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    Education: un rapport interne dessine un sombre autoportrait

    Lien publiée le 4 juillet 2014

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    (Mediapart) Mediapart publie l'intégralité du dossier confidentiel remis au nouveau ministre de l'éducation nationale. C'est un bilan sans fard des réformes engagées: le collège est en pleine crise, la création de 60 000 postes n'est pas acquise, les équations budgétaires sont intenables. Ce document préfigure ce qui devrait se passer sur le front de l'éducation ces trois prochaines années.

    C’est un volumineux document de 382 pages qui dresse un état des lieux minutieux de l'éducation nationale et de son ministère: un autoportrait du système scolaire, de sa cabine de pilotage, de ce qui fonctionne, ou pas. Remis à Benoît Hamon à son arrivée rue de Grenelle en avril, ce rapport rédigé par la direction générale de l’enseignement scolaire (Dgesco) est intitulé « Dossier ministre ». Il se présente comme un très long mémo de toutes les actions en cours au sein du ministère de l’éducation nationale, indiquant au nouveau ministre celles qu’il devra suivre avec vigilance, les chantiers qui s’annoncent et les points sur lesquels il devra trancher.

    Mediapart publie l’intégralité de ce dossier confidentiel, dont L’Express avait déjà révélé quelques aspects, parce qu’il dresse un bilan sans fard des deux années de Vincent Peillon rue de Grenelle. Pour être souvent aride – il faut passer outre une langue administrative souvent rebutante tant elle est lisse –, ce document n’en est pas moins extrêmement précieux pour comprendre à la fois comment fonctionne ce gigantesque ministère au quotidien, mais aussi pour se faire une idée de ce qui va ou non se passer sur le front de l’éducation dans les années à venir, déclarée en 2012 par François Hollande « priorité des priorités ».

    Benoît Hamon.Benoît Hamon.

    Il y a tout d’abord les sujets chauds à traiter dans l’urgence : les ABCD de l’égalité, sur lesquels le ministère vient d'opérer un spectaculaire recul, la circulaire pour la refondation de l’éducation prioritaire, ou le suivi de la réforme des rythmes scolaires. La réforme qui monopolise le débat médiatique sur l’école depuis des mois n’occupe dans ce rapport que quelques pages, comme si l’administration voulait signifier que ce n’est qu’une réforme parmi d’autres, mais aussi que le dossier est bien moins miné qu’on le dit. Constitué pour l’essentiel comme une série de fiches sur des sujets aussi divers que « les projets éducatifs territoriaux »« les missions de l’école maternelle » ou « la rénovation de la voie professionnelle », le dossier rappelle à chaque fois au nouveau ministre « les actions déjà engagées », celles « en cours », et surtout attire son attention sur « les points de vigilance ».

    De longs développements sont consacrés au détail des « 60 000 postes », importante promesse du candidat Hollande et dont on découvre combien elle sera en pratique difficile à tenir, mais surtout que ces postes n’empêcheront pas « une érosion du taux d’encadrement » dans les années à venir.

    Au fil des pages se dessine aussi une administration qui peine à hiérarchiser ses priorités, comme noyée dans le suivi d’une myriade de programmes accumulés au cours du temps, à l’image des coûteux « internats d’excellence » créés sous Sarkozy, si critiqués et néanmoins maintenus. Si le ministère est celui qui s’en est le mieux sorti dans l’austérité générale, ce rapport révèle une administration qui ne cesse de s’inquiéter pour le financement de telle ou telle mesure et paraît fonctionner avec des économies de bouts de chandelle : rognant sur la formation des assistants pour les élèves handicapés ou sur l’aide financière aux élèves. 

    Que fait Hamon de cette feuille de route laissée par l’administration précédente ? Il est évidemment trop tôt pour le dire, mais pour tous les dossiers sur lesquels le ministre s’est pour l’instant exprimé, éducation prioritaire, évaluation des élèves et même, à certains égards, celui des ABCD de l’égalité, il l’a pour l’instant suivie à la lettre.  

    • Créations de postes : le compte n'y est pas

    La création de 60 000 postes dans l’éducation, après un quinquennat Sarkozy qui en aura vu disparaître près de 80 000, constituait une des principales mesures de la campagne de François Hollande. À lire le détail du rapport laissé à Benoît Hamon, on découvre non seulement que la promesse sera difficile à tenir, mais aussi que, compte tenu des départs en retraite et de la hausse des effectifs, les taux d’encadrement ne vont guère s’améliorer dans les années à venir.

