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Le succès de Podemos en Espagne suscite des aigreurs chez les autres partis
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
(Le Monde) Un déluge d'invectives s'est abattu cette semaine sur Podemos (« Nous pouvons »), un nouveau parti espagnol issu du mouvement des « indignés » qui a été la révélation des élections européennes avec 7,97 % des voix et 5 sièges après seulement quatre mois d'existence. Depuis le 25 mai, les partis traditionnels et plusieurs médias passent à son encontre du mépris à la peur en passant par la calomnie.
Selon l'ancien chef du gouvernement socialiste Felipe Gonzalez (1982-1996), Podemos serait « une alternative bolivarienne ». Un parti de « freakies » (« monstres »), pour le sociologue Pedro Arriola, conseiller du chef du gouvernement Mariano Rajoy. Un mouvement « populiste associé aux pro-etarras », les militants du mouvement séparatiste armé basque ETA, d'après la chaîne conservatrice TeleMadrid. Un parti dirigé par un « sale gauchiste », le « rouge le plus médiatique du pays », selon le quotidien de droite La Razon, dont le directeur a affublé le chef de file de Podemos, Pablo Iglesias, du surnom péjoratif d'« El Coletas » (« celui à la queue de cheval »).
Dès dimanche soir, les critiques ont commencé à pleuvoir. Alors que circulaient sur Internet les rumeurs de financement occulte provenant du Venezuela ou de l'Iran, d'autres, comme le quotidien El Pais, extrapolaient son résultat aux élections générales de 2015 pour mettre en garde contre une dispersion des voix qui rendrait le pays « ingouvernable ».
TROISIÈME FORCE POLITIQUE À MADRID
Puis sont intervenues des figures des deux grands partis. Mardi, Pedro Arriola a exprimé son mépris pour la formation, troisième force politique à Madrid, en affirmant que la capitale « attire tous les freakies du monde ». Le numéro trois de la liste de Podemos est l'ancien procureur anticorruption Carlos Jimenez Villajero et le numéro cinq un scientifique, chercheur au CSIC, l'organisme de recherche publique.
Le lendemain, Felipe Gonzalez n'a pas été plus tendre. Il a placé Podemos parmi les « utopies régressives » et mis en garde contre « une alternative bolivarienne pour l'Espagne ou l'Europe serait une catastrophe sans palliatif » et produirait une« répartition égalitaire de la misère ».
« Personne ne pense que l'on puisse prétendre transposer le modèle de révolution bolivarienne en Europe, s'insurge Juan Carlos Monedero, l'un des fondateurs et idéologue de Podemos, un altermondialiste membre du conseil scientifique d'Attac en Espagne. Quand Hugo Chavez est arrivé au pouvoir, la pauvreté touchait 70 % des Vénézuéliens, l'Etat était faible et l'économie basée sur l'exportation depétrole. C'est impossible. »
LA « CASTE » EST LE GRAND ENNEMI DÉSIGNÉ PAR PODEMOS
Ancien conseiller d'Hugo Chavez entre 2005 et 2010, « critique et engagé radicalement dans la défense de la démocratie », ce professeur de sciencespolitiques à l'université Complutense de Madrid, auteur de plusieurs ouvrages, a été particulièrement pris pour cible par les médias. « J'ai fait ma thèse de doctorat en Allemagne sur l'échec de la RDA, mais personne n'en parle. Toute cette campagne menée par la “caste” vise à diaboliser le parti », affirme-t-il. La « caste » (politique) est le grand ennemi désigné par Podemos, qui la qualifie de « majordome des riches » et insiste sur la corruption qui la ronge. Un fléau devenu la troisième préoccupation des Espagnols.
De leur côté, les grands partis s'inquiètent du succès fulgurant de la formation, très présente sur les réseaux sociaux. Avec près de 400 000 abonnés surFacebook et 200 000 sur Twitter, elle devance largement les 140 000 abonnés surTwitter du PP ou du PSOE. Son médiatique chef de file, Pablo Iglesias, autre professeur de sciences politiques de 36 ans, qui fut un temps consultant pour la Gauche unie (écolo-communistes, IU) et multiplie les interventions dans les débats télévisés, en compte près de 330 000.
Les adversaires de Podemos ne lui reconnaissent qu'un seul mérite. Ce parti serait « l'expression politique concrète d'un moment compliqué pour une part importante de la société espagnole », selon Pedro Arriola. « Il est bon qu'il s'exprime par des votes et non par des pierres. »