dans les années 1920, à la suite de la révolution allemande, l’Internationale communiste a formulé une approche stratégique assez similaire à la « voie démocratique ». En Allemagne, en 1923, des gouvernements élus au niveau des Länder, dirigés par la social-démocratie (SPD) et le parti communiste (KPD), ainsi que l’encerclement par les institutions  bourgeoises qui leur a été imposé, ont servi d’impulsion à la lutte révolutionnaire. Une conférence des  conseils ouvriers saxons s’est tenue dans la ville de Chemnitz. Un embryon de double pouvoir s’est formé qui pouvait prendre l’initiative de l’insurrection. Cependant, le SPD, minoritaire au sein des conseils mais majoritaire au sein du gouvernement, a exigé que la conférence n’assume pas des pouvoirs qui appartenaient au parlement. Le KPD a décidé de subordonner la possibilité d’une insurrection à un accord unitaire, qui n’aboutira jamais, et la révolution allemande a échoué.

Bien qu’il y ait eu un embryon d’auto-organisation – et, à ce niveau, le KPD avait plus de poids que le SPD – la dynamique a été contrariée par l’autolimitation et la délégation (« poulantzienne » pourrait-on dire)  des pouvoirs au gouvernement du Land de Saxe. Les réformistes, même de gauche, n’étaient pas prêts à mener l’insurrection, ni à déléguer cette initiative à un organe de pouvoir alternatif. Sachant que le KPD n’était pas prêt à faire cavalier seul, ils savaient qu’ils contrôlaient la situation. Dans la mesure où l’adversaire sait qu’il a le dernier mot, la possibilité de faire pression sur lui diminue brusquement. En revanche, si la pression s’inscrit dans un principe de débordement ou de contestation qui échappe à son contrôle, la situation change et le leadership menacé peut être contraint d’accompagner la radicalisation en cours. C’est pourquoi l’autolimitation « poulantzienne » est le plus grand obstacle, même pour la tactique de pression sur les directions hégémoniques que Poulantzas postule.

Un phénomène similaire s’est produit lors de l’échec de la révolution espagnole, en particulier lors de l’expérience catalane entre juillet et septembre 1936. À cette époque, le POUM a accepté d’entrer dans le gouvernement de la Generalitat dirigé par le Front populaire espagnol et a procédé à la dissolution du Comité central des milices par l’intermédiaire – chose surprenante – d’Andreu Nin, le dirigeant du POUM. Le soulèvement de juillet 1936 contre le coup d’État fasciste avait donné naissance à des formes d’auto-organisation : les comités locaux des milices et le Comité central des milices antifascistes (CCMA). En tant qu’organes unitaires, tous les courants y étaient représentés, y compris les courants réformistes. Mais, comme à la conférence de Chemnitz, les courants réformistes – dont l’Esquerra  Republicana, la fameuse « ombre » de la bourgeoisie – avaient peu d’influence dans ces instances, alors  qu’ils avaient la mainmise sur le gouvernement de la Generalitat. La décision du POUM et de Nin d’accepter la dissolution de la CCMA a détruit la possibilité d’un pouvoir alternatif capable de surmonter les vacillations de la Generalitat.

Le schéma se répète : dans les organes d’auto-organisation, les courants radicaux trouvent un écho  plus favorable et l’évolution des rapports de force et la radicalité des masses en période de conflit révolutionnaire y sont mieux reflétées. Au « sommet », en revanche, les tendances à la modération, à l’adaptation et l’influence des réformistes sont plus fortes. Dans un tel contexte, lorsque le « bas » est subordonné au « sommet », même sous forme de pression de l’un sur l’autre, le contrôle des réformistes sur le processus est généralement garanti.

En conclusion : une voie révolutionnaire vers le socialisme démocratique

Les critiques de l’approche insurrectionnelle qui se concentrent sur son irréalisabilité politique dans des contextes de démocraties libérales consolidées me semblent pour l’essentiel correctes. L’idée d’une crise rapide due à l’effondrement de l’autorité de l’État et de sa saisie par une insurrection armée n’a jamais été répétée avec succès cent ans après la révolution d’Octobre.

Comme le montrent les intuitions de Gramsci, le cadre dans lequel doit se situer toute stratégie socialiste en Occident, du moins pour le moment, est celui d’un État complexe et ramifié dans la société civile, d’une démocratie capitaliste consolidée et d’un cadre de légalité pour la lutte politique. Dans la période  actuelle, lorsque la lutte des classes s’intensifie, elle tend à se manifester par de grandes mobilisations sociales combinées à des compétitions électorales. La nécessité stratégique de s’articuler autour de cette dynamique est inéluctable.

Les raisons invoquées par les partisans de la « voie démocratique » pour abandonner la tentative de « répéter Octobre » sont convaincantes à mes yeux. Elles étaient également convaincantes pour les bolcheviks eux-mêmes et pour la majorité de l’Internationale communiste depuis les années 1920, lorsqu’ils ont été confrontés aux débats sur les particularités de la révolution en Europe occidentale.