    La loi de juillet 2013 prévoit la création de 54 000 postes pour l’enseignement scolaire dont « 47 000 postes d’enseignants », précise le document (6 000 sont consacrés à l’enseignement supérieur). 26 000 postes sont prévus pour le rétablissement de la formation initiale des enseignants, il ne reste donc plus que 21 000 postes de professeur à répartir sur le quinquennat. Autant dire que les changements seront difficilement perceptibles sur le terrain.

    Sur l’année écoulée, le taux d’encadrement est ainsi passé, dans le premier degré, de 23,71 contre 23,67 l’année précédente. La situation ne va guère s’améliorer l’an prochain puisque, prévient le rapport, « malgré les moyens supplémentaires, la rentrée 2014 sera tendue »« Au total, la rentrée 2014 s’effectue avec 2 355 emplois supplémentaires pour le premier degré et seulement 986 emplois supplémentaires dans le second degré où il a été nécessaire d’allouer l’équivalent de 1 000 ETP (équivalent temps plein) d’heures supplémentaires pour faire face aux besoins (non prévus au budget et qu’il faudra compenser en 2015). »

    « L’augmentation des effectifs va absorber une grande partie des moyens supplémentaires. » Au bout du compte, pour le secondaire, le dossier annonce donc une « légère érosion du taux d’encadrement hors éducation prioritaire ». Et ce malgré l’apport de 1 486 emplois nouveaux. « Une partie de ces créations se réalisant par transformation de 500 emplois d’enseignants contractuels libérés à la rentrée, la variable globale en moyens d’enseignement sera de 986 ETP » et ce pour une hausse prévisionnelle des effectifs de 32 892 élèves.

    Pour les années suivantes, 2015-2017, la Dgesco précise dans les « points de vigilance » que « s’agissant des emplois enseignants, le niveau des prévisions de départ définitifs 2015-2017, arrêtés par le précédent cabinet, combiné avec le niveau de concours prévu dans le cadre des précédents schémas d’emplois, ne permettrait pas de réaliser la programmation prévue par la loi du 8 juillet 2013 ». « En effet, le niveau des recrutements prévus pour les professeurs des écoles ne dégagerait qu’environ 15 000 ETP de moyens nouveaux, y compris ceux apportés par les stagiaires pour le premier degré public sur la période 2012-2017 pour une programmation de 18 200 ETP. S’agissant du second degré public, le recours à des enseignants contractuels permettrait de respecter globalement cette programmation de la loi mais ne financerait que très partiellement l’impact de la démographie au détriment des réformes pédagogiques envisagées. »

    En clair, l’objectif des 60 000 créations de postes sera très compliqué à tenir et, pour l'instant, le compte n'y est pas.

    S’agissant des contrats uniques d’insertion (CUI), ces emplois de vie scolaire créés pour « renforcer la présence d’adultes dans les établissements », assister les élèves handicapés, les directions d’école, le rapport note que « le renouvellement du contingent de 22 000 CUI au 1er juillet 2014 n’est pas assuré à ce jour ». Par ailleurs, ce qui n’est pas le moindre des paradoxes, « les crédits formation des contrats aidés sont insuffisants pour poursuivre les actions initiées à la rentrée 2013. Le contentieux lié au manquement de l’EPLE (établissements du secondaire) employeur en matière de formation de ces agents génère une dépense estimée à 16 millions d’euros pour 2014 ».

    • Rythmes scolaires : tout ne va pas si mal

    Le dossier qui a sans doute coûté son poste à Vincent Peillon, et continue de cristalliser l’attention médiatique, ne prend ici que quatre pages à la tonalité globalement optimiste. Manière pour l’administration de défendre son bilan en soulignant que le dossier laissé à Benoît Hamon est moins miné qu’on le dit.

    « Pour 93 % des communes ayant mis en œuvre la réforme à la rentrée 2013, aucune difficulté n’a été relayée », annonce le document reprenant une évaluation interne du comité de suivi de la réforme. « La dynamique de généralisation se poursuit. » Au bout du compte, « moins de 4 % des communes sont dans une posture d'opposition (mais les récentes élections municipales peuvent changer ce chiffre) ». Mais, prévient la Dgesco, « le SNUIPP, la PEEP et des élus demandent toujours un assouplissement du décret pour, de fait, pouvoir revenir à la semaine de quatre jours ». 

