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Edito des bulletins "L’étincelle" diffusé à la SNCF

syndicalisme

Lien publiée le 1 juillet 2014

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

Le site des camarades de L'Etincelle se trouve ici : 

http://www.convergencesrevolutionnaires.org/

Mardi 1er juillet 2014

Vive notre grève… un bon galop d’essai !

Malgré 12 jours de grève, et parfois plus, à l'appel des fédérations CGT, Sud et FO, la réforme du ferroviaire voulue par le gouvernement et Pépy a été adoptée par l'assemblée. Notre détermination, la participation massive de jeunes à des cortèges dynamiques de manifestations (autorisées ou non par la préfecture) et la jonction que nous avons commencée à faire avec d'autres travailleurs soumis aux mêmes attaques a fait craindre au gouvernement une « coagulation » des mécontentements. Nous ne sommes pas passés loin d'un effet boule de neige qui aurait pu entraîner d'autres secteurs dans un mouvement d'ensemble, cauchemar du patronat et de ses serviteurs politiques de droite comme de gauche.

Nos ennemis...

La direction de la SNCF, responsable de cette réforme illisible, a soufflé à l'oreille des journalistes que les raisons de notre grève étaient incompréhensibles. Une stratégie, car derrière une réforme d'apparence technocratique, se cachent les problèmes quotidiens des cheminots : les bas salaires, les restructurations permanentes, les suppressions d'effectifs, l'augmentation de la productivité qui surcharge nos plannings de travail.

Nous n'avons pas réussi à expliquer les raisons fondamentales de notre grève : non pas une réforme particulière qui s'appliquerait aux cheminots, mais exactement les mêmes sales coups qui pleuvent sur tous les travailleurs, qu'ils soient nommés « accord compétitivité » dans le privé, « restructurations » à la poste ou « protocole » chez les intermittents. Car le « tous ensemble » est vraiment une nécessité. Aucun secteur s’il reste isolé ne peut l’emporter seul, même le nôtre qui pèse fortement sur l’économie et la situation sociale du pays… de façon d’autant plus visible qu’il est en grève.

Ce langage n'était pas celui des directions syndicales qui n'avaient aucune envie d'encourager la lutte à déborder le cadre de la SNCF. Non, les fédérations, qui discutaient le contenu de la réforme depuis un an et demi avec le gouvernement et la direction de la SNCF sans rien en dire ni aux cheminots ni à leurs adhérents, ne souhaitaient pas que la grève pose les problèmes communs à tous les travailleurs de ce pays. Elles ne voulaient que quelques aménagements à une réforme à laquelle elles étaient associées.

C'est une évidence pour la CFDT ou l'UNSA qui ont carrément combattu la grève.

... Et nos faux amis

Pour ce qui est des fédérations CGT et Sud, c’est un tout autre problème puisqu’elles ont impulsé la grève reconductible, non sans que certains dirigeants de la CGT, qui y pesait le plus lourd, ne précisent ici ou là qu’ils la voulaient reconductible mais courte ! Et dès le premier jour de grève à 21 heures, puis le lendemain à 8 heures et à 14 heures, la CGT et Sud se précipitaient chez le ministre Cuvillier pour discuter... Sur quoi ? Les grévistes, dont une bonne partie venait de voter lors de la première AG pour le retrait pur et simple de la réforme, n’étaient aucunement informés de la teneur des discussions. Cette attitude des états-majors syndicaux envoyait le signal au gouvernement qu'ils pèseraient de tout leur poids pour que le tempo de notre grève soit donné par ces négociations bidons puis par les discussions parlementaires.

Et huit jours après le démarrage de la grève, on a eu l’épisode du dépôt d’amendement du Front de gauche au parlement, dont personne n’a été fichu d’expliquer le contenu. Et pour cause : il n’y avait rien à gratter là-dedans, c’était juste « un amendement pour stopper la grève » (Chassaigne, député PCF qui l'a déposé). Dès le lendemain, le vendredi 20 juin, les directions syndicales commençaient dans les assemblées générales, soit à appeler à la suspension du mouvement, soit à faire comprendre, tout en votant la continuation, qu’elles en étaient partisanes… C’est à ce moment-là que les fédérations, aussi bien Sud que la CGT – puisque leur unité syndicale pour la reprise du travail a été parfaite ! – n’ont plus offert aucune perspective au mouvement, aucune échéance de manifestation ou rassemblement, et ont prétendu avoir choisi de ne plus appeler à rien… parce que c’est aux seuls grévistes qu’il serait revenu de décider. Intéressant de voir quel usage les bureaucraties peuvent faire de la démocratie !

