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Le CAC40 a basculé sous le contrôle des investisseurs internationaux

économie

Lien publiée le 29 avril 2014

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

(Le Monde) C'est un seuil symbolique. Mais compte tenu de l'agitation actuelle autour du passage sous pavillon étranger de plusieurs sociétés du CAC 40 – après Publicis et Lafarge, bientôt Alstom ? – il prend une coloration toute particulière : en 2014, pour la première fois, les entreprises qui composent l'indice-phare de la Bourse deParis sont contrôlées pour plus de moitié par des investisseurs étrangers.

Ce chiffre a atteint 49,9 % en avril, selon les calculs du cabinet d'analyse financière Alphavalue. Mais il faut lui ajouter les actionnaires qui détiennent moins de 5 % du capital – seuil en-deçà duquel aucune déclaration officielle n'est obligatoire en France – et les transactions issues du trading haute fréquence. « Ces deux éléments ne peuvent que faire monter la proportion de capital aux mains des étrangers, de sorte que le seuil des 50 % est, de fait, déjà dépassé », indique Maxime Mathon, porte-parole d'Alphavalue.

Sur une capitalisation totale de 1 198 milliards d'euros pour l'indice phare de la Bourse de Paris, près de 600 milliards d'investissements sont internationaux. En comparaison, en 2013, 48 % des entreprises du CAC étaient détenues par des étrangers. En 2007, cette proportion n'atteignait que 40,9 %.

LE FONDS QATAR HOLDING LLC EST DEVENU LE PREMIER ACTIONNAIRE DE TOTAL

Ce basculement corrobore l'étude publiée chaque année par la Banque de France, qui ne prend en compte que 35 sociétés car elle exclut celles dont le siège socialest implanté à l'étranger. Selon elle, les poids lourds hexagonaux étaient déjà détenus à 46,3 % par des non-résidents en 2012 (derniers chiffres disponibles). Soit 10 points de plus qu'en 1999 (36 %). « La hausse récente s'explique principalement par la montée des fonds souverains, Qatar en tête », explique M. Mathon. Ces fonds détenus par des Etats, y compris la France, contrôlent désormais 27 % du capital du CAC 40.

En 2013, le fonds Qatar Holding LLC est ainsi devenu le premier actionnaire deTotal, passant de 3 % à 4,8 % du capital. L'émirat (par le biais de Qatar Investment Authority) détient aussi 12,8 % de Lagardère, 5,3 % de Vinci, 2 % deVivendi et 1,03 % de LVMH. Autres grands amateurs du CAC 40 : les fonds dits ETF, qui investissent en répliquant les performances des indices. Le principal d'entre eux, l'américain Blackrock, a ainsi dépassé la barre des 5 % du capital de Publicis en janvier. Il possède désormais 5,65 % du capital du groupe de Maurice Lévy.

A l'inverse, quand l'Etat est présent au capital – EDFGDF Suez… –, les investisseurs étrangers se font plus discrets. « Ils savent que les sociétés sont moins gérées sous l'angle de la rentabilité et de la performance, et que la gouvernance est “bétonnée” », selon M. MathonLa répartition du capital étant moins susceptible d'évoluer, les investisseurs activistes restent en retrait. Autre raison de planter un drapeau étranger dans le CAC 40 : « la guerre des savoirs »,selon Alphavalue. Comme dans le cas d'Alstom, où l'enjeu est la récupération de brevets et de technologies stratégiques.

Enfin, les « machines à cash » de l'indice parisien constituent aussi des cibles de choix : Publicis, le spécialiste des cartes à puces Gemalto, le leader des verres ophtalmiques Essilor… Sans compter les groupes déjà partiellement passés sous pavillon étranger, comme ArcelorMitta. Faut-il s'inquiéter de ce phénomène ? « Il est logique compte tenu de l'internationalisation de l'activité du CAC 40 : près de 70 % du chiffre d'affaires des groupes est réalisé hors de France », souligne M. Mathon.

Chez Paris Europlace, le lobby de la place financière hexagonale, la chose est beaucoup moins entendue. « Nous répétons depuis des années qu'il y a un déséquilibre entre l'investissement français et celui des non-résidents au sein du CAC 40 », s'étrangle Arnaud de Bresson, délégué général de Paris Europlace. « Cette évolution témoigne de l'attractivité des entreprises françaises, mais aussi d'un risque de perte de contrôle de nos centres de décision », s'inquiète-t-il. Et deplaider pour le développement de l'épargne longue en France, notamment l'épargne investie en actions des entreprises.

Las, avec la disparition progressive du petit actionnaire individuel et l'absence – pour des raisons culturelles et juridiques – de fonds de pension à la française, difficile de contrebalancer l'offensive étrangère sur le capital des fleurons hexagonaux.

Si le CAC 40 passe progressivmeent sous pavillon étranger, la réciproque n'est pas vraie. Seule la société de gestion Amundi (filiale du Crédit Agricole et de la Société générale) possède des parts significatives au capital de grands groupes étrangers. Et encore, comme elle place les fonds de ses clients, elle utilise sans doute des fonds internationaux… La Caisse des dépôts, qui détient entre 1,5 % et 9,3 % (chez Veolia Environnement) de neuf groupes du CAC 40, « reste en second plan, sur une logique de soutien », note M. Mathon. Une influence trop limitée pour faire le poids face aux étrangers.