    Depuis, Benoît Hamon a publié une circulaire qui assouplit à la marge la mise en œuvre de la réforme.

    Par ailleurs, la Dgesco relève le faible nombre de communes passées aux nouveaux rythmes qui ont mis en place « un projet éducatif territorial » dont l’objectif est « de mobiliser toutes les ressources d’un territoire afin de garantir la continuité éducative entre les projets des écoles et les activités proposées aux élèves en dehors du temps scolaire ». Une moitié d'entre elles seulement ont présenté un avant-projet et un tiers ont finalement passé une convention avec le préfet. Une vraie déception. 

    • École maternelle et élémentaire : chantier en cours
    Vincent Peillon et Benoît Hamon lors de la passation de pouvoir.Vincent Peillon et Benoît Hamon lors de la passation de pouvoir.

    Les missions de la maternelle sont en cours de redéfinition avec la volonté de ne pas « primariser » ce niveau, c'est-à-dire n'en faire qu'une simple préparation à l'école primaire. Des propositions du conseil supérieur des programmes sont attendues.

    Le dispositif « plus de maîtres que de classes », auquel 1 310 emplois ont été consacrés à la rentrée dernière, doit éviter certaines dérives et doit servir, souligne le rapport, non pas à « diminuer le nombre d'élèves par classe », mais à « encourager la réflexion des maîtres sur les pratiques pédagogiques ».

    Par ailleurs, la faible attractivité de la fonction de directeurs d’école est devenue problématique, affirme le document. « La réflexion sur les missions des directeurs d’école peut poser la question du statut de l’école primaire » aujourd’hui, sans personnalité juridique et sans autonomie financière. Au vu des chiffres avancés, la priorité au primaire dans l'allocation des moyens – officiellement au centre de la « refondation de l'école » défendue par Peillon dans une école primaire notoirement sous-dotée – paraît encore bien cosmétique.

    • Une réforme du collège indispensable

    Avant de quitter son poste, Vincent Peillon avait annoncé qu’une réforme du collège était en préparation, réforme sur laquelle Benoît Hamon ne s’est pour l’instant guère exprimé. La lecture du document offre les contours des changements envisagés.

    Le rapport fait d’abord un état des lieux extrêmement critique du fonctionnement actuel du collège, ce « lieu d’apprentissage qui répond imparfaitement à ses missions », et qui semble encore ne pas très bien savoir quelle est sa place dans le système éducatif : « Est-il le prolongement de l’école primaire, permettant l’acquisition du socle commun ? Est-il un lieu préparant la scolarité au lycée et participant ainsi aux efforts pour atteindre l’objectif d’amener 80 % d’une classe d’âge au baccalauréat ? Cette ambivalence introduit une confusion dans l’image du collège, qui nuit au sens qu’élèves et familles peuvent lui donner. »

    Sur le fond, rappelant toutes les entorses au principe du collège unique (avec des filières d’excellence et des filières de relégation par le biais d’options ou de dispositifs spéciaux), le rapport admet qu’au collège « tous les élèves n’ont pas les mêmes chances ». Sans ambiguïté non plus, le document insiste sur les « inégalités sociales, territoriales, de genre » à l’œuvre dans ce niveau.

    Ses résultats sont médiocres, « trop d’élèves n’atteignant pas, à l’issue de leur scolarité, le niveau (…) pour une poursuite d’études constructive ». Le collège vit replié sur lui-même, tenant à l’écart les familles mais aussi son « environnement », et « n’offre pas aux élèves un lieu de vie propice non seulement à leurs apprentissages mais aussi à leur épanouissement » ; « le temps scolaire n’est ni adapté aux besoins des collégiens, ni respectueux de leurs rythmes », l’orientation y est toujours vécue comme une sanction des résultats scolaires et aucune réflexion sur l’évaluation n’a été menée…

    À cela s’ajoutent « des pratiques pédagogiques peu adaptées à la réalité du collège », avec des programmes « rarement applicables »… Le réquisitoire est terrible. Les pistes de réforme s’articulent autour de la réécriture du socle commun, sur lequel doit statuer le conseil supérieur des programmes, une plus grande « différenciation des approches pédagogiques », et plus d’autonomie pédagogique pour les établissements.