Les différents amendements adoptés par le parlement n’ont donc été que de l’enfumage pour nous faire reprendre le travail. Thierry Lepaon (secrétaire général de la CGT), finalement suivi du Front de Gauche (PC et Mélenchon), avaient décidé, après leur petit baroud d’honneur, de montrer ainsi patte blanche au gouvernement. Et tous finalement, à la suite de Hollande et Valls, d’appeler à reprendre le boulot - Sud et FO suivant le mouvement.

Aux grévistes eux-mêmes de prendre la main !

Avions-nous l’envie, et les moyens, de continuer la grève et de les faire plier ? Probablement. Mais il nous a manqué un certain nombre de choses : une participation plus active à la grève, si les grévistes regroupés en assemblées générales avaient organisé plus massivement des piquets et étaient allés démarcher leurs collègues restés à la maison. Il nous a manqué aussi une coordination entre nos assemblées générales locales, généralement « interservices » dans les grandes gares parisiennes sauf la gare de Lyon, mais qui restaient cloisonnées sans lien organisé entre elles. Il nous aurait fallu cette véritable coordination, si possible élue et représentative. En son absence les destinées de la grève sont restées aux mains de directions syndicales qui au bout de 8 jours décidaient de siffler la fin de la partie, parce qu’elles ne voulaient pas gêner davantage le gouvernement et amplifier un mouvement qui portait en lui des germes de contagion.

Ici ou là pourtant, des grévistes ont tenté de s’organiser eux-mêmes, d’éditer eux-mêmes tracts ou journaux, de se réunir pour discuter et décider de leur mouvement – ce à quoi aspirait précisément une nouvelle génération de jeunes cheminots, fortement présente dans cette grève et qui a déjà fait quelques armes dans des mouvements lycéens ou étudiants, entre autres contre le CPE, loi que le gouvernement a dû abroger en 2006. En région parisienne, une « AG des AG » a réuni une centaine de grévistes de diverses gares et secteurs éclatés, et fixé un rendez-vous de rassemblement commun à Paris le 24 juin, jour du vote final de la loi au parlement… rassemblement que les directions syndicales ont trouvé le moyen d’affaiblir en donnant au dernier moment des rendez-vous concurrents !

Nous n’avons donc pas gagné… si ce n’est un lot d’expériences politiques et en matière d’organisation dont il va falloir tirer profit pour les combats à venir. D’autres rounds nous attendent. Nous n’avons perdu qu’une première manche… entre autres parce que ceux qui se disaient nos chefs ont tiré dans nos propres buts !

Mais tous les liens que nous avons créés dans la lutte, si nous parvenons à les entretenir, seront importants pour la suite. Les liens entre adhérents de différents syndicats et non-syndiqués. Entre les jeunes et les anciens. Entre les différentes Gares, notamment à l'occasion de cette AG des AG mais aussi de nombreuses manifestations improvisées. Et les quelques liens avec des travailleurs d'autres secteurs, notamment postiers, intermittents et hospitaliers que nous avons soutenus et qui nous ont soutenus durant ces deux semaines.

La politique anti-ouvrière du gouvernement va se poursuivre, contre les cheminots comme contre toutes les catégories de travailleurs. Il y a toujours et encore des luttes en cours, comme aujourd’hui celle des intermittents, de postiers et d’hospitaliers, et d’autres. Face à ce patronat qui exige du gouvernement – déjà pourtant à plat ventre devant lui – d’amplifier et d’accélérer les mesures d’austérité contre les travailleurs, la riposte générale tous ensemble dont notre grève des cheminots a répandu le parfum reste à l’ordre du jour !