D’autre part, la manière typique dont la voie alternative au « léninisme traditionnel » a été formulée présente des problèmes théoriques et politiques significatifs, conduisant sur le plan stratégique à tout miser sur la radicalisation des leaderships réformistes hégémoniques sous la pression populaire, en renonçant à la construction d’un double pouvoir indépendant. Mais un pouvoir populaire centralisé est essentiel pour surmonter la paralysie imposée par la politique réformiste, même dans un scénario « poulantzien » de radicalisation des directions réformistes majoritaires.

Dans un État démocratique représentatif, tout processus éventuel de transition vers le socialisme est susceptible d’émerger d’une crise prolongée, au cours de laquelle les institutions libérales continueront à fonctionner activement. Il est donc probable qu’une représentation électorale ou gouvernementale de la radicalisation en cours émergera.

À cet égard, la « voie démocratique » est juste. Mais il est faux d’en déduire la nécessité pour le sommet de l’État (le gouvernement de gauche élu) de contrôler les événements – ce qui est une erreur symétrique à celle des « insurrectionnalistes ». Au contraire, il est nécessaire d’accompagner un processus de radicalisation sociale par la construction d’un centre de pouvoir alternatif, basé sur les organes des masses, qui peut décider à la fois de faire pression sur les directions politiques précédemment établies et de les déborder, au fur et à mesure que les événements se déroulent.

Mais ce rôle stratégique du double pouvoir n’implique pas de lui assigner la tâche de devenir nécessairement un organisme de gouvernement. Une éventuelle victoire révolutionnaire ne doit pas conduire à la destruction des libertés démocratiques fondées sur le suffrage universel et la citoyenneté politique, mais à l’ébauche d’un nouveau pouvoir politique démocratique, qui ne peut se  réduire à des organes d’auto-organisation nés d’un moment d’éruption volcanique des masses.

Des tensions peuvent apparaître entre les organes qui ont pris le contrôle de la vie politique pendant une crise révolutionnaire (comme le parti et les organes d’auto-organisation) et la nécessité de mettre en place des institutions pour une démocratie socialiste à long terme. Face à ces tensions, il est crucial de reconnaître que l’illusion d’une sorte de démocratie directe de masse permanente risque de conduire à son contraire : l’étatisation généralisée de la vie sociale et l’émergence d’un pouvoir bureaucratique et bonapartiste.

La démocratie comprend la dimension du suffrage universel et de la représentation parlementaire mais elle ne se limite pas à celle-ci. Comme l’avaient anticipé les austro-marxistes dans les années 1920, il est possible de concevoir des formes mixtes de démocratie qui articulent des institutions de démocratie représentative (assemblées législatives), de démocratie directe (référendums) et de démocratie économique (sur le lieu de travail). Explorer l’interrelation entre rupture révolutionnaire, transition vers le socialisme et démocratie est un défi central de notre époque. De nouvelles expériences restent à faire.

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Martín Mosquera est enseignant à l’Université de Buenos Aires et rédacteur en chef de la revue Jacobin América Latina.

Publié initialement dans Jacobin America Latina le 27 août 2024. Traduction Contretemps avec la collaboration de l’auteur.

Notes

[1] Perry Anderson, The Antinomies of Antonio Gramsci, Londres & New York, Verso, 2017 [1ère édition 1976], p. 103.

[2] Carmen Sirianni, « Councils and Parliaments: The Problems of Dual Power and Democracy in Comparative Perspective », Politics & Society, 12/1, 1983, p. 83-123.

[3] Nicos Poulantzas, L’État, le pouvoir, le socialisme, Paris, Amsterdam, 2024.

[4] [« L’État est aussi la condensation matérielle et spécifique d’un rapport de force, qui est un rapport de classe », ibid, p. 119. NdT]

[5] Michael Mann, « The autonomous power of the state : its origins, mechanisms and results », European Journal of Sociology / Archives Européennes de Sociologie / Europäisches Archiv für Soziologie, Vol. 25, n° 2, 1984, p. 185.

[6] « Parcours : vers un eurocommunisme problématique », entretien avec Stuart Hall et Alan Hunt, in Nicos Poulantzas, Repères. Hier et Aujourd’hui. Textes sur l’État, Paris, Maspero, 1980, p. 24. [1ère publication : Marxism Today, juillet 1979].

[7] Nicos Poulantzas, « The Problem of the Capitalist State, New Left Review, I/58, 1969; version française: « Le problème de l’État capitaliste » disponible sur Contretemps [en ligne], 22 septembre 2015 ; Ralph Miliband, « The Capitalist State. Reply to Nicos Poulantzas », New Left Review, I/59, 1970 ; version française: « De l’État capitaliste. Réponse à Nicos Poulantzas » disponible sur Contretemps [en ligne], 5 octobre 2015. La discussion dans les années qui ont suivi par le texte de Miliband « Poulantzas and the Capitalist State » New Left Review, I/82, 1973 et la réponse de Poulantzas, « The Capitalist State : A Reply to Miliband and Laclau », New Left Review, I/95, 1976.

[8] Fred Block, « The Ruling Class Does Not Rule: Notes on the Marxist Theory of the State », in Fred Block, Revising State Theory: Essays in Politics and Postindustrialism, Philadelphia, Temple University Press, 1987, p. 67. 

[9] Nicos Poulantzas, L’État, le pouvoir, le socialisme, op. cit., p. 349-350.

[10] Ibid., p. 351.