    • Réforme du lycée : un premier bilan contrasté

    De retour aux affaires, la gauche avait indiqué qu’elle attendrait de faire le bilan de la réforme du lycée menée en 2010 – spécialisation progressive, alignement du cursus de la voie professionnelle sur la voie générale, en trois ans – avant de toucher à ce niveau. Le rapport précise que « le recul est trop faible pour apprécier les résultats sur la réussite des élèves de voies générales et technologiques et sur les poursuites d’études des nouveaux bacheliers ».

    Concernant la voie générale et technologique, il faut prendre garde, note le rapport, à « un taux de réussite au baccalauréat en stagnation, un taux de diplômés de l’enseignement supérieur insuffisant (44 %) ; un coût trop élevé ; une construction déséquilibrée et socialement hiérarchisée des séries ; l’accompagnement personnalisé qui ne donne pas tous les résultats escomptés et une classe de seconde qui peine à s’imposer comme une véritable classe de détermination ».

    La réintroduction de l’histoire-géographie en S, supprimée par la droite et remise en place par Peillon, a été une erreur selon la Dgesco : « Dans le cycle terminal de la voie générale, le tronc commun conçu de façon à permettre les réorientations des élèves sans recourir au redoublement s’est rapidement trouvé affaibli par la réintroduction de l’histoire-géographie en série S. La hiérarchie des séries s’est dès lors maintenue, avec une série prédominante à partir de laquelle s’organisent des scénarios d’orientation. »

    Par ailleurs, « si la rénovation de la série STI2D (sciences et technologie et développement durable) a posé aux enseignants des difficultés d’adaptation, elle a favorisé un redressement de ses effectifs et l’orientation des filles dans certaines spécialités. L’évolution positive de la série L est beaucoup moins nette. On peut émettre l’hypothèse qu’elle souffre tout à la fois de son degré de spécialisation et de l’émiettement des enseignements de spécialité ».

    S’agissant de la rénovation de la formation professionnelle qui s’effectue désormais en trois ans (contre quatre auparavant), le document révèle que la réforme a contribué à augmenter l’accès au baccalauréat des « bac pro », même si leurs résultats sont plus faibles que ceux issus des autres voies. De même, « la rénovation de la voie professionnelle contribue à l’augmentation du nombre de bacheliers professionnels aspirant à une poursuite d’études », mais « l’écart est grand entre les vœux des élèves et les admissions effectives en STS. À l’issue de la procédure de 2013 concernant l’affectation des élèves dans l’enseignement supérieur, on constate que 29,3 % seulement des élèves sous statut scolaire et 13 % des apprentis qui avaient émis en premier choix une orientation en BTS ont reçu satisfaction ».

    Comme « leurs résultats dans l’enseignement supérieur restent faibles », on mesure aisément la frustration engendrée. Le rapport insiste aussi sur le taux alarmant de sorties en cours de CAP (17,7 en 2012). Pour l’administration, il est donc évident qu’il faut « poursuivre la réflexion sur l’organisation de la voie professionnelle ».

    Au chapitre des propositions pour réformer le lycée, le rapport s’interroge sur la possibilité d'« un tronc commun (aux trois voies : générale, technologique et professionnelle – ndlr) susceptible d’afficher une ambition partagée en termes de compétences, de connaissances et de culture à acquérir par tous les lycéens ». Il faut aussi réfléchir à « la place et à la forme du contrôle en cours de formation ». Et pourquoi pas reposer la question du bac dont le remplacement par un contrôle continu est un vieux serpent de mer rue de Grenelle. Quoi qu’il en soit, le rapport enjoint le nouveau ministre d’« engager la réflexion sur l’évolution du lycée », jugé par ailleurs bien trop « coûteux ».

    Pendant la campagne, Vincent Peillon avait laissé entendre qu'il pourrait réorienter les moyens du lycée vers le primaire, avant de reculer devant le veto des syndicats du second degré.

    • Éducation prioritaire : une réforme embryonnaire à suivre de très près

    Quant à un des chantiers les plus importants de la refondation de l’école, la réforme de l’éducation prioritaire, le rapport rappelle que celle-ci entrera en application l’an prochain dans 102 établissements « REP+ », qui « préfigureront la nouvelle politique de l’éducation prioritaire ». Dans ces établissements pilotes, les temps de service des enseignants seront aménagés pour permettre plus de concertation, des mesures financières doivent inciter à une fidélisation des équipes, etc. (lire notre article).

    L’administration appelle Benoît Hamon à la vigilance sur une série de points – « le développement effectif de la formation et du travail collectif que le temps dégagé pour les enseignants doit permettre dans les REP+ ». En clair, que ce ne soit pas juste du temps libéré pour les enseignants en échange de rien, « les moyens nécessaires au déploiement des REP+ à la rentrée 2015 », n'étant manifestement pas acquis.

    • Carte scolaire et mixité sociale : plus de rigueur

    Sur le volet de la mixité sociale et scolaire, fixée comme un objectif de la loi de 2013, la Dgesco rappelle qu’un certain nombre d’outils ont été mis en place et qu’un projet de décret est en cours : « Lorsque cela favorise la mixité sociale, un même secteur de recrutement peut être partagé par plusieurs collèges publics situés à l’intérieur d’un même périmètre de transport urbain. » Ce qui a « pour conséquence de faire de l’affectation un outil majeur, maîtrisé par les services de l’éducation nationale, pour atteindre l’objectif de mixité sociale. En effet, là où ces nouveaux secteurs permis par la loi auront été mis en place, il reviendra désormais au DASEN (direction académique des services de l'éducation nationale – ndlr), chargé de l’affectation, de répartir les élèves entre plusieurs collèges ».

    Le rapport rappelle l’existence d’une note demandant plus de rigueur dans l’octroi de dérogations : « Il n’y a pas lieu d’accorder des demandes de dérogation qui se ferait au titre de la convenance personnelle qu’elle soit en raison d’offre pédagogique ou d’autres motifs, sauf situation exceptionnelle à étudier au cas par cas. »

    • Orientation : tout reste à faire

    La réforme de l’orientation était là encore un des principaux piliers de la refondation de l’école. Le « Parcours individuel d’information, d’orientation et de découverte du monde économique et professionnel », avec pour objectif de faire de l’orientation « un choix réfléchi et positif », n’existe encore que sur le papier et devrait être développé à la rentrée 2015. 

    Parallèlement, la mise en place d’un service régional de l’orientation appelle à être vigilant sur la répartition des rôles entre État et région : « D’un côté, l’État a pour mission de définir au niveau national, la politique d’orientation des élèves, (…) de l’autre, la région doit coordonner sur son territoire, l’action des autres organismes participants… (missions locales, Pôle emploi, réseau information jeunesse). »

    L’idée que les régions s’accaparent le dossier de l’orientation fait craindre à certains une politique d’orientation « adéquationniste » où les élèves seraient orientés selon les besoins du moment du bassin d’emploi régional.

    • Lutte contre le décrochage : peut mieux faire

    Une évaluation de cette politique a été menée, en novembre 2013, dans le cadre de la modernisation de l’action publique (MAP), d’où il ressort que « le pilotage de la politique et la gouvernance inter-institutionnelle sont embryonnaires et inégaux », alors que « les moyens consacrés à la politique sont relativement modestes, quoique difficiles à évaluer ».

    « La résorption du décrochage (stock) stagne depuis des années », le « stock » représentant la somme cumulée des quelque 140 000 jeunes qui décrochent chaque année. De plus, le « volume des jeunes pris en charge dans le cadre de la remédiation reste faible ».

    L’administration interpelle donc le ministre pour que le ministère mette en place « une politique structurelle et globale de lutte contre le décrochage sur les trois volets prévention/intervention/remédiation », d’autant que « le surcoût financier supporté par la société à cause du non-traitement du décrochage est énorme ».

    Le rapport propose de « favoriser une évaluation positive » pour ne pas décourager les élèves mais aussi « un volet de formation des enseignants » : « L’effort portera notamment dans le domaine des repérages des signes de décrochage, des pratiques d’évaluation positive, de l’accompagnement personnalisé et des relations avec les familles. »

    Par ailleurs, « le financement du SEI (système interministériel d’échange d’information), support des plates-formes de suivi et d’appui aux décrocheurs » reste, prévient le rapport, à stabiliser.

    Le décret posant les bases d’un droit au retour en formation initiale pour les jeunes décrocheurs, un principe posé par la loi sur l’école, doit encore faire l’objet d’un décret.

    • Pour une nouvelle politique de l'évaluation

    C'est l'un des rares chantiers lancés publiquement par Benoît Hamon depuis son arrivée. Le ministre a en effet annoncé qu'une grande consultation allait se tenir jusqu'au mois de décembre pour tenter de trouver des pistes pour que l'évaluation soit plus encline à favoriser les progrès des élèves qu'à les sanctionner. Le dossier que lui a remis l'administration consacre pas moins de six pages à cette question sur laquelle sa feuille de route est particulièrement détaillée.

    « La notation chiffrée rend difficilement compte des erreurs d'un élève et induit des classements souvent perçus comme stigmatisants et dévalorisants. » Ainsi, les élèves français se distinguent aux tests PISA par le fait qu'ils n'osent parfois pas répondre de peur de se tromper et de perdre des points. Parallèlement, le rapport relève que l'évaluation par compétences « a été parfois mal comprise par les enseignants, les outils rejetés ». Le document préconise donc d'« intégrer dans la formation initiale des professeurs une formation à l'évaluation sous toutes ses formes », mais aussi d'« accompagner les professeurs en poste dans ces évolutions »

    • Apprentissage : gare aux mirages

    Le gouvernement s’est fixé l’objectif ambitieux d’augmenter de 50 % le nombre d’apprentis d’ici 2017. Une politique défendue au nom de la lutte contre le chômage des jeunes. Or, révèle le rapport, « plusieurs éléments de contexte concourent à rendre plus difficile la réalisation des périodes de formation en milieu professionnel » parmi lesquels la crise économique et le fait que les entreprises ne sont en réalité pas très enclines à employer cette très jeune main-d’œuvre. « Augmenter fortement les effectifs d’apprentis aux lycées ne peut se réaliser qu’à la condition de fortement mobiliser les conseils régionaux ainsi que les branches professionnelles », prévient donc l'administration.

    •  Internats de la réussite pour tous

    Violemment critiqués par la gauche, les internats d’excellence, extrêmement coûteux pour un très petit nombre d’élèves bénéficiaires, changent de nom pour devenir « les internats de la réussite pour tous ». Le bilan n’est pourtant pas fameux : « L’action “internat d’excellence” prévoyait la création et la rénovation de 20 000 places pour un coût de 400 millions d’euros. » Or, « en mars 2014, (seules) 4 100 places ont été réalisées ».

    On apprend que le gouvernement a décidé d’y injecter à nouveau 150 millions d'euros supplémentaires qui doivent permettre d'ouvrir 6 000 places nouvelles et qu’une charte a été rédigée « pour bien distinguer cette nouvelle politique de celle de l’internat d’excellence pour quelques-uns » – ils ne seront plus réservés uniquement aux élèves « méritants », mais sans qu’on sache quels seront les critères de sélection.

    •  Égalité filles/garçons : soigner la communication

    Sur ce sujet sensible où le gouvernement vient d’opérer un spectaculaire recul en enterrant les ABCD de l’égalité, le rapport notait que le dispositif « a fait l’objet d’une importante contestation, dont la manifestation la plus inquiétante a été la structuration de la “journée de retrait de l’école”. Malgré le succès très inégal de ces JRE, ce que ce mouvement a révélé de la méfiance nourrie parfois à l’encontre de l’école invite à la plus grande prudence, notamment dans la manière dont les annonces relatives à la poursuite de l’expérimentation de l’ABCD de l’égalité seront faites. Ce point a fait l’objet d’échanges avec l’inspection générale, dont les recommandations en la matière devront être suivies avec le plus grand soin ». Cependant, croyait bon de préciser le rapport, « un recul n’est pas envisageable ».

    •  La scolarisation des élèves handicapés : de fortes inégalités

    Alors que le ministère a beaucoup communiqué sur sa politique de résorption de la précarité pour les personnels accompagnant les élèves handicapés, on apprend que leur formation a été sérieusement passée au rabot : « Le comité interministériel du handicap (CIH) dans une de ses mesures prévoyait la mise en place de 220 heures de formation pour les personnels recrutés en contrats aidés. Les arbitrages budgétaires n’ont pas permis de financer la mesure en l’état. Le temps de formation est finalement fixé à 120 heures. »

    Par ailleurs, « la coordination de l’offre entre l’éducation nationale et le secteur médico-social apparaît insuffisante, aboutissant à des inégalités territoriales fortes ».

    • Relation école-entreprise : beaucoup de bruit pour rien

    « Le partenariat avec le monde économique participe aux missions du système éducatif : préparer les élèves à leur insertion sociale et professionnelle, lutter contre le chômage et faciliter la formation tout au long de la vie », annonce d’emblée le rapport, avant de détailler la myriade d’actions mises en place pour rapprocher l’école de l’entreprise.

    Certaines laissent pourtant visiblement dubitative l’administration elle-même, comme cette « plateforme numérique proposant une offre de contenus et de services et destinée à accompagner le développement de la culture d’entreprendre auprès de l’ensemble des collégiens et lycéens ». Elle relève d’ailleurs la « difficulté d’évaluation des actions conduites, en raison, notamment, de leur nombre et variété : effectivité de leur réalisation, impact sur les publics visés ».

    Au rayon des opérations de pure communication, la création du Conseil national éducation-économie, créé dans le cadre d’une « politique volontariste de partenariat renforcé avec les acteurs du monde économique » et « chargé d’animer une réflexion prospective », restera sans doute dans les annales. Pour l’instant, révèle le rapport, deux groupes ont commencé leurs travaux : « Un groupe présidé par Michel Pébereau, qui réfléchit à la thématique “développer la culture économique chez tous les élèves”. Un groupe présidé par Henri Lachmann chargé de la problématique du “développement de l’alternance – les conditions de sa réussite”. » Un nouveau groupe va se mettre en place sur l’intégration du numérique et de la transition énergétique dans les diplômes professionnels. Mais, comme le note cruellement le rapport, il existe un « risque de propositions peu innovantes, les membres des groupes découvrant la grande variété des actions déjà entreprises et peinant à s’en démarquer ». Par ailleurs, « la présence irrégulière des membres du Conseil qui se font ou non représenter, ce qui nuit au niveau et à la continuité des débats ; l’absence des deux présidents de conseil régional aux réunions (constatée dès la première réunion) est préoccupante ». De manière inquiétante, l’administration semble découvrir qu’il existe un « comité supérieur emploi », placé auprès de Fioraso, qui fait déjà, à peu de choses près, la même chose avec les mêmes personnes…

    • Laïcité : s’en tenir à la loi de 2004

    Le rapport souligne que la Charte de la laïcité, diffusée à la rentrée dans toutes les écoles, a été utilisée « à des degrés divers (…) pour résoudre le cas échéant des situations conflictuelles ». Selon les premiers retours d’une enquête interne sur la question de la laïcité, l’administration note une « absence presque générale de contestation de la loi de 2004 (interdisant le port ostentatoire des signes religieux – ndlr) », et ce malgré « quelques formes nouvelles de contestation du principe de laïcité ».

    Alors que Vincent Peillon n’avait pas tranché la question des mamans voilées accompagnant les sorties scolaires, le rapport affirme que cette question « bien que ne posant des problèmes que très circonscrits mérite attention ». Il souligne ainsi que « dans une étude rendue en décembre 2013, le Conseil d’État a précisé que les parents ne doivent pas se voir interdire de façon générale et systématique de manifester leur appartenance religieuse ».

    Un point spécifique concerne également « la question de la radicalisation des jeunes dans le cadre du plan national de lutte contre la radicalisation ». L’administration appelle le ministère à la vigilance sur l’« instruction à domicile, les écoles hors contrats, les écoles confessionnelles ». Le rapport s'interroge aussi sur une question jugée « importante » :  « Que faire quand un parent ou un personnel vient confier son inquiétude ? Quelle forme de signalement ? Quels sont les élèves vulnérables ? »

    • Aides financières aux élèves et fonds sociaux : la variable d'ajustement

    Les bourses nationales de collège et de lycée représentent un budget de 525 millions d'euros : aide pour la cantine, pour la scolarité. Elles bénéficient à 27,9 % des élèves en collège. Au lycée, la dépense moyenne par lycéen boursier est de 821 euros. S'agissant des fonds sociaux, « sur les derniers exercices, c'est le poste de dépense qui a servi de variable d'ajustement ».